Auteur Sujet: |Nouvelle] Vers Merywyn  (Lu 8903 fois)

0 Membres et 1 Invité sur ce sujet

Hors ligne Gary Bobo

  • Débutant
  • **
  • Messages: 34
    • Voir le profil
    • Les nouvelles de Gary Bobo
|Nouvelle] Vers Merywyn
« le: 24 juin 2015 à 11:39:01 »
Salut à tous !

Aujourd'hui je poste la suite de la nouvelle "La fin des Briscards" postée il y a maintenant quelques semaines. Cette fois-ci je ne met que le début du texte et mettrai le reste si cela vous plaît. Tous vos commentaires sont toujours la bienvenue. Bonne lecture !



"Après avoir assisté à la destruction des Briscards et avoir fuit Armandor, Mordecai traversa le Thornwood en direction du Cygnar et de la cité de Corvis. Là il se fit engager comme escorte à la caravane marchande de Bolden Keller qui remonte la rivière Noire vers la capitale du Llael, Merywyn. Les négociations avec le capitaine s’éternisèrent, ne levant l’ancre qu’à la nuit tombée. Durant le voyage, il sympathisa avec le garde du corps de Bolden, un ogrun bokur dénommé, Borok Urgart.


- Et c'est là que j'lui ai brisé le cou ! disait Borok d'un ton enjoué, tandis qu'il mimait des mains la nuque qu'il rompait sous ses doigts puissants.
- Et ensuite ? le questionna le vieux mercenaire à la barbe grisonnante.
- Le pauvre bougre s'est écroulé comme une masse sur le plancher de la taverne. Ensuite, tous ces foutus coupes jarrets me sont tombés dessus pendant qu'mon client prenait la tangente ! s’exclamait-il indigné, ses crocs proéminents saillant de sa large mâchoire. Comme j'étais encerclé je suis monté rapidement sur une table et j'ai plongé derrière le bar. Là, j'leur ai balancé le taulier !
Mordecai éclata d'un rire sonore et frappa du poing sur le bastingage en se tenant les côtes, comme si elles allaient se rompre dans hilarité.
- Là-dessus j'mets le feu à sa gnole et la cabane part en fumée pendant que j'm'éclipse ! ajouta l'ogrun le sourire aux lèvres, tandis que Mordecai riait plus bruyamment encore.
Lorsqu'il eut cessé de s'esclaffer, Mordecai se redressa et s'appuya de nouveau au bastingage métallique. Le petit navire à vapeur, glissait sur les eaux sombres de la rivière Noire, sur la coque on lisait difficilement « L’Ecumeur fumant ». Fargas Cosgrave, le capitaine, tenait la barre à l’arrière du bateau, une lanterne éclairant son visage d’une lueur dorée. Dans son dos, une grande cheminée crachait d’épaisses volutes de fumée noire. A l’avant, une petite cabine donnait accès à la cale.
  Mordecai essuya du bout des doigts les larmes qui perlaient aux coins de ses petits yeux sombres et ridés. Puis il tira de l'intérieur de son manteau clouté une longue pipe de terre cuite, ainsi qu'une petite chenille. Le vieux mercenaire commença à nettoyer sa pipe d'un geste lent et machinal, le regard perdu sur la surface sombre de l'eau. Il sortit ensuite une petite blague à tabac en argent ciselé qui contrastait étonnement avec la rusticité de la pipe. Le maniant avec une extrême précaution, il l'ouvrit, y prit un peu de tabac, en garnit sa pipe et la rangea, puis saisit une petite boite d'allumettes dans une autre poche, en prit une et d'un geste souple, il l'alluma en la frottant au bastingage et enflamma le tabac. Il prit un tasse-braise dans la même poche et, tout en la maniant, aspirait par à-coup, faisant rougeoyer le tabac incandescent dont la lueur se reflétait dans ses yeux sombres. Enfin, il prit une grande aspiration et soupira, recrachant l'épaisse fumée blanche qui disparut en de gracieuses volutes dans l'air nocturne.
  L'ogrun resta silencieux durant tout ce temps, observant les gestes méticuleux du vétéran, dont la silhouette semblait se fondre dans l'obscurité de cette nuit voilée. Lâchant un profond soupir après ce trop long silence, Borok se dirigea sans un mot vers la cale pour s'y reposer, laissant Mordecai à ses pensées.

  Un bruit sourd et lointain réveilla en sursaut le vieux mercenaire, alors qu'il s'était enfin endormi, blotti dans un recoin du pont supérieur. Il se releva péniblement et constata que le bateau à vapeur se situait dans une partie bien plus étroite du fleuve Noire, les obligeant à naviguer lentement pour ne pas s'échouer sur les rives à quelques malheureux mètres du bord. Le son des tambours que l'on frappe s'élevait de la forêt environnante, le rythme rapide évoquait une marche guerrière et bientôt une clameur bestiale s'éleva des sous-bois. Derrière lui, un cri retentit. Mordecai se tourna, Cosgrave toujours à la barre était en proie à une indicible terreur alors qu'il déclenchait l'alerte."
Mon blog : http://garybobo.blogspot.fr/
pour retrouver toutes mes nouvelles !

Hors ligne galhadar

  • Spécialiste
  • ******
  • Messages: 997
    • Voir le profil
    • E-mail
Re : |Nouvelle] Vers Merywyn
« Réponse #1 le: 30 juin 2015 à 23:45:29 »
Hello

J aime.bien vivement la.suite
nerf troll please

luciusle: 16 décembre 2018 :"Je serai surpuissant si j'avais tout gagné :D"

Hors ligne Gary Bobo

  • Débutant
  • **
  • Messages: 34
    • Voir le profil
    • Les nouvelles de Gary Bobo
Re : |Nouvelle] Vers Merywyn
« Réponse #2 le: 04 juillet 2015 à 14:10:36 »
Merci de ta réponse, je met la deuxième partie du texte, vu la longueur il en restera une troisième.

 - Des pillards Tharns ! Aux armes ! hurla-il en sonnant une petite cloche de bronze suspendue près de lui.
   Mordecai s'empara de son fusil, tandis que sortaient de la cale la quinzaine de matelots suivis de Bolden et de Borok, un immense arc à la main et une immense lame caspienne à la ceinture.
- Restez dans la cale ! Ordonnait le bokur à son client.
- Euh… Bien, je vous attendrais en bas, balbutia-t-il en jetant un regard paniqué aux hommes d'équipage qui s'armaient de sabres et de pistolets.
   Mordecai regarda la silhouette potelée du marchand disparaitre vers la cale, tandis que Borok le rejoignait arme au poing. La clameur des guerriers Tharns se fit plus puissante et plus bestiale encore. Tous étaient sur le qui vive, prêts à tirer sur les ennemis qui s'apprêtaient à surgir de la forêt alentour.
   Soudain, une imposante silhouette s'élança hors des sous-bois à la vitesse de l'éclair, se dirigeant vers le bateau dans un bond prodigieux. Mordecai, pétrifié de surprise et d'horreur, regarda la bête humanoïde et musculeuse. Au-dessus d’une gueule béante et pleine de crocs, brillaient deux petits yeux jaunes pleins d’une insatiable soif de sang. A moitié nu, il portait un long pagne élimé, auquel pendaient de nombreux trophées humains. De sa tignasse crasseuse émergeaient de longues cornes de bois ouvragées Il poussa un long hurlement bestial, brandissant au bout de ses bras, une large hache d'armes dentelées. Le cri s'interrompit soudain laissant place a une plainte aigue. Le Tharn avait un trait immense, semblable à un épieu, fiché au milieu du torse, le traversant de part en part. Il retomba lourdement dans l'eau dans un bruit d'éclaboussures sonores. Tous se tournèrent alors vers l'ogrun qui avait décoché une flèche de son immense arc. A cette vue, des cris de rage s'élevèrent de la forêt. Une pluie mortelle s'abattit sur le bateau depuis les fourrés proches. Des silhouettes minces et graciles, surmontées de têtes hirsutes, projetaient des javelots sur les matelots, les forçant à se réfugier derrière le bastingage pour les éviter.
   Profitant de leur incapacité à répliquer, les Tharns bondirent sur le pont. Bientôt, une demi-douzaine des redoutables guerriers atterrirent avec souplesse sur le pont métallique. Ils engagèrent alors un furieux corps à corps avec les matelots. C’est à cet instant que Mordecai pris conscience de la taille démesurée de leurs assaillants.
   Les javelots cessèrent alors de pleuvoir sur le navire, mais Mordecai et Borok étaient toujours la cible des tireurs embusqués qui les bombardaient, alors qu'ils tentaient d'abattre leurs redoutables adversaires avant qu'ils ne montent sur le pont supérieur. Tous deux se jetèrent alors dans la mêlée sanglante.
   Mordecai, l’épée à la main, fondit sur un Tharn qui faisait tourbillonner sa lourde hache, déchirant les chairs des matelots. Il esquiva plusieurs coups, se déplaçant habilement au milieu de la tornade d’acier et éventra son adversaire, répandant ses viscères sur le pont. Le Tharn s’effondra sur Mordecai, le bloquant sous son corps inerte. Le torse comprimé par le poids, le vieux mercenaire suffoquai et, bandant ses muscles, tenta de soulever la carcasse encore chaude. Son visage était rougit par l’effort, tandis qu’il se dégageait peu à peu. Soudain, un autre Tharn surgit de la mêlée, la gueule écumante de sang. Il brandit sa hache afin de décapiter Mordecai. Il retint alors son souffle en voyant la lame qui allait s’abattre sur son cou. Mais au moment où la hache aurait dû lui ôter la vie, une gigantesque lame frappa le ventre du sauvage, le fendant en deux et projetant brutalement le torse sanglant par-dessus le bastingage. Borok dégagea le vieux mercenaire et lui tendit la main. Mordecai la saisit et se releva. Son manteau de cuir était souillé : gorgé de sang. Son tors était douloureux, mais il sourit à la face bourrue et couverte de sueur de l’ogrun, qui affichait un sourire radieux.
   Soudain, une exclamation retentit à l’arrière du bateau ; derrière eux, le capitaine Fargas avait lâché la barre et s'était effondré, un javelot planté dans l'épaule. Mordecai récupéra son fusil et accouru à son aide. Borok de son côté, bataillait avec rage pour protéger les membres de l'équipage qui tombaient les uns après les autres. Mordecai s'accroupi près de Fargas et arracha le javelot, puis il déchira un pan de la tunique du capitaine, pansa sa blessure et l'aida à reprendre la barre tandis que l’Ecumeur fumant dérivait dangereusement vers la rive. Mordecai fit feu sur les ombres sous les branchages.
   Borok faisait tournoyer sa redoutable lame caspienne, répandant un océan écarlate sur le pont. Un guerrier Tharn se rua sur l’ogrun. Il abattit sa hache avec une fureur bestiale, tandis que Borok se contentait de parer les coups, subissant la brutalité animale de son adversaire. Puis, d’un revers de lame, il fit dévier la hache du Tharn et lui asséna une botte qui dans un éclair d’acier, lui fendit le crâne jusqu’aux dents. Extirpant sa lame de son adversaire tombé au sol, il vint à la rencontre d'un autre adversaire, les deux puissants combattants échangèrent quelques coups. D’un puissant coup de botte, il déséquilibra le guerrier Tharn, qui tomba à la renverse sur le pont maculé de sang. Sans lui laisser le temps de se relever, Borok l’empala, lui arrachant un hurlement d’agonie.
   Profitant que Borok soit désarmé, un pillard Tharn le chargea, abattant sa hache pour trancher l’ogrun en deux. Il bondit en arrière, esquivant le coup mortel qui l’érafla, déchirant le cuir de son épaule. Abandonnant sa lame, il s’élança vers son ennemi, le percutant brutalement. Désarmés, le Tharn et Borok furent projetés contre le bastingage. Borok le saisit à bras le corps et, bandant ses muscles, il l’étreignit avec force pour lui briser l’échine. Le guerrier bestial poussa un puissant hurlement de rage et asséna un coup de tête sur le nez de l’ogrun qui lâcha sa prise, un flot de sang coulant de son nez meurtri. Furieux, l’ogrun saisit la gorge du Tharn qui le roua de coups, mais cela ne sembla pas l’affecter. Cédant à la panique, il saisit les puissants bras de l’ogrun dans l’espoir de lui faire lâcher prise, mais ses doigts se resserrèrent plus fort encore. Le corps musculeux du Tharn se couvrait de sueur, tandis qu’il tentait de contenir la force de son adversaire, qui le pliait contre le garde-corps. La nuque du Tharn céda en même temps que son dos et il bascula par-dessus bord.
   Lorsque le cadavre brisé du dernier Tharn eu disparu dans les eaux sombres, des cris de rage retentirent sous les épais branchages. Puis ce fut le silence, ils avaient battu en retraite.

   Mordecai poussa un profond soupir et se laissa tomber contre le bastingage. Les matelots transportaient les blessés et pansaient leurs blessures. Le pont métallique était rouge de sang, les cadavres des Tharns gisant au milieu de ceux de leurs victimes atrocement mutilées. La moitié des hommes de Cosgrave avaient été tués, quelques autres étaient blessés, il ne restait que peu d’hommes valides. Borok rejoignait Bolden, qui était remonté sur le pont supérieur lorsque le vacarme du combat s'était tût. En constatant l'étendue du carnage, le petit marchand porta une main potelée à sa bouche pour retenir un haut le cœur, tandis que le bokur lui ordonnait de retourner en bas, le danger étant toujours présent tant que le bateau se trouverait sur cette partie du fleuve.
-Nous devrons accoster d'ici peu ! lança le capitaine Fargas au marchand et à son massif protecteur.
- Comment cela ? Merywyn est encore loin, et nous devions l'atteindre dans les délais que je vous avais fixés ! C'est uniquement sous cette condition que je vous ai engagé ! s'indigna-t-il en pointant un petit doigt boudiné vers le capitaine.
- Je m'en moque éperdument de vos délais ! aboya-t-il. Cette attaque a fait beaucoup de blessés et je n'ai pas de quoi les soigner à bord, il faut faire une halte sinon je perdrai la moitié de mon équipage, sans lequel je ne peux plus manœuvrer ce bateau.
   Bolden émit de petits grognements porcins, puis il s'en retourna vers le pont inférieur d'une démarche hautaine qui le rendait ridicule.
   Mordecai détailla le corps massif de son compagnon. Les muscles épais de l'ogrun ruisselaient de sueur et de sang, suintant de nombreuses estafilades; il était incroyable qu'il ne se soit pas encore écroulé sous la fatigue. Pourtant, ses nombreuses blessures ne semblaient pas l'affecter et son nez, s’était déjà arrêté de saigner. C’est d'une démarche assurée qu'il rejoignit le vieux mercenaire qui constatait avec dépit que sa blague était vide. Borok s'appuya sur la balustrade métallique et regarda les innombrables impacts qu'avaient causés les javelots dans la coque d'acier du bateau. Mordecai admirait l'horizon s’enflammant avec l’aube.
- Merci, lança-t-il au vieux mercenaire.
- Pas d'quoi, répondit celui-ci d’un ton détaché.
   Mordecai jeta un regard en coin à son compagnon, qui affichait un léger sourire, tandis que son visage était peu à peu illuminé par les rayons dorés qui pointaient à l'horizon.
Mon blog : http://garybobo.blogspot.fr/
pour retrouver toutes mes nouvelles !

Hors ligne Gary Bobo

  • Débutant
  • **
  • Messages: 34
    • Voir le profil
    • Les nouvelles de Gary Bobo
Re : |Nouvelle] Vers Merywyn
« Réponse #3 le: 20 juillet 2015 à 08:57:07 »
Et voici la dernière partie ! Bonne lecture !

Quelques heures plus tard, le soleil s'élevait doucement vers son zénith, faisant chatoyer la surface cristalline du fleuve. Les rayons lumineux caressaient le visage usé du vieux mercenaire assis sur le garde-corps, à côté de l'ogrun qui s'était endormi a même le pont. Il entendit le grincement d'une chaine, puis le bruit de l'ancre plongeant dans l’eau.
Mordecai se releva, la main en visière pour masquer l'éclat du soleil qui l'aveuglait. Il aperçut alors les toits des chaumières qui bordaient le fleuve. Celles-ci étaient construites de manière anarchique le long des quais de bois. Plus loin en amont, au sommet d'une petite butte, trônait une demeure plus imposante, faite de briques. Depuis son promontoire, elle dominait le hameau; elle était entourée d'un mur de briques également, munit d'un portail de fer forgé. Un pont de pierre se dressait entre les deux rives qui se rapprochaient à cet endroit. Au loin, on apercevait une tour de garde, qui se dressait fasse à l'épaisse forêt qui encerclait le petit hameau, comme un étau verdoyant.
Les matelots établirent un pont improvisé entre le quai et le bateau et commencèrent à acheminer les blessés, sous la direction du capitaine Fargas. De l'autre côté du bateau, Bolden semblait dans une colère noire et se défoulait sur son garde du corps qui subissait calmement la pitoyable crise du marchand.
- Cosgrave est complètement incompétent ! Cet arriéré n'est pas capable de me mener à destination dans les délais prévu ! Combien de temps et d'argent vais-je perdre à cause de cet imbécile ? pestait-il en faisant les cent pas face à l'ogrun. Quand à vous, ajouta-t-il en pointant son doigt gras sur Borok, vous auriez dû mieux protéger cet équipage ! Je ne vous paye pas pour...
Le petit marchand replet s'interrompit en voyant Mordecai s'approcher d'eux.
- Alors vous ! commença-t-il en fixant le vieux mercenaire d'un œil mauvais. Vous ne valez pas la moitié de ce que je vous paye espèce de vieillard décharné et sénile ! Vous n'êtes même pas capable de vous protéger vous-même ! Votre débilité et votre incompétence atteignent des sommets que c'est à se demander qu'elle chienne a pu vous mettre au mon...
Le marchand n'eut pas le temps de finir sa phrase qu'un poing ganté percuta son nez et le renversa. Il se redressa comme il put, portant la main à son nez gonflé, d’où s’écoulait du sang. Bolden ouvrit la bouche pour proférer quelque insulte, mais Mordecai le saisit par le col et le ramena à sa hauteur, plongeant un regard furieux dans le celui du marchand.
- Tu parles beaucoup pour un petit goret, dit-il doucement sur un ton de mépris, ton être entier me dégoute, tu ne sais rien du combat et de la mort. Je te conseille donc de fermer le trou à merde qui te sert de bouche, de poser ton énorme postérieur et d'attendre que l'on puisse repartir. Ces hommes t'ont protégé, alors montre un peu de respect.
 Sur ces mots, il relâcha son étreinte et le marchand s'effondra les yeux terrifié, puis il se mit à ramper dans un coin pour s'y réfugier, en couinant comme un porcelet.
Mordecai se tourna vers son ami qui le regardait avec effarement. Il savait que les ogruns avaient une vision très précise de la loyauté, ainsi que du respect qui était dû à un employeur. Il lui adressa un sourire que l'ogrun lui rendit, l'air amusé.
Alors que l'équipage avait fini de débarquer les blessés, un homme monta à bord, exposant sa silhouette gracile au soleil, qui illuminait son pourpoint blanc. Un long manteau bleu brodé de fils d'argent reposait sur ses minces épaules. Ses cheveux bruns étaient peignés en arrière et, sous son nez droit, il arborait une fine moustache.
- Je vous souhaite la bienvenue dans notre modeste village, s'exclama-t-il les bras grands ouverts, avant que Fargas ait pu prononcer le moindre mot. Je suis le Baron Heremon. J'ai mis une grange à la disposition de votre équipage.
- Je vous en remercie Baron, nous ne vous dérangerons pas longtemps, nous repartirons dès demain matin, les blessés devraient être en état de se déplacer. Je suis le capitaine Cosgrave, j'ai été engagé par cet homme, affirma-t-il en désignant Bolden, pour l'emmener lui et ses marchandises à Merywyn, dit-il amèrement, regrettant d'avoir accepté ce travail.
Le marchand, qui tremblait encore quelques minutes auparavant, s'était ressaisit, piqué par la curiosité et s’avançait vers le Baron, et tenait un mouchoir sous le nez.
- Puis-je vous inviter tous deux à séjourner dans ma demeure ? proposa Heremon affichant un sourire radieux.
- Sans vouloir vous offenser Baron, je préfère rester auprès de mes hommes, répondit Fargas. Heremon afficha une expression de déception, mais acquiesça.
- En ce qui me concerne, j'accepte volontiers cette aimable invitation Baron, affirma-t-il pressant toujours le mouchoir contre son nez.
Le visage de Heremon s'illumina et il l'invita à le suivre. Bolden foudroya l'ogrun le mercenaire du regard, tandis qu’ils s'éloignaient vers la demeure du Baron, tandis que le capitaine poussait un soupir, soulagé d'avoir échappé à leur compagnie.
Mordecai, Borok et Fargas rejoignirent les matelots dans la grange, à l'opposé de la demeure du Baron. Lorsqu'ils y pénétrèrent, ils furent accueillis par les râles des blessés allongés dans la paille. La grange était entièrement en bois avec un toit de chaume, de la paille était disséminée un peu partout au sol, ou en ballots empilés contre les murs. Dans un coin, on apercevait un abreuvoir vide, et de chaque côté de la porte était suspendus de nombreux outils agraires. Mordecai et Borok s'installèrent dans un coin pour y dormir, la nuit avait été longue.

La nuit était tombée depuis longtemps lorsque le vieux brisquard fut réveillé par le bruit sourd des tambours et les hurlements bestiaux qui s'élevaient de la forêt. Certains matelots gémirent de peur lorsqu'ils réalisèrent ce qui se préparait au-dehors. Mordecai et Borok se levèrent d'un bond, empoignèrent leurs armes, et sortirent de la grange. Dehors, la lune était masquée par d'épais nuages, plongeant le hameau dans l'obscurité. Mais, au loin, des lueurs émergeaient de la forêt, bientôt ce furent des dizaines de torches qui fusaient en direction de la tour de garde. Des cris de terreur s'en élevèrent presque aussitôt, accompagnés des hurlements sauvages des assaillants. La tour pris feu, devenant un fanal enflammé qui embrasait le ciel nocturne. Le village s'éveilla d'un seul coup, la lueur des lanternes apparaissant dans les rues, accompagnée des cris apeurés des villageois, tandis que Mordecai apercevait d'énormes créatures qui accouraient vers eux.
Le capitaine Fargas prévint ses hommes. Leurs armes étant restées à bord du bateau, certains prirent fourches, pelles et marteaux pour se défendre, tandis que d'autres aidaient les blessés à marcher. Lorsque tous furent prêts, les monstres de la forêt étaient déjà dans le village en contrebas. Ils dévalèrent la légère pente qui menait au village, d'où s’élevaient les cris de terreur mêlés aux cris de rage. Lorsque la petite troupe arriva dans les rues, elle fût immédiatement attaquée par un guerrier Tharn qui brandissait son immense hache, hurlant comme une bête, la gueule écumante de sang encore chaud. Une immense flèche d'acier le stoppa net dans sa charge et il s'effondra sur le sol. Ils continuèrent leur avancée et passèrent devant plusieurs chaumières en feu.
Soudain, surgissant des flammes, une énorme bête, semblable à un gigantesque singe écorché, se jeta au milieu du groupe. La gueule béante, elle planta ses crocs proéminents dans le crâne d'un matelot qui brandissait une fourche. L'os céda en un bruit mat, faisant jaillir une gerbe de sang. Puis, elle banda ses énormes muscles et se déchaina, abattant ses bras puissants comme des massues sur tout ce qui se trouvait autour d'elle. Sous ses assauts furieux, les matelots tombaient à terre les membres brisés, leurs crânes explosés par la force titanesque de l'ignoble créature qui poussait d'effroyables cris stridents.
Borok dégaina son épée et se jeta face à la bête, tandis que Mordecai ouvrait le feu, la balle de plomb se logeant dans son dos musculeux sans lui causer plus de dommage. L'ogrun esquivait les énormes poings de la bête avec une rapidité stupéfiante, il fit un bond de côté pour esquiver un coup, qui lui aurait enfoncé le crâne dans le torse jusqu'à l'aine. Il enchaina avec un coup de sa massive lame caspienne qui entailla durement la poitrine de la créature, lui arrachant un cri de rage. A peine eut-il dégagé sa lame qu'elle lui asséna un revers, qui balaya l'ogrun, le projetant au sol, l’œil droit gonflé.
Mordecai dégaina sa propre lame, se jeta sur le dos du monstre et lui enfonça sa lame jusqu'à la garde. La bête hurla de douleur et, d'un brusque mouvement d'épaule, se débarrassa du vieux mercenaire qui percuta un matelot. Borok profita de la diversion pour se relever et abattit de toutes ses forces le pommeau de son arme sur le crâne de la créature, l’enfonçant si brutalement, que ses yeux jaillirent de leurs orbitent. La bête s’effondra lourdement.
Ils continuèrent leur chemin vers le bateau. D’autres pillards Tharns surgirent des toits et des chaumières en flammes, brandissant leurs haches et hurlant leur soif de massacre. L’un d’eux fut sur Mordecai en un éclair. Il para le coup et se retrouva nez à nez avec l’ignoble guerrier écumant de rage qui lui soufflait son haleine chaude et nauséabonde sur le visage. A sa droite, un Tharn s’effondra, une flèche sombre plantée dans le crâne. Le vieux mercenaire percevait le fracas de l’affrontement qui se déroulait derrière lui.
Un Tharn surgit et repoussa brutalement le vieux Briscard, manquant de lui faire perdre l’équilibre. Puis, il se rua de nouveau sur Mordecai, qui esquiva le coup de taille qui l’aurait coupé en deux et porta une estocade qui blessa le sauvage. D’un violent coup de pied dans les côtes le Tharn le projeta de côté et dégagea la lame légèrement enfoncée dans sa poitrine. Mordecai se tint le flanc en suffoquant: la respiration coupée. De sa main il sentit qu’aucun os n’avait été brisé, sa légère cuirasse de cuir l’avait protégé. Le Tharn abattit sa hache sur la silhouette au sol. Désarmé, il esquiva en roulant sur le côté, et se releva d’un bond. Faisant face à son adversaire, il évita de nouveau une attaque, récupéra son arme et porta une botte qui transperça la gorge du Tharn qui tomba au sol et s’étouffa dans son sang.
Un second adversaire se rua sur Mordecai haletant, qui roula de côté pour esquiver un coup qui l’aurait décapité. Ils échangèrent quelques coups. La hache du Tharn lui entailla l’épaule, puis il riposta et entailla la cuisse nue de son adversaire, qui se mit à ruisseler d’écarlate. Alors qu’ils s’apprêtaient à s’affronter de nouveau, une large lame couverte de sang surgit de l’estomac du Tharn, lui arrachant un hurlement de douleur, et faisant jaillir le sang de sa gueule. Puis, le cadavre inerte fut balancé au sol, laissant apparaitre Borok, couvert de sueur, le visage ensanglanté par une profonde entaille au front.
Mordecai se retourna vers les matelots qui avaient subi de lourdes pertes. Les Tharns n’avaient fait aucun blessé, mais, tous ceux qui l’étaient déjà, étaient morts.
Ils se précipitèrent vers les quais. Alors qu’ils embarquaient, Mordecai aperçu une femme, un nourrisson dans les bras et un enfant à la main, qui accourait les yeux pleins de larmes. Derrière eux, un homme les suivait de près, armé d’une hache de bucheron. La femme manquait de trébucher à chaque pas, elle criait pour appeler à l’aide. Mordecai accouru rapidement, mais soudainement, un guerrier Tharn surgit d’une ruelle adjacente et décapita l’homme qui les suivait. Le mercenaire saisit son fusil, tandis que la femme courait plus vite encore, ses enfants poussant des gémissements stridents à la vue de l’horreur bestiale qui se ruait sur eux, une lueur sauvage brillant dans ses yeux jaunes.
Mordecai ouvrit le feu. La balle fit mouche et le Tharn, touché à l’épaule, trébucha. Mais, un second surgit des ténèbres embrasées du carnage et plaqua la femme au sol. La violence de l’impact projeta le nourrisson dans les eaux sombres du fleuve et disparut. Le second enfant se releva d’un bond pour s’enfuir, mais une large hache vint se planter dans son dos, le tuant sur le coup.

Ayant assisté impuissant à cette effroyable scène de carnage, Mordecai embarqua rapidement. Les marins appareillèrent sur ordre du capitaine Fargas. Le bateau s’éloigna doucement de la rive et s’avança sur les eaux rouges du sang des villageois.
Alors qu’ils passaient sous le pont qui franchissait le fleuve, une silhouette replète courait en agitant frénétiquement les bras. Mordecai et Borok entendirent la petite voix flûtée de leur employeur qui, paniqué, se ruait sur les quais. Mais lorsqu’il eut atteint le pont pour sauter à bord, une simiesque créature se saisit de lui et l’entraina vers la rue, où résonna un unique cri; ils ne seront finalement pas payés. Puis, une clameur bestiale s’éleva du petit village. Au loin, Mordecai aperçu la silhouette imposante d’un Tharn à la chevelure rousse, ornée de cornes, qui brandissait deux immenses haches. Cet impressionnant guerrier poussa un terrible cri qui résonna dans la nuit au-dessus de la clameur des autres pillards. Le Tharn à la crête flamboyante exultait à la vue du massacre.

Alors qu’il s’éloignait de plus en plus, le silence était retombé sur le hameau, dont les flammes continuaient de danser dans l’air nocturne, les volutes de fumée noires s’élevant toujours haut. Bientôt, ce spectacle flamboyant ne fut plus qu’une lueur sur l’horizon bleuté de la nuit.
Le soleil commençait doucement à pointer à l’est. Mordecai s’endormit contre la balustrade. D’après Fargas, ils arriveraient bientôt à Merywyn.



Mon blog : http://garybobo.blogspot.fr/
pour retrouver toutes mes nouvelles !

Hors ligne Titi

  • [BGT] Modérateur Global
  • Immortel
  • ********
  • Messages: 13012
    • Voir le profil
    • E-mail
Re : |Nouvelle] Vers Merywyn
« Réponse #4 le: 20 juillet 2015 à 12:17:39 »
Là, je n'ai qu'un mois de retard sur la première partie... :-X
C'est agréable à lire. :)
Mordecai a un langage étonnamment châtié quand il est en colère, mais c'est vrai que pour l'instant on ne sait pas grand chose du passé de l'individu. ;)
"Bon bin, plus qu'à attendre de voir à quoi va ressembler le futur Cygnar..."

Hors ligne Gary Bobo

  • Débutant
  • **
  • Messages: 34
    • Voir le profil
    • Les nouvelles de Gary Bobo
Re : |Nouvelle] Vers Merywyn
« Réponse #5 le: 21 juillet 2015 à 17:38:26 »
Merci pour tes réponses ! (je vais répondre à tes 2 messages ici) Que tu aies vu mes textes avec du retard m'importe peu, du moment que tu les as lu et aimé, ça me fait plaisir ! C'est vrai que le langage de Mordecai est dépourvu de "grossièreté", mais en fait je trouvais ça trop simple de lui faire dire des trucs du genre enc*** ou co***rd. quant à son passé, même si je l'ai défini dans les grandes lignes, il reste encore des zones d'ombres, je pourrai peut-être trouver une raison à sa façon de parler, ça peut être marrant ^^
Mon blog : http://garybobo.blogspot.fr/
pour retrouver toutes mes nouvelles !