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Background – Histoire des Royaumes d’Acier / Roman - La Voie de Caine
« Dernier message par elric le 05 février 2024 à 16:19:53 »
594 AR, Décembre ; Ceryl

C’était une matinée nuageuse alors que Caine se déplaçait le long de la digue, comme il l’avait fait presque tous les jours depuis son arrivée dans la cité côtière de Ceryl. Les vagues océaniques d’un hiver précoce se heurtaient aux brise-lames en pierre, blanche comme de l’écume et glaciales comme les os. Cette image avait fini par exercer une forte fascination sur lui lors de son affectation de compagnon, et il les fixait souvent depuis les fenêtres et les remparts du fort étant désormais son foyer. Que cela l’occupe ainsi n’était peut-être pas une surprise. Après tout, il n’avait jamais vu d’océan auparavant.

Il regarda le baleinier Chien Impudent sortir du port. Les hommes à bard chantaient bruyamment pendant leur travail, et même d’ici, il pouvait entendre les paroles de leur chanson alors qu’ils laissaient la civilisation derrière eux.

La garnison de la ville se dressait derrière lui, haute de huit étages, construite à côté du vieux phare. Prenant une profonde inspiration, il entama la longue montée des escaliers vers les remparts. Aussi encombrante que soit son armure, il s’y était habitué depuis longtemps et ne rechignait pas à emprunter la longue cage d’escalier. Trois saisons s’étaient écoulées depuis sa rencontre avec Rebald, et sous la direction de son mentor, le vénérable Seigneur Walder Brigham, l’armure avait été mise à rude épreuve. Caine comptait un moins une vingtaine d’escarmouches depuis son séjour avec le Seigneur Brigham, presque toutes contre des pillards des Îles Scharde orientale à l’ouest du port. À deux reprises, des poursuites eurent lieu avec des navires de reconnaissance khadoréens, persistant à tester la détermination de la vigilance côtière de Cygnar.

Ce qu’il n’avait pas eu, c’était des nouvelles du commandant en chef des éclaireurs. Depuis leur accord, on lui avait demandé de tenir un journal des navires au port, et rien de plus. Un coursier de Rebald venait le chercher chaque mois, mais il n’y avait rien de plus. Il commençait à penser que le marché avait été totalement oublié.

Caine porta ses mains à on souffle pour se réchauffer et regarda au-delà de l’horizon. Il se demanda où le Chien se dirigeait et, pour sa part, il se posait la même question.

Proche du sommet de la vieille cage d’escalier en pierre, il fut dépassé par des soldats de l’armée prenant leur service. Sur le rempart précédant le sommet du grand donjon, il entendit une voix familière et irascible s’élever.

« Allister ! Viens ici, gamin ! » Malgré lui, Caine sourit au vieil homme.

Au pied du mât du drapeau cygnaréen, haut de plus de quinze mètres, le seigneur Brigham prenait son thé du matin. Du gorgerin au soleret, son armure élaborée brillait, presque jusqu’à rendre fou, et sa longue cape doublé de fourrure noire battait au vent. Froissé comme du cuir, aux cheveux blancs, aussi vieux que son armure et tout aussi bien conservé. Héros à nombreuses reprises par le passé, maintenant sûrement sa dernière période de service. Un sourire toujours proche des lèvres, et en effet, il souriait largement alors que Caine passait la dernière marche.

« De quel navire s’agit-il ? » demanda le Seigneur Brigham en tirant sa barbe blanche soigneusement taillée et en observant la scène.

« Chien Impudent », monsieur.

« Ah oui. Il part à la chasse à la baleine au-delà des Scharde au cours des six prochains mois, je me risquerais à deviner… » L’attention du vieil homme se porta sur l’eau. Caine s’approcha du bord de la balustrade de pierre et observa les pêcheurs en contrebas tandis qu’ils vidaient leurs prises sur les quais.

« Allister, tu as été un bon élève ». Le vieil homme se mit à réfléchir, son attention revint brusquement. Caine leva les yeux des quais, surpris, et se tourna vers son mentor.

« Avant ton arrivée, on m’avait prévenu que tu serais difficile. Ton séjour ici ne s’est certainement pas déroulé sans incident, n’est-ce pas ? » demanda Brigham.

Caine hocha la tête, luttant contre l’envie de sourire, tandis que Brigham poursuivait. « Pourtant, pendant cette période, j’ai également été témoin de l’épanouissement de ton talent pour la guerre. Avec seulement une paire de pistolets, tu es devenu redoutable. Avec toi, j’ai peut-être enseigné à mon meilleur élève ».

L’aîné des warcasters porta son thé à ses lèvres, pensif.

« Mais il y a une autre partie à cela. Si je devais être franc, eh bien, il y a une part d’ombre qui te ronge. Je l’ai vu chez d’autres, des amis perdus au fil des ans. Crois-moi quand je te dis que tu feras la paix avec, sinon cela te consumera. Ce serait en effet une tragédie, car tu as bien plus à offrir, gamin, que ce que tu laisses percevoir au monde ».

Caine sentit inexplicablement ses joues rougir. Il détourna le regard, embarrassé. « Monsieur ? Pourquoi m’avouer de telles choses ? »

« Parce que je ne pourrai pas le faire demain ». Le vieil homme rit en sirotant son thé.

Les yeux de Caine s’écarquillèrent. « Est-ce que ça va, monsieur ? »

« Oui, Allister. Mais pas toi. En fait, tu nous quittes. J’ai déposé les papiers il y a une semaine, et ils sont revenus ce matin même ».

« De quoi parlez-vous ? »

« De ton apprentissage. Il est terminé. Tu vas être redéployé au sein de la première armée à Fellig la semaine prochaine ». Le vieil homme gloussa, en réponse à la surprise de Caine. Il avait l’air d’avoir oublié quelque chose.

« Je voulais t’offrir quelque chose », répondit le Seigneur Brigham en fouillant dans les plus de sa cape et sortir un petit artefact en laiton poli au bout d’une chaîne. Avec une gentille tape dans le dos, il le pressa dans la main de Caine.

« N’oublie jamais qu’il y a dignité dans cette vie, Allister. La moralité aussi, même si nous sommes souvent appelés à faire des choses terribles ».

Caine hocha la tête, voyant que le vieil retraçait son propre passé en parlant. « N’oublie jamais ça, si tu souhaites honorer ce pour quoi le Cygnar se bat ».

« Caine regarda l’artefact, curieux. En l’ouvrant, il vit une petite boussole, fabriquée avec une étonnante précision. Stupéfait, il ne put remercier son mentor qu’en murmurant. Le Seigneur Brigham acquiesça.

« Elle appartenait à mon père, Allister et je te l’offre maintenant. Il m’a dit quelque chose le jour où je me suis engagé, il y a si longtemps. Il m’a dit que suivre les ordres sans jamais se soucier de son coeur t’entraînera sûrement en enfer, peu importe ce qu’ils peuvent épingler sur ta poitrine. Je n’ai jamais oublié ces paroles, que Morrow ait son âme. Toi seul sauras à la fin de tes jours si ta vie a été digne, Allister. Puisse cette boussole te conduire à la même paix que celle que j’ai trouvée à la fin de la mienne ».
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Discussions sur les aides de jeu / [Question & Recherche] zones d'objectifs
« Dernier message par the_red_eye le 04 février 2024 à 17:16:13 »
Bonjour,

je recherches des zones d'objectifs circulaires de 9'

ça a existé pour warmachine / hordes ?
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Petit retour sur une commande Tyranide tout en griffes :


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« Dernier message par elric le 30 janvier 2024 à 13:16:09 »
Deux Ans Plutôt

594 AR, Fin du Printemps ; Le Praesidium, Brainmarché

« Prisonnier 31071 ! Tu as de la compagnie ».

Caine se retourna sur son lit de camp et découvrit un spectre l’observant. Il passa une main sur ses yeux pour bloquer l’éblouissement et plissa les yeux vers la silhouette d’un homme masqué de l’autre côté des barreaux. Ses yeux s’habituant, il aperçut que l’étranger était décharné, tant au niveau du visage que de l’ossature. Pendant un moment, l’homme se contenta de le fixer, le visage vide.

« J’ai entendu une historie, il y a deux saisons », débuta l’homme en gris, sa voix à peine plus forte qu’un murmure et dépourvue d’accent. « Il semble qu’il y ait eu un remarquable incident lors de l’inspection de l’Académie de Stratégie Militaire de Caspia ».

Caine ne répondit rien, mais se leva de son lit.

« Le Roi Vinter avait demandé à un cadet de tirer sur une cible à vingt pas, ce qu’il a fait. Par la suite, on entendit un conseiller du roi se montrer, dirons-nous, peu impressionné. Le cadet a effectué un tir à ricochet ayant touché deux murs et un lustre avant de faire voler la broche du conseiller de son épaule, laissant tomber sa cape à ses pieds.

Les pas des l’homme en gris s’arrêtèrent et il porta un long doigt à ses lèvres : « Le roi remarqua le glorieux avenir que ce cadet avait devant lui. C’est donc une d’une intéressante ironie qu’il disparaisse quelques mois plus tard, n’est-ce pas ? »

Caine lança un regard noir à l’homme en gris. Il se leva, puis vida sa vessie dans le seau près du lit.

« Pourquoi es-tu ici ? » Insista l’homme en gris, la voix toujours basse. « Nous savons tous les deux que tu peux partir à tout moment ».

« C’est ici que je dois être, n’est-ce pas ? En fin de compte, je suis rien de plus qu’un voyou. Un tueur ordinaire. N’est-ce pas ? » marmonna Caine en rattachant ses culottes.

« Un tueur exceptionnel, en fait. Une telle chose, je le crains, est une denrée précieuse par les temps qui courent. Au-delà de cette cellule et de ton apitoiement, notre nation est au bord du gouffre. Depuis que le Roi Leto s’est emparé du trône face à la corruption de son frère Vinter, nous sommes plus vulnérables en tant que nation que jamais ». Caine n’était toujours pas impressionné. L’homme en gris fit une pause. « J’ai décidé que Leto était le meilleur homme pour le Cygnar. Je veux le maintenir sur le trône, par tous les moyens disponibles. J’espère que t’engageras également pour cette cause ».

« C’est vrai ? » Se moqua Caine.

« Je sais que le patriotisme n’est pas une de tes vertus. Cependant, je crois savoir que tu as été fier de ta carrière.

« Oui, eh bien, tout cela est du passé, comme vous pouvez le constater. Ce n’est rien de plus que ce qu’on pouvait attendre de moi ».

L’homme en gris sortit une lettre des plis de son manteau.

« Il n’est pas nécessaire qu’il en soit ainsi. J’ai ici le moyen de faire table rase pour ainsi dire. Je t’ai obtenu une grâce. Tu pourrais affecter à la reprise de ton apprentissage de compagnon. Dès demain, si tu le souhaites. Je ferai ainsi appel à tes services chaque fois que je le jugerai opportun, sans exception.

« Vous avez perdu votre temps en venant ici ». Répondit Caine en s’appuyant contre le mur de sa cellule, les bras croisés.

« Je vois. Alors tu te contentes de te complaire dans ton échec ? L’homme en gris le regarda. « De connaître une fin plus ignoble et plus obscure encore que celle de ton imbécile de père ? »

Le visage de Caine trahit la surprise. L’homme en gris insista.

« Oui, c’est vrai. Il est mort la semaine dernière. On ne te l’a pas dit ? Non, je suppose que non. Qu’est-ce que cela peut te faire ? Qu’est-ce que ça peut faire ? »

La rage indignée s’empara de Caine. Il jeta un coup d’oeil à l’homme nerveux devant lui, envisageant de lui tordre son migre cou. L’homme observa sa colère froidement, haussant un sourcil.

« Oui. Supposons que tu veux me tuer ? Et alors ? »

Caine secoua la tête. Ses pensées étaient-elles si transparentes. Frustré, il se détourna.

« Mon offre expire avec moi, et tu finiras soit à la potence, soit pourchassé le restant de ta courte vie par ceux qui sont très certainement tes égaux ».

« Vous devriez y aller ».

« Peut-être que tu as raison ».

Caine ne répondit rien, mais agrippa les barreaux de sa fenêtre. Il entendit l’homme en gris se retourner pour partir. Des pas résonnèrent dans le couloir, de plus en plus lointain. Caine regarda depuis sa fenêtre en secouant la tête.

Non. Non ! Il ne se laisserait pas si facilement manipuler. Sauf…

Jetant un coup d’oeil vers la porte d’entrée dessous lui, il ferma les yeux et plia l’espace autour de lui. En un éclair, il se retrouva adossé au mur du donjon, les bras croisés. L’instant d’après, l’homme en gris franchissait la porte principale. Lorsqu’il aperçut Caine, il ne sembla pas du tout surpris. Au contraire, il sourit légèrement.

« C’est un plaisir de te rencontrer enfin Lieutenant Caine. Mon nom est Holden Rebald, Commandant en Chef des Éclaireurs du roi. Il tendit une main gantée, regardant Caine dans les yeux.

« Alors, nous avons un accord ? »
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La taverne de BG / Re : Boutique et Vente de Warmachine MKIV et peintures P3
« Dernier message par GRUXXKi le 30 janvier 2024 à 09:28:03 »
Bonjour Sébastien,

Le forum ne tourne plus beaucoup, la modernité fait que l'essentiel se passe sur discord maintenant.

Et oui une boutique qui vendrait de la MK4 en France serait un vrai plus, mais il y aura du boulot pour faire reprendre le jeu à son niveau MK2.
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Achats & Petites Annonces / Re : [VENTE] Cygnar et Mercenaries legacy unlimited
« Dernier message par Shywan Marcus le 28 janvier 2024 à 14:07:10 »
Modification suite à vidange d'étagères
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« Dernier message par elric le 24 janvier 2024 à 20:52:55 »
Trois Ans Plutôt

593 AR, Hiver ; Orven

« Compagnon Caine ! Nous y sommes presque, monsieur ». Cria le Lieutenant Gangier.

Caine n’écoutait pas, bercé qu’il était par le claquement régulier des fers de son cheval contre les pavés.

« Compagnon Caine, monsieur ! » Répéta l’officier subalterne fusilier, regardant Caine avec perplexité.

Caine se redressa, regardant le lieutenant bien emmitouflé dans sa tenue d’hiver, chevauchant à ses côtés. Les rues d’Orven grouillaient de vie autour d’eux, et les lumières et les décorations du prochain festival hivernal étaient partout où l’on regardait. Sous son armure, Caine frissonna et resserra sa cape autour de lui.

« La gare est juste devant, vous voyez ? »

Caine acquiesça, essayant toujours de se réfugier dans son armure pour se réchauffer. Il ne s’était pas habitué au poids de l’armure, même après un an, et elle frottait malgré les huiles et les baumes adoucissants qu’il avait appliqués sur la doublure en cuir. Il détestait particulièrement le fait que le plastron se coince sur sa poitrine lorsqu’il était essoufflé. Il avait l’impression d’être pris au piège. Malgré tout, il ne pouvait nier que c’était la première chose qu’il portait qui était neuve, adaptée à lui. Il y avait quelque chose de confortable là-dedans. Ce qu’il aimait dans son armure, c’était ce qui blasonné sur le contour des épaulières. Là, à gauche, le Cygnus gravé en or, et à droite, les protubérances blanches incurvées de son rang. Après un an de formation à Caspia, il était entré dans la phase finale.

Il était compagnon warcaster.

« Alors, où vous envoient-ils, lieutenant ? » Caine se pencha nonchalamment, saisissant les rênes. L’officier subalterne au visage frais s’éclaira, ralentissant son cheval tandis que les enfants couraient devant.

« En route pour la garnison de Nordgarde, monsieur ».

Caine grimaça à cette formalité. Il devait admettre qu’il en était venu à apprécier la compagnie du jeune officier. Son accent occidental semblait face à l’oreille de Caine, lent et mesuré, mais il parlait sérieusement, un effet que Caine trouva immédiatement désarmant. Malgré leur rang techniquement égal, le lieutenant s’en était remis jusqu’à présent à l’autorité de Caine en matière d’arcanes. Caine décida qu’il était temps d’y mettre un terme.

« Appelle-moi Allister. Nous sommes tous les deux des apprentis, hein ? »

Le visage jeune du lieutenant s’éclaira d’un sourire chaleureux.

« Très bien… Allister. Tu peux m’appeler Gerard, même si seule ma mère le fait. À la maison, on m’appelle simplement Gerdie

« Alors tu as fini l’Académie et tu pars affronter les khadoréens à Nordgarde ? »

« Comme mon père avant moi, Morrow paix à son âme. Rien d’aussi excitant que ton poste, j’ose le dire ». Gerdie sourit, ses yeux s’illuminèrent.

« Ech, en bien… » Se moqua Caine avec une fausse modestie.

« Muté comme apprenti sous les ordres du Commandant Magnus ? Monsieur, je veux dire Allister ? Es-tu fou ? C’est une légende vivante ! La rumeur dit que c’est lui qui tas choisi ! Y a-t-il du vrai là-dedans ? »

« Aucunement », répondit Caine avec un sourire.

Devant eux, un sifflet à vapeur retentit et les puissantes roues du train hurlèrent le long des rails, annonçant son arrivée dans la gare bondée. Le long train était chargé de passagers, heureux de débarquer après leur long voyage à l’étranger. Descendant de cheval, Caine et Gerdie amenèrent leurs montures aux écuries militaires attenantes à la gare. Caine donna une tape sur le museau de sa jument alors qu’il confiait les rênes à un garçon d’écurie roux. Se tournant, il observa le train qui l’emmènerait vers le nord. La foule qui s’interposait était intimidante, mais lui et Gerdie réussirent à se frayer un chemin. Devant eux, un aboyeur annonçait des troubles à Caspia, dans le sens comme s’il venait d’arriver. Caine fronça les sourcils en entendant les mots « menace pour Vinter » et « défis pour Leto », mais continua à avancer, les oubliant rapidement. C’est alors qu’une main dans la foule le frôla.

Qu’est-ce que c’était ?

La main flotta doucement tel un papillon et deux fois plus vite jusqu’à sa ceinture. S’il n’avait pas lui-même le don de magie et des années comme pickpocket, il l’aurait raté.

Caine réagit en une fraction de seconde.

Il lança sa propre main vers l’avant, et saisit la main baladeuse. Le voleur était bon, d’accord. Audacieux ou fou de tenter ce coup sur un officier armuré. Sa fatale erreur avait été de manquer rater son rang arcane sur l’épaule de Caine.

« Pardon, monsieur ! Je ne l’ai pas fait… » dit un visage fatigué du monde, alarmé, puis il s’arrêta. Il y avait de la confusion dans ses yeux. Caine se tourna vers l’homme tout aussi abasourdi. Le visage était cicatrisé, prématurément usé, les cheveux ébouriffés, mais d’une nuance de route familière. Il manquait deux doigts à la main qu’il tenait, mais il réalisa tout de même à qui elle appartenait.

« On dirait que tu as trouvé tes pierres après tout, hein Tylen ? » il sourit.

Son ancien partenaire sourit, ses yeux s’illuminant de soulagement et de surprise.

« Allie ? J’en crois pas mes yeux ! Serait-ce possible ? En vie et en personne ?


Caine lâcha sa main et hocha la tête.

« De même mon pote ».

Tylen s’émerveilla de sa transformation de voyou en militaire pur et simple.

« Nous pensions – nous craignions – qu’Horace avait tenu parole. Maintenant que je te vois, je ne suis pas sûr qu’il s’agisse un destin pire que ça ! »

Caine rit et lui donna une tape dans le dos. Les présentations furent faites. Gerdie, obligé de prendre leurs billets au kiosque à l’intérieur, ressortit. Tandis qu’il s’éloignait, Caine fronça les sourcils.

« Tylen, que fais-tu à Orven ? »

Le visage de son ancien complice devint grave à cette question, et il tendit sa main mutilée. Caine la regarda, plissant les yeux.

« Tu t’es fait pincer, Ty ? »

« On peut dire ça », admit Tylen. « Lorsque le Boss Dakin est mort l’année dernière, Horace a pris le relais. Il a jugé bon de faire quelques exemples ». Caine acquiesça, les yeux plissés à ce nom.

« La première chose qu’il a fait a été d’écraser quelques personnes comme moi. Il s’est assuré que nous comprenions que soit nous travaillions pour lui, soit nous ne travaillons pas ». Tylen exhiba sa main à trois doigts avec une fierté ironique.

« Après cela, il a ouvert son livre de rancunes. Il l’a cherché pendant longtemps. La prime était élevée, mais à la fin, il t’a cru mort, comme nous tous. Écoute, qu’est-ce qu’il a fait à ton paire ? Je suis vraiment désolé, Allie. Il ne le méritait pas ».

Caine sentit la colère monter en lui. Son regard était à la fois intense, perçant.

« Qu’est-ce que tu racontes, Tylen ? »

« Bon sang. Je pensais… »

Le monde Caine se remplit de rouge. Ses oreilles lui brûlaient et il eut l’impression que les secondes s’écoulaient à une vitesse d’escargot. Il saisit brutalement Tylen par l’épaule.

« Vivant ? … Il est vivant, Tylen ? »

« Oui… mais Caine, il est… euh, ow ! Tu me fais mal ! » protesta Tylen. Caine le relâcha aussi vite qu’il l’avait attrapé et se retourna pour partir. Ce faisant, Gerdie revenait, se frayant un chemin dans la foule avec les billets à la main.

« Hello ! » lui cria l’officier subalterne à travers la circulation piétonnière bruyante. Caine ne répondit pas, mais se tourna vers son vieil ami.

« Dis-lui de continuer sans moi. J’ai quelque chose à faire ».

Tylen hocha la tête et regarda Caine disparaître dans la foule.

* * *

Caine franchit la vieille porte rouge, affolé. Elle lui paraissait si vieille et si fragile à présent, comme un objet datant de plusieurs siècles. L’intérieur de la maison n’avait pas mieux résisté, plus défraîchie que jamais il ne l’avait vue. Le couloir sentait la mort. Des baumes et des liniments flottaient de la cage d’escalier au-dessus.

Alors qu’il entrait dans le hall d’entrée, un cri de surprise vint de la pièce d’entrée. Sa petite sœur, Bethany, le regardait fixement. À genoux, elle frottait la boue d’une paire de bottes de travail, tandis qu’une douzaine d’autres attendaient d’affilée. Elle leva les yeux de sa corvée, la bouche grande ouverte. La vue de son frère mort, mais aussi devenu soldat, l’avait transformée en statue.
« Beth ! » Caine s’approcha d’elle, se mettant à genoux et posant un bras sur son épaule. Elle s’élança pour l’étreindre, manquant de le faire tomber. Il lui rendit l’étreinte, la serrant avec intensément. Elle ne dit rien, mais se mit à sangloter sur son épaule. Il lui tapota la tête et se recula suffisamment pour la regarder dans les yeux.

« Papa. J’ai entendu dire qu’il… est-ce qu’il va bien ? » demanda-t-il doucement.

Bethany renifla, toujours sous le choc de la vision s’offrant à elle. Elle regarda au-delà de l’exigu hall d’entrée et vers les escaliers. Caine suivit son regard et hocha la tête. La tapotant une fois de plus, il se leva et se dirigea vers les escaliers.

La chambre était calme et sombre, avec des rideaux moisis retenant le soleil de fin d’après-midi. S’il n’y avait pas eu une respiration saccadée dans l’ombre, Caine aurait pensé que la pièce était vide. Tirant les rideaux, il vit son père allongé devant lui sur le lit. Le vieil homme était presque immobile et moribond, comme il ne l’avait jamais vu. Ses yeux fixant le plafond d’un air absent. Il avait vieilli de vingt ans en un peu plus de deux ans, si l’on en croyait les apparences. Ses cheveux avaient été réduits à seulement quelques mèches blanches, et sa silhouette autrefois charnue était maintenant presque squelettique. Caine remarqua une inquiétante cicatrice autour de son cou, tel un inégal collier.

Puis il cessa de respirer. Caine se précipita à ses côtés, posant une main sur son bras décharné.

Convulsant, le vieil homme trembla comme s’il était possédé, puis fut ravagé par une toux sèche. Sa gorge s’éclaircit, il respira à nouveau lentement et péniblement dans ses poumons atrophiés.

Caine s’assit sur une chaise à côté du lit et pris sa main en coupe. En il se pencha en avant, s’approchant de l’oreille de son père.

« P’pa ? » Il regarda Seamus, ne sachant pas quoi faire. Petit à petit, son visage se durcit.

Il ouvrit son long manteau, révélant le plastron de son armure. « Regarde ça ! Me vois-tu ? Suis-je encore un voyou pour toi ? Est-ce qu’un voyou porte l’armure du roi ? »

Caine observât le visage de son père, attendant désespérément un signe. Il n’y eut aucune lueur de reconnaissance dans ces yeux gris et flous. Ils se contentaient de fixer le plafond au hasard. Au fur et à mesure que l’attente se prolongeait, sa tête se mit trembler lentement. Deux années de dépit et de colère refoulés s’écoulèrent de lui et il s’affaissa dans le fauteuil en expirant longuement.

« Tu ne pouvais pas me laisser faire, n’est-ce pas ? » murmura-t-il.

« Il est comme ça depuis qu’ils l’ont battu », prononça Bethany depuis l’embrasure de la porte.

« Morrow, pardonne-moi, ils auraient dû le laisser mourir là-bas. Je jure que cela aurait été mieux. Mieux que ça », ajouta Bethany, le visage rougi. Caine fut choqué de voir à quel point elle lui rappelait sa mère la dernière fois qu’il l’avait vue.

« Où étais-tu, Allister ? Nous pensions que tu étais mort ».

« Je suis désolé, Beth… Je devais y aller ».

Elle hocha la tête sans un mot, venant à ses côtés. Elle baissa les yeux sur leur père, à la respiration sifflante, s’essuyant les yeux.

« Pourquoi ? Pourquoi est-ce arrivé ? » demanda-t-il.

« Qui sait ? » Bethany s’assit sur le lit, pris la main décharnée de Seamus et la caressa lentement.

« Maman a dit qu’il avait payé sa dette au Boss Dakin. Cela aurait dû être la fin. Mais quand Horace a pris la relève, il est venu le chercher, comme s’il avait un compte à régler. Il n’a jamais dit pourquoi. Sa bande a pendu P’pa sur la place de marché, à la tour de l’horloge, à la vue de tous. Il y est resté cinq minutes avant que quelqu’un prenne la peine de le descendre. Horace en a pendu une douzaine d’autres comme lui en une semaine. Tout le monde l’a vu, mais aucun témoin, bien sûr ». Bethany le regarda, mais Caine détourna le regard, la mâchoire serrée. Se levant, il se dirigea vers la porte.

« Où vas-tu ? Maman va bientôt rentrer de son service. Elle voudra savoir si tu vas bien », plaida-t-elle.

« Je ne suis pas bien, Beth. Pas du tout ».

* * *

Caine marchait dans la rue, le meurtre dans les yeux. Malgré la froideur, la rage brûlait en lui plu fort que la centrale énergétique à l’arrière de son armure. En fin de compte, trouver Horace ne fut pas un défit. Quelques ivrognes éméchés n’avaient pas tardé à l’informer que lui et son équipe se trouvaient à la Chaudière, comme la plupart des nuits, tout comme il l’avait fait la dernière fois que Caine l’avait vu. En s’approchant du bar, il put entendre l’air d’un violoniste et d’une foule bruyante chantant avec lui. S’approchant de la porte, il sortit son arme. Les quelques personnes rassemblées près de la porte lui jetèrent des regards effrayés et s’empressèrent de dégager la voie. Tout sauf un, Même dans sa rage, il reconnut l’ancien homme de main d’Horace à la main cicatrise qu’il avait tendu vers lui. À sa décharge, le grand tint bon, osant même s’emparer de sa propre arme.

Trop tard.

Trois enjambées après, Caine explosa de rage. Un arc de force projeta le truand contre les épaisses portes en bois, qui à leur tout se brisèrent tel du bois d’allumettes. Dans la taverne, le violoniste s’arrêta et brusquement la foule en délire se tût.

Caine enjamba la porte brisée et le truand inconscient, passant devant des clients stupéfaits qui avaient été renversés par la force de l’impact.

« Horace ! » Cria-t-il devant une foule abasourdie, les yeux brûlants comme des braises. « Sors de ton trou ! » Depuis le box du fond, Horace était assis, une servante à chaque bras. Le truand cligna des yeux, la tête penchée d’un air interrogateur. En vérité, Horace ressemblait encore beaucoup à ce que Caine avait vu la dernière fois, il n’en avait pas moins la face squelettique qu’avant. Pourtant, d’une manière ou d’une autre, il ne pouvait pas sembler plus différent. Là où Caine avait vu un adversaire ou une menace, il ne voyait plus qu’une proie.

Peu à peu, Horace commença à se bouger, plissant les yeux en signe de reconnaissance. « Bien sûr, bien sûr… J’arrive ». Cria-t-il paisiblement, s’adressant à moitié à la foule. Ses hommes le regardaient bouger, attendant le signal pour agir. Il leur fit signe de s’en aller, de s’éloigner du box.

Caine hocha la tête et se tourna vers la porte. Dans le silence feutré de la pièce, il entendit le bruit d’un pistolet qu’on armait.

Il sourit.

Revenant sur Horace en un clin d’oeil, son arme cracha une fois, un coup de tonnerre dans l’espace clos. Horace poussa un cri de consternation lorsque le tir fit tomber son arme au sol. Serrant sa main engourdie, il lança un regard noir à Caine.

« Tu veux faire ça ici, hein ? Bien. Ramasse ». Caine rengaina son arme, croisant les bras.

Le truand plongea vers l’arme, roulant derrière de ses précieuses serveuses s’étant cachée sous la table entre-eux. L’attrapant par le cou, il la souleva pour en faire un bouclier. Se penchant derrière l’épaule de la jeune femme, il tenta une nouvelle fois de braquer l’arme sur Caine.

Le deuxième pistolet de Caine cracha, suivit d’un autre coup de tonnerre et d’une corolle de fumée. Horace relâche la jeune fille et se roula par terre, à l’agonie. Sa main gauche avait été réduite en une masse de viande et de sang jaillissant. Une fois de plus, Horace avait lâché son pistolet. Caine, quant à lui, avait rechargé et rengainé.

« RAMASSE ! » aboya Caine, sa rage à son comble.

Horace, tremblant de douleur et de colère, tendit la main vers son pistolet. Il se redressa au prix d’un grand effort, haletant sous l’effet du choc. Caine l’observait, les bras croisés. Un bras tremblant souleva le pistolet pour viser, et essaya une fois de plus de tirer. Une fois de plus, la bouche du canon brilla et un coup de tonnerre rugit.

Horace chuta au sol en hurlant, sa rotule disparue.

Caine s’avança d’un pas insouciant vers le truand qui gémissait désormais. Cette fois, Horace n’osa pas toucher son arme. Il ne faisait que gémir lorsque Caine s’agenouilla pour lui remettre.

« Non ? » C’est tout ce que vous avez ? Personne d’autre ? Personne n’est capable de m’offrir un vrai combat ? » cria en jetant un regard circulaire furieux dans la taverne. Le silence lui répondit. Les clients restants, observant avec terreur sous leurs tables et derrière le bar. Les truands qu’il avait répérés et marqués avaient disparu. Il prit une profonde inspiration. À mesure que sa rage se calmait, ses manières devenaient détachées et calculatrices.

« Ainsi soit-il ».

Caine repoussa l’arme d’Horace puis se pencha sur lui pour le saisir par la chemise avec un grognement. Passant le bras valide du truand sur son épaule, Caine le remit debout.

« Allez, Horace. Nous allons nous promener ».

Sur le marché, orné de lumières colorées et de couronnes de Noël les deux hommes claudiquaient. Horace boitait pour suivre le rythme de Caine, il criait à chaque pas. Devant eux se tenait la grande Tour de l’Horloge du Marché, haute de cinq étages et ornée de rameaux de fête. Horace leva les yeux vers elle, la panique se lisant sur son visage.

« Je me souviens de toi… écoute, on peut résoudre ça, hein ? » plaida-t-il.

« Certainement ».

« J’ai de l’argent, tu sais ? Tu peux… prendre… autant que tu veux ». Il adressa un faible sourire par-dessus la douleur, essayant de paraître sympathique. Caine regard froidement Horace.

« Je voulais un moment. Tu me l’as pris. Tu peux me le rendre ? »

Le truand, déconcerté, le regarda d’un air absent.

Caine jeta un coup d’oeil vers le ciel, sa concentration se renfonçant. Fermant les yeux, il plia le monde autour de lui. Au prix de grands efforts, il amena le gangster blessé avec lui Le duo disparu, pour réapparaître sur le podium devant la tour de l’horloge. Respirant lourdement, Caine se balança sous l’effort qu’il avait fourni pour en faire apparaître un autre. Horace, désorienté par la téléportation, tomba à genoux, éclaboussant son dîner sur le côté de la passerelle. Tandis qu’il se relevait, Caine reprit son souffle et jeta un coup d’oeil à la gargouille à l’ange de la tour.

Cela fera l’affaire.

Il se pencha pour détacher une corde attachée à la gargouille. Cette corde était emmêlée avec des branches à une tour inférieure voisine. En tirant brusquement et avec force, la corde se détacha à l’autre extrémité, et les branches glissèrent jusqu’au sol. Alors qu’il enroulait la corde autour de son bras, le cadran géant rétro-éclairé de l’horloge marquait l’heure, les aiguilles de fer défilaient avec des battements forts et réguliers.

Toujours désorienté et à genoux, Horace ne se rendit pas compte que Caine confectionnait un nœud coulant avec la corde et l’attachait. Regardant par-dessus le bord, Caine remarqua que son spectacle avait rassemblé un large public, qui comprenait enfin les forces de l’ordre local. Les gardes crièrent de s’arrêter et de se rendre. Un Horace piteux au visage plat, leva les yeux vers Caine, essuyant la salive de ses lèvres.

« Pas comme ça. Pas… » Horace haletait tandis que Caine lui passait la corde au cou.

« Juste comme ça ».

Caine expulsa Horace de la passerelle d’un coup de pied. L’ex-truand tendit la corde avec un bruit sec, et ne convulsa qu’une fois avant de devenir un dernier ajout aux décorations des fêtes.

Caine disparu de la passerelle, pour réapparaître sur les pavés, vacillant un instant avant de tomber à genoux. Les gardes arrivèrent de tous côtés, l’armes aux poings, et il leva les mains d’un air moqueur.

« Bien. J’ai fini ».
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Background – Histoire des Royaumes d’Acier / Roman - La Voie de Caine
« Dernier message par elric le 18 janvier 2024 à 13:46:34 »
Quatre Ans Plutôt

592 AR, Été ; Académie de Stratégie Militaire, Port Bourne

Caine se tenait droit et concentré aligné avec une douzaine d’autres comme lui le long du champ de tir. Par une journée nuageuse, ils se tenaient à l’abri dans les épais murs de pierre de l’académie. Chacun était vêtu des capes bleues et grises patinées des cadets Mages Balisticiens de la Tempête Mystique. Leur panoplie état complétée par un tricorne, des lunettes de tireurs d’élite et l’arme de poing de marque, un pistolet cinémantique, rangé dans un étui à la taille.

À vingt pas de distance, l’équipe dans les fosses de la galerie mékanique complexe commença à faire fonctionner les rouages.

Derrière les cadets, le sergent-artilleur faisait les cents pas en ajustant ses propres lunettes. Ensuite, il serra ses mains derrière son dos et se racla la gorge.

« Cadets, à vos MARQUES ! » hurla-t-il d’une voix très mesurée.

Caine plia les poings et stabilisa sa respiration. Derrière ses propres lunettes, il cligna des yeux, comptant les points de la mêlée dans son couloir. Il écouta les pas du sergent derrière lui. Devant lui, la galerie s’animait. L’instructeur faisait encore les cents pas, sur le point de donner le mot… jusqu’à ce que…

« Cadets, FEU ! »

D’un mouvement fluide et délibéré, Caine sortit de son étui un pistolet richement gravé. Les runes gravées sur le canon brillaient faiblement à son contact. Régulièrement, il visait vers le bas et observait. Dans le couloir de chaque cadet se trouvait un kaléidoscope de cibles colorées et animées. Certaines se précipitaient de gauche à droite, d’autres se déplaçaient selon des motifs ou en arcs de cercle.

« Deux minutes ! » hurla le sergent-artilleur.

Caine aligna sa première cible. D’un murmure et d’une légère pression, le canon de son pistolet explosa avec une flamme scintillante. Des runes mystiques tourbillonnaient autour de son tir, le suivant comme un feu d’artifice. Il avait murmuré Briser, exactement comme ils avaient été entraînés, jour après jour ces huit derniers mois. Le mot lui avait-il appris, n’était pas aussi important que les pensées qu’il évoquait. Avec la bonne pensée, la volonté du mage balisticien s’imposait à son arme, et le tir lui-même s’en trouvait grandement modifié.

Dans le grand cadre du stand de tir mékanique, une plaque d’acier peinte en bleu s’agitait de haut en bas jusqu’à ce que le tir de Caine l’atteigne et qu’elle se brise comme autant de confettis.

L’un après l’autre, les cadets à sa gauche et à sa droite firent de même, murmurant leurs propres mots de pouvoir. La cour résonnait de la cacophonie des tirs ensorcelés.

Caine n’y prêtait aucune attention. Il était dans sa tête, les mains se déplaçant pour recharger sans lui, alors qu’il se concentrait sur sa prochaine cible. Cinq autres tirs et cinq succès de plus alors que les secondes s’égrenaient.

« Une minute ! »

Alors qu’il se concentrait, le monde autour de lui ralentit, s’assombrissant jusqu’à l’obscurité. Seules les cibles à distances semblaient encore vivantes, car elles entraient et sortaient de la cohue en quantité infinie. Il y avait des cibles rouges, articulées et lestées de briques. À eux, Caine chuchota Foudre, son tir se brisant à l’impact avec suffisamment de force pour les faire reculer. Il y avait aussi des cibles jaunes tournoyantes, placées bien à l’écart des autres. C’est à celles-ci que Caine murmura Portée, poussant son tir de plus en plus loin. Chaque fois que son pistolet se vidait, il s’arrêtait mécaniquement pour le recharger et tirait à nouveau sans hésitation. Il n’en avait encore manqué aucun.

« Trente secondes ! »

Il lui restait deux cartouches à la ceinture. Un score de treize était déjà impressionnant, à un point du record. Pourtant, il sentit une curiosité ludique l’éloigner de l’urgence du test. Il s’était souvent demandé, au cours des mois précédents, s’il ne pouvait pas évoquer une nouvelle façon d’augmenter son tir. Caine sourit en rechargeant. Pourquoi ne pas essayer ? Qu’avait-il à perdre ? Son esprit s’emballa alors qu’il rechargeait, excité de repousser de nouvelles limites. Son arme chargée, il concentra ses pensées. Il tendit la main, visant et tirant avec fluidité. Rebondir, murmura-t-il cette fois. Il regarda le tir voler et hocha la tête devant le résultat irrégulier. Pas mal, mais il pouvait faire mieux. Ses mains tremblaient tandis qu’il rechargeait, il avait désespérément envie d’un nouvel essai. Il visa à nouveau, et murmura encore une fois. Rebondir. Le coup de feu jaillit de la bouche et se dirigea vers la galerie. Les cibles se fissurèrent, se brisèrent et tombèrent, alors que le tir magique ricochait entre elles. Caine sourit au spectacle.

« Cadets, CESSEZ LE FEU ! »

La main de Caine remit l’arme dans son étui. Il adopta une posture de repos, croisant les mains derrière le dos. Prenant une inspiration, il laissa son attention vagabonder jusqu’à ce qu’il entende le pas de l’instructeur derrière lui.

« Cadet Caine, rompez ».

Avec des mouvements mesurés, Caine recula, et de plus d’un pas. L’instructeur se déplaça pour prendre sa position dans le couloir, regardant vers le bas.

« Couloir huit ; indiquez ! » Cria le sergent. Du niveau inférieur de la galerie sortit un bâton au bout duquel était fixé une ardoise Un numéro y avait été noté à la craie. Autour de lui, les camarades cadets de Caine commencèrent à murmurer. De son côté, l’instructeur commença à pester. « Cadet Caine ! Voudriez-vous m’éclairer sur la note parfaite pour cet examen ? »

« Quinze, sergent-artilleur ! » répondit Caine.

« Remarquable. Essayer de deviner pourquoi ce score n’a pas été battu depuis la fondation de cette école, cadet Caine ? » Il grogna. Caine évita de regarder l’hargneux instructeur, gardant les yeux baissés.

« Parce que nous ne recevons que quinze cartouches, sergent-artilleur ! »

« Brillant, cadet ! » Le sergent le contourna, étudia son visage à la recherche d’un signe de culpabilité. « Alors comment expliquez-vous votre score ?! »

Caine regarda le nombre griffonné sur l’ardoise. Il était noté dix-sept. Caine se retint de sourire, mal. L’instructeur s’en aperçut et entra immédiatement dans une colère noire, jurant ses grands dieux contre son insubordonné cadet. Enfin, il se calma.

« Je dis que vous êtes un tricheur ».

Caine se renfrogna. « Je n’ai pas triché, sergent-artilleur ! J’ai juste essayé quelque chose de différent… »

Si son explication visait à apaiser le sergent, elle eut exactement l’effet inverse. Le visage du pistolero grisonnant se teinta d’indignation.

« C’est c’la, Cadet Caine ? Vous voulez me faire croire que vous avez improvisé une nouvelle évocation sur place ? Suffisamment perfectionnée pour abattre plus de cibles que vous n’avez de tirs ? » Caine commença à ouvrir la bouche ? « Ne répondez pas ! J’ai compris, vraiment. Vous avez reçu un peu d’aide de vos camarades, c’est ça ? Combien ça vous a coûté de les persuader de faire des tirs croisés dans votre couloir ? Couloir sept et neuf, indiquez ! »

De nouveau, des ardoises avec des numéros griffonnés surgirent de la galerie, dans les couloirs adjacents à celui de Caine. L’instructeur se dirigea vers les cadets à gauche et à droite, comparant les chiffres à la craie avec les munitions restantes dans leurs bandoulières. Ses lèvres bougeaient tandis qu’il comptait pour lui-même.

Puis il s’arrêta.

« Cadets, ROMPEZ ! » aboya-t-il en pausant une main contraignante sur l’épaule de Caine. « Cadet Jenkins ! Faites-moi venir le lieutenant ! » Un à un, la classe de Caine passa devant lui. Le sergent-artilleur était devenu curieusement silencieux pendant qu’ils attendaient. Une minute plus tard, le lieutenant de l’école de combat sortait à grands pas du réfectoire, visiblement agacé.

« Il faudrait mieux que ce soit pour une bonne chose, sergent-artille », grommela le lieutenant en approchant. En remarquant Caine debout à côté du sergent-artilleur, il leva les yeux au ciel. « Gloire à vous ! Allons-nous encore parler du Cadet Caine ? Qu’est-ce que c’est cette fois cadet ? Pris avec de la gnôle dans la caserne ? Encore des combats ? » L’exaspération du lieutenant était palpable.

Le sergent-artilleur salua vivement lorsque l’officier s’arrêta devant lui, et Caine se tint au garde-à-vous.

« Pas cette fois, monsieur ». Répondit le sergent-artilleur. « Il semblerait que le cadet vienne d’obtenir un score légitime de dix-sept au test de tir ».
Le lieutenant se lécha les lèvres et cligna des yeux. « Sergent-artilleur, avec moi ». Dit-il presque voix basse.

Caine demeura au garde-à-vous, le visage tourné vers l’avant et les mains pressées le long du corps. Il observa cependant les mages balisticiens plus chevronnés arpentant le champ de tir le regard détourné. Après quelques minutes d’une discussion feutrée mais animée, ils revinrent. L’expression du lieutenant était indéchiffrable alors qu’il faisait face à Caine. Le sergent-artilleur, quant à lui, se dirigea vers l’armurerie au pas de course.

« Cadet Caine, la semaine dernière, le quartier-maître a prétendu qu’un de ses labor-jacks avait disparu au cours de la nuit. Je suppose que vous ne vous en souvenez pas ? »

La mâchoire de Caine se crispa et son esprit s’emballa, essayant de comprendre l’intention.

« Monsieur ? »

« Il semble que votre caserne était la seule à passer l’inspection le lendemain. Votre troupe était la seule à bénéficier d’une permission.

« Les… euh, les garçons et moi, on s’en est pris une bonne, monsieur », menti Caine. Depuis l’armurerie, il pouvait entendre le bruit de grands pieds chaussés de fer s’approchant, avec le sifflement rythmique de vapeur. La nausée commença à lui serrer les tripes et la vague de fierté qu’il avait ressentie quelques instants plutôt avait disparu depuis longtemps. Pourquoi le lieutenant en parlait-il ? Ne venait-il pas de faire quelque chose que personne n’avait jamais réalisé ? Ne devraient-ils pas le féliciter ? Et même lui demander comment effectuer l’évocation ? Comment se faisait-il que tout tournait si mal, si vite. Caine luttait pour garder son souffle, mais son coeur battait la chamade.

« Ou peut-être ont-ils été aidés ? Hein, cadet ? » Le lieutenant se tourna vers la porte de l’armurerie. À travers les portes ouvertes, une immense silhouette se pencha pour passer l’arcade et sortir de l’ombre. Il s’agissait d’un modèle Orient Motorisations usé, construit pour les tâches générales de travail. En apparence, il ressemblait à un homme en armure massive d’environ trois mètres de haut avec un visage en forme de visière, d’épaisses et bulbeuses épaules, des tendons de pistons et des mains surdimensionnées à triple articulation et à préhension en griffes. D’une cheminée située dans son dos s’échappait un filet de fumée. À côté de lui, le sergent-artilleur le faisait avancer en aboyant des ordres. Il affichait une expression d’indéniable suffisance.

« Vous savez, sans votre petit spectacle d’artillerie aujourd’hui, je n’aurais peut-être jamais organisé cela. » Les bras croisés du lieutenant étaient maintenant croisés, les yeux plissés.

Caine sentit la chose, ses pensées directes étant désormais repoussées aux confins de son esprit. À mesure qu’il se rapprochait, il le sentit lui aussi. Des yeux brûlants enfoncés au fond de la fente d’une visière grillagée se redressèrent et se fixèrent sur lui. Il essaya de ne pas le regarder, mais la reconnaissance qu’elle montrait le fit paniquer.

Non ! Reste en arrière ! Pensa-t-il, essayant désespérément de plier la machine semi-intelligente à sa volonté. Cela avait marché la semaine dernière, après tout…

Il ne pouvait plus l’arrêter.

La bête s’éloigna du sergent-artilleur et se dirigea vers Caine. En quelques grandes enjambées, la machine sifflante se tenait devant lui, soumise, la tête penchée.

« Oh par pitié ! Veux-tu simplement t’éloigner de moi ? Soupira Caine.

Cette fois, consciencieusement, le labor-jack recula d’un pas. Il resta immobile et pencha la tête une fois de plus, attendant un autre ordre.

« C’est ce que je pensais ». Le lieutenant hocha la tête. « Ce sera tout, sergent-artilleur ».

Le sergent-artilleur cria à la machine de reculer, mais elle restait fixée sur Caine.

« Monsieur, je ne sais pas… »


« Cadet Caine ! À la lumière de cela et d’autres incidents pour lesquels vous avez été cités, j’ai pris la décision de vous renvoyer immédiatement de cette école de combat ». Déclara le lieutenant d’un ton ferme.

Caine ne put cacher son indignation.

Plus d’un an de travail ! Bien sûr, il avait eu son lot de difficultés à s’adapter à la vie militaire, mais n’avait-il pas versé son sang et sa sueur dans cette uniforme ? N’avait-il pas fait preuve de talent ? Depuis cette dernière nuit avec son père, l’accomplissement de cette chose brûlait en lui comme jamais auparavant. Il allait le montrer à ce vieux salaud. Il lui en mettrait plein la face.

« Vous ne pouvez pas prendre ça ! » Un grognement lui tordit le visage et l’officier devant lui recula.

« Retirez-vous Cadet Caine ! » Le Lieutenant lui fit signe de partir. « Il s’agit d’une I pas d’un renvoi ! De toute évidence, nous perdons votre temps ici. Je vous envoie à l’école de combat de Caspia. Vos manigances vont probablement vous faire renvoyer, d’accord. Mais si ce n’est pas le cas, vous pourriez bien devenir un warcaster ».
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