Allez, je me lance ! Voici la présentation de mon manager cygnaréen :
Depuis l'aube, un certain brouhaha perdurait devant le comptoir de la Maison Ruhigenkrieg. C'était jour de recrutement ! Toutes sortes de soldat de fortune, de récolteur de morts, de routier ou de roulier se pressaient en files indiennes devant les portes gardées pour passer un à un en espérant remplir les conditions nécessaires à l'obtention d'un contrat. Subitement, près de la porte la plus à gauche, des éclats de voix commencèrent à augmenter en volume. Les propos tenus devinrent de plus en plus injurieux. Tant et si bien qu'une rixe ne tarda pas à se déclencher. Étant donné le caractère généralement sanguin de l'homme d'épée moyen, le nombre de participants enfla rapidement et les échanges de coups se répandirent sans surprise aux autres files d'attente. Bientôt, l'ensemble des gardes dument rétribués par la Maison sortirent mettre un terme à ce chaos grandissant. Profitant du tumulte et du désordre ambiant, un homme de belle prestance se faufila ni vu ni connu par l'entrée la plus à gauche. Le col de son long manteau renforcé était relevé et son chapeau bien baissé sur son visage avenant. Un observateur attentif pouvait également remarquer qu'un fourreau de rapière dépassait au bas de son grand habit.
A peine entré, le trentenaire se redressa et retrouva toute sa superbe, manifestant une belle assurance alors qu'il s'agissait de sa première venue au sein de ces lieux. Dès qu'un employé s'enquit de la raison de sa présence, il répondit avec hauteur, dignité, autorité et élégance : "L'intendant, je vous prie ! J'ai rendez-vous séance tenante !". Décontenancé par tant d'aplomb, l'employé ne voulut pas prendre le risque de courroucer l'inconnu, voire l'intendant si ce dernier l'attendait vraiment. Il le mena donc jusqu'au bureau de son supérieur. L'employé commença par frapper délicatement à la porte, attendit d'entendre une réponse et fut éberlué de voir l'élégant inconnu aussitôt ouvrir la porte et entrer dès que la voix de l'intendant se manifesta. Estomaqué par tant d'impudence, l'employé ne sut réagir à temps ni proférer la moindre protestation. De même, l'intendant écarquilla les yeux et ne put proférer la moindre parole avant que l'inconnu commence son entrée en matière :
"Bien le bonjour, maitre intendant, j'ai ouï dire que votre estimée Maison recherchait activement des officiers de qualité. Je vous rassure, j'ai bien eu connaissance du fait que vous désiriez recevoir un courrier de présentation avant d'accorder toute entrevue. Néanmoins, je crains que la froideur de l'écrit ne rende pas justice à mes talents. Je me suis donc fait un devoir que de venir vous présenter en personne les divers atouts dont je pourrais faire profiter votre Maison."
L'intendant haussa un sourcil. L'individu qui avait fait irruption dans son bureau présentait bien et ne manquait manifestement pas d'aplomb. Il fit donc un signe silencieux à son employé pour qu'il referme la porte et retourne à ses occupations. Ensuite, il sourit au nouveau venu et lui présenta un fauteuil face à son bureau. Le sourire et le regard incisif de l'intendant devinrent cruels au fur et à mesure de ses mots. Tout en parlant, il sortit un massif revolver d'un tiroir et le déposa en toute innocence sur le plateau de son bureau, canon tourné vers son interlocuteur.
"Installez vous donc. J'ose espérer que vous saurez me convaincre, mon joli. Sinon vous paierez votre outrecuidance en distrayant mes gardes par la qualité de vos cris.
- Sans forfanterie aucune, je gage y parvenir, maitre intendant. Tout d'abord, pardonnez moi ce manque aux convenances mais laissez moi me présenter. Je suis Brann-Wilfrid Sunbright de King's Vine, onzième neveu par alliance du Duc Fergus Laddermore, seigneur de Durnkeep. En effet, mon honorée mère est la sœur cadette du duc. Et mon digne père est un lointain cousin du Duc Mordrin Sunbright II, seigneur de Whiterock. Comme vous vous en douterez, j'ai donc reçu une formation militaire de premier ordre dès mon plus jeune âge. Le maniement de diverses lames, de diverses armes à feu et de diverses montures n'ont plus de secrets pour moi. Et bon sang ne saurait mentir, j'étais destiné à servir en tant qu'officier au sein de la puissante armée du Cygnar.
- Et donc, comment avez-vous échoué ici, votre seigneurie ?, demanda l'intendant sur un ton un peu goguenard contenant une ironie non dissimulée.
- J'y viens, maitre intendant, j'y viens. Voyez-vous... étant le cinquième fils de mon noble père, je n'avais quasiment aucun espoir d'hériter d'un titre familial, aussi ma jeunesse fut quelque peu... turbulente et rebelle. Et mes opinions politiques tranchées me valurent de me brouiller avec mon puissant oncle maternel. Ne souhaitant pas me retrouver sous son commandement, j'ai donc esquivé ma carrière toute tracée au sein de l'armée : je me suis engagé dans une compagnie de mercenaires. Souhaitant au plus vite quitter ma cité natale de King's Vine, je ne fis pas le difficile. Cette compagnie répondait au doux nom des Éperviers aux Serres d'Acier. J'étais jeune et ne souhaitait pas faire étalage de mon lignage. Je fus donc intégré comme simple recrue. Dans un premier temps, les missions furent aisées : traque de brigands, protection de villages face à des monstruosités en maraude. De la routine. Elles me permirent de gravir rapidement les échelons en pouvant démontrer mon entrainement et mes connaissances en tactique..."
Subitement le dandy fut interrompu par une voix tonitruante provenant de l'extérieur du bâtiment : "J' sais qu' t'es là-d'dans, foutu bâtard d' nobliau d' merde ! Sors d'ici !"
L'incriminé se racla la gorge avant de déclarer à l'intendant avec un ton désolé : "Veuillez m'excuser, maitre intendant, mais mon honneur ne peut tolérer que l'on manque ainsi à la vertu de mon honorée génitrice. Je reviens de suite." Et il se leva de son fauteuil et marcha à grande enjambées vers la sortie du comptoir. Des éclats de voix injurieux retentirent avant de laisser place aux cliquetis du ferraillement de lames. Brusquement interrompu par un râle d'agonie aussitôt suivi par des applaudissements et des vivas.
Peu après, Brann-Wilfrid fut de retour dans le bureau de l'intendant, souriant comme si de rien n'était, essuyant sa lame avec un linge brodé avant de la remettre au fourreau et déclarant :
"Incroyable comme un ruffian en armure complète se croit invulnérable face à une rapière. Ils oublient toujours que leur point faible se trouve au niveau des yeux."
Et il reprit sa place dans le fauteuil, toujours empli d'assurance.
"Où en étais-je ?
- Votre ascension chez les mercenaires...
- Si fait ! Donc mes talents me permirent de gagner le rang de lieutenant en juste quelques années de contrats peu risqués. Et je me serai sans doute contenté de cette position si subitement le Khador n'avait pas envahi le Llael. Notre capitaine décida d'aussitôt remonter vers le nord pour se faire engager parmi les défenseurs du royaume menacé. Nous fument engagés. Et nous nous battirent. Mais notre bravoure ne fut pas récompensée. Nous perdîmes du terrain et de nombreux hommes. Et même notre capitaine fut occis par un tir de Destroyer mal ajusté. C'est donc dans la défaite et la démoralisation que les lambeaux de notre compagnie firent un repli stratégique pour se renforcer. Bien sûr, il se posait tout d'abord le problème de la succession de notre capitaine..."
Des détonations sèches retentirent soudain, aussitôt suivies par des cris de douleur et des cris de panique. Puis d'autre détonations, plus proches, désordonnées. Ce fut ensuite un chaos d'échange de tirs. A nouveau, Brann-Wilfrid quitta son fauteuil et cette fois se précipita pour rejoindre la porte vers l'extérieur qu'il avait déjà empruntée. Restant à couvert, il dégaina le même genre de massif revolver que possédait l'intendant. Le genre de revolver lourd souvent appelé "canon à main". D'un rapide coup d’œil, il détermina que les tirs ennemis provenaient d'un bosquet non loin. A portée donc de son arme. Il commença par beugler :
"A terre, mes gaillards ! Repérez les tireurs embusqués ! Bien ! En joue !... Feu !"
La salve issue de nombreux fusils provoqua de multiples cris de douleurs depuis le petit bois. Brann-Wilfrid repéra un fusilier masqué qui orientait son arme vers lui. D'un mouvement prompt, il brandit son revolver et fit feu. Le canon de son arme s'auréola de lumière bleutée dessinant des symboles et cercles occultes. La tête ciblée explosa dans des gerbes de sang et d'esquilles d'os. Entre deux coups de feu, le trentenaire hurlait un ordre pour organiser ses tireurs et les faire se mettre à l'abri derrière les victimes inertes. Bientôt, le silence revint. Tous les agresseurs embusqués étaient soit neutralisés soit en fuite.
Brann-Wilfrid retourna donc à pas rapides dans le bureau de l'intendant, qui s'épongeait le front d'un mouchoir, le regard plus affolé qu'au début de l'entretien. Le gentilhomme présenta son arme à feu pour que l'intendant puisse l'admirer :
"Incroyable comme quelques runes sur un canon vous changent la vie d'un pistolero. Un investissement bien rentabilisé !
- Certainement...
- Mais reprenons. Donc, il fallait un successeur à notre capitaine. Et à cette époque, je me sentais la carrure pour prendre ce poste. J'ai donc du faire disparaître la concurrence. Par la persuasion, par la négociation ou par les armes. Mais je pus atteindre mon but et je devins le nouveau capitaine de la Compagnie des Éperviers aux Serres d'Acier. Ma première tâche fut d'en renouveler les rangs. Ce ne fut point difficile : nombre de soldats cygnaréens étaient désabusés de voir l'infanterie cantonnée à des tâches du génie alors que le prestige du combat était réservé à la cavalerie. Vous avez d'ailleurs la plupart des membres de ma Compagnie à l'extérieur de vos murs. Certes, j'avoue qu'ils ont provoqué le tohubohu précédant mon arrivée à dessein. Mais ne leur en voulez pas trop, ils avaient des ordres. Et ils viennent de repousser des malfaisants qui en voulaient manifestement à ceux que vous pourriez recruter. Vous semblez avoir une concurrence assez acharnée. Si vous vous pressez, vous pourrez peut-être faire main basse sur un blessé et l'interroger. Mais j'imagine que les postulants au recrutement vont maintenant être plus rares.
- Et bien...
- Alors ? Vous ai-je convaincu ? Seriez-vous intéressé de m'engager comme officier et de recevoir les services de ma troupe d'hommes d'armes ?
EDIT : j'avais juste oublié un mot au milieu du texte... et j'en profite pour corriger quelques fautes.