Trois Ans Plutôt
593 AR, Hiver ; Orven
« Compagnon Caine ! Nous y sommes presque, monsieur ». Cria le Lieutenant Gangier.
Caine n’écoutait pas, bercé qu’il était par le claquement régulier des fers de son cheval contre les pavés.
« Compagnon Caine, monsieur ! » Répéta l’officier subalterne fusilier, regardant Caine avec perplexité.
Caine se redressa, regardant le lieutenant bien emmitouflé dans sa tenue d’hiver, chevauchant à ses côtés. Les rues d’Orven grouillaient de vie autour d’eux, et les lumières et les décorations du prochain festival hivernal étaient partout où l’on regardait. Sous son armure, Caine frissonna et resserra sa cape autour de lui.
« La gare est juste devant, vous voyez ? »
Caine acquiesça, essayant toujours de se réfugier dans son armure pour se réchauffer. Il ne s’était pas habitué au poids de l’armure, même après un an, et elle frottait malgré les huiles et les baumes adoucissants qu’il avait appliqués sur la doublure en cuir. Il détestait particulièrement le fait que le plastron se coince sur sa poitrine lorsqu’il était essoufflé. Il avait l’impression d’être pris au piège. Malgré tout, il ne pouvait nier que c’était la première chose qu’il portait qui était neuve, adaptée à lui. Il y avait quelque chose de confortable là-dedans. Ce qu’il aimait dans son armure, c’était ce qui blasonné sur le contour des épaulières. Là, à gauche, le Cygnus gravé en or, et à droite, les protubérances blanches incurvées de son rang. Après un an de formation à Caspia, il était entré dans la phase finale.
Il était compagnon warcaster.
« Alors, où vous envoient-ils, lieutenant ? » Caine se pencha nonchalamment, saisissant les rênes. L’officier subalterne au visage frais s’éclaira, ralentissant son cheval tandis que les enfants couraient devant.
« En route pour la garnison de Nordgarde, monsieur ».
Caine grimaça à cette formalité. Il devait admettre qu’il en était venu à apprécier la compagnie du jeune officier. Son accent occidental semblait face à l’oreille de Caine, lent et mesuré, mais il parlait sérieusement, un effet que Caine trouva immédiatement désarmant. Malgré leur rang techniquement égal, le lieutenant s’en était remis jusqu’à présent à l’autorité de Caine en matière d’arcanes. Caine décida qu’il était temps d’y mettre un terme.
« Appelle-moi Allister. Nous sommes tous les deux des apprentis, hein ? »
Le visage jeune du lieutenant s’éclaira d’un sourire chaleureux.
« Très bien…
Allister. Tu peux m’appeler Gerard, même si seule ma mère le fait. À la maison, on m’appelle simplement Gerdie
« Alors tu as fini l’Académie et tu pars affronter les khadoréens à Nordgarde ? »
« Comme mon père avant moi, Morrow paix à son âme. Rien d’aussi excitant que ton poste, j’ose le dire ». Gerdie sourit, ses yeux s’illuminèrent.
« Ech, en bien… » Se moqua Caine avec une fausse modestie.
« Muté comme apprenti sous les ordres du Commandant Magnus ? Monsieur, je veux dire Allister ? Es-tu fou ? C’est une légende vivante ! La rumeur dit que c’est lui qui tas choisi ! Y a-t-il du vrai là-dedans ? »
« Aucunement », répondit Caine avec un sourire.
Devant eux, un sifflet à vapeur retentit et les puissantes roues du train hurlèrent le long des rails, annonçant son arrivée dans la gare bondée. Le long train était chargé de passagers, heureux de débarquer après leur long voyage à l’étranger. Descendant de cheval, Caine et Gerdie amenèrent leurs montures aux écuries militaires attenantes à la gare. Caine donna une tape sur le museau de sa jument alors qu’il confiait les rênes à un garçon d’écurie roux. Se tournant, il observa le train qui l’emmènerait vers le nord. La foule qui s’interposait était intimidante, mais lui et Gerdie réussirent à se frayer un chemin. Devant eux, un aboyeur annonçait des troubles à Caspia, dans le sens comme s’il venait d’arriver. Caine fronça les sourcils en entendant les mots « menace pour Vinter » et « défis pour Leto », mais continua à avancer, les oubliant rapidement. C’est alors qu’une main dans la foule le frôla.
Qu’est-ce que c’était ?La main flotta doucement tel un papillon et deux fois plus vite jusqu’à sa ceinture. S’il n’avait pas lui-même le don de magie et des années comme pickpocket, il l’aurait raté.
Caine réagit en une fraction de seconde.
Il lança sa propre main vers l’avant, et saisit la main baladeuse. Le voleur était bon, d’accord. Audacieux ou fou de tenter ce coup sur un officier armuré. Sa fatale erreur avait été de manquer rater son rang arcane sur l’épaule de Caine.
« Pardon, monsieur ! Je ne l’ai pas fait… » dit un visage fatigué du monde, alarmé, puis il s’arrêta. Il y avait de la confusion dans ses yeux. Caine se tourna vers l’homme tout aussi abasourdi. Le visage était cicatrisé, prématurément usé, les cheveux ébouriffés, mais d’une nuance de route familière. Il manquait deux doigts à la main qu’il tenait, mais il réalisa tout de même à qui elle appartenait.
« On dirait que tu as trouvé tes pierres après tout, hein Tylen ? » il sourit.
Son ancien partenaire sourit, ses yeux s’illuminant de soulagement et de surprise.
« Allie ? J’en crois pas mes yeux ! Serait-ce possible ? En vie et en personne ?
Caine lâcha sa main et hocha la tête.
« De même mon pote ».
Tylen s’émerveilla de sa transformation de voyou en militaire pur et simple.
« Nous pensions –
nous craignions – qu’Horace avait tenu parole. Maintenant que je te vois, je ne suis pas sûr qu’il s’agisse un destin pire que ça ! »
Caine rit et lui donna une tape dans le dos. Les présentations furent faites. Gerdie, obligé de prendre leurs billets au kiosque à l’intérieur, ressortit. Tandis qu’il s’éloignait, Caine fronça les sourcils.
« Tylen, que fais-tu à Orven ? »
Le visage de son ancien complice devint grave à cette question, et il tendit sa main mutilée. Caine la regarda, plissant les yeux.
« Tu t’es fait pincer, Ty ? »
« On peut dire ça », admit Tylen. « Lorsque le Boss Dakin est mort l’année dernière, Horace a pris le relais. Il a jugé bon de faire quelques exemples ». Caine acquiesça, les yeux plissés à ce nom.
« La première chose qu’il a fait a été d’écraser quelques personnes comme moi. Il s’est assuré que nous comprenions que soit nous travaillions pour lui, soit nous ne travaillons pas ». Tylen exhiba sa main à trois doigts avec une fierté ironique.
« Après cela, il a ouvert son livre de rancunes. Il l’a cherché pendant longtemps. La prime était élevée, mais à la fin, il t’a cru mort, comme nous tous. Écoute, qu’est-ce qu’il a fait à ton paire ? Je suis vraiment désolé, Allie. Il ne le méritait pas ».
Caine sentit la colère monter en lui. Son regard était à la fois intense, perçant.
« Qu’est-ce que tu racontes, Tylen ? »
« Bon sang. Je pensais… »
Le monde Caine se remplit de rouge. Ses oreilles lui brûlaient et il eut l’impression que les secondes s’écoulaient à une vitesse d’escargot. Il saisit brutalement Tylen par l’épaule.
« Vivant ? … Il est
vivant, Tylen ? »
« Oui… mais Caine, il est… euh, ow ! Tu me fais mal ! » protesta Tylen. Caine le relâcha aussi vite qu’il l’avait attrapé et se retourna pour partir. Ce faisant, Gerdie revenait, se frayant un chemin dans la foule avec les billets à la main.
« Hello ! » lui cria l’officier subalterne à travers la circulation piétonnière bruyante. Caine ne répondit pas, mais se tourna vers son vieil ami.
« Dis-lui de continuer sans moi. J’ai quelque chose à faire ».
Tylen hocha la tête et regarda Caine disparaître dans la foule.
* * *
Caine franchit la vieille porte rouge, affolé. Elle lui paraissait si vieille et si fragile à présent, comme un objet datant de plusieurs siècles. L’intérieur de la maison n’avait pas mieux résisté, plus défraîchie que jamais il ne l’avait vue. Le couloir sentait la mort. Des baumes et des liniments flottaient de la cage d’escalier au-dessus.
Alors qu’il entrait dans le hall d’entrée, un cri de surprise vint de la pièce d’entrée. Sa petite sœur, Bethany, le regardait fixement. À genoux, elle frottait la boue d’une paire de bottes de travail, tandis qu’une douzaine d’autres attendaient d’affilée. Elle leva les yeux de sa corvée, la bouche grande ouverte. La vue de son frère mort, mais aussi devenu soldat, l’avait transformée en statue.
« Beth ! » Caine s’approcha d’elle, se mettant à genoux et posant un bras sur son épaule. Elle s’élança pour l’étreindre, manquant de le faire tomber. Il lui rendit l’étreinte, la serrant avec intensément. Elle ne dit rien, mais se mit à sangloter sur son épaule. Il lui tapota la tête et se recula suffisamment pour la regarder dans les yeux.
« Papa. J’ai entendu dire qu’il… est-ce qu’il va bien ? » demanda-t-il doucement.
Bethany renifla, toujours sous le choc de la vision s’offrant à elle. Elle regarda au-delà de l’exigu hall d’entrée et vers les escaliers. Caine suivit son regard et hocha la tête. La tapotant une fois de plus, il se leva et se dirigea vers les escaliers.
La chambre était calme et sombre, avec des rideaux moisis retenant le soleil de fin d’après-midi. S’il n’y avait pas eu une respiration saccadée dans l’ombre, Caine aurait pensé que la pièce était vide. Tirant les rideaux, il vit son père allongé devant lui sur le lit. Le vieil homme était presque immobile et moribond, comme il ne l’avait jamais vu. Ses yeux fixant le plafond d’un air absent. Il avait vieilli de vingt ans en un peu plus de deux ans, si l’on en croyait les apparences. Ses cheveux avaient été réduits à seulement quelques mèches blanches, et sa silhouette autrefois charnue était maintenant presque squelettique. Caine remarqua une inquiétante cicatrice autour de son cou, tel un inégal collier.
Puis il cessa de respirer. Caine se précipita à ses côtés, posant une main sur son bras décharné.
Convulsant, le vieil homme trembla comme s’il était possédé, puis fut ravagé par une toux sèche. Sa gorge s’éclaircit, il respira à nouveau lentement et péniblement dans ses poumons atrophiés.
Caine s’assit sur une chaise à côté du lit et pris sa main en coupe. En il se pencha en avant, s’approchant de l’oreille de son père.
« P’pa ? » Il regarda Seamus, ne sachant pas quoi faire. Petit à petit, son visage se durcit.
Il ouvrit son long manteau, révélant le plastron de son armure. « Regarde ça ! Me vois-tu ? Suis-je encore un voyou pour toi ? Est-ce qu’un voyou porte l’armure du roi ? »
Caine observât le visage de son père, attendant désespérément un signe. Il n’y eut aucune lueur de reconnaissance dans ces yeux gris et flous. Ils se contentaient de fixer le plafond au hasard. Au fur et à mesure que l’attente se prolongeait, sa tête se mit trembler lentement. Deux années de dépit et de colère refoulés s’écoulèrent de lui et il s’affaissa dans le fauteuil en expirant longuement.
« Tu ne pouvais pas me laisser faire, n’est-ce pas ? » murmura-t-il.
« Il est comme ça depuis qu’ils l’ont battu », prononça Bethany depuis l’embrasure de la porte.
« Morrow, pardonne-moi, ils auraient dû le laisser mourir là-bas. Je jure que cela aurait été mieux. Mieux que ça », ajouta Bethany, le visage rougi. Caine fut choqué de voir à quel point elle lui rappelait sa mère la dernière fois qu’il l’avait vue.
« Où étais-tu, Allister ? Nous pensions que tu étais mort ».
« Je suis désolé, Beth… Je devais y aller ».
Elle hocha la tête sans un mot, venant à ses côtés. Elle baissa les yeux sur leur père, à la respiration sifflante, s’essuyant les yeux.
« Pourquoi ? Pourquoi est-ce arrivé ? » demanda-t-il.
« Qui sait ? » Bethany s’assit sur le lit, pris la main décharnée de Seamus et la caressa lentement.
« Maman a dit qu’il avait payé sa dette au Boss Dakin. Cela aurait dû être la fin. Mais quand Horace a pris la relève, il est venu le chercher, comme s’il avait un compte à régler. Il n’a jamais dit pourquoi. Sa bande a pendu P’pa sur la place de marché, à la tour de l’horloge, à la vue de tous. Il y est resté cinq minutes avant que quelqu’un prenne la peine de le descendre. Horace en a pendu une douzaine d’autres comme lui en une semaine. Tout le monde l’a vu, mais aucun témoin, bien sûr ». Bethany le regarda, mais Caine détourna le regard, la mâchoire serrée. Se levant, il se dirigea vers la porte.
« Où vas-tu ? Maman va bientôt rentrer de son service. Elle voudra savoir si tu vas bien », plaida-t-elle.
« Je ne suis pas bien, Beth. Pas du tout ».
* * *
Caine marchait dans la rue, le meurtre dans les yeux. Malgré la froideur, la rage brûlait en lui plu fort que la centrale énergétique à l’arrière de son armure. En fin de compte, trouver Horace ne fut pas un défit. Quelques ivrognes éméchés n’avaient pas tardé à l’informer que lui et son équipe se trouvaient à la Chaudière, comme la plupart des nuits, tout comme il l’avait fait la dernière fois que Caine l’avait vu. En s’approchant du bar, il put entendre l’air d’un violoniste et d’une foule bruyante chantant avec lui. S’approchant de la porte, il sortit son arme. Les quelques personnes rassemblées près de la porte lui jetèrent des regards effrayés et s’empressèrent de dégager la voie. Tout sauf un, Même dans sa rage, il reconnut l’ancien homme de main d’Horace à la main cicatrise qu’il avait tendu vers lui. À sa décharge, le grand tint bon, osant même s’emparer de sa propre arme.
Trop tard.
Trois enjambées après, Caine explosa de rage. Un arc de force projeta le truand contre les épaisses portes en bois, qui à leur tout se brisèrent tel du bois d’allumettes. Dans la taverne, le violoniste s’arrêta et brusquement la foule en délire se tût.
Caine enjamba la porte brisée et le truand inconscient, passant devant des clients stupéfaits qui avaient été renversés par la force de l’impact.
« Horace ! » Cria-t-il devant une foule abasourdie, les yeux brûlants comme des braises. « Sors de ton trou ! » Depuis le box du fond, Horace était assis, une servante à chaque bras. Le truand cligna des yeux, la tête penchée d’un air interrogateur. En vérité, Horace ressemblait encore beaucoup à ce que Caine avait vu la dernière fois, il n’en avait pas moins la face squelettique qu’avant. Pourtant, d’une manière ou d’une autre, il ne pouvait pas sembler plus différent. Là où Caine avait vu un adversaire ou une menace, il ne voyait plus qu’une proie.
Peu à peu, Horace commença à se bouger, plissant les yeux en signe de reconnaissance. « Bien sûr, bien sûr… J’arrive ». Cria-t-il paisiblement, s’adressant à moitié à la foule. Ses hommes le regardaient bouger, attendant le signal pour agir. Il leur fit signe de s’en aller, de s’éloigner du box.
Caine hocha la tête et se tourna vers la porte. Dans le silence feutré de la pièce, il entendit le bruit d’un pistolet qu’on armait.
Il sourit.
Revenant sur Horace en un clin d’oeil, son arme cracha une fois, un coup de tonnerre dans l’espace clos. Horace poussa un cri de consternation lorsque le tir fit tomber son arme au sol. Serrant sa main engourdie, il lança un regard noir à Caine.
« Tu veux faire ça ici, hein ? Bien. Ramasse ». Caine rengaina son arme, croisant les bras.
Le truand plongea vers l’arme, roulant derrière de ses précieuses serveuses s’étant cachée sous la table entre-eux. L’attrapant par le cou, il la souleva pour en faire un bouclier. Se penchant derrière l’épaule de la jeune femme, il tenta une nouvelle fois de braquer l’arme sur Caine.
Le deuxième pistolet de Caine cracha, suivit d’un autre coup de tonnerre et d’une corolle de fumée. Horace relâche la jeune fille et se roula par terre, à l’agonie. Sa main gauche avait été réduite en une masse de viande et de sang jaillissant. Une fois de plus, Horace avait lâché son pistolet. Caine, quant à lui, avait rechargé et rengainé.
« RAMASSE ! » aboya Caine, sa rage à son comble.
Horace, tremblant de douleur et de colère, tendit la main vers son pistolet. Il se redressa au prix d’un grand effort, haletant sous l’effet du choc. Caine l’observait, les bras croisés. Un bras tremblant souleva le pistolet pour viser, et essaya une fois de plus de tirer. Une fois de plus, la bouche du canon brilla et un coup de tonnerre rugit.
Horace chuta au sol en hurlant, sa rotule disparue.
Caine s’avança d’un pas insouciant vers le truand qui gémissait désormais. Cette fois, Horace n’osa pas toucher son arme. Il ne faisait que gémir lorsque Caine s’agenouilla pour lui remettre.
« Non ? » C’est tout ce que vous avez ? Personne d’autre ? Personne n’est capable de m’offrir un vrai combat ? » cria en jetant un regard circulaire furieux dans la taverne. Le silence lui répondit. Les clients restants, observant avec terreur sous leurs tables et derrière le bar. Les truands qu’il avait répérés et marqués avaient disparu. Il prit une profonde inspiration. À mesure que sa rage se calmait, ses manières devenaient détachées et calculatrices.
« Ainsi soit-il ».
Caine repoussa l’arme d’Horace puis se pencha sur lui pour le saisir par la chemise avec un grognement. Passant le bras valide du truand sur son épaule, Caine le remit debout.
« Allez, Horace. Nous allons nous promener ».
Sur le marché, orné de lumières colorées et de couronnes de Noël les deux hommes claudiquaient. Horace boitait pour suivre le rythme de Caine, il criait à chaque pas. Devant eux se tenait la grande Tour de l’Horloge du Marché, haute de cinq étages et ornée de rameaux de fête. Horace leva les yeux vers elle, la panique se lisant sur son visage.
« Je me souviens de toi… écoute, on peut résoudre ça, hein ? » plaida-t-il.
« Certainement ».
« J’ai de l’argent, tu sais ? Tu peux… prendre… autant que tu veux ». Il adressa un faible sourire par-dessus la douleur, essayant de paraître sympathique. Caine regard froidement Horace.
« Je voulais un moment. Tu me l’as pris. Tu peux me le rendre ? »
Le truand, déconcerté, le regarda d’un air absent.
Caine jeta un coup d’oeil vers le ciel, sa concentration se renfonçant. Fermant les yeux, il plia le monde autour de lui. Au prix de grands efforts, il amena le gangster blessé avec lui Le duo disparu, pour réapparaître sur le podium devant la tour de l’horloge. Respirant lourdement, Caine se balança sous l’effort qu’il avait fourni pour en faire apparaître un autre. Horace, désorienté par la téléportation, tomba à genoux, éclaboussant son dîner sur le côté de la passerelle. Tandis qu’il se relevait, Caine reprit son souffle et jeta un coup d’oeil à la gargouille à l’ange de la tour.
Cela fera l’affaire.Il se pencha pour détacher une corde attachée à la gargouille. Cette corde était emmêlée avec des branches à une tour inférieure voisine. En tirant brusquement et avec force, la corde se détacha à l’autre extrémité, et les branches glissèrent jusqu’au sol. Alors qu’il enroulait la corde autour de son bras, le cadran géant rétro-éclairé de l’horloge marquait l’heure, les aiguilles de fer défilaient avec des battements forts et réguliers.
Toujours désorienté et à genoux, Horace ne se rendit pas compte que Caine confectionnait un nœud coulant avec la corde et l’attachait. Regardant par-dessus le bord, Caine remarqua que son spectacle avait rassemblé un large public, qui comprenait enfin les forces de l’ordre local. Les gardes crièrent de s’arrêter et de se rendre. Un Horace piteux au visage plat, leva les yeux vers Caine, essuyant la salive de ses lèvres.
« Pas comme ça. Pas… » Horace haletait tandis que Caine lui passait la corde au cou.
« Juste comme ça ».
Caine expulsa Horace de la passerelle d’un coup de pied. L’ex-truand tendit la corde avec un bruit sec, et ne convulsa qu’une fois avant de devenir un dernier ajout aux décorations des fêtes.
Caine disparu de la passerelle, pour réapparaître sur les pavés, vacillant un instant avant de tomber à genoux. Les gardes arrivèrent de tous côtés, l’armes aux poings, et il leva les mains d’un air moqueur.
« Bien. J’ai fini ».