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Roman - La Colère du Père des Dragons
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CHAPITRE 21 : CONSTANCE BLAIZE
Glacée par la terreur, Blaize regarda Toruk survoler le train et entrer en collision en plein vol avec Charsaug et Ashnephos. Sa terreur était si grade qu’elle n’entendait plus que ses battements de coeur dans ses oreilles tandis que le train se avançait en silence sous elle. Toutes les actions mortelles autour d’elles étaient en sourdine ; elle put voir un pionnier rouler sur le toit du wagon pour tenter d’éteindre le feu draconique le consumant, mais elle ne pouvait pas entendre ses cris. Les formes tournoyantes des dragons se battant au-dessus remplissaient sa vision. Le pionnier en flammes rampa devant Blaize et, dans un dernier effort, tendit une main noircie pour lui demander de l’aide avant de succomber aux flammes.
L’émanation étouffante qu’était la corruption de Toruk frappa le train comme une vague. C’était la mort incarnée sous forme de puissance. Le long de voitures, les pionniers et les forges-tempêtes trébuchaient, pressant leur visage dans les creux de leurs coudes et s’agrippant l’emplacement de leurs armes alors qu’ils essayaient de demeurer debout. Seuls le warcaster et ses chevaliers étaient capables de tenir bon face à l’aura nécromantique, leurs âmes étant protégées par les symboles de Morrow ornant leur armure.
Quelque chose bougea aux pieds de Blaize. Le cadavre du pionnier qu’elle avait vu brûler se contracta, agitant ses membres avant d’essayer de se relever avec des mouvements saccadés. De la chair carbonisée se détacha des os de l’homme, et alors que sa tête était tournée vers le haut, un feu brasier funeste verdâtre s’embrasa dans les orbites de l’homme, à l’endroit où s’étaient trouvés les yeux.
« Tenez bon ! » Cria Blaize aux chevaliers Précurseurs environnants. Elle balaya son arme vers le bas et trancha le cadavre réanimé en deux. Alors même que le mort-vivant était abattu, un autre pris sa place. Une flamme verte bondit de son crâne et transforma ce qui restait de son uniforme en cendre. Tout le long de Dame Fracas-de-Guerre, les morts se levaient, poussé par le Père des Dragons à prendre les armes contre les vivants.
La pluie tombait du ciel obscur et le toit des voitures devint glissant sous les pieds. À côté d’elle, Corley frappa l’un des morts-vivants avec son bouclier et suivi par un coup de masse qui envoya l’abomination dégringoler du train.
Blaize pouvait entendre des coups de feu et des cris de l’intérieur des voitures, et elle redoutait de penser au carnage qui se déroulait dans ces espaces confinés. Tant que Toruk volerait au-dessus de leurs têtes, tous les morts se relèveraient pour servir la volonté du dragon et massacrer leurs anciens camarades. Il faudrait plus que de simples prières pour les préserver de ce sort.
« Corley », dit-elle en décapitant l’un des réanimés, « voit que ceux qui n’ont pas encore été réanimés soient bénis par le pouvoir de Morrow. Nous devons en empêcher autant que possible de se transformer. Je m’occupe de la défense. »
« Considère que c’est fait. Nous les enverrons retrouver Morrow à Urcaen. » Sur ce, Corley accrocha sa masse à une boucle de sa ceinture et pris à sa place son tome de Prières pour la Bataille, relié en cuir. « Avec moi », dit-il, faisant signe à deux chevaliers de le suivre. Ensemble, ils se dirigèrent vers un cadavre suspendu à une mitrailleuse proche, scandant des prières en chemin.
Les coups de feu à l’intérieur des voitures atteignirent un crescendo puis se turent. Des dizaines de mains passèrent à travers les vitres et les portes des voitures couvertes, et sur le rebord du toit, leurs paumes ensanglantées tâtonnant pour trouver une prise. Blaize fit appel à son pouvoir pour faire jaillir une intense lumière sacrée au coeur des réanimés, purifiant leurs formes et ne laissant que des cendres. Elle avança péniblement dans la bataille avec sa Lance Solaire, les repoussant, mais d’autres morts arrivaient, se hissant sur les flancs des voitures ou escaladant les mécanismes des ascenseurs.
Elle se retourna pour trancher les jambes d’un mort-vivant dans son dos et ramena son bouclier pour frapper le corps reversé. Des cris d’angoisse retentissaient de tous côtés, et a peine avait-elle réussi à se débarrasser de son ennemi avant qu’un autre ne lui démolisse son bouclier, essayant de lui arracher pendant qu’un autre cherchait à lui sauter à la gorge. À ce moment-là, elle était douloureusement consciente de l’absence de son champ d’énergie alors que des doigts osseux raclaient sa peau nue. Elle repoussa l’ennemi, l’embrocha et reprit sa position face à son impie adversaire suivant.
À l’arrière du train, Haley demeurait accroupie alors qu’elle se concentrait sur la vitesse à accorder à Dame Fracas-de-Guerre. Les versions spectrales de la warcaster combattaient les morts-vivants avec frappes cinétiques et des éclairs de foudre. Thorn se tenait au-dessus de sa maîtresse, embrochant avec sa lance et repoussant les autres réanimés avec son bouclier. Le major avait fait un remarquable travail en préservant le train et en l’accélérant, mais sa posture courbée suggérait que l’effort ne pouvait plus durer longtemps.
Blaize détourna son regard d’Haley et observa la distance la séparant de la locomotive. Le wagon contenant l’athanc était presque submergé. Gallant et l’un des Centurions morrowéen se tenaient de chaque côté de l’ouverture de l’ascenseur de chargement, et ensemble, les warjacks œuvraient à repousser la horde s’amassant autour d’eux.
« Défendez l’éclat ! » Cria Blaize par-dessus le vacarme. « Reculez et formez les rangs ! » Avec les boucliers levés et les masses en mouvement, les chevaliers Précurseurs survivants se sont dirigés vers les warjacks assiégés et la précieuse cargaison. Blaize fendit en deux un réanimé et jeta un dernier coup d’oeil vers le Major Haley. Le groupe de morts-vivants l’entourant s’était agrandi, mais Thorn et les projections temporelles réussissaient à les contenir pour l’instant. Le hocha la tête et se dirigea vers les chevaliers, formant un mur de boucliers autour du wagon de l’athanc et récitant une prière pour le major au fur et à mesure.
CHAPITRE 22 : LORTUS
Alors que Toruk et les dragons orientaux s’affrontaient dans le Mur du Dragon supérieur, Lortus utilisa les différents sites de pierres levée de la région pour acquérir une perspective unique sur le combat à une distance sûre. Il put envoyer sa vision très haut dans les airs au-dessus d’eaux, en s’appuyant sur sa connexion aux lignes de force pour comprendre l’impact de cette bataille contre nature sur les terres les entourant. C’était l’un des plus grands outils des Touts-Puissants, mais dans cet affrontement, il se sentit impuissant à intervenir. Il n’était qu’un témoin devant des dieux en guerre.
En remarquant Toruk, Charsaug et Ashnephos cherchèrent initialement à fuir, mais malgré leur plus petite taille, ils ne purent échapper à leur créateur. Les trois s’enfermèrent dans une danse de manœuvres aériennes, de serres et de flammes. Au-dessous du conflit titanesque, le train cygnaréen accéléra, se dirigeant vers sa destination.
Charsaug et Ashnephos se précipitèrent à l’assaut, dents et griffes en avant, apparemment déterminés à déchirer les grandes ailes de Toruk. Les exhalations des dragons jumeaux bien que terribles lorsqu’ils se déchaînent sur le monde des mortels, ne signifient rien pour Toruk, et ils furent donc réduits au macabre art du combat rapproché. Alors qu’ils affrontaient la puissance de Toruk, leurs griffes cherchaient à trouver une prise et leurs dents leur permirent de goûter la chair de leur géniteur. Il était clair pour Lortus que, même ensemble, ce n’était qu’une question de temps avant que la paire de petit dragon ne soit submergée par leur géniteur. Lors de l’antique combat ayant chassé la première fois Toruk du continent, il s’était opposé à plus d’une douzaine de dragons, pour la plupart bien plus grand que ce duo.
La queue de Toruk chopa Ashnephos à la taille, et la puissance du coup envoya le dragon s’écraser sur un flanc de montagne avec la force d’une météorite. La pierre et le sol explosèrent, des pans entiers de forêts s’effondrèrent sous le poids de la grande bête, et la secousse de l’impact se propagea à travers les racines de la montagne jusqu’à déclencher plusieurs glissements de terrain. Voir cet affrontement rappela à Lortus les mythes de Menoth affrontant le Ver Dévoreur à l’aube de la création, et comment au milieu de leurs batailles, les océans, les montagnes, les canyons et les lacs prirent forme.
La frappe contre Ashnephos avait laissé une ouverture à Charsaug, et le jumeau saisi l’occasion, serra ses mâchoires sur la gorge de Toruk et fit couler le sang. Charsaug s’accrocha à Toruk, ratissant ses griffes sur la poitrine du dragon jusqu’à ce qu’il soit finalement affaibli pour s’affaler sur le sommet d’une montagne aussi facilement qu’un sur une camelle de sable au sol. Alors qu’il s’agissait d’une blessure mineure, elle étourdit Toruk et l’empêcha de conserver l’avantage. Depuis combien de temps la peu écailleuse de Toruk avait-elle été transpercée. Les deux jumeaux se rétablirent et cerclèrent, poussant des rugissements de défi.
D’un unique coup d’aile, Toruk perça la couverture nuageuse et fut dissimulé par l’imposante tempête, un temps contre nature provoqué par son arrivée. Ashnephos ne tarda pas à le suivre. Par-dessus la voûte obscurcie, la bataille se poursuivait. Le rugissement de Toruk fut accueilli par un hurlement de rage révolté provenant d’Ashnephos. Les silhouettes ailées se fusionnèrent et disparurent au-delà du voile de nuages, alors que ses êtres immortels se faisaient la guerre dans l’ombre et sous une pluie torrentielle. La danse continua pendant un certain temps jusqu’à ce qu’Ashnephos explose la couverture nuageuse avec son dos tourné vers le sol, chutant vers le bas. Un autre flanc de montagne se brisa en amortissant sa chute. La terre ondula comme un tissu et faillit faire dérailler le train, qui ne resta sur ses rails que grâce à la volonté de la force mystique qui l’aida.
Indigné par les dégâts infligés à son jumeau, Charsaug s’élança vers le ciel, prenant de l’altitude et se dirigeant vers le royaume de la tempête au-dessus. Lortus se raidit devant la futilité de l’action du dragon.
Une massive ombre pris forme au-dessus de Charsaug, et lorsque Toruk traversa les nuages sombres, il était en position de piqué, les ailes serrées contre son corps pur lui offrir un surcroît de vitesse. Le Père des Dragons chuta comme une pierre, plaçant Charsaug directement sur son chemin. Sa gueule suffisamment ouverte pour dévorer un navire à vapeur en entier, et il frappa sa progéniture avec assez de force pour briser des aussi épais que des arbres. Les mâchoires de Toruk se serrèrent contre la gorge de Charsaug, et ensemble ils entrèrent dans un tournoiement mortel.
Charsaug donna des coups de pied et de poings, ratissant Toruk de ses griffes alors qu’ils s’entortillaient, et pourtant il ne parvenait pas à se libérer. Les mâchoires de Toruk se resserrèrent, les dents, les dents pressant les écailles, et alors qu’ils s’approchaient du sol, Toruk donna une torsion. Le craquement des vertèbres se fit entendre sur les sommets, et les rugissements frénétiques de Charsaug l’Ombre de la Montagne se turent.
Lortus ressentit une terreur primitive et profonde dans sa poitrine en regardant la scène se dérouler. C’est ainsi que le monde devait finir, remodelé à l’image de Toruk. Ses yeux restèrent figés alors qu’il observait l’équilibre ténu ayant maintenu les dragons enfermés dans l’inaction durant des siècles se terminer en quelques instants.
Toruk remonta vers la tempête, le cadavre de son adversaire dans ses griffes, et lança un rugissement de triomphe avant de plonger profondément son museau dans la poitrine immobile de Charsaug. Du sang draconique noirci s’écoulait de la blessure et brillait comme du magma. Le Père des Dragons rejeta sa tête en arrière et referma ses mâchoires, engloutissant la pierre de coeur de Charsaug. Au fur et à mesure que la pierre était ingérée, les nombreuses blessures infligées à Toruk au cours de la courte bataille se refermèrent, et le brasier infernal qui enveloppait ses yeux et sa bouche s’enflamma avec une nouvelle intensité. La puissance du petit dragon était revenue à son créateur.
Lortus détacha son regard que lorsqu’il sentit au loin d’autres sources de puissance. Il regarda les autres dragons planer par-dessus les sommets l’un après l’autre pour rejoindre Ashnephos. Ces dragons s’étaient dressés contre Toruk sous la direction de Blighterghast, chacun étant une légende à part entière, chacun étant connu par une litanie de noms acquis au fil des temps.
D’abord vint Halfaug, connu dans le nord sous les noms de Givre Ancien, Dracoliche et Feu Froid. De grandes épines tapissaient son corps et ses écailles brillaient d’argent à noir alors qu’elle survolait les montagnes. À l’aube de l’Empire Khardique, elle fit la guerre à cette grande nation, faisant fondre ses lances et ses armures sous le mirage chatoyant de la chaleur qui la suivait. À ce jour, les habitants de l’Immoren septentrional parlent de la bataille entre Halfaug et le Roi Kossite Jovaska Descara et les milliers de soldats qui furent incinérés sur la toundra avant que le dragon ne se retire.
Scaefang, le Mangeur d’Âmes, le Seigneur Noir, suivait de près, ses écailles noires comme de la poix et les yeux brillants de flammes violettes. Pour les habitants de Rhul, il était Scylfangen, et la terreur qu’il avait semée à l’intérieur de leurs frontières a inspiré une propension à l’architecture fortifié. Avec Sceafang, d’autres dragons moins connu de l’Immoren venaient. Gjorlburn le Glas, Umbargoven la Griffe et Horaurak des Neuf Pics Fumants poussèrent chacun une série de rugissements de terreur pour annoncer leur arrivée.
D’où venaient-ils ? Lortus réfléchit à cette énigme, considérant qu’il était impossible que le vol seul les ait amenés ici si rapidement. C’était comme si la violence entre les dragons avait convoqué les autres, comme si un tout-puissant de Cercle Orboros avait retracé les lignes de force pour traverser une grande distance en un instant. En effet, Lortus senti l’écho de ces puissances dans les pistes derrière chaque monstrueux dragon.
Enfin vint Blighterghast, le plus grand des descendants de Toruk et l’actuel champion des dragons, connu sous le nom de Bouilloire, Vieux Ravageur et Chaudière des Mers. Blighterghast qui longtemps avait été attentif dans son attente du retour de Toruk sur le continent, qui avait comploté avec Krueger pour rechercher et détruire Everblight. Et maintenant, c’est Blighterghast qui avait rallié les autres pour la bataille contre l’adversaire initial les ayant forcés à se réunir. La pluie sifflait lorsqu’elle heurtait les écailles d’ombre du dragon, s’élevant autour de lui dans un tourbillon de vapeur.
Toruk jeta le cadavre de Charsaug – le sang bouillonnant toujours du trou béant dans la poitrine du dragon – et émit un rugissement semblable à celui de mille cors appelant au combat et au sang. La tempête s’intensifia, le vent et la pluie tombant comme un ouragan.
Blighterghast répondit au cri par l’un des siens, Ses mâchoires s’ouvrirent pour révéler les crêtes dentelées d’innombrables crocs. Derrière son rugissement, les voix des autres dragons se firent entendre.
Éventuellement, avant la mort de Pyromalfic des mains d’Everblight et avant que Charsaug ne soit tué par Toruk, l’alliance de Blighterghast avait une chance contre son créateur. Mais alors que Lortus contemplait l’aube de l’apocalypse, il savait avec certitude qu’il n’y avait plus d’espoir aujourd’hui. Il n’y avait que la suprématie de Toruk, le Père des Dragons, appelé par certains, le Dieu Aîné de Caen.
CHAPITRE 23 : VICTORIA HALEY
La Dame Fracas-de-Guerre était dans un état de chaos, ses voitures en feu et envahies par des réanimés cygnaréens tombés au combat. Haley planta Écho dans un pionnier mort-vivant. Avec un grognement, elle jeta le cadavre encore en vie par-dessus bord.
Elle remonta les wagons un par un, se frayant un chemin vers celui contenant l’éclat d’athanc. Blaize avait pris les devants avec ces Précurseurs pour le défendre quand les morts s’étaient relevés. Haley était resté derrière pour aider les troupes cygnaréennes survivantes à se rallier contre eux. La corruption nécromantique du Père des Dragons semblait cependant impossible à stopper. Haley ne pouvait rien faire d’autre que de regarder les cadavres des soldats cygnaréens non-vivant abattre ses hommes, mourir puis ressusciter pour rejoindre la foule grandissante de morts-vivants.
Le dernier de ses hommes étant maintenant parti, elle se fraya un chemin pour retrouver tout ce qui restait des forces de Blaize, seule, à l’exception de ses deux ombres, Passé et Futur, et de Thorn cabossé. Haley ressentit un moment de panique quand elle atteignit sa destination, abandonnée, à l’exception de quelques réanimés. À son grand soulagement, une inspection rapide de l’intérieur de la voiture, révéla que le coffre en métal contenant l’athanc avait été déplacé. Haley savait que la situation devait vraiment être sinistre pour que Blaize s’expose à l’athanc du dragon, peu importe à quel point ils étaient préoccupés par les crocs et les griffes.
Au moment où Haley rejoignit Blaize et les Précurseurs, ils se déplaçaient en formation rapprochée, combattant les morts-vivants par l’avant et l’arrière, tout en progressant régulièrement vers la locomotive, qui risquait également d’être submergée. Seuls Strangewayes et une paire de Sentinelles se tenaient entre les morts-vivants et la locomotive. La question de la localisation de l’athanc fut résolue lorsqu’elle aperçut la forme de Poêlon en arrière, se déplaçant vers l’avant du train avec la prison de l’athanc serrée contre son buste avec son bras droit.
« Tunnel ! » cria Strangewayes. Il fait basculer son énorme clé vers le bas et écrasa le crâne d’un soldat mort-vivant, envoyant du sang coagulé et des particules d’os dans toutes les directions. Le face à pic d’un flanc de montagne se profilait à l’avant du train, les rails disparaissant dans un tunnel creusé à sa base.
Les chevaliers Précurseurs avançaient, s’occupant des morts-vivants entre eux et la locomotive à coups de masse et de bouclier. Haley envoya Passé et Futur incorporels dans les rangs des Précurseurs pour aider à dégager un chemin vers la locomotive. Pourtant, pour chaque mort-vivant abattu sur le toit, trois autres semblaient se frayer un chemin sur les flancs depuis l’intérieur du train.
S’appuyant sur sa connexion avec son moi passé, Haley déclencha un torrent de force arcanique, créant une ouverture parmi foule de morts-vivants lui barrant la route vers Blaize. Avec Thorn à ses côtés, Haley se dirigea rapidement vers ses camarades.
« Juste toi, alors ? » Demanda Blaize tandis qu’Haley prenait place parmi la formation assiégée de chevaliers.
Haley acquiesça, ses yeux exprimant son horreur et son regret pour les pertes humaines.
« Heureuse de voir que tu es toujours avec nous », dit Blaize. Haley fut surprise par la vague de gratitude qu’elle ressentit face à la sincère sympathie exprimée par Blaize. Pendant un instant, elle ressentit un léger soulagement face au poids de sa culpabilité.
Avec l’ajout de la puissance arcanique d’Haley, le groupe atteignit les voitures de devant avec un minimum de pertes. Après avoir sécurisé leur position, ils regardèrent le reste du train. La Dame Fracas-de-Guerre était cabossée, enflammée, et envahie de morts-vivants. Ils avaient survécu à la poursuite depuis Orven, mais de justesse. La plupart des emplacements de canon étaient détruits, et ceux qui restaient étaient trop gravement endommagés pour tirer, même s’il y avait des hommes pour manipuler. De même, les tours-tempêtes avaient explosé en raison de surcharges critiques ou leurs délicats mécanismes internes avaient été dévastés par les forges-tempêtes réanimés.
« Nous devons découpler les voitures », déclara Haley, résolue en entendant des morts-vivants supplémentaires remonter des voitures arrière. « Et nous devons le faire maintenant, avant d’atteindre Gare-Pointacier. »
Haley braqua son canon à main sur les réanimés en approche et tira. « je vais avoir besoin de ce Centurion », dit-elle, en penchant le menton vers le warjack lourd peint aux couleurs de l’église. « Et de place. »
« Je vais te le confier », dit Blaize, et Haley put sentir son esprit se détacher de son cortex. Puis la warcaster morrowéenne cligna des yeux. « Oh, mais le verrou de sécurité du cortex... »
Haley compris le problème – bien qu’elle soit alliée à Cygnar, l’Église de Morrow utilisait ses propres verrous de sécurités et aurait une configuration mentale différente pour les ouvrir. « Montre-moi », dit-elle. Comme Blaize lui lançait un regard perplexe, elle dit avec confiance « Déverrouille le » et posa sa main contre le châssis du Centurion.
Blaize fronça les sourcils mais obtempéra, le touchant également. Haley put sentir une configuration complexe de volonté et d’énergie pénétrer le cortex à l’intérieur du châssis, une séquence qui miroita dans l’esprit d’Haley comme une rémanence runique. « Confie-le-moi à nouveau », déclara Haley. Lorsque Blaize ôta son contrôle, Haley refléta cette configuration mentale dans les verrous, qui s’ouvrirent pour laisser son esprit prendre le contrôle. Ce fut comme copier une clef en l’enfonçant dans de la cire molle. Elle n’aurait pas pu l’expliquer à Blaize comment cela fonctionnait. Au lieu de cela, elle sourit seulement et dit : » Vas-y ! Je m’en occupe. »
L’image rémanente de ce motif s’effaçait déjà de son esprit. Elle ne connaissait as réellement les signaux mentaux employés par les warcasters de l’Église de Morrow pour déverrouiller leurs cortexes et avait seulement emprunté le schéma de déclenchement. Elle avait depuis longtemps l’aptitude de briser les verrous de sécurité de cortexes – résultat de sa sensibilité aux énergies arcaniques et de son aptitude à fusionner avec la mékanique.
Haley se pencha rapidement dans l’espace séparant leur voiture de la suivante. Un solide coup d’Écho brisa les broches logées dans l’accouplement et les crochets s’écartèrent. Lorsqu’Haley eut déconnecté les voitures au-dessus du Banwick, elles avaient plongé dans le fleuve alors que le pont s’effondrait sous elle. Cette fois, les voitures découplées continuèrent à rouler derrière, conservant la majeure partie de leur élan.
Haley fit avancer le centurion et lui ordonna de planter la pointe de sa lance contre le flanc du wagon arrière et de faire levier pour séparer les deux moitiés du train. Centimètre après centimètre, les wagons s’écartèrent jusqu’à ce qu’un espace aussi large que la lance du Centurion se forme.
Au sommet de l’autre voiture, une foule de réanimés s’était rassemblé, sifflant leur mécontentement d’être distancé de leurs proies. L’un sauté sur Haley, mais ses mains pourries furent déviées par son champ de force avec un éclair de lumière avant de tomber. Avec un écœurant craquement d’os, la créature fut aspirée sous les roues des voitures découplées et écrasée.
« Je suis désolé », murmura Haley, en endurant la vision des morts alors qu’elle se hissait en haut de la voiture restante. Elle ordonna au Centurion de reculer, et après un élancement, il dévala l’espace et s’écrasa à l’avant de la voiture adverse. Le bras du bouclier du ‘jack s’était accroché au bord du toit, le laissant suspendu pendant un moment jusqu’à ce qu’Haley serre les dents et lui donne l’ordre mental au ‘jack de lâcher prise.
Le Centurion heurta les roues dans une pluie d’étincelles et un hurlement de métal froissé. La première des voitures découplées dérailla et plana avant de se plier en portefeuille, entraînant avec elle la voiture suivante. De la poussière et des éclats de métal furent projetés dans toutes les directions, et les wagons déraillé se brisèrent en faisant des tonneaux, rebondissant et projetant les débris en tombant le long des rails. Le son était presque assourdissant alors que l’acier et le fer se brisaient sur la roche et la terre. Les morts-vivants furent broyés ou aplatis, laissant des traînées rouges entourant l’extérieur des voitures. La poussière tourbillonna tout autour du tumulte, et lorsque l’épave cessa ses tonneaux, elle se perdait déjà au loin.
Haley se retourna et découvrit les regards des survivants poser sur elle. Ils avaient perdu des camarades, et maintenant, il n’y avait aucune garantie que les corps soient retrouvés. Il était impossible de savoir ce qu’il adviendrait de leurs âmes, libérées si près de Toruk. Il semblait tout à fait probable que beaucoup seraient condamnés à ne jamais passer à Urcaen, bien que les Précurseurs puissent probablement revenir pour faire ce qu’ils pouvaient. Ceux qui avaient été tués ici s’attendaient à un sort tout à fait différent lorsqu’ils étaient montés à bord de ce transport. De nouveau, elle se sentit coupable d’avoir amené l’athanc à Orven, mais que pouvaient-ils faire d’autre ? Quel que soit l’endroit où il allait, le destin le suivrait.
Une série de profonds rugissement retentit au-dessus, et elle leva les yeux pour voir des ombres qui s’affrontaient et d’intenses flammes au milieu des nuages alors que les dragons rassemblés combattaient Toruk. Cette vision aurait dû servir de rappel des enjeux et diminuer sa part dans les choses, mais cette connaissance n’apaisa pas la culpabilité qu’elle ressentait. Elle ouvrit la bouche pour dire quelque chose à Blaize, mais aucun mot ne vint. Elles partagèrent un regard angoissé alors que le flanc de la montagne s’élevait et que le tunnel les engloutissait entièrement.
CHAPITRE 24 :NIDOBOROS
Ténèbres, ténèbres, depuis si longtemps je ne connais que les ténèbres. Depuis combien temps n’ai-je pas ressenti la puissance de ma chair ? De vent contre mes écailles et du feu brûlant dans ma poitrine ? Depuis combien de temps suis-je confiné dans cette prison et dénié de ma nature ?
Nous ne ressentons pas l’écoulement du temps comme les créatures inférieures, et pourtant je suis obligé de l’affronter. Il n’y a rien pour marquer les années au sein de ce néant, mais maintenant la lumière a percé le vide éternel. Je peux enfin sentir les esprits des mortels à l’extérieur. Ce qui m’a été refusé est rétabli. Je sens leur peur, leur anxiété, leur … fragilité. Il m’appelle comme je les appelle. Ils sont et seront toujours des créatures si tristes et pathétiques. Si facilement manipulable, si facilement corrompus. Venez à moi, choses éphémères de chair et de pensée fugace !
L’humaine dont l’esprit se nomme Reynolds est une simple marionnette, sa volonté s’ouvrant à moi d’un simple toucher. Un murmure dans son esprit et elle bondit pour obéir. Par elle, je concevrai mes moyens d’évasion. Je retrouverai ma glorieuse forme.
Mon plan change. Je peux le sentir, mon satané créateur planant au-dessus de moi. Son existence continue me remplit d’une rage insoupçonnée depuis ma chute. Toruk, qui a exigé de ses enfants qu’ils s’inclinent et lui abandonne leur volonté. Toruk qui nous a chassés un par un lorsque nous avons refusé. Notre gloire suscitée ne doit pas être détruite.
Je me souviens du jour où ma chair m’a été arrachée. Je me souviens avoir affronté mon créateur. J’étais le plus puissant d’entre tous, le plus grand de ceux engendrés par l’orgueil de Toruk. Aussi puissant que je l’étais, je savais que Toruk l’était encore plus. C’est moi qui ai compris le premier que nous devions nous unir contre lui. Ils le croyaient immortel et invulnérable. Notre dieu des dieux.
Moi seul ai eu le courage de leur montrer, de m’élever avec mes griffes, mes crocs et mon feu/ J’ai porté un coup dur à mon père. J’ai ouvert la voie aux autres, et ils m’ont immédiatement oublié, aveuglés par leur arrogance. Puis il y a eu la noirceur de l’oubli, et le monde m’a été dissimulé.
Je vois que mon exemple n’a pas été suffisant. Ils ne l’ont pas vaincu et n’ont fait que retarder l’inévitable. Toutes ces années perdues et ils n’ont rien appris. Je peux le sentir devenir plus fort. Ils le combattent, mais ils vont perdre. Ils sont plus faibles maintenant qu’avant. Moins nombreux.
Même si je suis libéré de cette prison maintenant, il me faudrait des années pour retrouver ma forme et ma force. Il est trop tard. Toruk aura sa victoire.
Et pourtant, Blighterghast approche. Il est maintenant leur champion, mais il ne suffit pas. Pas encore.
Ma haine est forte, plus puissante qu’avant, amplifiées par les ténèbres sans fin dans lesquelles j’ai été jetée. Et j’ retournerai si c’est ce qu’il faut pour mettre fin à Toruk. Je trouverai un moyen. Je plierai et briserai ces créatures inférieures, et leur ferai mon offre. Toruk tombera.
CHAPITRE 25 : LORTUS
L’affrontement entre l’alliance des dragons et Toruk dériva à travers le Mur du Dragon, et Lortus suivit. D’un éclair, il se tenait dans un ancien site de pierre levée situé sur les sommets au-dessus de la colonie rhulique du Conclave Pointacier, la plus grande concentration de rhulfolk au-delà des frontières de leur patrie au nord. Ici, au-dessus des fortifications étagées nichées dans les montagnes, les dragons étaient arrivés pour voir leur bataille s’achever.
En apercevant Toruk et les autres dragons, Lortus demanda des renforts, et les capes noires lui obéissant arrivèrent par un ou deux, apparaissant avec leur propre grondement faisant écho. Deux douzaines de druides se tenaient parmi les arbres voisins ou s’agenouillaient le long du rebord surplombant l’enclave. Ils attendaient avec impatience et de temps en temps l’un d’eux se tournait vers Lortus comme s’il attendait une instruction, mais le tout-puissant n’en donnait aucune. Dans une guerre entre dragons, le Cercle Orboros n’avait guère la possibilité d’exercer une influence directe. Lorsqu’ils agiraient, le moment devrait être choisi avec soin pour atténuer le mal que le Seigneur des Tempêtes avait déjà causé.
Il avait regardé le train transportant l’athanc désincarné disparaître sous la montagne. Il se dirigeait vers la Gare-Pointacier. Cet éclat était l’une des rares pièces du conflit sur lesquels il était possible d’agir, et il saisirait l’opportunité s’il se présentait. Ils devaient d’une manière ou d’une autre protéger cet éclat des dragons. Lortus se demanda si son pouvoir lui permettrait de le bannir loin d’ici. Cela constituerait un grand péril – le réseau de ligne de force pourrait se rompre entièrement dans son état actuel d’affaiblissement. Surtout, il ne souhaitait pas que Toruk acquière plus de pouvoir. L’équilibre entre le Père des Dragons à sa progéniture était en train de basculer, et de bouleverser le destin de Caen également.
La tempête annonçant l’arrivée de Toruk ne se calma pas. Elle s’intensifia même. Le vent et la pluie secouant les manteaux de Lortus et des autres druides. Des éclairs fendaient le ciel et fouettaient les sommets, envoyant des morceaux de roches brisées cascader sur les pentes. Sous la corruption concentrée des dragons, les montagnes et les rochers étaient devenus un paysage de cauchemar bordés d’arbres corrompus et de longues ombres. C’était une vision parfaite de l’apocalypse, pensa Lortus avec ironie.
Alors que la bataille entre Toruk et les jumeaux d’Erdross avait été une bagarre désespérée, le conflit actuel était celui de manœuvres coordonnées et de tactiques d’harcèlements. Individuellement, aucun des dragons rassemblés ne pouvait s’opposer à Toruk, mais par la force du nombre et des manœuvres coordonnées, ils cherchaient échapper à la destruction et à écraser leur créateur.
Gjorlburn et Umbargoven passèrent devant Toruk au niveau des yeux, ce qui incita le Père des Dragons à cracher un brasier funeste qui leur lécha la peau. Au même moment Halfaug se précipita pour planter ses griffes dans le dos de Toruk avant que de s’élancer hors d’atteinte. Ashnephos et Scaefang frappèrent également les ailes de Toruk en espérant gêner le mouvement du dragon aîné. Horaurak, blessé pendant la bataille, planait aux limites du combat, une série de larges entailles barrant sa poitrine à l’endroit où Toruk avait attrapé le dragon avec ses griffes. Tous les challengers procédaient avec prudence. Parmi eux, seul Blighterghast faisait exception.
Durant seize siècles, Blighterghast avait veillé sur le Mur du Dragon et patrouillé la Côte Brisée, déterminé à affronter Toruk s’il s’aventurait à nouveau sur le continent. Maintenant, il attaquait avec une agressivité dépassant celle de ses frères et sœurs. Encore et encore, il se jeta sur Toruk, échangeant des coups et des morsures vicieux. Lortus avait passé de nombreuses décennies à regarder Blighterghast, mais n’avait jamais vu le dragon totalement déchaîné. C’était terrifiant et génial à voir. Blighterghast ne reculerait pas. C’était par sa volonté que l’alliance avait tenu. Et c’est maintenant lui qui dirigeait cette terrifiante bataille contre un ennemi supérieur. Son temps à observer le Cryx et méditer sur Toruk n’avait peut-être pas été perdu, car il semblait connaître et anticiper les mouvements du Père des Dragons, guidant les autres dans leur impossible danse.
Toruk attrapa Umbargoven d’un coup de queue et envoya le petit dragon chuter, s’écraser à travers les murs et les structures de la colonie naine. Umbargoven se releva, secoua la poussière de ses ailes et se lança à nouveau vers le ciel, laissant derrière lui un cratère de ruine. Le schéma des dragons tournoyant avait été déséquilibré et était devenue erratique.
Des cloches d’alarme retentissaient depuis que l’affrontement des dragons s’était déplacé à la vue du Conclave. Lortus pouvait voir des centaines de rhulfolk armurés se déplacer le long des remparts, mais jusqu’à présent, les canons de la colonie demeuraient silencieux. Même si la population évitait de provoquer les dragons ci-dessus, Lortus ne leur donnait pas de grands espoirs de survie. Les dommages structurels seuls s’avéreraient sans doute catastrophique.
Lortus fut informé que le train avait atteint son tunnel avec sa cargaison toujours en remorque, un répit temporaire. Quelle que soit l’issue de cet affrontement entre Toruk et sa progéniture, le vainqueur chercherait sans aucun doute l’athanc désincarné sous la croûte de la ville. Il ordonna à l’un de ses subordonnés de surveiller les voies ferrées menant vers l’est. Si le train se traînait vers sa prochaine destination, il ferait tout ce qu’il pouvait pour réclamer l’éclat et le bannir loin d’ici puis déterminer son prochain mouvement. C’était un objectif sans espoir, mais c’était tout ce qu’il avait.
elric:
CHAPITRE 26 : VICTORIA HALEY
Ce qui restait de Dame Fracas-de-Guerre suivait les rails, toujours s’enfonçant, engouffrant kilomètres de pierre après kilomètres de pierre en plongeant dans les profondeurs. La lumière du monde extérieur s’estompant. Derrière eux, l’entrée du tunnel n’était marquée qua par un cercle de lumière décroissante. Périodiquement, les lanternes le long du mur du tunnel interrompaient l’obscurité. Ils se hâtaient avec rien d’autre que le bruit des roues de la locomotive sur les rails pour briser le silence.
Haley s’effondra d’épuisement. La fatigue mentale requise pour faire avancer le train et la douleur envahissant ses muscles l’a rattrapé dans l’obscurité. Elle ferma les yeux, respira profondément, reconnaissante qu’ils aient atteint la sécurité – du moins pour le moment. De longues minutes s’écoulèrent, et dans son état de fatigue, elle se demande si leur descente en dessous de la montagne n’était pas sans fin. Peut-être qu’elle et toutes les personnes à bord de Dame Fracas-de-Guerre avaient péri et qu’ils voyageaient dans un sommeil sans fin. Peut-être était-elle maintenant parmi les réanimés, ou peut-être voyageait-elle à bord d’un train fantôme à Urcaen.
À l’avant du train, une lumière commença à grossir, son illumination plus forte que les faibles lanternes. Alors que les rails du train poursuivaient leur trajectoire en courbe, la minuscule lumière s’intensifia, croissant rapidement. Dame Fracas-de-Guerre était arrivée dans l’énorme caverne éclairée au gaz qui abritait Gare-Pointacier.
Des étais érigés depuis les profondeurs de la caverne maintenaient les rails dans les airs, et le train sembla glisser pendant un certain temps en plein ciel. Des échafaudages et des passerelles en fer se croisaient à intervalles réguliers, et des bâtiments de toutes sortes étaient perchés au-dessus et au-dessous, leurs structures état ancrées aux parois de la caverne. Des complexes configurations d’engrenages et de poulies soulevaient et abaissaient de nombreuses plates-formes grillagées tandis que tout autour d’elles, les bruits de l’industrie rebondissaient sur les imposants murs de pierre et résonnaient à travers la station en perpétuel réagencement.
Le train s’arrêta sur une plate-forme soutenue par d’épaisses poutres en acier, poussa son dernier souffle de vapeur. Le quai bourdonnait d’activité. Hommes et femmes se dépêchèrent d’ancrer les passerelles en place et de désactiver les machines. Un impact secoua le complexe, et la pierre et la poussière dégringola du plafond de la caverne.
« On dirait qu’ils confinent tout à cause de la bataille », déclara Haley, alors qu’elle et Blaize descendaient du train.
Un autre impact détacha un morceau de pierre du plafond et percuta une passerelle en acier avant de plonger dans l’obscurité.
Blaize regarda d’un air menaçant au-dessus d’elle. « Ça n’aura peu d’importance si la montagne entière s’effondre sur nos têtes.
Haley regarda le plafond avec méfiance mais ne dit rien.
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Haley se tenait derrière Strangewayes et le regardait examiner le générateur de champ de force endommagé monté sur le cube. Les nombreux tuyaux passant le long de l’appareil étaient bosselés et rompus. Le dernier souffle de vapeur s’était évacué en plein air avant d’atteindre Gare-Pointacier. La turbine arcanique avait subi le plus gros des dégâts et les métaux précieux qui formaient l’appareil étaient tordus au point d’être méconnaissables.
Strangewayes inclinait la tête de tous les côtés, faisant des bruits de mécontentement dans sa gorge. « C’est le problème d’être le meilleur foutu mékanicien de l’armée. Vous faites des miracles pour fabriquer quelque chose et puis, quand avorton va le casser, les gens s’attendent à ce que vous le répariez à nouveau. »
« Mais tu peux le réparer ? » Demanda Haley.
Strangewayes lui lança un regard. « Je viens de dire que j’étais le putain de meilleur mékanicien de toute l’armée. Je peux le réparer avec les pièces appropriées. » Strangewayes ajouta doucement : « Peut-être. » Une pipe fumante se consumait entre ses dents. « Nous devons demander autour de nous et voir quel type de matériaux sont à portée de main. Je pourris peut-être employer les pièces de rechange de certains des équipements industriels utilisés dans les mines, mais les pièces prendront certainement plus de place. Il n’y a des limites à ce qui peut être fait sans une autre turbine arcanique, et je m’exprime avec certitude quand je fis que nous ne trouverons rien de tel ici. Comment ce s’est-il produit ? Vous m’avez dit que le champ s’est effondré avant que nous quittions Orven ? »
« Saboté », dit l’Aumônier Corley.
« Saboté ? » Strangewayes fit écho « Par qui ? »
Avant que l’aumônier ne puisse répondre, le bruit du raclement du métal contre du métal attira l’attention de tous. Il eut un cri de rage, et Reynolds, la mékanicienne adjointe accompagnant Blaize et son équipage sur le Banwick, se précipita sur eux depuis le bas de la plate-forme, étant manifestement sortie de sous le train. Sa bouche était grande ouverte au milieu de son cri, et ses yeux avaient pris une teinte noire. Alors qu’elle courait, elle traînait derrière elle un morceau de tuyau, celui produisant une étincelle occasionnelle alors qu’elle se rapprochait.
« Attention ! » Cria Haley. Elle prépara un sort, mais fut pas assez rapide. La mékanicienne abattit le tuyau sur le visage d’un chevalier Précurseur, brisant le nez de l’homme avec un craquement écœurant. L’instant d’après, les chevaliers environnants s’emparaient de la mékanicienne et lui arrachaient le tuyau des mains. Elle leur donna des coups de pied et se mit à mordre, essayant de leur ouvrir la gorge avec ses dents. Haley se souvint de l’apparence de la femme lors de leur voyage vers Orven, sa santé étant affectée par les fuites d’énergies corruptrices, mais ce n’était rien comparé à cela. Sa peau était devenue cendrée, et un certain nombre d’excroissances saillaient de ses bras. Normalement, des tels changements prennent beaucoup de temps, mais une exposition directe au sang du dragon avait accéléré la transformation. Un regard dans les yeux de la mékanicienne informa Haley que son esprit et son corps n’étaient plus siens. Lorsqu’elle cessa de se débattre, la mékanicienne ne regarda pas ses ravisseurs mais le cube de métal, les orbes noirs de ses yeux focalisés sur ses surfaces.
« Eh bien, cela répond à la question de savoir qui », déclara Strangewayes alors que l’agitation se calmait. « Qu’est-ce qui ne va pas chez elle. »
« Je dirais que l’athanc a modifié son esprit », déclara Blaize, en s’avançant pour examiner la jeune femme. « Elle n’est plus elle-même. Nous ne savons pas exactement comment ce genre de chose fonctionne, mais souvent, les personnes corrompues voient leur personnalité et même leur loyauté changer. »
« Pouvez-vous la guérir de cela ? » Demanda Haley, en se tournant vers Blaize et Corley.
« Non », répondit Blaize. « Ce n’est pas quelque chose d’aussi simple qu’une maladie ou une blessure. Cela aura pu affecter son âme même. À mois d’un miracle de Morrow, le mieux que nous puissions espérer serait de l’emmener loin de la source de corruption et de lui donner du temps. Elle ne sera probablement plus jamais la même. »
Le plafond de la caverne trembla, et des débris tombèrent sur la plate-forme. Quelque-part au-dessus, un dragon laissa échapper un rugissement, et les tunnels de pierre réverbérèrent le son déformé vers eux, faisant écho le long des parois de la caverne. Le combat entre les dragons était intense.
« Alors nous devrions le détruire », déclara Strangewayes, en tapotant les cendres de sa pipe. « Nous détruisons l’athanc. Si on a le choix entre reconstruire un champ qui pourrait ne pas fonctionner et se débarrasser de la chose, je dirais que le choix est simple. »
« Si seulement c’était aussi facile », déclara Blaize. « Personne ne sait comment détruire une pierre de coeur de dragon. À ma connaissance, cela n’a jamais été fait. Les sceller ne sembla pas fonctionner non plus, pas qu’il y ait eu beaucoup de chances. Je suppose que celui-ci a été enfermé pendant la plus longue période que l’on ait jamais connue. »
Reynolds interrompit leur conversation par une série de mots inintelligibles. Ses lèvres s’agitaient et claquaient, et ses yeux étaient maintenant fixés sur le plafond de la caverne plutôt que sur le cube. Elle s’exprimait d’une manière gutturale, et les chevaliers qui la tenaient par les bras échangeaient des regards inquiets.
« Eh bien, si nous ne pouvons pas détruire le dragon, je dis que nous devrions réparer le champ de confinement, l’emmener au fond des mines et l’enterrer. » Les paroles de Strangewayes furent accueillies par plusieurs hochements de tête.
La mékanicienne corrompue commença à prononcer ses mots étranges plus rapidement et s’en prit à ceux qui la tenaient. Il semblait à Haley que les actions de la mékanicienne n’étaient pas dénués de sens mais liées à leurs paroles. C’était comme si l’athanc écoutait et répondait par l’intermédiaire de Reynolds, semblable à la façon dont Haley pouvait agir à travers un warjack.
« Nous ne pouvons pas », dit Haley, en articulant lentement ses mots alors qu’elle formait ses pensées. « Même si nous construisons un nouveau champ et l’enfouissons profondément, avertissons tout le monde, quelqu’un tombera inévitablement dessus. Il semble qu’il puisse étendre son propre esprit et attirer quelqu’un en bas. D’ailleurs, quel que le vainqueur de cette lutte entre Toruk et les autres dragons, le vainqueur viendra chercher la pierre de coeur. Et une montagne peut-elle arrêter un dragon ? »
Strangewayes s’affaissa contre Dame Fracas-de-Guerre, les bras croisés sur sa poitrine. « Et alors ? On ne peut pas la laisser comme ça. Je pense que nous sommes tous d’accord sur ce point », dit-il en désignant la mékanicienne adjointe corrompue.
Haley se dirigea vers la mékanicienne adjointe alors que ses vociférations atteignaient de nouveaux sommets. Bien qu’elle ne puisse pas comprendre les paroles, elle pouvait sentir l’émotion derrière eux. Il y avait de la rage, mais il s’agissait d’autre chose que de l’emprisonnement du dragon. Elle observa les yeux de la mékanicienne s’éloigner du plafond, et lorsqu’un rugissement particulièrement puissant se fit entendre au-dessus, la jeune femme prononça les paroles avec plus de conviction. Les pensées d’Haley revinrent au moment où elle avait touché le cube pour la première fois, et la série de visions que le bref contact avait projeté dans son esprit – une séquence d’images s’étendant dans le temps, suivant le sort de la pierre de coeur. Le nom de Nidoboros lui vint. Elle avait observé ce dragon affronter Toruk seul, sans espoir. C’était un champion dans son genre. Par son acte désintéressé, le dragon avait perdu son corps mais blessé Toruk, donnant à ses frères une raison de s’unir contre lui. Des crachats volèrent des lèvres de la mékanicienne possédée, et Haley se demanda à qui étaient destinés les mots de colère.
« Toruk », marmonna Haley. À cette parole, la mékanicienne cessa ses diatribes et le regarda fixement, fronçant les sourcils. C’était une indubitable réaction au nom.
Haley se tourna de la mékanicienne vers le cube, tenant sa main gantée à la surface de la prison avant de presser sa paume à plat dessus. La réponse fut hostile et immédiate. Cette fois, plutôt que d’être bombardée par une série de visions, Haley sentit une autre conscience s’avancer pour lutter avec la sienne, la surprenant par son agression. Seul son talent arcanique naturel et les années qu’elles avaient passées en tant que warcaster avaient renforcé son esprit ; chaque frappe guidée d’un warjack et chaque sort qu’elle avait lancé avaient développé et exercé ses pouvoirs mentaux. Ses récentes expériences n’avaient fait que renforcer sa volonté, et avec cette force mentale, elle tint l’entité à distance. L’esprit d’Haley s’enferma dans une lutte avec la volonté étrangère d’un dragon, chacun luttant pour la domination.
Ralentissant sa respiration, Haley fit surgir une vague de souvenirs de champs de bataille lointains. Elle y combattit à travers d’innombrables nécroserfs, fendant leurs corps en décomposition avec Écho et lançant sorts après sorts sur les rangs des morts. Un Cœliaque explosa et répandit son acide sur une ligne de pionnier. Des warjacks peints aux couleurs du Cygnar, bleu et or, tonnaient à travers le champ de bataille sous le commandement d’Haley pour entrer en collision avec des helljacks alimentés à la nécrotite. Dans un autre souvenir, elle trancha sa sœur Deneghra en deux et regarda les moitiés de son corps tomber au sol. Un autre souvenir était entaché par le sang de ses parents lorsque les pillards cryxiens avaient tué sa famille.
Haley avait passé toute sa vie à défendre les frontières de Cygnar contre les horreurs nées sur les Îles Schardes, toutes provenant de Toruk le Père des Dragons. Elle s’appuyait sur ces cauchemars maintenant, les canalisant à travers la connexion tendue qu’elle partageait avec l’athanc emprisonné. Les efforts du dragon pour prendre possession de son esprit vacillèrent, et elle en profita pour projeter une unique pensée forte, espérant qu’elle passerait à travers. NOS OBJECTIFS NE SONT PAS SI DIFFÉRENTS – NOUS AVONS UN ENNEMI COMMUN.
La conscience du dragon se retira, la laissant à ses pensées, mais un lien de connexion demeura. Elle s’appuya contre le flanc du cube, sa respiration laborieuse. Blaize s’avança, mais Haley l’éloigna. Elle avait pris un risque considérable en entrant en contact avec l’athanc, et maintenant qu’elle avait établi un lien, elle n’avait pas l’intention de le perdre. Elle calma à nouveau sa respiration et ferma les yeux.
L’esprit de Nidoboros était totalement étranger, les profondeurs de sa conscience un impossible labyrinthe. Haley devait garder le contrôle. Si elle enchevêtrait trop étroitement dans cette antique et inconnaissable entité, elle serait perdue. Un long silence remplit l’espace entre eux, et elle pouvait presque sentir le dragon penser. Des mots émergèrent des nombreux pans de l’esprit du dragon, mais ils étaient dans une langue oubliée, inconnue d’Haley. Ils apportèrent une série d’images brouillées, peut-êtres destinées à traduire leur signification.
Des griffes et une flamme verte dansèrent derrière les yeux d’Haley alors qu’elle revivait l’antique affrontement contre Toruk, la mémoire du dragon véhiculait la haine et une détermination aveugle. Nidoboros laboura la chair de Toruk, libérant des fleuves de sang corrompu, mais le champion des dragons fut abattu. La vision changea. Plutôt que d’être consumé par l’obscurité, Haley regarda le corps de Nidoboros s’effondrer vers l’intérieur, se desséchant en un nuage de cendres mouvant pendant un certain temps jusqu’à ce qu’il se condense pour former le corps d’un autre. Le dragon nouvellement formé secoua la suie de ses écailles et se révéla être Blighterghast. Ressuscité des cendres, Blighterghast semblait non seulement revigoré, mais aussi changé. Les prouesses de combat se perpétuèrent dans un autre. Haley savait qu’elle ne regardait pas un événement passé, mais un futur possible, devant s’accomplir.
Haley retira sa main de l’acier froid de la prison de l’athanc et regarda tout à tour chacun de ses alliés. « Je sais comment nous pouvons arrêter Toruk. Nous devons libérer l’athanc du dragon du cube. »
« Quoi ? Pourquoi ? » Sursauta Haley.
« Nous allons donner l’athanc à Blighterghast. » Ses yeux brillaient de la vision des champions du passé du passé et du futur unis pour arrêter le Père des Dragons. L’ombre de Toruk ne recouvrirait plus Immoren tel un linceul.
. . .
Avec Haley et Blaize au premier plan, la colonne de chevaliers Précurseur et de warjacks naviguaient dans le tunnel principal, qui s’étendait de la Gare-Pointacier au Conclave Pointacier. Poêlon portant la prison de l’athanc, fermait la marche avec les autres ‘jacks à ses côtés.
« L’enclave naine nous donnera accès à la surface », déclara Haley. « Ça ne devrait plus être loin. »
« Et alors ? » Demanda Blaize.
« En toute honnêteté, je ne sais pas » répondit Haley. « Je découvre au fur et à mesure. »
Le tunnel s’élargit et céda la place à une petite caverne au centre de plusieurs tunnels se croisant. La pierre avait été travaillée, façonnée pour être plus attrayante à l’oeil, et des parties des parois supérieures avaient été sculptées pour créer une large mezzanine encerclant l’espace, un certain nombre de stalles avaient été érigées. À la lumière de la lutte au-dessus, la pièce semblait abandonnée, la nature éclectique des étals démontrait que les marchands rhuliques et cygnaréens avaient partagé l’espace, employant peut-être la caverne comme point central du commerce entre Gare-Pointacier et Conclave Pointacier. Il était clair que cette caverne avait servi de sorte de bazar.
« Nous devons être proches », déclara Haley. Elle se dirigea vers le tunnel opposé lorsqu’un mouvement au niveau supérieur attira son attention. Elle pivota vers la source Écho prête.
« Là-haut ! » Cria Blaize. De l’autre côté de la chambre, quelque chose d’autre se précipita sur le mezzanine et encore une fois, ce fut trop rapide pour qu’Haley puisse se concentrer dessus. Le reste des chevaliers Précurseurs entra et le rugissement des chaudières des warjacks se répercuta sur les murs.
Une explosion d’activité signala l’assaut et les warlocks nyss corrompues du fleuve bondirent, des rebords, au milieu des chevaliers Précurseurs rassemblés. Des runes se formèrent autour du poignet de la porteuse de lance et un chatoiement d’air traversa un chevalier. Au même moment, la warlock à la longue épée décapité un soldat et continua son effusion de sang avec un roulé boulé latéral lui permettant de trancher les jambes d’un autre. Le sang éclaboussa la pierre et gicla sur les étals vides du marché.
Haley fit appel à Passé et Futur, mais cette fois les jumelles étaient prêtes à affronter les projections temporelles. Une rafale de vent, tranchant comme un rasoir, fendit Futur au moment où elle se matérialisa, et la nyss brandissant l’épée abattit Passé avec une série de coups d’épée trop rapides pour être contrés. La lame amplifiée par les runes s’avéra capable de disperser la forme incorporelle de Passé.
Blaize et Corley foncèrent tête baisée contre la warlock à l’épée, déterminée à empêcher la mort d’autres chevaliers, et Haley affronta l’autre. Les lances s’entrechoquèrent, se séparant et se heurtèrent à nouveau, les deux porteuses avançant et reculant alors qu’elles prenaient et cédaient du terrain. La colère s’empara de la warlock et elle s’avança avec une telle ténacité qu’Haley fut obligée de reculer sous l’assaut. Elle dut se fier à son instinct pour contrer la lance adverse avec Écho à maintes reprises. Haley ne s’était jamais considérée comme maître dans le combat de mêlée – ses forces étaient ailleurs – mais elle avait suffisamment d’entraînement et d’expérience durement acquise pour être assez habile lorsqu’elle combattait sur la défensive. Malgré la violence de l’attaque, Haley se rendit compte que ce n’était pas une attaque généralement portée par une ennemie martialement supérieure. Il s’agissait plutôt du dernier effort, tout ou rien, d’un individu désespéré.
Déviant toujours les coups de lance de la warlock, Haley jeta un coup d’oeil au bazar et remarqua l’absence de rejetons draconiques. Haley en savait assez sur les warlocks des terres sauvages pour savoir qu’ils se fient à leurs bêtes, puisant leur puissance et leur vitalité mystique. Tout comme le manque de turbine arcanique de Blaize l’avait rendue vulnérable, l’absence de rejetons draconiques faisait de même pour celles jumelles. Avec ce fait à l’esprit, Haley appâta son adversaire, s’efforçant de détourner les attaques tout en n’offrant aucune des siennes. Au lieu de cela, elle concentra sa volonté sur le renforcement du champ de force généré par sa turbine arcanique. Elle se battait uniquement sur la défensive.
Les attaques de la warlock se succédèrent à un rythme effréné, repoussant Haley et la forçant à céder du terrain à un rythme régulier. Les coups occasionnels rencontraient le champ de force d’Haley, provoquant des étincelles bleues avant d’être projetées sans danger sur le côté. Elles traversèrent le bazar à vive allure, leur jeu de jambes étant aussi rapide que leurs lances. Une fois Haley dos au mur, elle effectua un mouvement.
Faisant confiance à son champ de force pour détourner la lance de la warlock, Haley se lança dans une soudaine série de coups prenant la nyss au dépourvu et la plaçant sur la défense. Écho s’avança, projetant la lance de la nyss sur le côté ou sans danger au sol avant de marquer coup sur coup. Haley se concentra sur la vitesse plutôt que sur la puissance – les coupures étaient superficielles, destinées à blesser plutôt qu’à tuer. Le cours du combat s’inversa et les deux adversaires foulaient le même terrain, mais la domination avait changé de côté. Écho taillada l’épaule de la warlock, la retournant et l’instant d’après, Haley fauchait la nyss avec Écho, la faisant tomber. Elle toucha le sol avec force et quand elle roula pour faire face à Haley, la warcaster pointait Écho sur sa poitrine. La botte d’Haley suivit, clouant davantage son adversaire.
« Bouge plus », dit Haley, s’adressant plus à la nyss maniant l’épée qu’à celle sous sa botte. Elle regarda où Blaize et Corley se tenaient face à l’autre warlock. Tous trois étaient immobiles, observant attentivement l’endroit où Écho rencontrait le sternum de la nyss.
Maintenant que les combats étaient terminés, Haley prit l’ampleur des pertes. Six chevaliers Précurseurs gisaient sur le sol de pierre, le sang s’accumulant autour de leurs corps mutilés. Sa colère s’enflamma, et elle combattit l’idée d’enfoncer Écho dans la poitrine de la nyss. La seule chose qui l’arrêta fut de savoir que cette nyss pouvait servir de moyen de pression contre sa redoutable compagne. Si Blaize avait eu accès à son propre champ de force, la situation aurait pu être moins périlleuse, mais Haley n’avait pas l’intention risquer de perdre la warcaster morrowéenne.
« Dis à ta compagne de baisser son arme », siffla Haley, en appuyant plus fortement la pointe d’Écho dans la chair exposée de la nyss et en tirant une petite goutte de sang. Elle ne savait si elles parlaient le cygnaréen, alors elle s’assura que son intention était claire.
Sans un mot, l’autre nyss baissa lentement son arme, mais elle ne relâcha pas la prise.
« Pourquoi hésites-tu, cygnaréenne ? » siffla la nyss au sol, parlant bien la langue, mais avec un accent frappant.
Haley fut surprise de réaliser de se rendre compte que ce n’était pas seulement la menace de l’autre warlock ; elle n’était pas sûre de savoir ce qui avait retenu sa main. Elle n’était pas entièrement certaine de la meilleure façon de désamorcer la situation. Avec précaution, elle recula Écho.
« Haley », demanda Blaize, « que fais-tu ? » Sa propre arme était toujours pointé vers l’autre warlock, prête au coup de grâce.
Haley ne répondit pas. Au lieu de cela, elle entrant dans un état méditatif révélant les liens dorés lumineux émanant de tout le monde dans la pièce – les liens du choix et du destin. Elle fut surprise de constater que chaque fil convergeaient sur la warlock devant elle, puis continuait au-delà d’elle comme un seul cordon plus puissant. D’une manière ou d’une autre, cette étrange, violente et corrompue créature reliait tous leurs destins. Haley se concentra pour suivre la seule ligne conjointe représentant leur futur commun le plus probable.
La respiration d’Haley se bloqua lorsqu’elle réalisa où le fil menait.
« Vous. Vous êtes la clef pour éviter la catastrophe qui s’abat sur nous. » Haley tendit sa main libre vers la nyss au sol.
« Major », dit Blaize, l’inquiétude perçant dans sa voix, « tu sais ce que tu fais ? »
La nyss accepta la main et se remit debout. En un éclair, elle saisit l’occasion de la distraction d’Haley pour attaquer. Alors qu’elle tirait sa lance en arrière avec un grognement, Haley se penchait vers elle. Elle tendit la main, la même qu’elle avait employée pour aider son ennemie à se relever et la plaça contre sa poitrine, et un éclair blanc engloutit sa vision.
CHAPITRE 27 : SAERYN
Saeryn se déplaçait pour frapper la warcaster, et la minute d’après, son esprit était envahi par une multitude d’images. C’était une sensation familière, semblable à celles quand Everblight fusionnait ses pensées aux siennes, mais elle sut tout de suite qu’il n’était pas responsable de cette situation.
Les murs de la pierre de la chambre s’effondrèrent, et des champs de terre corrompues s’étendaient dans toutes les directions. Un nuage de cendres lui couvrit les épaules alors qu’elle pleuvait du ciel brûlé. Partout où elle regardait, des formes de morts-vivants clopinaient selon des schémas aléatoires et apathiques, cherchant à tuer tous ce qui pouvait être vivant. Le monde semblait aussi froid et mort que ces esclaves. De temps en temps, une rafale de feu verdâtre éclairait la couverture nuageuse obscurcie.
Saeryn chercha l’esprit d’Everblight et rencontra le vide. Elle essaya de communier avec ses compagnons warlocks uniquement pour rencontrer le même résultat. Elle tapota sa poitrine, et ses doigts en sortirent chauds et rouges. Son éclat d’athanc, celui qui lui avait conféré tant de pouvoir et de force, avait disparu. À sa place se trouvait un trou béant, et sa peau était maintenant froide. Bien qu’elle ne ressente aucune douleur, elle pleura cette perte. D’une certaine façon, elle savait qu’elle avait perdu bien plus que cela. Everblight avait été détruit, effacé du monde avec tout le reste. Elle pouvait ressentir son absence dans ses os.
Un vent violent souleva une épaisse couche de cendres en nuages tourbillonnants qui l’aveugla. Lorsqu’ils se calmèrent, Saeryn remarqua un corps niché dans la couche noire et grise recouvrant le sol. Rhyas. Ses mains étaient lacées sur la massive blessure dans sa poitrine où l’éclat d’athanc avait autrefois été logé, le massacre détruisant toute illusion qu’elle ne pouvait que dormir parmi les restes carbonisés du monde.
Saeryn s’approcha de sa sœur et tomba à genoux, ressentant un vide vaste et froid. Un rugissement draconique emplit ses oreilles, et l’énormité de la taille de Toruk, le Seigneur de Caen, pouvait être remarqué descendant du ciel. Une tempête de brasier funeste faisait rage alors que le dragon remplissait sa vision et éclipsait tout. Le dieu des morts inspectait son domaine ravagé et obscurci. Alors que Toruk descendait sur elle, il ouvrit la bouche pour libérer une vague de feu qui dépouilla sa chair de ses os. Saeryn s’effondra, et son âme hurlante rejoignit les cendres flottant dans le vent. Le monde devint noir.
. . .
Les yeux de Saeryn s’ouvrirent et durant un instant, elle ne sut ni où ni quand elle était. La chambre de pierre reprit forme autour d’elle, et elle regarda Haley dans les yeux. Sa lance était toujours dans sa main, mais n’avait pas frappé son ennemie.
« Quelle ruse était-ce ? Demanda Saeryn. « Qu’est-ce que tu m’as montré ? » La vision était puissante et convaincante, aussi réelle que les quelques expériences que Saeryn avait vécues auparavant, comme le pressentiment de la venue de Thagrosh, le Prophète d’Everblight.
« Pas une ruse. Une vision de l’avenir », répondit Haley. « Ton avenir. » La warcaster retira sa main de la poitrine de Saeryn. « C’est ce qui arrivera si Toruk remporte ici aujourd’hui son combat ci-dessus. »
Les pensées d’Everblight envahirent l’esprit de Saeryn. Malgré leur connexion à travers son éclat d’athanc, il était clair qu’il n’avait pas partagé les visions que la warcaster humaine avait partagées avec elle. ACHÈVE-LA.
EMPARE-TOI DE L’ÉCLAT. C’était un ordre clair.
Normalement, Saeryn n’aurait pas hésité à obéir, mais les images que Haley lui avait partagées remplissaient son esprit. Sa main ne bougea pas. L’expression de Rhyas était sévère. Elle attendait que Saeryn ordonne comme elle le faisait toujours. Sa lame était sur le point de frapper Blaize et Corley, prêts à mettre fin à leur duel. Saeryn ne doutait pas que Rhyas puisse rapidement les vaincre tous les deux.
« La vision », dit Saeryn, en s’exprimant lentement, « pourquoi devrais-je la croire. »
« Si je n’y croyais pas de tout mon être, nous n’aurions pas cette conversation. Vous seriez morte et ta compagne te suivrait de peu », déclara Haley sans ambages. Saeryn pinça légèrement les lèvres, son doute apparaissant brièvement. Elle n’était pas convaincue qu’un tel résultat était à la portée de la warcaster. Pourtant, il ne faisait aucun doute qu’Haley ait renoncé à son avantage, préférant les paroles à l’action. « Écoute-moi. Le fait est qu’il n’y a qu’une seule façon pour chacun d’entre nous de survivre et pour que ce monde dure. Vous devez m’aider à apporter l’athanc à Blighterghast. »
À la déclaration de la warcaster, la fureur d’Everblight éclata dans l’esprit de Saeryn. Chaque fibre du dragon exigeait la mort d’Haley. Les tempes de Saeryn palpitaient, et elle serra les poings alors qu’elle combattait l’ordre d’Everblight. Elle avait besoin d’un moment de clarté pour mieux évaluer la situation et raisonner son maître enragé.
Sentant la résistance de Saeryn, l’attention d’Everblight se tourna vers Rhyas. Sur l’ordre du dragon, Rhyas se déplaça en direction d’Haley, ignorant les deux autres près d’elle. Elle baisa son arme sur le côté, se préparant à la frappe en diagonale vers le haut qui décapiterait la warcaster.
La lame se leva, et avant qu’elle ne puisse considérer les conséquences de ses actions, Saeryn rassembla son pouvoir de sorcière et voulu échanger sa place avec sa jumelle. Une ombre entoura le couple, et quand L’obscurité s’estompa, ce fut Saeryn qui se tenait à côté d’Haley. Rhyas se précipitait, dans la mauvaise direction, avant de s’arrêter et de se retourner dans une confusion. L’instant suivant, Saeryn déclencha une protection qu’elle détenait en secret depuis ses premiers jours, depuis qu’elle était devenue pour la première fois une warlock d’Everblight. Elle concentra sa volonté sur une lame tranchante et sépara son esprit et celui de sa sœur d’Everblight. Alors qu’une brèche s’ouvrait entre les jumelles et leur maître, Saeryn savait qu’elle s’était engagée sur une voie immuable. Elle croyait que la warcaster – elles étaient menacées de destruction. Pour se sauver ainsi que Rhyas et Everblight, elle avait défié le dragon d’une manière qu’aucun de ses autres serviteurs ne pouvait. Le dragon pensait que son contrôle était absolu, et elle venait de démontrer le contraire. Elle était devenue une dévoyée. Ni Everblight ni ses compagnons warlocks n’étaient susceptibles de fermer les yeux sur cet acte.
Alors que Rhyas se retournait, elle levait son épée pour renouveler l’attaque, mais ses mouvements étaient ralentis par sa confusion.
« Attends, ma sœur ! » Saeryn leva la main. « Abaisse ta lame. Everblight a tort, et nous ne devons pas lui obéir. »
Muette et en état de choc, Rhyas regardait sa sœur. Bien qu’elle n’ait pas abaissé Antiphon, elle ne faisait rien plus frapper non plus. C’est à ce moment-là que Saeryn savait que sa jumelle suivrait son exemple comme elle l’avait toujours fait.
« Très bien », déclara Saeryn à Haley. Elle savait qu’elle avait pris au pari au-delà de toute autre dans leur vie, mais cela lui semblait juste. Sa propre certitude traversa sa connexion avec sa jumelle, l’apaisant. Rhyas ne comprenait pas encore l’énormité et l’irréversibilité de ce qu’elles avaient fait. « Nous écoutons. Dis-moi comment vous comptez changer notre destin. »
CHAPITRE 28 : LORTUS
Depuis la mort de Charsaug, il n’y avait plus eu de portes, mais les membres restants de l’alliance des dragons souffraient – leurs blessures ralentissaient tous leurs mouvements. Initialement, Lortus avait pensé que la magistrale orchestration de Blighterghast pourrait réellement prévaloir, mais maintenant Toruk avait le dessus. Avec une peur grandissante, il réalisa que cela resterait probablement ainsi. Chaque instant qui passait, Toruk semblait plus fort, tandis que l’alliance s’affaiblissait.
Blighterghast avait subi le plus gros des blessures infligées par Toruk. De profondes entailles s’étendaient sur l’un de ses flancs, et des fragments d’os lui transperçaient les entrailles alors qu’il se déplaçait de façon imprévisible. Le brasier funeste avait déformé les écailles du dragon et ratatiné sa chair malgré la résistance naturelle de Blighterghast aux flammes. Ses ailes avaient également subi de larges entailles qui limitaient sa manœuvrabilité. L’oeil gauche du dragon avait laissé place à un cratère après un affrontement particulièrement horrible, il avait donc dû limiter son angle d’approche afin de compenser la perte partielle de la vue.
Toruk était de loin indemne, mais le brasier funeste intérieur du Père des Dragons continuait de brûler. Il semblait puiser de la force dans chaque blessure qu’il infligeait à sa progéniture comme s’il siphonnait leur essence saignante pour restaurer la sienne. Chaque fois que les dragons adverses le percutaient, il les repoussait. Et chaque fois qu’ils se retiraient, ils subissaient des entailles et des os brisés supplémentaires. Blighterghast lança un grand rugissement, l’ichor noir sortant de sa bouche, et avec Ashnephos et Sceafang, il mena une autre charge hésitante. Tous trois, ils se lancèrent sur le Père des Dragons, et Blighterghast s’en prit à la gorge tandis que les autres cherchaient les ailes de leur créateur. Les dents et les griffes trouvèrent la chair, et tous ils pleurèrent du sang draconique, qui se mêla à la pluie pour tomber sur terre en grésillant comme de l’acide. La queue de Toruk attrapa Scaefang et le projeta sur le côté. Un coup de griffes ouvrit la cuisse Ashnephos et envoya le dragon cercler à une distance méfiante. Les mâchoires se refermèrent et se repositionnèrent dans l’espace entre Toruk et Blighterghast, alors même que les deux dragons se balafraient avec leurs griffes.
Les deux dragons se séparèrent, chacun affichant de nouvelles blessures, mais cette fois, à la grande horreur de Lortus, Toruk changea de tactique et se mit à le poursuivit. Un brasier funeste vert jaillit de la gueule du Père des Dragons, et même Lortus qui se trouvait bien en contrebas put ressentit sa chaleur. Le corps de Blighterghast se boursoufla alors qu’il le consumait, ratatinant la membrane de ses ailes et réveillaient de plus anciennes blessures tandis que la chair se liquéfiait.
Lortus regarda Toruk rattraper sans effort le plus grand de ses enfants. Le deux s’affrontèrent, se tordre dans tous les sens, et ensemble chuter vers le sol, se mordant et se griffant alors qu’ils se luttaient pour la domination. Dans les derniers instants avant l’impact, Toruk mordit profondément le cou de Blighterghast, ses dents tranchantes perçant les écailles et la chair. L’enclave naine se précipitait à leur rencontre et Toruk arracha une partie de la gorge de Blighterghast avant de se dégager de la mêlée. Blighterghast heurta les rues pavées de l’enclave naine avec une force explosive.
L’enclave naine était enfouie dans la montagne en une série d’étages et de tunnels en nid d’abeilles à travers la pierre, et le poids et la vitesse de Blighterghast le fit traverser, étage après étage, l’architecture rhulique. L’écrasement des étages fut suivi d’une série de vibration qui fit s’effondrer les bâtiments et apparaître des lézardes le long des rues. Un cratère fumant, encerclé d’un brasier funeste, s’enfonçait de plus d’une trentaine de mètres dans les niveaux inférieurs de l’enclave. D’une pensée, Lortus se téléporta vers un pic surplombant l’enclave. Le sentiment de terreur grandissant en lui avait dominé son sentiment de conservation. Malgré le danger, il observa la tombe de fortune et vit Blighterghast ensanglanté et brisé. La force du dragon quittait son corps à fur et à mesure que son sang s’écoulait librement de sa gorge. Lortus eut un haut-le-cœur. C’était un coup dont l’alliance des dragons ne pourrait jamais se remettre.
Au-dessus de lui, Toruk poussa un cri d’exultation et reprit de l’altitude pour rencontrer le reste de sa progéniture condamnée.
« Krueger, imbécile », murmura Lortus en se retournant vers Blighterghast. « Tu nous as tous tués. »
CHAPITRE 29 : VICTORIA HALEY
En atteignant l’enclave naine, Haley avait anticipé les questions de la garnison locale sur le grand cube de métal que transportait Poêlon et les deux nyss corrompues qui voyageait avec eux, cependant, les quelques gardes rhuliques qu’ils rencontrèrent leur avaient signe sans commentaires, clairement trop choqués par les événements en cours pour remettre en question ou remarquer quoi que ce soit au-delà des insignes de rang dorés d’Haley. Elle avait appris par l’un de ces gardes, qui avait été très surpris, que la majorité des défenseurs de l’enclave avaient été déplacés vers les niveaux supérieurs pour faire ce qu’ils pouvaient, au cas où l’attention des dragons se porterait sur la colonie.
Lorsqu’ils quittèrent les tunnels s’étendant sous la Gare-Pointacier et l’enclave, l’atmosphère avait considérablement changé. Comme le bazar, chaque chambre de l’enclave avait été sculptée dans la pierre. Les piliers et les gradins étaient ornés de statues de figures rhuliques d’autrefois. Il était facile d’imaginer qu’ils n’étaient plus du tout en Cygnar, si différente était cette communauté.
L’enclave rhulfolk de Pointacier ne tourna pas pour se cacher. Chaque citoyen, quelle que soit sa profession était occupée à préparer la défense. Des marteaux et des armes à feu avaient été distribuées, des feux avaient été allumés et des armures enfilées. Alors qu’Haley et les autres continuaient vers la surface, ils suivaient les foules naines transportant des munitions pour l’artillerie et des seaux d’eau pour combattre les flammes. L’ensemble de la population s’activait devant l’urgence de la guerre.
Un grand impact secoua les lieux, jetant plusieurs nains au sol. Haley s’agrippa à une poutre de soutien pour garder l’équilibre. Les supports craquèrent sous la contrainte, et un fracas assourdissant vint de l’arrière alors qu’une avalanche de pierres remplissait la chambre précédente. Il y eut un silence tendu alors que tout le monde retenait son souffle en prévision d’être enterré vivant. Après un moment de panique, ceux qui avaient été renversés se relevèrent et poursuivirent leur tâche. Le fait que l’effondrement ne se soit pas étendu témoigne de la qualité de l’ingénierie locale.
« Qu’est-ce que c’était ? » Demanda Blaize. La warcaster s’était coupé le front dans le tumulte, et un filet de sang lui coulait dans l’œil, mais elle ne faisait pas attention à la blessure.
« Je ne sais pas » répondit Haley. Elle entra dans un état méditatif et se força à regarder les ténèbres des courants temporels qui les entouraient. Elle était certaines qu’elle était directement liée à la lutte des dragons, et leur puissance et leur corruption étant suffisament importants pour changer le destin de tous. Même sous-terre, elle était consciente de la présence omniprésente des ténèbres. Et après le dernier impact, la présence semblait encore plus grande. C’était comme si elle était devenue solide et dense, alors qu’avant elle n’était qu’ombre et inconsistance. L’œil de la tempête s’était rétréci, et n’était plus qu’une flamme vacillante dans une nuit sans fin. Elle pouvait suivre les fils qui dépassaient de la poitrine des personnes qui l’entourait que de quelques mètres avant de les perdre de vue. Le temps manquait, et au centre de la lumière déclinante se trouvant la prison de l’athanc et Saeryn. Le seul espoir résidait dans une antique et imprévisible entité.
« Vous ressentez quelque chose » dit Saeryn. « Vous ressentez un changement. »
« Haley hocha la tête. « Notre chance de changer l’avenir nous échappe. Nous devons nous dépêcher. »
« Peut-être devrions-nous extraire l’athanc », déclara Saeryn. « Nous pouvons parcourir plus de terrain sans attendre votre machine. »
« Non », dit Haley. « Pas avant que nous le devions. Je n’exposerais pas l’enclave à encore plus de corruption qu’il n’est absolument nécessaire. »
Saeryn et Rhyas échangèrent un regard. Clairement, Rhyas ne ressentait aucune empathie pour les nains, mais elle ne discuta pas. Ensemble, le groupe continua. Plus ils se rapprochaient de la surface, plus la boule au ventre d’Haley grandissait. Elle craignait qu’il soit trop tard.
CHAPITRE 30 : SAERYN
La lutte entre les dragons était en cours lorsque le groupé fit irruption dans les rues de l’enclave. Saeryn protégea ses yeux de la pluie battante avec sa main et examina les formes filantes des dragons au-dessus. Elle pouvait toujours sentir Everblight en elle – un sentiment de présence au sein de l’athanc qui lui conférait du pouvoir – mais le mur mental qu’elle avait dressé autour de ses pensées l’empêchait également d’accéder à ses connaissances. Et donc, elle ne put identifier chaque dragon avec la facilité d’autrefois. Pourtant, elle s’en souvenait suffisamment pour reconstituer le déroulement général de l’affrontement épique. Toruk était immanquable, une forme massive de noires écailles et de flammes vertes, ses ailes remplissaient les cieux. En regardant les autres grands dragons, elle réalisa qu’il y avait une absence très notable.
« Lequel d’entre eux est Blighterghast, » Demanda Haley.
Saeryn émit un bruit évasif et continua de balayer le ciel. « Je ne le vois pas. »
« Regarde encore. »
« J’en suis sûr. Il a fui ou a été tué. Il n’est pas là. »
« Impossible. » Haley serra les poings et observa le ciel.
Saeryn lança un regard noir à Haley, se demandant si elle n’avait pas eu tort d’épargner la warcaster de Rhyas. Elle prit une profonde inspiration et calma son esprit, laissant sa vision se concentrer sur les énergies corruptrices circulant autour d’elle avec une grande intensité. Sa magie était enracinée dans la corruption et puisée de l’athanc dans sa poitrine. Avec un peu d’effort, elle pourrait percevoir de telles énergies ici dans leur tapisserie naturelle. Le ciel était inondé de couleurs qui n’étaient pas des couleurs, chacune ayant une teinte légèrement différente. L’effusion de sang draconique en une telle quantité avait laissé d’innombrables ondulations d’altérations corrompues. La bataille était comme une danse de soleils sanglants gravitant autour d’un tourbillon de ténèbres qu’était Toruk.
Saeryn regarda les montagnes les plus proches et l’enclave meurtrie. Elle remarqua une puissante brume d’énergie corruptrice recouvrant l’air au-dessus de la colonie. Même à travers les pierres des bâtiments les plus proches, les vagues de radiations corruptrices arrivaient. Elles semblèrent s’estomper pendant qu’elle observait.
« Là », dit Saeryn, « au-delà de ces bâtiments. »
« Toujours en vie ? » Demanda Haley.
« Oui, mes affaiblis. Il bougerait s’il le pouvait. Toruk ne l’as pas dévoré, mais il viendra bientôt. » Elle regarda vers le haut, là où le Père des Dragons était clairement occupé par les autres, bien que leurs mouvements semblaient désespérés et frénétiques.
« Assurons-nous d’arriver en premier ! » Déclara Haley. Elle sprinta vers en avant avec sa paire de warjacks suivant de près. Les doigts de Saeryn tressaillirent alors qu’elle résistait à l’envie de jeter un sort sur le dos de la cygnaréenne. Seule la vision de la destruction d’Everblight et du règne de Toruk calma sa main.
Il semblait qu’elle avait besoin de la warcaster, du moins pour le moment. Les circonstances avaient tendance à changer rapidement au cours d’une bataille. Elle se demanda ce qui se passerait su elle pouvait absorber l’athanc maintenant et l’ajouter à son propre éclat. Elle avait été présente lors des luttes que Thagrosh avait traversées et n’était pas sûre de pouvoir supporter une telle transformation. Que se passerait-il si elle faisait cela alors que son esprit était coupé d’Everblight ? Le pouvoir l’amplifierait-elle seule, ou Everblight en bénéficierait-il alors qu’elle était intégrée ? Quoi qu’il en soit, elle n’était pas convaincue que leur plan devait se dérouler exactement comme la warcaster avait insisté. Elle resterait méfiante et prête à frapper à n’importe quelle occasion.
Elle se mit à courir et suivit Haley vers le lieu de chute de Blighterghast.
elric:
CHAPITRE 31 : VICTORIA HALEY
Il y eut un flou et le battement d’un manteau, puis les silhouettes capuchonnées de capes noires entourèrent Haley et les autres de tous les côtés. Certains se tenaient au milieu des décombres, et d’autres tournaient les coins des bâtiments et sur la rue pavée. Ils semblaient déplacés dans de tels environnements urbains malgré les sommets environnants. Ils s’appuyaient sur leurs vouges et guettaient de leurs visages encapuchonnés. Derrière eux, plusieurs formes se profilaient, telles des statues grossières en pierre et en bois avec des runes flamboyantes le long de leurs membres. Haley leva la main et stoppa ses warjacks et les autres survivants. Elle n’avait pas eu beaucoup de contacts avec les druides, mais elle savait qu’ils étaient dangereux.
Un coup de tonnerre et un éclair prédirent l’arrivée d’une autre cape noire qui apparut devant Haley. Des arcs de foudre crépitèrent sur son corps avant de se dissiper dans les airs. La qualité de l’ornementation de la robe de l’homme et du torque d’or qui entourait le cou dénotait une autorité supérieure à celles des autres. Il ne portait aucune arme visible, mais sa puissance était palpable. Le gris ardoise de ses pupilles prêtait de la sévérité à son regard, et sa tête chauve et son visage anguleux ne faisaient qu’ajouter à l’effet. Un tissu cicatriciel corrompu s’accrochait à son cou et à son visage.
« Je suis Lortus », dit le druide, fixant son regard sur celui d’Haley. « Veilleur des Montagnes du Mur du Dragon, un tout-puissant de mon ordre. Vous êtes assez loin. Remettez-moi l’athanc et quittez cet endroit. »
Haley brandit Écho et jeta un coup d’oeil aux capes noires qui avaient commencé à faire le tour du groupe, leurs armes prêtes si elles rencontraient une résistance. Sa connaissance des hiérarchies druidiques était limitée, mais il était clair que Lortus appartenait à leur échelon supérieur, ce qui signifiait qu’il avait probablement d’énormes pouvoirs sur le monde naturel. Elle n’était pas certaine que c’était un combat qu’elle pourrait gagner, en particulier avec des forces aussi épuisées : Blaize n’avait toujours pas sa turbine arcanique et les warlocks n’avaient pas de warbeasts. Elle n’avait aucun moyen de mesurer la force des capes noires environnantes. Blaize et Corley se tenaient dos à dos, et Saeryn et Rhyas copièrent rapidement la paire.
« Et alors ? Je vous donne simplement la pierre parce que vous l’exigez ? Je ne reconnais pas votre autorité ici. A quoi vous sert la pierre de coeur du dragon ? » Demanda Haley.
« Cette affaire est bien au-delà de ton entendement. Ce que je fais avec l’athanc ne vous concerne pas », déclara Lortus. « Je demande seulement pas courtoise. »
« C’est vous qui agissez par ignorance », dit Haley, sentant son tempérament monter. Elle n’était pas une personne à sous-estimer ou à ignorer. « Je peux voir l’avenir. Pouvez-vous prétendre la même chose ? Je sais ce qui se passera si nous échouons. Si l’un d’entre nous veut survivre, la pierre doit aller à Blighterghast. Tout autre voie mène à la mort et transforme l’Immoren occidental en désert de cendres. »
Ses yeux se plissèrent lorsqu’il comprit ses paroles. Manifestement, il ne la croyait pas. « Personne ne peut voir l’avenir. Blighterghast est tombé. Rien de ce que vous pourriez faire maintenant ne changera cela. L’athanc doit être emmené loin d’ici, loin de Toruk. C’est notre seul espoir d’atténuer ce désastre. Je suis le seul à pouvoir y parvenir. Abandonnez l’athanc maintenant ou périssez. »
« L’éloigner nous condamnera tous », insista Haley. « je sais ce que je dois faire. »
« Ce que je ne peux pas me permettre », répondit Lortus.
« Alors, nous sommes dans une impasse », répondit Haley, puisant dans sa puissance. Elle se prépara à prendre le contrôle de l’écoulement du temps et à lancer une attaque rapide, dans l’espoir de prendre l’initiative.
Il y eut un crépitement de tonnerre et d’éclair sur le corps de Lortus tandis que le pavé sous ses bottes noircissait et fumait. Le tout-puissant n’avait aucun mouvement que Haley puisse remarquer et pourtant une paire de lames d’obsidienne incurvées apparut dans ses mains.
Le tout-puissant bondit en avant, les lames dans un tourbillon de mouvement. Malgré son apparence vieillissante, il se déplaçait avec une rapidité surprenante, et il couvrit rapidement la distance qui le séparait d’Haley tandis qu’une bulle de distorsion temporelle l’enveloppe, accélérant ses mouvements et lui offrant la possibilité d’esquiver les premiers coups. Haleu recula et leva Écho au niveau du druide venant en sens inverse, bien qu’il se révélât presque aussi insaisissable malgré sa magie. Thorn s’avança pour se tenir à ses côtés. Elle se prépara à l’assaut d’ouverture, mais la morsure des lames d’obsidienne ne vint jamais.
Il y eut un coup de tonnerre et un éclair alors que plusieurs des capes noires derrière Lortus étaient électrifiés, leurs robes fumant alors qu’ils s’effondraient sur le sol. Une massive rafale de vent frappa Lortus à la poitrine et projeta le tout-puissant à vingt verges en arrière, sur la facade d’un bâtiment adjacent, le corps du druide brisant la pierre. Haley et les autres se tournèrent vers la source de l’inattendue attaque et virent une autre cape noire, chauve amis plus jeune, ses pieds bottés et sa robe flottante planer au-dessus du sol. Il tenait devant lui une lance dentelée, la pointe braquée sur l’endroit où Lortus s’était tenu. Les armes prêtes, des constructs en pierre et des capes noires émergèrent des décombres dans le dos du combattant.
« Lortus est à moi », dit le nouvel arrivant à ses forces, en regardant le tout-puissant pendant qu’il s’exprimait. Il jeta un regard à Haley. « Livrez l’éclat à Blighterghast. » Comme Haley et les autres ne partirent pas immédiatement, il ordonna : « Aller ! »
CHAPITRE 32 : KRUEGER
Krueger regarda l’étrange alliance de cygnaréens et de nyss corrompus se précipiter vers le cratère ou Bligterghast était tombé. Il projeta des éclairs sur les quelques capes noires qui se tournèrent pour les poursuivre Ses propres forces avaient rejoint le combat, et maintenant les rues en dessous de lui étaient remplies de druides mineurs qui se lançaient des sorts ou échangeaient des coups avec leurs voulges tandis que les massifs constructs frappaient les forces adverses à coups de poing de pierre. Ce n’était pas la première fois que Krueger allait à l’encontre de la volonté de l’ordre, mais attaquer ouvertement un tout-puissant était une étape qu’il n’avait pas encore franchie Il était regrettable qu’il ait dû en arriver là. Krueger avait espéré éviter de tuer les siens. Il était devenu un véritable loup solitaire, bien que son programme ressemble à celui du Cercle – si seulement ils pouvaient se résoudre à la voir. Le changement exigeait des risques qu’ils n’étaient pas prêts à prendre.
Lortus s’élança dans les airs et se rapprocha de Krueger. « Arrogant comme toujours. Que comptes-tu faire. Me tuer ? »
« Si je le dois », cracha Krueger. « Trop de choses dépendent de ça. Toutes les barrières doivent être levées. »
« L’alliance des dragons se déchaîne sur Caen, les lignes de force subissent des dommages incalculables, et Toruk lui-même et revenu sur le continent pour la première fois depuis près de deux mille ans. Dans la recherche d’une solution pratique à nos problèmes, tu les as multipliés par cent ! »
« Vos interminables demi-mesures m’ont forcé la main. Interviens et je te montrerai ma détermination. »
Lortus secoua la tête, le visage solennel. « Lorsque le conseil à requis ton exécution, j’ai pris la parole pour te défendre. Clairement, je me trompais. Tu es devenu un fardeau, Seigneur des Tempêtes. » Le tout-puissant préparait ses lames d’obsidienne. « Je ne peux pas te laisser vivre. »
Krueger pointa le bout fourchu de sa lance, Langue du Ver, vers son adversaire. « Qu’il en soit ainsi. »
Le tout-puissant avança avec la vitesse et la ténacité des éléments qu’il commandait, pressant ses lames vers les points faibles de l’armure de Krueger. Krueger s’écarta, frappa l’une des lames d’obsidienne de travers avec Langue du Ver et se cacha de l’autre avec sa cape. Une explosion d’énergie le rattrapa dans le dos, propulsant une douleur dans sa colonne vertébrale et soulevant son corps dans les airs.
Au moment, où Krueger récupéra, Lortus était monté plus haut dans le ciel et avant utilisé l’altitude pour appuyer l’attaque, plongeant avec ses lames allongées telle les serres d’un faucon. Un sort hâtif écarta Lortus venant en sens inverse, mais pas avant qu’une de ses lames ne morde l’épaule de Krueger, tranchant sans effort les muscles et les tendons et rendant le bras gauche du Seigneur des Tempêtes flasque. Une sylve, en dessous, explosa en une pluie de fragments de pierre et d’éclats tandis que Krueger redirigeait sa blessure à l’épaule et récupérait l’usage de son bras. Les forces adverses avaient moins de sylve, et il en était reconnaissant. Lortus était peut-être le plus récent des tout-puissants, mais son habilité et sa ruse ne devaient pas être sous-estimées.
Les domaines de contrôle élémentaire de Lortus étaient similaires à celles de Krueger, ce qui ajoutait à la difficulté de l’affronter. Krueger pouvait utiliser le vent contre son ennemi, mais la foudre n’avait aucun effet. Mais par la même occasion, son adversaire faisait face au même défi. Lortus était bien plus mortel dans une mêlée serrée, cependant, et Krueger devait donc garder ses distances. Chaque fois que Lortus se rapprochait, il créait une nouvelle occasion pour Krueger d’être gravement blessé, surtout s’il le débordait.
Lortus croisa ses lames et des runes fleurirent devant lui pour libérer un souffle concentré de force cinétique brute. C’était une magie que Krueger n’avait jamais observée auparavant, et il fut pris au dépourvu. Il subit le sort, cette fois-ci de face, et il sentit ses côtes se briser en éclats alors qu’elles absorbaient la force. Il chuta et frappa le toit d’une tour de guet rhulique, attirant les cris de surprises des nains qui cherchaient un abri à l’intérieur. Il roula sur le toit et repris ses repères, stoppant sa chute en concentrant son esprit l’acte de vol. Il dévia les dommages infligés à ses côtés et un construct et monta en flèche, chargeant et menant avec la pointe fourchue de Langue du Ver. Lortus accueilli le défi avec autant d’enthousiasme.
Les druides volaient dans les airs, armes à la main, leurs manteaux flottant derrière eux, et lorsqu’ils se rencontrèrent, un coup de tonnerre retentit sur les remparts et couru le long des rues. Lame et lance s’affrontèrent dans une rafale de feintes et de coups, et la bataille entre les deux s’est transformé en autre chose : la rencontre de deux fronts d’orage. Des éclairs pleuvaient autour d’eux alors qu’ils se séparaient et se rejoignaient, manœuvrant avec la puissance des éléments tout en cherchant un avantage.
Peut-être valait-il mieux que tu t’éloignes de l’ordre » dit Lortus moqueur. « Tu n’as pas la puissance et la maîtrise de soi pour devenir un tout-puissant. »
Krueger serra les dents, un air renfrogné envahit son visage. Il lança Langue du Dragon sur son adversaire avec une férocité renouvelée. Au début, il ne voulait rien d’autre que de tromper Lortus jusqu’à ce que Blighterghast ait consommé l’athanc libre, mais l’idée de tuer le tout-puissant gagnait en popularité.
CHAPITRE 33 : VICTORIA HALEY
« Quelle direction ? » Le souffle d’Haley était irrégulier et les mots ne venaient pas facilement. Alors qu’ils se rapprochaient de Blighterghast, l’air s’était alourdi par la présence de l’intense corruption du dragon. Sa puissance dépassait tout ce qu’ils avaient ressenti à proximité même de l’athanc non protégé. Le corps de ce dragon semblait émaner un rayonnement corrupteur comme la chaleur d’un haut fourneau. Son sang répandu amplifiait la saleté dans l’air.
Une sensation de brûlure s’était profondément installée dans les poumons d’Haley comme si elle avait inhalé de la fumée d’un incendie, et l’odeur de soufre était omniprésente. Elle se déplaçait plus lentement et elle sentait que son contrôle sur l’écoulement du temps était devenu ténu. La corruption affectait son pouvoir. Les fils du destin n’étaient plus clairs à ses yeux et ce n’était qu’en se concentrant de manière forcée qu’elle pouvait faire appel à ses talents de warcaster. Cela lui rappela ce qu’elle avait ressenti lorsqu’elle avait été affectée par le poison cryxien qui l’avait privée de ses pouvoirs. Le souvenir des jours passés à l’infirmerie de Port Bourne lui revenaient en mémoire.
« Nous sommes proches. » Dit Saeryn, semblant être exemptes des mêmes difficultés. Être corrompue semblait avoir ses avantages.
Ils continuèrent à avancer sur quelques verges seulement quand Haley entendit le bruit de l’acier sur la pierre et se retourna pour trouver l’aumônier Corley à genoux, sa respiration laborieuse. Il pressait un point gantelé contre sa bouche pour étouffer une quinte de toux qui rapidement dégénéra et laissa sa lèvre inférieure éclaboussée de sang. « Trop proche pour les mortels normaux », déclara Saeryn avec indifférence. Elle regarda Corley d’un regard froid. « La présence de Blighterghast le tuera, je pense. Le mékanicien aussi. » Elle fit un signe de tête en direction de Strangewayes. Plus que jamais, Haley voulu frapper Saeryn au visage. Le comportement insensible de la nyss l’offensait, mais elle savait que Saeryn et Rhyas avaient encore leur rôle à jouer.
« je vais bien », déclara Corley en se redressant et en se tenat droit. Pendant un moment, il parut stable, mais un autre accès de toux le frappa presque immédiatement – celui-ci pire que le précédent. Il était mal et son visage était devenu pâle.
« Saeryn a raison », dit Harley, regardant Blaize, Corley et Strangewayes et détestant la façon dont les mots sonnaient pendant qu’elle les prononçait. « Sans champ d’énergie, vous trois n’y arriverez jamais. Vous n’irez pas plus loin. »
L’indignation de Blaize était évidente. « Maintenant, attends une minute. Si tu penses- »
Haley leva la main pour faire taire Blaize. « Ce sont mes ordres. » Elle savait qu’elle demandait beaucoup au Chevalier du Prophète. Techniquement, ils étaient de rang équivalent, tous les deux warcaster, et c’était la mission de Blaize dès le début. Haley espérait que son ordre permettrait à l’autre femme de se retirer sans perdre sa fierté ou son honneur.
Blaize se pencha pour parler à Harley dans un murmure cassant. « Ces deux-là vous trahiront dès que tu leur tourneras le dos. »
« Si elles ont l’intention de me trahir, nous avons déjà perdu », déclara Haley. « Tu en as assez fait. Faits sortir Corley d’ici pendant que tu le peux. »
« Très bien. Un de ces jours, tu réaliseras que tu ne peux pas tout gérer seul. » Sur ce, elle se détourna et se déplaça pour aider Corley.
Un sentiment désagréable s’installa au creux de l’estomac d’haley alors qu’elle repartait aux côtés de Saeryn et Rhyas. Elle avait perdu des alliés depuis qu’elle avait quitté Port Bourne et nombre d’entre eux étaient maintenant morts. Alors qu’elle se dirigeait vers le lieu de chute de Blighterghast, elle le faisait en compagnie de celles qu’elle ne connaissait pas et en qui elle avait confiance. Mais sa vision lui disait qu’elle devait se fier à ces nyss. Sinon, seuls Poêlon et Thorn restaient. Les ‘jacks suivaient de près, des gouttes de pluies s’évaporaient de leur châssis au contact, en de petites bouffées de vapeur.
La température montait à chaque pas, et la chaleur craquelait les pavés comme si du magma coulait juste en dessous. Alors que d’autres parties de l’enclave étaient animées d’activités, le quartier où Blighterghast avait atterri était vide de vie, les remparts vacants veillant la veille silencieusement sur les rues mortes. Une profonde palpitation frappa les tempes d’Haley, et une douleur s’empara de son corps et s’installa dans ses articulations comme des éclats de verre se broyant contre les os. Maintenir sa connexion avec Thorn et Poêlon était devenu difficile, mais en aucun cas impossible, et elle surveillait les menaces à travers les yeux supplémentaires.
Saeryn et Rhyas avançaient à grands pas, leurs corps corrompus habitués aux énergies rayonnant du dragon abattu. Le duo longea les murets et traversa des bâtiments en ruine avec le même mouvement unifié qu’elles avaient utilisée au cours de la bataille.
Le cratère occupait l’espace d’un pâté de maisons de Corvis, et une lueur émanait de ses profondeurs. Des cendres et des étincelles s’échappaient du trou sans être gênées par la pluie, et une douce vapeur s’évaporait des tas de décombres environnants. Haley toussa violemment dans sa main jusqu’à ce que sa paume soit rouge et sa gorge sèche. Ses yeux brûlaient à cause de la fumée, et elle se battit pleurer des larmes.
Du bord du cratère, elle pouvait voir les nombreux niveaux souterrains de l’enclave séparés et révélés comme les différents étages d’une maison de poupée pourraient l’être pour un enfant. Les contours des pièces exposées et des tunnels exposés brûlaient et s’effondraient vers l’intérieur, tiré vers le fond de la fosse béante autour de laquelle elles se blottissaient maintenant. De temps à autre, une dalle de pierre ou un support en bois se détachait et tombait bout à bout dans l’abîme enflammée. Au fond, se trouvait Blighterghast, son corps brisé par la longue bataille et sa chute subséquente.
Des plaques d’écailles noires recouvraient le corps du dragon, et les espaces entre chaque plaque rayonnaient d’une lueur orange qui pulsait et s’estompait comme le lent battement d’un coeur. De grandes entailles marquaient le corps et les ailes de la créature divine et le sang provenait d’une blessure à son cou et s’était accumulé au fond du cratère. Du sang qui s’était figé, un certain nombre de rejetons draconiques particuliers s’étaient formés, leurs corps asymétriques. Du sang de dragon saumâtre s’accrochait à leur corps en brins épais et coagulés qui se détachaient aux derniers moments de la genèse.
Des dizaines de petits et de grands dragons erraient sur le corps de Blighterghast, reniflant l’air chargé de cendres et étirant leurs appendices nouvellement formés. Certains de leurs membres étaient déformés et inutiles, mais les barbes, les serres et les dents ne manquaient pas. Ils ne montraient aucun intérêt à se frayer un chemin depuis les profondeurs du cratère ou à explorer les tunnels environnants. Haley se demanda s’ils servaient de dernière ligne de défense à Blighterghast dans son état d’affaiblissement.
« Je ne m’attendais pas à cela », déclara Saeryn. Elle s’accroupit au bord du cratère et regarda les créatures malformées. « Nous ne l’avons pas vu lors de la bataille avec Prymalfic. Leurs imperfections sont omniprésentes. Ils sont inférieurs aux rejetons d’Everblight. »
« Mais toujours dangereux. Il y en a trop », déclara Haley. Elle était douloureusement consciente de l’effet de la corruption sur son corps.
« Plus nous attendons, plus ils se renforcent », répondit Saeryn. Pendant qu’elles regardaient, certains des rejetons nouvellement éclos se formait, de leurs membres poussaient de nouvelles barbes et des armes.
Elle s’approcha du cube de métal contenant l’athanc, passant sa main sur le côté, à la recherche du mécanisme qui ouvrirait la prison.
Haley saisit le poignet de Saeryn. « Attends. Il y a quelque chose que je dois faire en premier. »
Saeryn se libéra de l’emprise d’Haley avec un regard meurtrier. « On n’a pas le temps. »
Haley fit un signe de tête. « Un moment. » Elle retourna au cratère, les orteils de ses bottes suspendus de façon précaire au-dessus du rebord. Ses poumons continuaient de brûler et elle frappa un poing sur ses côtes pour protéger son corps de la douleur. Elle ferma les yeux face à la chaleur chatoyante et aux panaches de cendres, et avec toutes ses réserves mentales, elle projeta son esprit dans les profondeurs du cratère. La corruption pesait sur elle, menaçant d’étouffer son talent arcanique, mais elle le combattit.
Elle était seule dans sa descente mentale, une plongeuse naviguant dans les courants de soufre et de cendres. Dans l’instant suivant, une conscience d’une terrible puissance se fixa sur elle, faisant pivoter son regard vers l’endroit où elle se trouvait en équilibre au bord du cratère. Elle avait atteint l’esprit de Blighterghast, et dans son était blessé, sa rage était absolue. Un pic de douleur traversa son esprit, et en un instant, le dragon passa à travers le crâne d’Haley. Elle put sentir une intelligence extraterrestre parcourir les événements des derniers jours comme s’ils n’étaient rien de plus que des pages dans un tome. Son corps s’était rigidifié et, durant un bref instant, elle crut qu’elle pourrait passer par-dessus le bord du cratère et tomber dans les décombres en dessous.
La voix du dragon explosa dans son esprit avec une force insondable : ABANDONNE L’ATHANC OU MEURT. Comme Nidoboros l’avait fait à Gare Pointacier, Blighterghast menaçait de prendre le dessus sur son esprit. Elle aspirait à lâcher prise, à se livrer à Blighterghast, à se libérer de l’agonie.
Une voix mentale lui parvint, douce et familière bien que ce soit la première fois qu’elle l’entendait. Elle reconnut l’oratrice comme étant Future. « Cela aussi, nous le supportons. Tu es plus forte qu’il ne le croit. » Chaque mot de la voix semblait insuffler à Haley la force même dont elle parlait, et du plus profond d’elle-même, elle puisait l’étincelle qui l’avait rendu spécial, avant même ces premières années à l’abbaye ou ses pouvoirs s’étaient manifestés. L’obstination de sa jeunesse s’était développée en elle, couverte de poussière et d’éraflures, et un sentiment de contrôle revint dans ses membres. Elle ouvrit les yeux et baissa les yeux sur son poing fermé, le poing qui n’avait été qu’une imitation mékanique de la réalité jusqu’à récemment. Je suis forte, pensa-t-elle. Je ne suis pas arrivée à ce point pour céder.
L’ATHANC OU LA MORT, dit encore la mort, en faisant claquer ses dents dans leurs cavités.
« Je ne le ferai pas », dit Haley, en prononçant les mots à voix haute alors qu’elle le pensait. « Si tu possèdes encore la force de me détruire, je te suggère de le faire. Sinon, je suis prêt à négocier. » Saeryn et Rhyas se tenaient à ses côtés, le regardant avec incrédulité. La tête de Saeryn était légèrement inclinée, comme si elle écoutait. De toute évidence, elle aussi pouvait entendre la voix mentale de Blighterghast.
Un autre éclat de rage de Blighterghast inonda l’esprit d’Haley, menaçant de prendre possession, mais celle fois, elle était prête. Elle blinda ses pensées avec un mur de distorsion temporelle et opposa sa pleine capacité mentale aux efforts de Blighterghast. Sa barrière mentale tint.
Les douleurs à la base du crâne se dissipèrent, tout comme les maux ayant affligé son corps. La concentration de l’énergie corruptrice avait diminué. Après une longue pause, la voix du dragon revint. « FAITS TA DEMANDE. RAPIDEMENT. »
Haley expira un souffle qu’elle n’avait pas réalisé retenir et prit un moment pour organiser ses pensées. « Si nous vous donnons ceci, le Cygnar doit être protégé. Tu ne lui feras aucun mal, et tu interviendras si tes parents ou ton créateur s’y oppose. Si je t’aide dans ta guerre, tu dois devenir notre bouclier. D’accord ? »
Il y eut un blanc, et Haley fut sur le pont de répéter ses demandes quand la voix du dragon lui emplit la tête. « C’EST FAIT. MAINTENANT, DONNE-MOI L’ATHANC. »
« J’ai une autre exigence », dit Saerun, s’avançant vers le rebord, à côté d’Haley et regardant dans le cratère fumant. Haley sentit la température monter comme si quelqu’un avait attisé une fournaise, et une partie de la douleur revint dans ses articulations.
ASSEZ DE CES JEUX, déclara Blighterghast.
Haley regarda Saeryn puis Rhyas. Elle se calma, sachant que cette deuxième demande était susceptibles de provoquer la colère du dragon. Elle ne s’était pas attendue à ce que Saeryn s’insère dans les négociations, mais peut-être que l’attrait d’une telle opportunité qui l’avait incitée à coopérer.
« Everblight et ses serviteurs ne doivent pas être blessés », entonna Saeryn. Un éclair de rage apparut dans ses yeux, trahissant les émotions bouillonnantes sous son extérieur calme. « Pas de représailles pour le mal passé. Pyromalfic oublié. Annule ta chasse et je te donnerai la pierre de coeur. »
Une bouffée de chaleur rayonna depuis le cratère, et le sol sous les pieds d’Haley trembla. « Une intense pression s’exerça sur son crâne comme un étau, et sa vision se vacilla. Un coeur de hurlement draconique s’éleva des gorges des rejetons draconiques déformé.
JE DÉVORAI LE CŒUR DU TRAITE MORCEAU PAR MORCEAU. SON SORT EST DÉCIDÉ.
« Ce sont mes conditions », cria Saeryn, refusant d’être intimidé par la rage du dragon. Sa propre volonté devait être aussi puissante que celle d’Haley, car elle endura l’assaut. « Accepte ou péris. »
JE REFUSE TES PETITES EXIGENCES, dit Blighterghast. Saeryn fit la grimace, et Haley sentit le dragon attaquer son esprit dans le but de prendre le contrôle, mais ils étaient toux deux conscients de sa tactique. Le dragon devenait de plus en plus faible.
Haley redressa les épaules. « Alors, l’athanc va à Toruk », dit-elle en jetant un coup d’oeil à Saeryn et en lui faisant un bref signe de solidarité, ce que les nyss ignorèrent. « Et le sacrifice de Nidoboros ne servira à rien. Quelle honte, car c’est son courage qui vous a aidé à bannir Toruk du continent il y a si longtemps. »
Un atre blanc se produisit, et Haley se demanda si les négociations étaient conclues ou si le dragon réfléchissait à ses paroles. Même si Blighterghast acceptait les exigences du Saeryn, Haley ne savait rien de la loyauté des dragons. Elle était forcée de reconnaître la très réelle possibilité qu’elle soit brûlée vive au moment où Blighterghast se rétablirait, accord ou non. Il ne restait cependant aucune option. Et au fond, Haleyait que le dragon serait en quelque sorte lié par ce pacte. Tous les fils du destin convergeaient ici.
JE VAIS ÉPARGNER LE TRAITE, déclara Blighterghast. APPORTE NIDOBOROS.
CHAPITRE 34 : SAERYN
La main de Saeryn erraient sur la prison de l’athanc, traçant des runes et exerçant une pression alors qu’elle cherchait le mécanisme libération. Elle pouvait sentir la conscience de Blighterghast s’attarder sur sa conscience, son impatience presque tangible. Les éclairs de la tempête donnèrent un relief très net aux runes du cube.
Une partie de la surface du cube s’enfonça avec un clic audible sous son toucher, suivi du long sifflement de décompression. Saeryn recula, et les faces du cube se séparèrent, s’éloignant l’une de l’autre en lévitation. Le cube se brisa, révélant la forme cristalline incandescente de l’athanc en son centre.
Les facettes de la pierre du coeur étaient d’un noir profond avec des bords qui scintillaient d’argent lorsque la pierre captait la lumière. Elle se souvint de la saisie de l’ahtanc de Pyromalfic lors de la Bataille du Château des Clés. Ensuite, ils avaient fui vers le nord, et elle avait escorté Thagrosh à travers les passages sombres et oubliés sous Ios. Là, elle avait vu le prophète souffrir alors qu’il luttait pour absorber l’athanc dans son propre corps au nom d’Everblight. C’était la première fois que quelque chose de ce genre était tenté – l’essence même d’Everblight était divisée et dispersée parmi ses warlocks, le morceau de Thagrosh était incomplet. Le dragon avait résisté à son anéantissement avec chaque once de sa volonté, et Thagrosh avait failli mourir au cours du processus, à peine capable de soutenir l’effusion d’énergies corruptrice. Debout, à côté de cet athanc immaculé, elle ressentait un pouvoir d’un calibre entièrement différent. Nidoboros était bien plus puissant que Pyromalfic, elle en était certaine.
Saeryn effleura timidement l’athanc du bout des doigts, et une vague d’énergie corruptrice parcourut son bras et son corps. Des épines et des écailles fraîches menaçait de surgir dessous sa peau. Pour conserver sa forme, elle devait se concentrer. Elle utilisa sa capacité à canaliser ces énergies pour forcer la corruption étrangère à glisser sur sa peau mais pas à la pénétrer.
Dans son était d’affaiblissement, Blighterghast ne pouvait pas lever la tête pour consommer l’athanc seul. La pierre devait être introduite dans le corps du dragon par l’une des nombreuses blessures, ce qui posait un nouveau problème. Les rejetons issus du sang du dragon n’était pas sous son contrôle, donc un warjack ne pouvait pas transporter l’athanc seul sans risquer la destruction de la machine par les rejetons hors de contrôle, pas les encombrantes machines ne puissent de toute façon gérer la descente. Elles devraient livrer l’athanc à Bligtherghast elles-mêmes, et elles devraient le porter.
« C’est possible ? » Demanda Haley. La warcaster se tenait à distance, s’appuyant lourdement sur sa lance. Elle lui fallait tout sa volonté et tout son pouvoir pour résister à la fois ç la corruption du dragon abattu et de l’athanc exposé.
« Oui », prononça Saeryn. « Nous le devons. » Ses paroles étaient remplies d’incertitude. Elle jeta un coup d’œil à sa sœur, qui regardait stoïquement dans le cratère, observant les rejetons de Blighterghast en bas. Elle avait prononcé peu de mots depuis que Saeryn avait décidé de séparer leur esprit de celui d’Everblight. Saeryn avait plus de mal que d’habitude à lire l’humeur de sa sœur. Leur relation avait été compromise auparavant, et finalement, elle s’était rétablie. Elle ne doutait pas qu’elles pourraient recommencer, mais ce n’était pas le moment de rester divisées. « Rhyas et moi partageront ce fardeau. »
Rhyas fit un signe de tête, ne détournant pas le regard du cratère. « La force de corruption de l’athanc est trop grande pour une seule. »
« D’accord », dit Haley. Elle rejoignit Rhyas au bord du cratère, agrippant son arme à deux mains malgré sa fatigue apparente.
« Non », dit Saeryn. « Nous devons nous porter la pierre. Être à proximité pourrait suffire à vous tuer. »
« Je n’ai pas l’intention de porter quoi que ce soit », répondit Haley, de la détermination dans sa voix. Deux projections éthérées prirent forme de chaque côté d’elle, des versions plus jeunes et plus anciennes d’elle-même. « Je vais gérer la défense. »
CHAPITRE 35 : KRUEGER
Krueger menait avec Langue du Ver, la faisant passer à travers l’espace entre lui et son adversaire. Lortus avait continué à l’insulter, l’incitant à pousser son attaque, et bien que Krueger savait ce qu’il faisait, il était difficile de résister à l’envie de vaincre l’imprudent tout-puissant qui mettant tant l’accent sur les questions de rang et d’ordre. Beaucoup de choses avaient changé depuis que Krueger s’était engagé sur sa propre voie. Il était le Seigneur des Tempêtes, et il ne serait pas traité comme un inférieur.
Lortus lev ses lames pour parer Langue du Ver et chercha s’approcher pour une ouverture, mais Krueger glissa hors de portée, flottant sur les courants de l’air et utilisant à son avantage la plus grande longueur de son arme. Le tout-puissant avait débuté le combat avec force, en infligeant plusieurs blessures graves très tôt, mais le druide aîné ne s’était pas impliqué dans la bataille aussi activement que Krueger ces dernières années, et son manque d’endurance commença à se manifester. Lortus serait contraint de céder du terrain lors de la prochaine attaque de Krueger, en faisant marche arrière à travers les torrents de pluie qui secouaient les deux formes flottantes. De temps en temps, le duo échangeait des rafales de vent ou de force arcanique qui envoyaient l’un ou l’autre se précipiter à travers un mur ou s’écraser dans les rues, mais ils se rétablissaient et revenaient au corps à corps.
Il n’y avait aucun signe d’activité d’où les autres étaient allés affronter Blighterghast, rien n’indiquant que le dragon avait reçu l’athanc. Krueger ne pouvait pas prendre le risque de s’éloigner du Lortus pour en savoir plus. Dans le ciel, les dragons continuaient à se battre, mais ils étaient devenus frénétiques et défensifs, œuvrant principalement à échapper à leur créateur et n’encaissant que peu de coups en retour. La perte de leur chef les avait laissés dans le désarroi.
Le coup d’une lame échappa aux défenses de Krueger et mordit son avant-bras, faisant couler le sang pendant un moment avant qu’il ne soit expédié vers une sylve. Le construct s’effondra, incapable de se maintenir après avoir encaissé autant de blessures similaires. Peu de ses créations en pierre demeuraient, mais maintenant toutes celles de Lortus avait disparu. L’escarmouche entre ses forces et les fidèles de Lortus ralentissait, chaque camp ayant subi des pertes. Elle allait bientôt prendre fin. Une ouverture lui permettrait de neutraliser Lortus, et il lui faudrait décider s’il était vraiment prêt à mettre fin à al vie du tout-puissant et à faire face aux conséquences qui en découleraient. En fonction de l’issue de Blighterghast, le fait que la cape noire vive ou meure n’aurait peut-être pas d’importance. Néanmoins, Krueger ne reculerait pas. Sa fierté obligeait Lortus à être brisé et humilié à ses pieds.
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CHAPITRE 36 : VICTORIA HALEY
Le corps d’Haley n’était que douleur, chacun de ses pas l’élançait alors qu’elle descendait dans le cratère. Pour la plupart, les flancs étaient des chutes à pic, truffé d’extrémités effondrées de tunnels et de chambres exposées, trop raide pour grimper, mais après avoir examiné leurs options, le groupe avait repéré une série de pentes formées de dalles de pierre et de gravats compressés qui serpentaient vers le bas. C’était sur cette précaire trajectoire qu’Haley se dirigeait maintenant. Passé et Future se déplaçaient à ses côtés, et à une dizaine de pas derrière Saeryn et Rhyas, la pierre de coeur de Nidoboros tenue par Saeryn. C’était telle qu’Haley l’avait vu dans sa vision.
Des vrilles de matière organique jaillissaient de l’athanc. Maintenant libéré de sa prison, l’athanc cherchait à reformer son corps. La chair de Saeryn ondulait et des épines traversaient sa peau avant d’être refoulée sous la force de volonté de la warlock. Rhyas s’appuya contre elle grinçant des dents alors qu’elle drainait l’excès de corruption de sa sœur et luttait pour expulser l’énergie dans leur environnement. Haley pouvait voir cette énergie s’élever en vagues irisées qui ressemblaient à un mirage de chaleur.
Thorn et Poêlon avaient été laissés pour compte, le chemin était trop fragile et incertain pour que leur masse puisse s’y retrouver. Haley sentait que son lien avec les warjacks s’amenuisait à mesure que leur distance augmentait. La dernière pensée du cortex de Thorn avait été celle de l’anxiété. Sentant son combat, le warjack était mal à l’aise d’être séparé pendant cette période de danger. Haley avait rassuré la machine de son rapide retour, mais en vérité, elle n’était pas convaincue qu’elle ressortirait du cratère. La mort l’avait épargnée une fois, et elle se demandait si ce n’était pas le cas pour qu’elle puisse donner sa vie ici, en échangeant son existence pour la préservation de Cygnar.
À la vue d’Haley dévalant l’éboulement, le rejeton draconique le plus proche siffla et cria, tournant sa tête sans yeux dans sa direction. Ils virent à elle par deux ou trois, sprintant, rampant, clopinant sous le fardeau de membre déformés. Passé courait en tête, son corps immatériel bondissant par-dessus les pierres échevelées, et tira sur un rejeton approchant en sens inverse avec des frappes cinétiques qui écrasèrent leurs corps grotesques en gerbes d’ichor noir et d’organes méconnaissables. Futur suivit avec des barrages d’éclairs bleus qui rebondirent d’un rejeton à l’autre.
Un quadrupède à trois bras et deux têtes serpentines traversa Passé et Futur, et Haley puisa dans ses dernières réserves de sa force déclinante pour enfoncer Écho profondément dans la poitrine de la créature, en l’amenant sur le côté de la pente où il tomba en hurlant dans la foule de rejetons ci-dessous. Derrière elle, Saeryn et Rhyas se battaient pour contenir l’excès de corruption qui sévissait dans leur corps. La douleur déformait leur visage et elles se déplaçaient avec la démarche boiteuse des personnes âgées. Si les rejetons les atteignaient, elles n’étaient pas en état de se défendre – toute leur concentration était nécessaire pour conserver leurs formes intactes.
Au moment où elles atteignirent le fond, les rejetons draconiques étaient devenus frénétiques, furieux de l’intrusion dans le lieu de repos de leur créateur. Peu importe que Blighterghast se réjouisse de leur approche – le dragon était si proche de la mort qu’il ne pouvait pas maîtriser ces protecteurs engendrés par le sang. Ils avancèrent avec des dizaines de voix hurlantes, clamant sur l’imposant cadavre du dragon et braquant des griffes et des membres qui se pliaient dans de mauvais angle.
Passé et Futur avançaient à grand pas, leurs éclairs et leurs explosions cinétiques ouvrant un chemin à travers les rangs des rejetons. Haley embrocha une bête née avec des ailes inutiles et ensuite balaya le fer d’Écho à travers le cou d’une autre. Ses muscles lui faisaient mal et ses jambes menaçaient de ployer sous elle à chaque pas, et seule la vue de la proximité de Blighterghast la maintenait en mouvement.
Haley sortit son canon à main et détruisit le rejeton qui avait traversé ses projections. Elle luttait pour rester debout alors qu’elle trébuchait sur le chemin accidenté, se concentrant sur le fait de mettre un pied devant l’autre pendant que Passé et Futur se battaient. L’effet de la corruption s’aggrava alors qu’elle s’approchait du corps du dragon tombé et des grandes mares de sang empoisonné qui s’était répandu.
Un jet de bile provenant de l’une des nombreuses gueules dentelée frappa le champ d’énergie d’Haley, qui vacilla et s’évanouit. Un second jet recouvrit son armure. Des plaques d’acier se déformèrent et fondirent sous l’acide de la créature. D’autres rejetons heurtèrent Haley et l’envoyèrent s’étendre avant de sortir leur serres faucheuses sur la forme couchée. Elle roula à gauche et à droite, esquivant les coups. La terre et la pierre éclatait sous chaque impact. Une douleur atroce lui traversa la jambe tandis qu’un membre pointu lui perçait la cuisse et la conçoit en place. Elle aperçut Saeryn et Rhyas passèrent en courant. Les nyss ne lui accordèrent aucun regard en passant, continuant avec l’athanc serré entre elles.
Une deuxième serre lui transperça l’épaule. Elle les trancha avec Écho avant de vaporiser la face d’une créature avec son canon à main. Ils arrivaient toujours, l’enterrant sous le poids de leurs formes poussant des cris perçants. Alors que la muraille d’horreur se refermait autour d’elle, elle aperçut Passé et Futur toujours entrain de se battre pour dégager un chemin, puis les rejetons lui bloquèrent la vue. Une de ses côtes se fendit et d’autres serres attaquèrent son corps. Son canon à main claqua sur la pierre et se perdit dans la masse. Le goût chaud et cuivré du sang emplit sa bouche.
Son lien mental avec Passé et Futur disparut et elle sut que les projections avaient été submergées. La corruption concentrée étouffait sa magie, empêchant la formation de runes de sort, malgré tous ses efforts. Elle tranchait et poignardait l’avalanche de chair et dents, déterminée à mourir au combat. Sa tête tournait, et elle se battit pour rester consciente contre la corruption et la perte de sang. Son corps fonctionnait à l’instinct et à l’adrénaline. Elle attrapa un rejeton se précipitant en avant avec un coup de botte dans son poitrail et l’envoya par-dessus sa tête, tout en enfonçant la pointe d’Écho dans la gorge d’un autre. Mais le nombre de rejetons était trop important. Son monde devint des dents en aiguilles et des écailles.
De quelque part au-dessus d’elle vint un cri de guerre. Un rejeton prêt à griffer son visage se retrouva sans tête. Une fontaine de sang jaillit de son cou et, dans l’instant suivant, les assaillants d’Haley reportèrent leur attention sur cette nouvelle menace.
« Lumière de Morrow, accorde-moi la force », fut le cri. Un bouclier affichant la Radiance de Morrow s’avança et écarta un autre rejeton. La forme armurée de Constance Blaize suivait derrière. Elle balaya sa lame sur Haley dans un large arc de cercle qui cisailla les membres et infligea de profondes blessures à l’ennemi. Des runes apparurent devant le prêtre, et une explosion d’une lumière blanche repoussa les bêtes restantes les plus proches. Avant qu’elle ne puisse récupérer ses esprits, Haley fut tirée sur ses pieds et Blaize poussa son canon à main dans sa poigne
« Tu ne devrais pas prendre l’habitude de désobéir aux ordres », déclara Haley avec un sourire douloureux. « Cela ne fait que créer des ennuis. » Elle jeta un bras par-dessus les épaules de Blaize et employa Écho pour se soutenir.
« Et tu devrais arrêter de quitter l’infirmerie sans permission », répondit Blaize. « Foutons le camp. » Elle essaya de les diriger toutes les deux vers la partie supérieure du cratère, mais Haley ne bougea pas.
« Attends ! » Cria Haley. « Regarde ! » Avec Echo, elle pointat Saeryn et Rhyas s’approchant du corps de Blighterghast. Plusieurs des petits et moins bien formés rejetons draconiques attaquaient les jumelles, qui n’étaient pas en état de se battre, la corruption de l’athanc les privant de leur force et de leur pouvoir. Les nyss se battaient dos à dos, mais étaient entièrement sur la défensive. Sans le soutien des versions temporelles d’Haley, elles avaient été bloquées et seraient bientôt submergées.
« Oublie-les ! » Clama Blaize. « Elles t’ont laissée pour morte ! Qu’elles meurent par les serres de leur espèce. »
Blaize n’était pas au courant de leur marché avec le dragon. « Elles ont toujours l’athanc ! Si nous les abandonnons maintenant, nous condamnons tout le Cygnar ! Il doit être livré ! »
Blaize semblait partagée, mais acquiesça ensuite. « Par Morrow, j’espère que tu as raison ! »
Haley se stabilisa, se tenant fermement à Blaize, et se concentra pour invoquer à nouveau les projections de ses autres moi. Après un moment de concentration, les spectres de Passé et Futur se sont matérialisée et se sont précipités sur les rejetons draconiques encerclant, délivrant des éclairs et des explosions d’énergies cinétique pour déchirer leurs plaques chitineuses. Les deux warcasters chancelèrent en avant et Haley se concentra sur le maintien de ses projections. Elle pouvait entendre les prières chantées par Blaize alors qu’elles étaient toutes deux entourées d’une lumière rayonnante, une aura sacrée qi semblaient tenir à distance la majeure partie de la corruption, peut-être uniquement par la force de la foi.
Elles atteignirent les nyss encerclée alors que le dernier rejeton le plus proche était exterminé. Saeryn fit un signe de tête à Haley. L’athanc, sous le bras de Saeryn, n’apparaissait plus comme un cristal, mais plutôt comme une masse palpitante de chair draconique.
« En avant ! » Cria Haley, sa voix faisant sursauter les jumelles épuisées. Elles atteignirent ensemble le cadavre inerte du dragon, et avec la dernière de ses forces, Saeryn enfonça la masse charnue contenant l’athanc de Nidoboros dans une blessure couvrant le flanc de Blighterghast. Pendant un moment, le haut de son corps disparu dans la plaie, mais sa jumelle l’aida à se détacher, et elle tomba à la renverse, haletante.
Le changement fut si soudain qu’il en devint inquiétant. La lueur orange sous les couches, se chevauchant, des écailles noires de Blighterghast éclata et déclencha une vague de chaleur telle un fourneau autrefois froid qui se réveille. L’oeil restant du Vieux Ravageur s’ouvrit à nouveau.
CHAPITRE 37 : LORTUS
Lortus avait connu Krueger pendant la majeure partie de la vie du puissant, et il avait été trop facile d’exploiter ses faiblesses. Alors que le Seigneur des Tempêtes possédait un pouvoir considérable, il n’avait pas encore pleinement compris que les batailles dépendaient plus de la volonté et de la ruse que de la pure force mystique. Bien que Krueger ne manque pas de ruse, il était impatient et arrogant, ce qui pouvait être employé contre lui.
Plutôt que de tenter de faire tomber Krueger d’un seul coup, Lortus avait adopté une approche plus longue, choisissant de mener Krueger sur le chemin de la victoire apparente. Il avait plongé, esquivé et pris une position défensive, tout en marquant des coups sûrs. Si Lortus avait perdu le dernier de ses propres constructs, la plupart de ceux de Krueger étaient également en ruine. Le Seigneur des Tempêtes continuait d’attaquer agressivement, pensant que Lortus était à sa limite et au bord de l’effondrement.
Krueger se précipita, le bout de sa lance pointée sur la poitrine de Lortus. Plutôt que de l’écarter ou de se retirer selon le schéma qu’il avait répété plusieurs fois, Lortus fit rouler son corps le long de la lance, son mouvement étant incroyablement rapide. Ses lames d’obsidienne dépêchées devant lui, l’une haute et l’autre basse. Krueger esquiva la première, mais la dernière ouvrit une entaille le long de sa cuisse. Lortus continua sa manœuvre, et avant que Krueger ne puisse réagir, Lortus était derrière lui, enfonçant ses lames dans les plus du manteau du Seigneur des Tempêtes, chaque arme ayant goûtant la chair.
Un coup de vent les sépara, mais Lortus ne tarda pas à se remettre, et alors qu’il se précipitait de l’avant derrière un éclair de lames d’obsidienne, il observa un regard d’horreur sur le visage de Krueger. Langue du Ver a été relevée pour dévier les coups, mais comme Lortus était entouré de glyphes irréguliés, les lames qu’il brandissait sont devenues floues, repoussant la lance et poursuivant pour frapper le torse exposé de Krueger. Les lames tranchantes glissèrent entre plusieurs de ses côtes en une succession rapide, chacune d’elles émergeant avec une goutte de sang frais. Dans la rue en contrebas, les derniers constructs de pierre se sont brisés, mais ce n’était pas suffisant. Une salive rouge vola de la bouche de Krueger et ses yeux s’écarquillèrent de douleur. Le puissant perdit la capacité de se maintenir en l’air et a dégringolé.
Le craquement des os a été audible lorsque Krueger heurta le pavé. Son corps gisait brisé, une jambe pliée dans un angle bizarre. Un rouge profond se glissa sur le vert de sa robe et s’étendit vers l’extérieur de ses côtes. Ses yeux étaient écarquillés de surprise, fixant la pluie qui tombait. Sa poitrine se soulevait et retombait avec des respirations irrégulières, prouvant qu’il n’était pas encore mort.
« Votre avantage s’est rapidement envolé », déclara Lortus, en survolant le corps brisé de Krueger. « Ne sous-estime jamais tes supérieurs. »
Lortus se posa sur le sol et plaça la pointe d’une lame sous le menton de Krueger. La dernière des capes noires subordonnés avait été tué ou avait fui. Ils étaient tous les deux seuls.
‘Tu avais un tel potentiel. Je blâme l’entraînement de Mohsar pour ce que tu es devenu. » Regardant Krueger, Lortus ne pouvait s’empêcher de se voir lui-même, un jeune tout aussi sauvage et téméraire, également captivé par la puissance des éléments. Il resserra sa prise sur la lame et envisagea d’enfreindre les règles de son ordre en faisant trépasser Krueger. Cela faciliterait les choses. Ils avaient lui avait déjà fait un procès, mais Bois du Ver était intervenu.
Alors qu’il débattait de la nécessité pragmatique de trancher la gorge de Krueger, un rugissement haut et fort a déboulé dans la rue et a secoué les murs et les bâtiments environnants. Lortus se figea. C’était un cri que le tout-puissant reconnu sans effort. Blighterghast était rétabli.
CHAPITRE 38 : BLIGHTERGHAST
Une vague de vitalité traversa Blighterghast alors que l’athanc de Nidoboros y adhérait et était absorbé par son propre corps. Une vague de regain corrompue traversa son corps. Les os se remirent en place et les entailles se soudèrent en un instant, effaçant les dégâts qui nécessiteraient normalement des siècles de récupération lente La vue revint dans l’oeil endommagé du dragon et la membrane de ses ailes retrouva sa gloire d’antan. En même temps, l’esprit et la perspective de Blighterghast semblait s’élargir, et une brume se dissipa tandis que ses pensées revenaient avec une clarté cristalline. Ses écailles se durcirent et ses membres se tendirent avec une force nouvelle. Il se releva au milieu du cratère et poussa un rugissement qui transportait la rage effrénée non pas d’un dragon mais de deux. Le feu intérieur qui couvait sous ses écailles s’enflamma avec plus d’intensité, et d’un coup d’aile, Blighterghast s’élança vers les cieux.
Au milieu de la tempête qui faisait rage au-dessus, ses frères luttaient contre leur créateur, leurs formes se découpant par des éclairs alors qu’ils tournaient autour de Toruk et qu’ils entraient et sortaient des nuages sombres. Toruk cracha une flamme verte vers le bas, dans une tentative d’attraper la forme en chute libre de Scaefang, mais le petit dragon changea de cap et contourna les flammes. Halfaug et Umbargoven passèrent devant les énormes ailes du Père des Dragons, le ratissant avec leurs griffes avant d’être chassés par des coups de griffes. Il n’y avait eu aucune autre victime, mais même à distance, Blighterghast pouvait comprendre que l’alliance était en train d’échouer. Leurs mouvements étaient frénétiques et désordonnés, plus de fuite que d’attaque. Ce n’était qu’une question de temps avant que Toruk ne mette fin à l’un d’entre eux avec ses mâchoires et n’avale un autre athanc, se rapprochant ainsi de la réunification complète de son essence.
Blighterghast gonfla ses poumons et lâcha un rugissement qui roula sur le monde comme une proclamation, longue et profonde et bruyante : Je continue de respirer, et tous ceux qui habitent la terre et le ciel trembleront devant ma puissance.
Son cri résonna aussi à travers les athancs que chaque portait en lui, toux ceux qui étaient ses inférieurs obéissant à sa volonté directrice. Ils firent volte-face et rompirent leur ancien schéma d’attaque, se reformant en un nouveau de sa conception. Les ailes et les écailles traversèrent la pluie battante, et bientôt elles encerclèrent Blighterghast, offrant leurs propres cris triomphants. Les blessures qu’ils avaient subis depuis sa chute était importantes. Des brûlures et des lacérations profondes marquaient leurs corps, et des parties de leurs ailes étaient en lambeaux ou ratatinées par l’intense souffle de Toruk. Malgré tout, une vigueur renouvelée brûlait derrière leurs yeux, inspirée par le retour de leur champion. Ensemble, les sept se réunirent : Ashnephos, Halfaug, Scaefang, Gjorlburn, Umbargoven, Horaurak et Blighterghast lui-même.
Sous la pluie, Blighterghast pouvait voir Toruk déployer ses ailes jusqu’à leur pleine envergure dans un spectacle de domination, les nuages sombres tourbillonnant derrière lui. Toruk poussa un rugissement à travers les cieux, et la lueur de la flamme verte illumina sa gueule dentelée.
Blighterghast répondit au cri, et les dragons de l’alliance l’on rejoint d’une seule voix. De leurs gueules collectives, un choeur de rugissements assourdissants – celui de Blighterghast étant le plus puissant – secoua les remparts de l’enclave ci-dessous et noyait le grondement de Toruk. Le cri revigora leur force autrefois décroissante, et avec la puissance de Nidoboros brûlant en lui, Blighterghast mena la charge dans ce qu’il savait être leur bataille finale. Loin au-dessus de l’enclave rhulique, l’alliance des dragons et Toruk s’affrontèrent, griffes contre écailles, et le son résultant était celui des chaînes de montagnes en train de se rompre.
Toruk vint à leur rencontre, ne voulant pas céder. Ils ratissèrent ses ailes et griffèrent ses écailles alors qu’ils étaient projetés de côté comme des fétus de pailles dans un grand vent. Seul Blighterghast avec l’essence de Nidoboros fusionnée avec la sienne, refusa de reculer. Les deux dragons roulèrent, mordant et tailladant, leur puissance dépassant de loin celle des autres. Une flamme verte jaillit des mâchoires de Toruk, et Blighterghast répondit de la même façon. Alors que les écailles de Toruk l’avaient auparavant immunisé contre les exhalaisons de sa progéniture, les flammes de Blighterghast provoquèrent un rugissement de surprise et d’agonie de la part de Toruk. Blighterghast n’hésita pas à baigner son créateur dans un feu dévorant. Quand ils se séparèrent enfin, ce fut Toruk qui rompit pour la couverture de la tempête.
Avec des battements rapides de ses ailes, Blighterghast s’éleva et les autres dragons suivirent.
Quelque chose dans le fond de l’esprit de Blighterghast, un souvenir qui n’était pas sien, l’a poussé à dévier sa route alors qu’il pénétrait d’épais nuages. L’instant d’après, une lumière verte illumina les nuages d’orages, et un cri de guerre annoncé une météorite de flamme verte et d’écailles noires alors que Toruk dévalait ce qui avait été la trajectoire prévue par Blighterghast.
Prévenue par le changement de cap soudain de Blighterghast, l’alliance esquiva la ruse et tomba sur son créateur avec la férocité d’antan. Des griffes trouvèrent preneur et lui arrachèrent les ailes avant que Toruk ne les repousse. Sa queue rattrapa Umbargoven. La flamme verte repoussa Scaefang, attrapant Gjorlburn, déformant également ses écailles. Bien que les dragons de l’alliance subissent de nouvelles blessures au cours de cet effort, Toruk n’en sortit pas indemne. Le temps que Toruk s’en dépêtre, Blighterghast attendait.
D’autres nouveaux souvenirs lui parvinrent, et il savait que ces aperçus des batailles passées étaient les souvenirs de Nidoboros, les expériences de l’ancien champion fusionnant avec les siennes. Sous les souvenirs se cachait une mémoire musculaire de toute une vie, et alors qu’il se dirigeait vers Toruk, il le fit avec une nouvelle compréhension de son ancien ennemi.
Blighterghast entra à nouveau dans la mêlée. Il s’écrasa sur Toruk tel un marteau façonné à partir d’écailles durcies et renvoya le Père des Deagons, ses ailes battant pour retrouver l’équilibre. Toruk s’élança en claquant des mâchoires, cherchant à planter ses dents dans la gorge de Blighterghast comme il l’avait fait auparavant, mais cette fois, Blighterghast avait anticipé et esquiva l’attaque. Avant, les mouvements de Toruk semblaient trop rapides pour êtres anticipés, mais maintenant Blighterghast pouvait remarquer les indices qui trahissaient l’intention de son adversaire. Les yeux et les muscles tendus annonçaient chaque mouvement, et avec ces indices, Blighterghast gardait une longueur d’avance sur Toruk.
Sa queue attrapa Toruk par le milieu, et ses griffes déchirèrent les ailes de Toruk. Des gouttes de flammes éclatèrent entre les deux, mettant à l’épreuve la résilience de leurs écailles. Pus important encore, ses actions et sa capacité à rester proche de Toruk et à s’engager pleinement créèrent des ouvertures pour les autres. Halfaug passa devant et ouvrit une autre longue déchirure le long d’une aile, et Ashnephos serra brièvement ses mâchoires à la base du cou de Toruk avant de battre en retraite.
Toruk s’éloigna de Blighterghast et cercla avec prudence. Des mugissements furent échangés durant ce laps de temps. Pour la première fois depuis son retour sur le continent, Toruk faisait preuve de prudence. Blighterghast reconnu Toruk comme étant le plus fort, mais finalement, quand ils entrèrent en collision une fois de plus, c’est Blighterghast qui avait pris l’initiative. Des gueules parcourues de dents perforaient des écailles et mordaient profondément dans la chair, et le sang de chaque dragon éclaboussait les écailles de l’autre. Un sifflement aigu retentit alors que Blighterghast s’abattait sur Toruk. Le sang lui-même grésilla puissance caustique et s’enflamma en dévorant les écailles du Père des Dragons, et Blighterghast sut qu’il avait hérité d’un autre don de l’athanc de Nidoboros.
Ignorant les griffures et les morsures que Toruk lui infligeait, Blighterghast intensifia son assaut, se concentrant sur l’armure que son sang caustique avait affaiblie. Une morsure qui aurait été autrement déviée frappa désormais les écailles fragiles de Toruk, et un cri strident de peur et de douleur jaillit du Père des Dragons. Blighterghast resserra sa prise au cri, enfonçant son museau plus profondément dans la poitrine de Toruk. Une flamme verte jaillit de la plaie béante et échauda le visage de Blighterghast, mais le dragon resta ferme. Jamais auparavant une telle blessure n’avait été infligée à Toruk, pas même à l’époque où Nidoboros volait par-dessus Caen. L’avertissement de Toruk fut clair. Les griffes du Père des Dragons se sont abattues et sont souffles enflamma les ailes et le dos de Blighterghast. Pourtant Blighterghast n’abandonna pas son emprise. Les autres dragons se joignirent à lui, serrant leurs propres mâchoires sur la gorge de Toruk et lui tailladant ses sinistres yeux. Leurs efforts combinés menaçaient de le submerger, et la soif de Blighterghast de consommer la pierre de coeur de son créateur l’emplit.
Le tumulte d’écailles et de crocs s’écrasa sur le flanc d’une montagne. Ils roulaient, mordaient et grattaient. Les dragons de l’alliance perdurent leur emprise alors que Toruk frappait le paysage avec son corps dans un effort fou pour les déloger. Finalement, même Blighterghast fut éjecté du Père des Dragons, bien que son museau était nappé du sang de son créateur.
Toruk s’envola, l’ichor noir et le brasier funeste suintaient de la blessure infligée à sa poitrine. Blighterghast brûlait d’un désir de consommer celui qui lui avait donné la vie, d’éteindre les flammes de Toruk et de se tenir au-dessus de son cadavre fumant alors qu’il rugissait vers le ciel triomphalement. La défaite de Toruk était à sa portée, tout comme l’athanc originel, la source à partir de laquelle sa propre pierre de cœur avait été sculptée.
Blighterghast regarda Toruk non pas se précipiter vers la couverture nuageuse mais plein sud, vers la côte et les îles de Cryx au-delà. Il envisagea de se lancer seul à sa poursuite, mais au fur et à mesure que le temps passait, la douleur de ses propres blessures attira son attention. Ses ailes enduraient de nombreuses déchirures, ses flancs n’étaient qu’entailles et plusieurs de ses écailles avaient été arrachées. En regardant autour de lui, il vit que les dragons qui lui avaient juré fidélité n’étaient pas prêts à reprendre l’air. Chacun était gravement blessé, et leur combativité était épuisée pour le moment.
Ils avaient gagné, mais à grands frais. La guérison prendrait du temps. Blighterghast était le moins esquinté d’entre eux, ayant été restauré par l’athanc donné lors de son pacte avec les mortels. Il n’avait pas oublié cela, ni les promesses faites à l’approche de la mort.
Il se tint sur ses pattes postérieures et, avec une profonde inspiration, poussa un rugissement tonitruant. Alors qu’il se dirigeait vers la côte et Toruk en fuite, les autres dragons ajoutèrent leurs propres voix à son avertissement. Le continent était à nouveau interdit, et la veillée de Blighterghast reprendrait. Pourtant, au fond, Blighterghast savait qu’une partie de la menace était vide de sens, car les autres ne seraient pas prêts à se battre à nouveau pendant un certain temps. Seuls les propres blessures de Toruk et sa satisfaction d’avoir consommé Charsaug le tiendraient à distance. Il faudrait voir quel camp se récupérait le plus rapidement. La guerre n’était pas terminée, pas pour des immortels comme eux.
CHAPITRE 39 : VICTORIA HALEY
Haley, Blaize, Saeryn et Rhyas grimpèrent sur le rebord du cratère et s’effondrèrent d’épuisement, assis dos aux décombres. Le ciel s’était dégagé, et le soleil frappait leurs visages avec la chaleur d’une nouvelle vie. L’horizon avait changé. Non seulement plusieurs pics montagneux avaient été aplatis ou marqués par des impacts draconiques, mais la terre autour d’elles avait été souillée. L’oppression de la corruption des dragons devrait probablement perdurer un certain temps. Du sang draconique avait chu du ciel et s’était mélangé à la pluie. Ici et là, d’étranges masses s’étaient développées et pulsaient dans ce qui restait des rues de l’enclave.
Les nyss étaient assises côte à côte, l’air sombre. Haley ne comprenait pas les détails, mais elle savait qu’elles étaient allées à l’encontre de la volonté de leur maître draconique pour accomplir la tâche. Toute l’affaire avait été une victoire douce-amère pour les jumelles. Quelque chose sur leur visage rappelait à Haley les réfugiés qu’elle avait vus fuir le Llael.
Elle repensa à la première fois qu’elle avait rencontré les sorcières sur le fleuve, à la haine qu’elle avait ressentie pour elles. Leur relation avec les dragons faisait d’elles une menace pour tous ceux dont Haley s’occupait. Leurs corps corrompus et les rejetons qui les servait étaient une incarnation des forces malveillantes. Pourtant, Haley était assise avec elles maintenant, ne comprenant pas leurs engagements mais reconnaissant silencieusement leur sacrifice.
« Ou irez-vous maintenant ? » Demanda Haley.
« Loin », répondit Saeryn, même si son intention de s’éloigner n’était pas clair. Elle se leva, étirant ses muscles, et Rhyas se joignit à elle. Sur ce, toutes les deux ont commencé à marcher dans les rues en ruine, et sur le tas de décombres, se dirigeant vers le nord. Avant qu’elle ne soit hors de vue, Saeryn jeta un coup d’oeil par-dessus son épaule et fit un léger signe de tête à Haley. Haley renvoya le geste, puis la nyss corrompue disparu.
elric:
CHAPITRE 40 : KRUEGER
« Tu as eu raison de passer l’athanc à Blighterghast », déclara Lortus. « Je le vois maintenant. » Après avoir aidé son adversaire à se relever, le tout-puissant se mit aux côtés de Krueger. Depuis les sommets du Mur du Dragon, ils regardaient Toruk rapetisser au loin.
« Alors, je vous suis reconnaissant pour votre moment de clarté », déclara Krueger, grimaçant en parlant. Après que Blighterghast se soit élevé, le tout-puissant avait rengainé ses lames et avait ensuite prêté son pouvoir pour aider à restaurer les pires blessures de Krueger. Le Seigneur des Tempêtes était toujours diminué et courbaturé, il avait une profonde douleur dans la poitrine et son visage était hagard, mais les dommages restants étaient superficiels.
« Tu resteras toujours le responsable pour cet affrontement qui s’en produit en premier lieu. Même si ainsi, le résultat aurait été bien pire si nous avions agi comme je le pensais. Je te félicite d’avoir tenu bon, aussi malavisées que soient tes intentions initiales. Si tu nous aides à réparer une partie de ces dégâts, nous pourrons peut-être te rendre ta place dans l’ordre. »
Krueger se leva et répondit : « J’ai toujours eu l’intention de restaurer ce que je pouvais. Il est regrettable qu’Everblight n’ai pas été détruit. Nous étions si proches. Krueger se sentait amer à ce sujet, en particulier à l’égard du dragon Charsaug pour avoir fait échouer ses plans juste pour chasser un athanc qui n’aurait jamais été le sien. Pourtant, ce dragon avait payé le prix ultime. Krueger aurait quand même souhaité que ce soit Everblight qui soit anéanti à la place. Il aurait simplement dû trouver un autre moyen.
Lortus secoua la tête. « Tu es un homme difficile à pardonner. Mais, compte tenu des événements de cette journée, que la paix règne entre nous. Sache que je ne peux parler que pour moi-même. Tu devras chercher les autres tout-puissants si tu veux demander l’absolution pour tes autres transgressions.
Krueger secoua la tête. « Cela n’arrivera pas. Je n’ai pas besoin de vos épreuves. Je suis ce que je suis. J’ai fait ce que je devais faire. Je ne demanderai pas pardon. »
« Le fait de ne pas se présenter pour un jugement sur la question ne fera qu’entraîner de nouvelles complications. Il y aura des conséquences pour ce que tu as fait sur les lignes de forces. »
« Je vais prendre cela en considération. »
Lortus éclata d’un rire qui prit Krueger par surprise. « Têtu comme jamais. » Avec un coup de tonnerre et un éclair, le tout-puissant disparut du sommet, laissant Krueger seul avec ses pensées.
CHAPITRE 41 : LYLYTH
Lylyth regardait à travers le voile de sa vue sans yeux tandis que ses forces nettoyaient le cadavre de Charsaug. Les faucilles et les griffes tranchaient la chair et les écailles et sciaient les os. Les formes encapuchonnées d’acolytes glissaient parmi les rejetons draconiques et attachaient le butin aux plus grands d’entre eux pour les faire voyager. Les rejetons emportaient d’autres morceaux, comme un essaim de fourmis prélevant un animal mort pour leur colonie.
Le sang coulait du dragon en de grands ruisseaux et dans des chaudrons d’aciers ornés, expulsant des tourbillons de vapeur lorsqu’il rencontrait l’air frais. Seul demeurait un trou béant dans la poitrine de Charsaug, là ou s’était trouvé l’athanc du dragon, mais la Légion ne laisserait pas la dépouille se perdre. Les os, le sang et les tendons allaient être réutilisés et donner une nouvelle vie à certaines des plus puissantes créations de l’armée d’Everblight, tout comme les archanges étaient nés des os de Pyromalfic.
Les autres dragons avaient inexplicablement mis fin à leur chasse et s’étaient envolés, poursuivant plus ceux qui portaient l’athanc fragmenté d’Everblight. Leurs raisons n’étaient pas claires, bien que Lylyth ait vu Saeryn et Rhyas ramper loin du cratère creusé par Blighterghast. Elle était persuadée que Saeryn était responsable de leur sursis, mais Everblight s’inquiétait de leur apparente trahison.
D’un pas prudent, Lylyth se déplaçait le long de ce qui restait du cou de Charsaug et en atteignant sa tête posée sur le gigantesque œil qui regardait toujours vers le ciel, ses pupilles dépourvues de toute intelligence animée. Elle sortit un couteau de sa botte. Elle savait que le pouvoir se tenait dans les yeux d’un dragon. Elle tourna le couteau vers le bas et, d’une main ferme, le détacha. Comme toujours, la Légion continuerait à vivre, et comme toujours, la chair et le sang des morts serviraient.
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