Auteur Sujet: Roman - Poudrière  (Lu 3786 fois)

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Roman - Poudrière
« le: 14 juillet 2024 à 13:48:44 »
CHRONIQUES DES ROYAUMES D’ACIER

ACTES DE GUERRE I

POUDRIÈRE

AERYN RUDEL

PARTIE I

PARTIE II

PARTIE III
Citation de: Maître Yoda
Trop gentil tu seras, dans le côté obscur tu l'auras.

Si vous constatez des fautes d'orthographe et/ou de conjugaison, des phrases à remanier pour une meilleur compréhension.
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Roman - Poudrière
« Réponse #1 le: 14 juillet 2024 à 14:04:03 »
PARTIE I

- 1-
Cinq-Doigts, Ord, 1er Trineus, 611 AR


LE LIEUTENANT LONAN DUFF DESCENDAIT la passerelle de la frégate ordique HMS Colère de la Jouvencelle tout en respirant le désagréable parfum de Cinq-Doigts. Même si l’arôme mélangé de la fumée de charbon, des marmites et de la sueur rance des humain, n’était pas agréable, c’est ce que l’odeur représentait qui le dérangeait le plus. C’était l’odeur du rivage, là où il était le plus vulnérable.

Il était le dernier à quitter le navire ; le reste de l’équipage était parti depuis longtemps pour quelques jours de permission et les réjouissance que cela impliquait. Bientôt, ils se dirigeraient vers Zu, la mystérieuse terre située loin au sud, servant d’escorte à deux frégates de la Maison Mateu transportant des fournitures et des hommes jusqu’à leur avant-poste sur cette terre exotique.

Il faudrait deux jours pour acquérir toutes les fournitures nécessaires, et le Capitaine Vanus de la Colère de la Jouvencelle avait ordonné à son équipage de se reposer et de s’amuser. Ils resteraient en mer pendant trois mois après avoir quitté Cinq-Doigts et n’auraient pas beaucoup d’occasions de  suite.

Lonan avait fait pression sur le capitaine pour qu’il soit autorisé à rester à bord, mais Vanus n’avait rien voulu savoir. Le capitaine pensait que la réticence de Lonan à descendre à terre n’était due qu’à sa maladresse sociale et à son sens du devoir. Il ne pouvait pas avouer au capitaine le véritable raison ; que son nom n’était pas Lonan Duff, mais le Prince Lyan di la Martyn, peut-être le seul héritier vivant du trône de Llael, un pays maintenant occupé par l’Empire Khadoréen. Il ne pouvait pas dire à son capitaine que son père, le Roi Rynard di la Martyn, était mort dans de mystérieuses circonstances, que le pouvoir du roi était assumé par un gouvernement corrompu et que presque tous ceux qui prétendaient au trôné avaient été tués ou forcés de se cacher. Non, il ne pouvait dire cela à personne, alors il avait quitté la cabine du capitaine, pris son pistolet et son coutelas, et s’était forcé à descendre la passerelle vers une ville remplie de voleurs et d’assassins, une ville où des agents de l’ennemi pouvaient être embusqués dans chaque recoin sombre.

Lonan s’avança sur le quoi bruyant et animé. La ville se profilait à l’horizon, une collection apparemment infinie de bâtiments qui s’estompaient tel un tapis gris sur l’Île du Capitaine, l’une des nombreuses îles sur lesquelles Cinq-Doigts s’était répandue comme une infection. La Colère de la Jouvencelle était amarrée dans le quartier Rivergrav District, l’un des plus fréquentés de la ville. Des hommes et des laborjacks – des automates massifs animés par la vapeur – envahissaient la jetée, déplaçant des marchandises vers et depuis les nombreux navires et bateaux fluviaux qui y étaient ancrés.

Il avait appris à se perdre dans la foule et se laissa entraîner par le flot de gens qui descendaient la jetée. Le quai était un lieu de mouvement constant, les gens allaient ou sortaient, et il y avait peu de destinations à part une poignée de tavernes ou l’un des nombreux navires amarrés.

Il baissa son chapeau et remonta le col de sa veste, dissimulant ainsi son visage. Son long manteau était trop chaud pour le climat, mais il cachait la chemise en cotte de mailles qu’il portait en dessous. De nous jours, il ne quittait jamais le navire sans une forme de gilet pare-balles. Il n’avait aucune destination en tête, mais errer pouvait être dangereux. Plus il était visible longtemps, plus il était probable qu’il soit vu par quelqu’un connaissant sa véritable identité.

D’habitude, il n’était pas aussi prudent ni aussi effrayé. Après que la guerre en Llael eut atteint son paroxysme, la recherche des héritiers du Roi Rynnard n’avait guère été une préoccupation urgente. Lonan se cachait en Ord depuis la mort de son père, et la guerre avait facilité ses déplacements. Il s’était engagé dans la marine ordique sous un nom d’emprunt il y a presque dix ans, travaillant dur mais n’atteignant délibérément que le grade de sous-lieutenant. Ce grade intermédiaire cachait ses véritables capacités et son intelligence sous un manteau de maladresse feinte et d’indifférence professionnelle et lui offrait un certain anonymat tout en lui accordant suffisamment d’autorités pour éviter occasionnellement les situations dangereuses.

Il conservait encore quelques contacts en Llael, mais ils étaient restés silencieux durant des années. Il supposait qu’ils avaient été tués lors des combats ou qu’ils avaient fui le pays comme lui. Il avait donc été choqué de recevoir une missive de l’un d’entre eux lors de sa dernière escale, une lettre suggérant que la recherche des héritiers ru roi avait repris, mais pas par des agents de ce qui restait du gouvernement llaelais ni même de la Résistance qui luttait contre les envahisseurs khadoréens. La notre comportait une unique ligne, et elle l’avait glacé jusqu’à l’os. Elle disait : Khador recherche les héritiers survivants.

Les khadoréens contrôlaient des pans entiers de l’ouest de l’Immoren, dont la capitale Merywyn, et ils n’avaient aucun intérêt à voir revenir un roi llaelais. La Résistance le souhaitait peut-être, car un héritier légitime pourrait galvaniser la population, mais personne ne l’avait jamais contacté, le croyant probablement mort. Les khadoréens ne pouvaient le rechercher que pour une seule raison : l’éliminer et supprimer la possibilité qu’un fils de Rynnard s’assoie un jour sur le trône de Llael.

Il n’y avait aucun signe d’assassins dans les différents ports qu’il avait visité au cours du mois dernier, bien que sa peur augmentait à chaque fois que son navire accostait. Sa récente affectation sur la Colère de la Jouvencelle avait été une aubaine, et son voyage vers la nouvelle frontière de Zu le mènerait en haute mer pendant des moi, bien au-delà de la portée du Khador. Il devait juste survivre aux deux prochains jours à Cinq-Doigts.

Il connaissait intimement la ville, où il avait été stationné pendant près de sept ans au sein de la Marine Royale. C’était un endroit où il pouvait se cacher et se perdre dans la foule grouillante de la tentaculaire ville, un havre connu pour les pirates et les contrebandiers, mais maintenant, il semblait que c’était l’endroit idéal pour que les assassins frappent. Le seul endroit  sûr pour lui était la forteresse navale. Il pouvait y trouver une relative sécurité parmi les marins stationnés dans la garnisons de la Marine Royale.

Le seul problème était que la garnison se trouvait sur l’Île Belliqueuse, ce qui signifiait qu’il devrait traverser une bonne partie de la ville, en passant par l’Île du Poursuivant et l’Île Doleth, pour l’atteindre. Il jeta un coup d’oeil à la foule affairée sur le quai. Des centaines de marins et d’ouvriers vaquaient à leurs occupations tout autour de lui. La plupart étaient des humains, mais il y avait quelques trollkin et i pouvait apercevoir de temps en temps un imposant ogrun parmi eux.

Personne ne faisait attention à lui et il se fondait dans la foule. Lonan accéléra le pas, se déplaçant avec le flot des gens. Il lui faudrait traverser l’un des nombreux ponts reliant les îles de Cinq-Doigts pour atteindre sa destination, et le premier n’était pas très loin.

Il resta près des nombreux entrepôts qui bordaient la jetée, évitant ainsi le gros de la foule. Par la suite, il progressa bien, s’éloignant de l’immense marina pour se diriger vers la partie plus commerciale des quais. Ici, les poissonniers et autres marchands vendaient leurs marchandises, et la foule passait de marins et des matelots à un mélange plus cosmopolite. Lonan n’aimait pas ça ; son uniforme naval le distinguait.

Il se dépêcha de traverser le marché, ignorant les cris des marchands et les bruits sourds de la foule. Le pont vers l’Île du Poursuivant n’était pas très loin. Il quitta le Rivergrav pour se rendre dans l’autre partie de l’Île du Capitaine, moins peuplée. Il s’agissait du District de l’Esprit d’Outre-Tombe, le centre industriel de l’île, où de gigantesques usines crachant de la fumée dans le ciel et d’innombrables entrepôts où étaient stockés les marchandises dominaient l’horizon.

Il était plus vulnérable ici. Il n’était pas seul, mais la foule était clairsemée, et il y avait de nombreuses allées sombres et étroites entre les bâtiments pouvait facilement abriter un assassin. Il se faufila entre les personnes se trouvant sur son chemin, les observant au passage, à la recherche d’un indice lui permettant de penser qu’ils étaient autre chose que de simple visages sans la foule. Il pouvait voir le pont maintenant, une chose massive de pierre et d’acier s’élevant au-dessus du canal entre l’Île du Capitaine et celle du Poursuivant. Ce fut un soulagement. L’Île du Poursuivant était avant tout un marché, et la garde y était donc plus importante.

Il n’en resta pas moins prudent à l’approche du pont. Il y avait des gens qui allaient et venaient sur le pont, mais devant celui-ci se tenaient deux hommes vêtus de longs manteaux gris, sous lesquels on pouvait voir le renflement révélateur d’épées ou de pistolets. Ils n’avaient pas l’air à leur place, ni parce qu’ils étaient armés, ni à cause de leur tenue vestimentaire. C’est la façon dont ils observaient la foule qui le terrifia. Leurs yeux s’attardaient sur tous ceux qui passaient devant eux, un regard pénétrant et scrutateur.

Lonan s’arrêta, son coeur battant dans sa poitrine. Il était possible que les hommes ne le cherchaient pas. Ils pourraient être employés par l’un des infâmes Hauts Capitaines, de puissants criminel qui étaient le véritable pouvoir de Cinq-Doigts, et celui qui n’avait rien à voir avec un prince de Llael exilé. Il se frotta la bouche et regarda derrière lui. La voie était libre et il y avait un autre pont, moins utilisé, menant à l’Île du Poursuivant en passant par le Rivergrav. Il pouvait faire demi-tour et repartir par où il était venu.

Il jeta à nouveau un coup d’oeil vers le pont. Les deux hommes le fixaient directement. L’un d’eux fit signe de tête à l’autre et ils commencèrent à se diriger vers lui.

Il envisagea de dégainer son pistolet et d’abattre l’un deux immédiatement. Il rameuterait probablement la garde, ce qui lui assurerait une certaine sécurité, mais il repoussa rapidement l’idée. La garde était aussi corruptible que tout le reste à Cinq-Doigts. Il commença à se déplacer dans l’autre direction. Il ne courait pas. Pas encore. Il se déplaçait à contre-courant des gens sur les quais, les dépassant. Il jeta un coup d’oeil par-dessus son épaule. Les deux hommes étaient toujours derrière lui, marchant rapidement.

Lonan se rendit compte qu’il les avait vus trop facilement, comme s’ils s’étaient placés là pour le forcer à se déplacer dans l’autre sens. L’effrayer vers-

Il se cogna contre une muraille de muscles, une muraille avec une mâchoire carrée, des yeux sombres et un manteau gris. La muraille lui enfonça également une courte lame dans les côtes.

La lame traversa le manteau de Lonan, mais la cotte de maille en dessous l’empêcha de pénétrer dans sa chair. Pourtant, la force derrière la lame était immense et Lonan sursauta de douleur lorsqu’une de ses côtes se fendit. Il trébucha en arrière, et les yeux de son agresseur s’écarquillèrent de surprise – il ne s’attendait pas à une armure – et s’avancèrent vers lui. Cette fois, Lonan sortit son pistolet, un pistolet lourd à répétition pour lequel il avait dépensé près d’un mois de salaire. Il tira à bout portant, deux fois : à la poitrine, à la tête. Le sang gicla et l’homme tomba. Des cris d’alarme s’élevèrent de la foule sur les quais et les gens s’éparpillèrent. Devant lui, Lonan pouvait voir d’autres silhouettes grises se diriger vers lui. Il voulait leur tirer dessus, mais il y avait trop de monde entre lui et ses cibles. Paniqué comme il l’était, il ne voulait pas risquer de gaspiller ses balles sur des cibles inutiles.

Il regarda par-dessus son épaule. Les deux hommes derrière lui se rapprochaient. Il était en infériorité numérique et probablement moins armé. À sa gauche se trouvait l’entrée d’un immense entrepôt, et il pouvait voir des laborjacks se déplacer à l’intérieur tandis que des ouvriers se tenaient debout et le regardaient. Certains d’entre eux étaient armés. La plupart des citoyens de Cinq-Doigts avaient une bonne connaissance de la violence.
Il se retourna et couru dans l’entrepôt, dépassant deux ouvriers dont l’un lui cria quelque chose. L’intérieur de l’entrepôt était un labyrinthe de caisses et de boîtes, et il essayait de maintenir sa direction, espérant trouver une sortie de l’autre côté.

Les imposants murs de boîtes l’empêchait de voir si ses agresseurs l’avaient suivi. Qui étaient-ils ? Son contact avait déclaré que des agents khadoréens le recherchaient, mais ces hommes n’étaient pas des soldats, du moins pas dans le sens normal du terme.

Il poursuivit son chemin, transférant son pistolet dans sa main gauche et dégainant son coutelas avec sa droite. Les caisses et les cartons s’amenuisaient, et il avait des raisons d’espérer lorsque l’autre côté de l’entrepôt présentait un espace dégagé et un ensemble de grandes portes doubles menant à une large allée.

Il voulu s’élancer vers la sortie, mais il eut à nouveau le désagréable sentiment d’être suivi par un troupeau sur un chemin choisi pour lui. La perspective d’une échappatoire était trop tentante, cependant, et il se précipita vers la porte ouverte.

En sortant dans la rue, la première chose qu’il remarqua fut à quel point la rue était vide ; la suivante était le grand bâtiment en pierre juste en face de lui. Il n’eut même pas le temps de lever les yeux avant que le premier coup de feu retentisse.

Quelque chose frappa son épaule gauche et le fit tourner sur lui même. Son pistolet s’échappa de sa main et une profonde douleur brûlante lui transperça l’épaule. Il retourna en trébuchant dans l’épaule, je jetant vers la gauche alors qu’un autre projectile ricochet sur le sol en béton. Lonan courut vers la première rangée de caisse à sa gauche, les hautes piles créant un chemin  étroit semblable à une ruelle. Le sang coulait le long de son bras gauche et essayer de bouger le membre blessé ne faisait jamais qu’intensifier sa douleur jusqu’à une agonie brûlante. La balle avait traversé sa cotte de mailles sans ralentir et avait probablement enfoncé certains maillons dans sa blessure.

Il écoutait tout en bougeant, mais l’entrepôt était devenu silencieux. Seul le grondement lointain des chaudières des laborjacks perçait le silence. Il approchait de la fin de la rangée, qui s’ouvrait sur une autre rangée s’étendant de gauche à droite en forme de T. Il ne fut guère surpris lorsqu’un autre des assassins vêtus de gris apparut dans l’intersection, un long sabre courbé à la main.

Il jeta un coup d’oeil en arrière. Un autre assassin se dirigeait vers lui. Un étrange sentiment de calme s’installa en lui. Son mort était imminente ; ces hommes étaient bien assez nombreux pour l’assassiner. Il se rassura en si disant que cela mettrait fin à la fuite et à la dissimulation. Il n’avait jamais été très pieux, mais il y avait probablement une place pour lui sur Urcaen, une place qui lui offrirait un semblant de paix.

Mais il n’irait pas docilement à la mort.

« Je suis Lyan di la Martyn », cria-t-il, donnant de la voix à un nom qu’il n’avait plus prononcé depuis plus d’une décennie. « Lequel d’entre vous, bâtards, mourra le premier ? »

Il fonça vers l’assassin armé du sabre. L’homme se déplaça et se mit en garde, le bras droit tendu, la lame pointée vers le sol.

Lyan se précipita en avant puis esquiva tout en effectuant un large revers. Il avait été formé au maniement de l’épée à la cour de son père, avec les meilleurs instructeurs, et il n’avait pas perdu ses compétences au cours des dix années qui s’étaient écoulées depuis. Il était plus rapide et plus habile que son adversaire, malgré sa blessure. Sa lame heurta celle de son adversaire, et son arme était plus lourde, et son arme plus lourde écarta le sabre le temps d’un battement de coeur, assez longtemps pour qu’il puisse riposter et transformer son premier coup en une puissance entaille. Sa lame s’enfonça dans le cou de l’assassin, traversant la chair et se logeant contre la colonne vertébrale de l’homme. Le sang jaillit et Lyan libéra son arme alors que l’homme s’effondrait au sol.

Il se retourna pour faire face à l’attaquant suivant, qui ne se précipitait pas sur lui – il avait attendu calmement que Lyan en finisse avec son compatriote. La main du tueur était tendue et un anneau de runes encerclait son poing de particules d’un bleu arctique.

Il n’eut pas le temps d’éviter ce qui arrivait. Lyan leva ses bras sur son visage. Une explosion d’un froid à craquer les os suivit alors qu’il était enveloppé par le sort de l’ensorceleur khadoréen. Ses muscles se contractèrent, sa respiration se figea dans ses poumons et ce fut comme si chaque centimètre carré de sa peau exposée était assailli par une douleur engourdissante. Sa cotte de mailles n’offrait aucune protection contre cette attaque, et les anneaux d’acier fusionnèrent en une feuille de métal glacé.

Le froid surnaturel arracha la force de ses membres et Lyan tomba à genoux. Il avait tenu son épée et l’avait brandie à l’approche de l’homme. Son assassin était grand, avec des traits nets et des cheveux noirs et clairsemés. Ses yeux étaient bleus, froid et impitoyables, et ses lèvres dessinaient un sourire crispé. Dans une main, il tenait une lourde hache de guerre, dont la lame était ornée de runes brillantes.

Lyan tenta un coup maladroit sur l’arcaniste, qui s’écarta avec désinvolture, puis frappa d’un pied botté et arracha la lame de la main de Lyan.

« Vous êtes courageux, Prince Lyan », dit l’homme. Son accent khadoréen n’était pas prononcé, mais il était indubitable. « Je ne m’attendais pas à ce que vous soyez… si fougueux ».

Lyan ouvrit la bouche pour s’exprimer, mais son corps tremblait si violemment à cause du froid qu’il eut du mal à prononcer quoi que se soit. « Fais-le », dit-il. « J’en ai assez de faire semblant… de cacher qui je suis ».

L’homme acquiesça, son visage se tordant en un simulacre de sympathie. « Oui, ces jours sont révolus pour vous », dit-il, et à la surprise de Lyan, il laissa tomber la hache à côté de lui et passa sa main sous son manteau. Il en sortit une longue dague droite à la pointe méchamment aiguisée. « Mais je ne vous abattrai pas comme un vulgaire chien. Vous méritez une meilleurs mort que celle-là. Une mort noble. Pouvez-vous vous tenir debout, Prince ? Pouvez-vous mourir debout ? »

Lyan se rendit compte qu’il avait la force de se lever et qu’il ne voulait pas mourir à genoux. Il se releva, haletant, la douleur lui traversant le corps. Le froid surnaturel avait gravement endommagé ses organes internes. Sa vision se brouilla.

« Fais-le », murmura-t-il.

« Avec plaisir ». L’homme posa une main sur l’épaule de Lyan et plaça la pointe de sa dague sur son coeur. « Au revoir, Prince Lyan. Je vous promets que votre mort marquera le début d’une nouvelle ère de grandeur pour votre nation ».

Il poussa Lyan en avant, enfonçant la lame à travers sa maille et dans son coeur.

Le choc de la lame pénétrant dans son corps céda la place à une chaleur se répandant, et Lyan di la Martyn accueillit favorablement les ténèbres s’élevant pour l’engloutir.
« Modifié: 01 septembre 2024 à 20:59:25 par elric »
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« Réponse #2 le: 14 juillet 2024 à 14:14:10 »
- 2-
Nord de Corvis


LE SEIGNEUR GÉNÉRAL COLEMAN STRYKER marchait en tête d’un long cortège de Chevaliers-Tempête. Son visage buriné était plissé d’inquiétude, le faisant paraître plus âgé que ses trente-cinq ans. Il passa une main dans sa mèche de cheveux rouge et regarda derrière lui. Il dirigeait une force plus réduite qu’il ne l’aurait souhaité, mais il ne seraient exposés que pour un court moment.

Ils étaient en route pour Merywyn, la capitale du Llael déchirée par la guerre, où les plus féroces ennemis du Cygnar les attendaient, mais il n’y allaient pas pour poursuivre leur conflit qui durait depuis des décennies, mais pour inaugurer une nouvelle ère de paix. Il avait combattu les khadoréens pendant des années et, d’après son expérience, la paix n’était pas un concept que la nation septentrionale de Khador considérait avec beaucoup d’enthousiasme.

 Il avait quitté Corvis il y a un jour et avaient suivi le Fleuve Noir vers le nord à bord d’une petite flotte de navires remplis de soldats et de dignitaires cygnaréens, mais ils avaient maintenant une partie du fleuve connu pour être en proie aux attaques des hommes-gator venant du Marais Bloodsmeath voisin. Les sauvages humanoïdes reptiliens avaient la mauvaise habitude de couler les navires passant sur leur territoire. Ainsi, il avait été décidé que pendant que le reste du convoi cygnaréen poursuivait sa route par bateau, Stryker et une petite force de Chevaliers-Tempête escorteraient le roi par voie terrestre. Il leur suffirait de marcher seize kilomètres sur la Grande route Commerciale du Nord pour atteindre le point où la flotte cygnaréenne es récupérerait, mais cela signifiait de passer près du Bois Scintillant, une forêt située à proximité des énigmatiques iosiens, des elfes xénophobes qui voyaient d’un très mauvais œil tout humain pénétrer sur leur territoire.

« Je n’aime pas ça. Nous sommes trop exposés, et trop peu nombreux », dit Stryker au Chevalier-Tempête musclé qui marchait à ses côtés. Le Capitaine Garvin Tews avait retiré son casque, dévoilant ses traits et sa mâchoire carrée. Il approchait la cinquantaine, mais était toujours en excellente condition de combat, et le poids de sa lourde armure de Lame-Tempête et du grand glaive-tempête voltaïque qu’il portait ne semblait pas le déranger du tout.

« Vous savez que notre roi pense qu’une plus petite force sera moins visible », déclara Tews.

« Et qu’en penses-tu, capitaine ? » demanda Stryker avec un sourire las.

« Je vous demande pardon, monsieur, mais je pense que le Roi Julius devrait laisser les questions de stratégie, en particulier lorsqu’elles concernent sa propre sécurité, à ceux qui ont plus… d’expérience » dit Tews en se mordillant la lèvre.

Le sourire de Stryker s’élargit. Tews était militaire depuis près de trente ans. C’était un chevaliers, comme tous les membres des Lames-Tempête, mais il était aussi un soldat, un fantassin dans l’âme.

« Les éclaireurs sont en retard », déclara Stryker. Il avait envoyé une escouade de rangers pour voir si la route présentait de potentiels dangers.

« Pas de beaucoup », répondit Tews en haussant les épaules. « Qu’est-ce qui vous inquiète, Seigneur Général ? »

« Probablement rien, mais nous approchons du Bois Scintillant, et il est proche de la route. Nous serions coincés entre elle et le fleuve à l’ouest ».

« Avez-vous peur d’une embuscade ? » demanda Tews.

« C’est que je la tendrais », déclara Stryker.

Tews se frotta le menton. « Maintenant, vous m’inquiétiez », dit-il. « Mais par qui, Iosiens ? »
« Il a pire que les elfes au sein de cette forêt », déclara Stryker. Il avait pris sa décision. Il leva un poing armuré. « Compagnie, halte », dit-il et le cliquetis des armures et des armes résonnant derrière lui lui apprit qu’une centaine de chevaliers avaient immédiatement suivi son ordre. Il regarda les rangs des chevaliers jusqu’à ce que deux imposants Cuirassés se dressent au-dessus des humains. L’un deux était son warjack personnel, Vî Arsouye. L’autre Cuirassé était contrôlé par un autre warcaster, le Capitaine Kara Sloan, qui, avec huit membres de la garde royale, protégeait le roi. Julius montait à cheval à proximité, dominant ses chevaliers. Stryker tendit son esprit vers Arsouye, et le cerveau mékanique du warjack devint un bourdonnement sourd à l’arrière de son crâne. Arsouye était irrité, anxieux. Il voulait se battre, mais il n’y avait rien à faire. Stryker maîtrisa les émotions du ‘jack et le calma.

« Lieutenant Archer », dit Stryker à un Chevalier-Tempête se trouvant à proximité. « Informez le roi que je pense qu’il est préférable que lui et le Capitaine Sloan retent là où ils sont pendant que la moitié de notre force part en éclaireur. Dites-lui que cela nous retardera d’environ trois heures ».

« Oui, monsieur », répondit le Lieutenant Archer en se précipitant vers le centre de leur courte colonne.

« À quoi penses-tu, Coleman ? » demanda Tews en s’approchant. Stryker connaissait le capitaine Lame-Tempête depuis quinze ans ; ils avaient combattu et saigné ensemble sur d’innombrables champs de bataille. Le fait qu’il utilise le prénom de Stryker ne dérangeait pas le seigneur général le moins du monde. Ils étaient plus que des frères d’armes, ils étaient des amis.

« Je n’arrive pas à mettre le doigt dessus », répondit Stryker, « mais il y a quelque chose qui cloche ».

« Tu penses pas que les khadoréens nous attaqueraient à la veille de notre traité de paix, n’est-ce pas ? »

Stryker secoua la tête. « Non, ce serait stupide, et il y a une chose que l’Impératrice Vanar n’est pas, c’est être stupide ».

« Et bien, tes intentions signifient généralement que la violence se profile à l’horizon ». Tews posa son casque sur sa tête et leva son lourd glaive-tempête, une épée à deux mains à large lame alimentée en énergie galvanique. Dans les mains d’un homme comme Tews, une telle arme pouvait facilement trancher un homme en armure en deux. « Cela fait longtemps que nous n’avons pas eu une bonne bagarre. Et le roi n’est pas mauvais avec une lame. J’espère néanmoins qu’il ne fera rien d’irréfléchi s’il s’agit de sang ».

Stryker grimaça. « Désolé, capitaine, mais le roi ne me confie pas son humeur, ses désirs et ses projets en général. Je n’ai pas sa confiance comme j’avais celle de Leto »

Deux ans s’était écoulés depuis la coûteuse guerre civile qui avait vu Julius, le fils de l’infâme tyran Vinter Raelthorne IV, monter sur le trône de Cygnar. L’oncle de Julius, Leto, avait abdiqué pour éviter une nouvelle effusion de sang, et une nouvelle ère avait commencé en Cygnar, une ère fans laquelle Stryker était de plus en plus éloigné de son nouveau roi.

Le Lieutenant Archer revint peu de temps après. « Monsieur », dit-elle, le visage plissé d’inquiétude.

« Crache le morceau », dit Tews. « Le seigneur général n’est pas du genre à tirer sur le messager ».

« Le roi va continuer à avancer derrière vous, mais gardera une bonne distance », déclara-t-elle. « Il pense qu’un retard de trois heures ne serait pas politiquement prudent ».

« Difficile de protéger un homme qui ne vous écoute pas », déclara Stryker, « mais il est le roi. Archer, peux-tu commander un warjack ? »

Elle acquiesça. « J’ai reçu une formation de base ».

« Bien. Amène les deux Sentinelle sous le commandement du Capitaine Sloan », déclara-t-il, désignant un type de warjack léger armée d’un solide bouclier et d’une mitrailleuse à grande vitesse. « Je les veux près du roi. Arsouye va m’accompagner ».

« Oui, monsieur », répondit-elle et elle se dépêcha d’exécuter ses ordres.

Il tendit son esprit vers Arsouye et exhorta le gros warjack à le rejoindre en tête de colonne. Le cuirassé l’atteignit rapidement, laissant échapper un souffle de vapeur strident en guise de salutation. Arsouye tenait son gigantesque marteau sismique dans un poing métallique et ouvrait et fermait l’autre. Le warjack sentit l’anxiété de Stryker à travers leur connexion.

« Très bien », prononça Stryker en se tournant vers la cinquantaine de Chevaliers-Tempête formant la tête de la colonne. « Je veux que les glaives-tempête soient activés, et je veux des yeux sur la lisière des arbres. Compris ? » Un choeur de « oui, monsieur » répondit. Il sortit sa propre arme, la grande épée mékanique Vif-Argent, des fermoirs magnétiques situés à l’arrière de son armure et la balança sur une épaule. « Alors, on bouge ».
* * *
LE BOIS SCINTILLANT ÉTAIT UN ÉPAIS enchevêtrement de chênes et d’ormes noueux, s’étendant loin à l’est. C’était un endroit sauvage entre les nations de Llael et Cygnar et les étendues arides des Marches Sanglantes à l’est. Des tribus de trollkin vivaient encore dans ces bois et cette fière race guerrière avait eu une histoire apre avec le Cygnar ,mais Stryker ne s’attendait pas à une attaque de leur part. On racontait que d’autres créatures plus sauvages vivant au sein du Bois Scintillant, mais les forces de Stryker étaient trop nombreuses pour constituer une cible tentante pour une bande de tharn. Qu’est-ce qui le rendait si inquiet ? Alors qu’il s’approchait de la lisière de la forêt, il ne pouvait se défaire de l’impression que quelque chose lui échappait.

Le roi et la moitié des Chevaliers-Tempête avaient allongé la distance entre eux et la partie de la colonne de Stryker, même s’ils étaient encore trop proches au goût de stryker. S’il y avait une attaque, il voulait prendre le plus gros avant l’arrivée du reste de ses hommes. Il jeta un coup d’oeil derrière lui. Le roi se tenait au milieu d’une groupe serré de Chevaliers-Tempête. Julius portait une armure similaire, et sa couleur bleue le rendait difficile à repérer parmi ses chevaliers par un ennemi. La poignée de l’épée du père de Julius, Régicide, dépassait de l’épaule du jeune homme – il était un épéiste doué, bien que loin d’être aussi impitoyable et sauvage que son père, qui fut singulièrement terrifiant avec une lame.

La route qu’ils suivaient, en terre battue offrant une assise stable aux soldats et aux warjacks, longeait le Fleuve Noir. Elle se rétrécissait considérablement face l’envahissant présence du Bois Scintillant, comme si l’antique forêt essayait de dévorer la route.

Bientôt, ils seraient contraints de former une colonne étroite, à moins de dix mètres entre le fleuve et la lisière de la forêt. Tous les yeux étaient rivés sur la pénombre parmi les arbres, à la recherche d’un mouvement. Stryker laissa ses sens dériver vers Vî Arsouye, se donnant ainsi un meilleur point de vue à trois mètres du sol.

Il n’y avait rien… puis un éclair blanc, et les muscles de Stryker se tendirent rapidement. Le suite ne fut pas une surprise, et il invoqua rapidement sa magie pour créer un champ d’énergie protecteur autour de lui et des Chevaliers-Tempête les plus proches. La vue des runes qui se formaient autour de son corps suffit amplement à alerter ses homme de l’imminence de la bataille, mais il cria malgré tout l’ordre « Chevaliers-Tempête, formez les rangs ! »

Il y avait cinquante Chevaliers-Tempête à l’avant de la colonne et cinquante autre plus loin, protégeant le roi. Les hommes autour de lui formèrent rapidement une ligne, leurs glaives-tempête pointés vers les arbres, une haie mortelle d’énergie voltaïque. Stryker était au centre avec Arsouye à côté de lui, le gros warjack frappant son marteau dans son poing ouvert, presque tremblant d’excitation à l’idée de ce qui allait se passer.

« Stable ! » cria Tews, près de Stryker.

Soudainement la forêt s’anima d’ombres blanches et du claquement révélateur de cordes d’arbalètes frappant leur aiguillons, puis une grêle de carreaux jaillit des arbres.

Stryker s’était attendu à ce que les Chevaliers-Tempête les plus proches de lui soient protégés par son sort, mais les éclairs ne furent ni ralentis ni déviés par la magie.

Du coin de l’oeil, il vit un de ses Chevaliers-Tempête chuter. Un carreau d’arbalète avait fait mouche. Celui qui les attaquait était assez habile pour trouver les ponts faibles de l’armure d’une Lame-Tempête.

« Feu ! » cria Stryker. Ses Chevaliers-Tempête actionnèrent le bouton de tir sur les poignées de leurs glaives-tempête, et des éclairs électriques s’élancèrent vers les arbres. Ils tiraient à l’aveugle, mais Stryker entendit des cris de douleur dans la forêt.

La zone boisée, ensuite, dégorgea de dizaine de guerriers en armure blanche brandissant de larges épées tranchantes et des boucliers portant l’icône en forme de boucle et de croix du Menofix, le symbole sacré du dieu Menoth. C’étaient des chevaliers du Protectorat, la nation théocratique à l’est de Cygnar, qui s’était récemment étendue au nord de Llael. Stryker n’eut pas le temps de réfléchir à leur présence ici qu’ils percutaient sa ligne de Chevaliers-Tempête dans un fracas d’acier contre acier.

La rage est le dégoût bouillonnaient en lui. Il avait combattu ces fanatiques à de nombreuses reprises, et leur adhésion aveugle et violente à leur religion avait coûté de nombreuses vies.

Avec Vif-Argent, un rencontra un chevalier chargeant, repoussant le coupé d’épée du guerrier du Protectorat avec sa bien plus lourde arme, puis ripostant et abattant Vif-Argent en un puissant arc tranchant. La lourde lame déchira le plastron du chevalier ennemi, le fendant jusqu’au sternum. Le chevalier fut mort debout, et Stryker repoussa le corps.

Il tendit son esprit vers Arsouye et envoya le warjack charger au milieu de l’ennemi, balançant son marteau sismique en décrivant de large arcs. Il n’était pas possible de parer un tel coup, et les chevaliers du Protectorat furent écrasés, leurs armures pulvérisée, leurs corps brisés.
Stryker jeta un coup d’oeil à sa gauche et à sa droite ; ses Chevaliers-Tempête ne s’en sortaient pas bien. Les guerriers du Protectorat était habiles et leurs lames légères et rapides trouvaient les lacunes de l’armure Lame-Tempête.
Tews criait et frappait avec son glaive-tempête. Il abattit un chevalier du Protectorat puis en tua un autre en la chargeant avec avec une décharge d’électricité.
Arsouye subissait des dégâts, mais pour l’instant ils étaient légers, et les cadavres en armures s’accumulaient autour des pieds du grand warjack.
Stryker s’apprêtait à rejoindre la position de Tews lorsque deux minces panaches de fumée apparurent au-dessus de la ligne des arbres. Cela signifiait qu’une chose : des warjacks. Les ‘jacks du Protectorat surgirent de la forêt à une trentaine de verges de la position de Stryker. Ils étaient plus petits qu’Arsouye, leur blindage était peinte en blanc et rouge, et les Menofixes étaient bien visibles sur leur coque. Les deux warjacks brandissaient de longues lames tranchantes dans chaque poing et se déplaçaient rapidement et gracieusement. Pire encore, ils n’étaient pas seuls.
L’homme qui émergeait de la forêt, derrière les warjacks, portait peu d’armure, et son massif torse était nu, exposant des muscles et du tissus cicatriciels. Son visage était couvert par un masque doré et il brandissait un lourd fléau dans une main, la majeure partie de son chaîne étant enroulée autour de son bras. Stryker le connaissait : il s’appelait Amon Ad-Raza, un warcaster tout comme lui et l’un des combattants les plus meurtriers du Protectorat.
La raison de l’attaque était on ne peut plus claire. La paix entre le Cygnar et le Khador signifiait que l’une ou l’autre des nations, ou les deux, pourraient tourner leur attention vers un ennemi commun : le Protectorat de Menoth. Cela menacerait les possessions du Protectorat en Llael. Le Cygnar avait envisagé que le Protectorat réponde au traité d’une manière ou d’une autre, mais une attaque sur la route, si près de la frontière de Cygnar et contre le roi en personne, avait été la moins probable.
Stryker avait écouté son instinct, l’ayant conduit en toute sécurité à travers plus de dangers qu’il ne pouvait s’en souvenir. Julius n’était pas dans la partie avant de la colonne là ou Amon Ad-Raza avait probablement considéré qu’il se trouverait. Le warcaster avait levé la main trop tôt ce qui avait donné une chance à Stryker.

Il regarda en direction de l’endroit où était positionné le roi, à environ cinquante verges de la position de Stryker ; la garde du roi avaient formé une cercle protecteur autour de lui, un mur mortel formé de glaives-tempête. Une vague de panique traversa Stryker lorsque Julius s’éloigna de la Protection de ses gardes pour engager deux chevaliers du Protectorat ayant réussi à atteindre sa position. Pourtant, Stryker n’avait pas à s’inquiéter. La lame du roi était un être vivant, un serpent d’acier et de sang, et il maniait Régicide avec une telle vitesse qu’elle ne semblait rien peser. Julius bloqua un coup d’épée du premier chevalier, puis faucha l’ennemi d’une riposte si rapide que Stryker ne la vit pas. Le Chevalier du Protectorat était debout, l’instant d’après, il gisait en deux morceaux aux pieds du roi. Julius tua le chevalier restant d’un coup sec, faisant passer Régicide à travers le plastron de l’homme, son corps, puis son dos armuré. Julius dégagea sa lame et retourna calmement sous la protection de ses chevaliers.

Stryker concentra à nouveau son attention sur son environnement immédiat, abattit un autre chevalier ennemi chargeant sur lui et appela Arsouye à sa position. Il aurait besoin du gros Cuirassé pour s’occuper des warjacks ennemis. Il ressentit l’empressement d’Arsouye, puis les pas tonitruants du warjacks fonçant vers Stryker.

Amon Ad-Raza avait engagé les Chevaliers-Tempête les plus proches, et ses warjacks les transperçaient dans un déluge d’acier et de sang. Stryker fonça, sans se soucier des ennemis, les abattant lorsqu’ils se trouvaient sur son chemin ou laissait Arsouye les écraser.

Amon regarda dans sa direction alors que Stryker s’approchait, et des runes jaune vif se formèrent autour du poing lourd du guerrier du Protectorat. Une torride chaleur entoura Stryker lorsque le sort prit effet, et son champ d’énergie s’enflamma alors qu’il tentait de compenser. Son armure de warcaster finit par encaisser le plus gros, et l’acier chauffé  brûla la peau de ses bras et de ses jambes. Il serra les dents contre la douleur et courut, invoquant un sort de son cru. Un éclair jaillit de sa main tendue, un éventail d’énergie bleu-blanc se dirigea vers son ennemi. Amon n’était pas encombré par une armure, et son entraînement au sein de l’Ordre monastique du Poing l’avait rendu incroyablement agile. Il esquiva la foudre en bondissant, évitant les éclairs avec une facilité qui sembla enfantine.

Les Chevaliers-Tempête derrière Stryker combattaient toujours les chevaliers du Protectorat, et ceux qui les précédaient essayaient toujours de repousser les warjacks d’Amon Ad-Raza. Stryker ordonna à Arsouye de s’attaquer aux warjacks ennemis pendant qu’il poursuivait Amon. La sensation excitante du premier coup porté par le Cuirassé à l’aide de son marteau sismique fut transmise par leur lien, suivie de la satisfaction d’Arsouye lorsque la coque du premier warjacks s’écrasa.

Stryker jeta un coup d’oeil vers le reste des forces cygnaréennes et le roi. Des silhouettes en armure bleue se déplaçaient maintenant dans sa direction. Le roi était parmi eux ; il se jetterait sans doute dans la bataille aux côtés de ses hommes. Stryker ne pouvait pas permettre cela, ne pouvait pas permettre à Amon Ad-Raza de se rapprocher à ce point de Julius.

Stryker se trouvait à six mètres de son ennemi quand Amon lança son fléau en avant, la lourde balle à l’extrémité arrivant sur Stryker comme un grand météore doré. Il se tourna sur le côté et l’arme le manqua de peu. Amon ramena son bras en arrière. L’arme revint vers lui.

Stryker était maintenant assez proche pour frapper avec Vif-Argent. Il était rapide et habile, et il avait canalisé sa volonté dans le coup, mais Amon s’enfuit en dansant. Vif-Argent frappa dans le vide.

À nouveau, le fléau d’Amon se dirigea vers lui. Cette fois, Stryker tenta de le dévier avec son arme. Il y parvint – partiellement. Il écrasa la tête du fléau, mais celui-ci le frappa quand même d’un coup sec et le projeta en arrière, son plastron enfoncé au-dessus de son abdomen.

Amon observa l’endroit où le reste des forces cygnaréennes avançait sur la route. Il réalisa clairement que sa cible n’était pas là où il l’avait initialement pensé. Stryker tenta de se rapprocher à nouveau, et Amon envoya son fléau en arc de cercle dans sa direction. Cette fois, Stryker tint bon et plaça Vif-Argent devant lui. Il fit un pas de côté alors que la tête du fléau se dirigeait vers lui et il frappa la chaîne le reliant à Amon. L’acier consacré était trop solide que pour être coupé, mais le coup changea la direction de la tête du fléau qui s’enroula autour de Vif-Argent. La force du coup faillit arracher l’arme des mains de Stryker. Mais le fléau d’Amon était coincé, et le warcaster du Protectorat allait l’arracher d’une seconde à l’autre. Stryker pressa la gâchette situé à la base de la poignée de Vif-Argent, déclenchant l’explosion voltaïque. Des éclairs s’élevèrent dans les cieux et le long de la chaîne du fléau, dont le manche métallique était tenu dans la main droite d’Amon.

Le corps d’Amon se figea sous l’effet de l’énergie galvanique le traversant. L’effet ne serait pas suffisant pour tuer le warcaster ou même lui causer des dommages durables, mais cela offrit à Stryker l’ouverture dont il avait besoin. Il se dégagea du fléau d’Amon et fonça en direction de son ennemi en lui assénant un large coup de taille. Amon avait suffisamment récupéré, mais ses réactions étaient ralenties. Il essaya de s’éloigner de la lame de Stryker une fraction de seconde trop tard. La pointe de Vif-Argent mordit le flanc d’Amon. Bien qu’Amon ne portait aucune armure, le coup de Stryker rencontra comme s’il en portait une. Les étranges méthodes de l’Ordre du Poing protégeaient leurs corps des blessures. Pourtant, la lame était entrée en contact, trancha la chair et les côtes se brisèrent sous l’impact.

Amon s’éloigna en trébuchant, tirant son fléau derrière lui. Du sang coulait de son flanc, mais Stryker ne pouvait dire l’étendue de la blessure. Il prit un moment pour surveiller Arsouye. À travers les yeux du warjack, il que vit que les deux warjacks du Protectorat étaient à terre, détruits par Arsouye et les attaques concentrées des Chevaliers-Tempête restants.

Stryker se retourna vers Amon, prêt à lancer une nouvelle attaque, mais le warcaster du Protectorat inclina la tête dans sa direction.

« Ne pensez pas que c’est fini, Seigneur Général », dit-il, sa voix grave mais toujours lointaine derrière son masque. « Vous ne pouvez endiguer le flot de ceux qui suivent la Vraie Loi, quelles que soient les alliances que vous concluez ».

Avant que Stryker ne puisse répondre, Amon se retourna et courut vers le Bois Scintillant, une main serrée sur son flanc blessé. En quelques secondes, il disparut dans les ténèbre de la forêt. Amon avait confirmé la raison de l’attaque, comme Stryker l’avait soupçonné. Pourtant, il ne pouvait rien faire de plus avec ces informations, et ce qui restait des chevaliers du Protectorat reculait. Il entendit Tews ordonner de les laisser partir.

Stryker inspira profondément et laissa son corps se détendre, laissant l’adrénaline refluer. Tews le rejoignit.

« C’est grave ? » demanda Stryker au capitaine des Lames-Tempête.

Tews secoua la tête. « Difficile à dire pour l’instant. Au moins cinq morts, dix autres blessés. Je suppose que les éclaireurs que nous avons envoyés en avant son morts aussi ».

« Bon sang », prononça Stryker dans un souffle. C’était le prix du commandement. Même la victoire avait un coût.

Le reste des forces cygnaréennes les avait rejoints, avec à leur tête le Capitaine Kara Sloan. La warcaster était grande et fine, avec des cheveux blonds courts et des taches de rousseur sur le nez. Elle tenait à deux mains un fusil à canon long mékanique. Stryker avait souvent combattu aux côtés de Kara, et il savait qu’on pouvait compter sur elle pour faire des ravages avec son arme.

« Seigneur Général », dit Kara, « Le roi est en sécurité. Je lui ai conseillé de rester en arrière ».

« Merci, Capitaine Sloan », répondit-il. « Je pense que nous en avons fini ici. Amenez davantage d’hommes pour s’occuper des morts et des blessés.

« C’était Amon Ad-Raza ? » demanda-t-elle, les yeux écarquillés.

Stryker acquiesça. « Je suis aussi surpris que vous ».

« Par Morrow, que faisait-il ici ? »

Stryker lui offrit un sourire fatigué. « Échouer à tuer notre roi ».
« Modifié: 21 juillet 2024 à 16:26:54 par elric »
Citation de: Maître Yoda
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« Réponse #3 le: 21 juillet 2024 à 16:32:15 »
- 3-
Merywyn, Llael Occupé par le Khador


STRYKER MARCHAIT À NOUVEAU en tête d’un cortège de Chevaliers-Tempête, Tews à ses côtés, son large visage sombre.

« Par Morrow, je me sens pas à ma place », dit Tews.

Stryker ne dit rien, mais il ne pouvait guère contester cette affirmation. Il menait ses Chevaliers-Tempête non pas au combat, mais à travers l’immense cour vers l’un des plus grands bâtiments de tous les Royaumes d’Acier. La Grande Cathédrale de l’Ascendant Rowan à Merywyn surpassait à peu près toutes les autres structures morrowéennes dans le monde, à l’exception de la Cathédrale de l’Archicour de Caspia, le siège du pouvoir morrowéen.

Devant la puissante cathédrale et le long la voie de pierre banche menant à son entrée, deux régiments complets de soldats étaient alignés : l’un cygnaréen, l’autre khadoréen. C’était un choquant contraste de rouge et de bleu devant le blanc immaculé de la chapelle. Chevaliers-Tempête, chevaliers de l’épée et trois warcasters se tenaient au garde-à-vous du côté cygnaréen. Le Capitaine Sloan avait voyagé avec Stryker, le troisième warcaster, le Capitaine Jeremiah Kraye, et un contingent de chevaliers de l’épée étaient venus de Port Bourne pour les rejoindre à Merywyn. Stryker ne pouvait s’empêcher de penser que si Kraye avait été avec eux sur la route, ils auraient peut-être perdu moins d’hommes dans l’embuscade du Protectorat De plus, quatre warjacks – deux Cuirassés et deux Sentinelles – se tenaient devant l’ensemble des troupes cygnaréennes. Les cortexes des warjacks formaient une présence bourdonnante à l’arrière du crâne de Stryker, l’un plus fort que tous les autres. Il sourit alors que Vî Arsouye tournait la tête vers lui. Le warjack de confiance et marqué par les combats, laissa échapper de la vapeur dans un sifflement strident en guise de salut, ce qui sursauter le contrôleur à côté du Cuirassé.

Calme-toi, mon vieil ami, pensa Stryker en regardant le warjack. L’agressivité d’Arsouye et son instinct à chercher la bataille étaient renforcés par les problèmes qu’ils avaient rencontrés sur le chemin de Merywyn. Stryker ne pouvait pas blâmer le warjack.

En face des cygnaréens, les khadoréens avaient rassemblés leur propre démonstration de force martiale. Des rangées de Man-O-War Troupes de choc, robustes soldats enfermés dans d’énormes armures à vapeur, se tenaient à côtés de rangées de Crocs de Fer à l’armure plus conventionnelle, leurs larges boucliers reposant sur le sol, les piques plantées, les pointes s’élevant vers les cieux tel un bosquet de pointes. Deux warcasters khadoréens furent reconnus par Stryker parmi les troupes. Le premier était le Kommandeur de Front Sorscha Kratikoff, une guerrière aussi froide et impitoyable sur le champ de bataille que toux ceux qu’il affrontés, grande et glacial comme un glaçon, une forme donnée et une fonction meurtrière. Parmi les khadoréens se trouvait également la Kommandeur Strakhov, à la mâchoire carrée et aux cheveux noirs, un soldat robuste, marqué par les batailles, aimé par sa nation et détesté par ses ennemis. Stryker avait affronté les deux au combat à de nombreuses reprises. Et, bien sûr, il y avait des warjacks khadoréens, des monstruosités d’acier et de fer semblant toujours primitifs à Stryker, mais il les avait affrontés au combat, et leur efficacité était incontestable.

Devant Stryker et Tews marchaient deux hommes, tous deux majestueux et royaux. Le premier était l’ancien roi de Cygnar, Leto Raelthorne, qui avait récemment abdiqué son trône au profit de son neveu et fils de son frère, le tyran Vinter Raelthorne. À dix-neuf ans, Julius Raelthorne ressemblait plus à son père qu’à son oncle. Grand et mince, avec des cheveux noir et des traits carrés et acérés, le jeune roi se déplaçait avec la grâce et l’assurance d’un guerrier. Le jeune roi dégageait une froideur de prédateur faisant frémir Stryker. Tout comme son père.

Stryker se faisait encore à l’idée du fils de Vinter Raelthorne, un tyran qu’il avait aidé à chasser du trône il y plus de quinze ans, une homme qu’il avait contribué à vaincre lors de la récente tentative de Vinter de revenir en Cygnar en tant que roi légitime. Leto avait abdiqué pour éviter une longue guerre civile qui aurait coûté cher au Cygnar, et Stryker pouvait comprendre le raisonnement de son ancien roi. Mais il y avait beaucoup de Vinter dans Julius, et contrairement à sa relation avec Leto, Stryker n’avait pas la confiance du jeune roi.

« Serrez les dents, capitaine », dit Stryker, remarquant enfin le commentaire de Tews. « Ce sera bientôt terminé, et nous pourrons rentrer chez nous ».

« Oui, monsieur ». Tews fixait les troupes khadoréennes à sa gauche, et si Stryker connaissait l’esprit de son ami comme il le pensait, Tews essayait probablement de calculer le nombre de khadoréens qu’il pourrait tuer si les choses tournaient mal.

Il y avait peu de chance que la violence éclate, cependant. Ils étaient ici à l’invitation de l’Impératrice Ayn Vanar en personne pour signer un traité qui mettrait fin aux combats entre leurs deux nations. Après une coûteuse guerre civile et avec un nouveau roi sur le trône, le Cygnar avait besoin de temps pour guérir, et la fin de la guerre de dix ans avec le Khador leur offrirait ce temps.

Sur les grandes marches de la cathédrale attendait leur hôte, l’Impératrice Ayn Vanar, une femme majestueuse aux cheveux de jais, à la peau ivoire et aux yeux sombres. Elle paraissait petite, voire fragile, mais elle avait de l’acier dans le sang, et elle dirigeait le Khador d’une main de fer depuis plus d’une décennie. À ses côtés se trouvait un homme que Stryker reconnut immédiatement. D’une beauté sombre et vêtu d’une armure cramoisie baroque, le Grand Prince Vladimir Tzepesci était un noble puissant régnant sur une vaste étendue du Khador et dont la lignée pouvait remonter jusqu’à l’antiquité ; comme Stryker, c’était un warcaster. C’était aussi un impitoyable et brillant chef militaire. Stryker avait croisé le fer avec Vlad à plusieurs reprises, et le khadoréen était à la fois habile et sournois. Sa présence ici en contribuait guère à apaiser les doutes de Stryker.

« Impératrice Ayn Vanar », prononça Julius lorsque le petit cortège de cygnaréens s’arrêta au pieds des escaliers. Il inclina la tête mais ne s’inclina pas ; après tout, il parlait à un égal. « Merci d’avoir accepté de nous rencontrer ici à la Cathédrale. C’est un magnifique bâtiment, en quelque sorte épargnée par tous les… conflits que cette ville a connus ces derniers temps ».

L’impératrice sourit, mais son sourire n’atteignit pas ses yeux. « Bien sûr, Roi Julius. Il est normal que nous nous rencontrions dans un endroit où vous seriez plus à l’aise, puisque vous avez gracieusement fait le long voyage jusqu’à notre ville ».

« Leur ville, » murmura Tews.

Stryker lança un regard de reproche au capitaine, mais il eut la même réaction à la déclaration de l’impératrice. Les khadoréens s’étaient emparés de Merywyn lorsqu’ils avaient envahis le Llael, et ils occupaient désormais une grande partie de cette nation. Le Cygnar était allié au Llael et avait aidé la Résistance Llaelaise à combattre les envahisseurs. Tout cela était désormais terminé, du moins en ce qui concerne la participation du Cygnar, même s’il était peu probable que la Résistance reconnaisse le traité que son roi s’apprêtait à signer.

« Votre Majesté, je vous présente le Grand Prince Vladimir Tzepsci », dit l’Impératrice Vanar en posant légèrement sa main sur l’épaule armurée de Vlad.

Julius inclina la tête en direction du warcaster. « Prince Tzepesci, j’ai beaucoup entendu parler de vous », dit-il. « Vous êtes un puissant ennemi pour le Cygnar, et je me réjouis de vous compter parmi nos alliés ».

« Vous m’honorez, Votre Majesté », répondit Vlad en s’inclinant. « Je suis moi aussi impatient de vous compter parmi mes amis et alliés ». Son accent était plus perceptible que celui de la reine, les consonnes plus aiguës, certains mots plus prononcés.

Stryker avait assisté à de nombreuses négociations officielles, et il connaissait assez bien le ballet des plaisanteries feintes, mais celui lui déplaisait toujours entendre le roi s’exprimer si gentiment à un homme ayant probablement massacré des centaines, voire des milliers de soldats cygnaréens.

« Je remarque que le Général Stryker vous accompagne, Votre Majesté », dit Vlad en regardant par-dessus l’épaule de Julius.

Julius jeta un coup d’œil à Stryker et à sa garde d’honneur composée de Lames-Tempête. « Bien sûr, le seigneur général est un membre apprécié de mon conseil ».

« Je n’en doute pas », répondit Vlad. « Il est bon de vous revoir, Seigneur Général, dans des circonstances… plus agréables ».

« Stryker hocha la tête. « Et vous, Prince Tzepzsci. Notre dernière rencontre fut bien moins… agréable que celui-ci ».

La tension était palpable. Des hommes qui, autrefois, s’étaient qualifiés d’ennemis acharnés ne pouvaient pas mettre leurs différends de côté aussi facilement, et ils recouraient aux armes à leur disposition : dans ce cas, des paroles acerbes et des plaisanteries forcées.

« J’ai cru comprendre que vous aviez rencontré des problèmes sur la route », dit Vlad.

« Nous avons été attaqué, oui. Une tentative d’assassinat contre notre roi par le Protectorat de Menoth ». Stryker fut surpris que Vlad soit déjà au courant de l’attaque.

« Ils craignent la force que nous tirerons tous deux de notre alliance », répondit la reine. La colère traversa son visage. « Mais attaquer un souverain de cette manière est impensable et indigne des zélotes du Protectorat ». Sryker fut impressionné par les talents d’actrice de l’impératrice. Sa sincérité en aurait trompé plus d’un, mais pas Stryker. Il se demandait à quel point elle serait en colère si Amon Ad-Raza avait réussi. Elle-même avait récemment tenté de tuer Leto. Bien sûr, tout cela avait été pardonné au nom de l’opportunisme politique.

« J’étais bien protégé, Votre Majesté », dit Julius. Le roi avait avait peu parlé de l’attaque et ne semblait guère troublé par celle-ci. « Les assassins n’étaient pas à la hauteur de Seigneur Général Stryker et de ses Chevaliers-Tempête ».

« Bien sûr », dit Vlad. « Les prouesses au combat du seigneur général sont bien connues ». La tension revint , et avant que Stryker ne puisse répondre à Vlad, le Haut Chancelier Leto l’interrompit net.

« Votre Majesté », prononça l’ancien roi, « nous avons beaucoup à faire. Peut-être devrions-nous débuter ».

Julius regarda son oncle et sourit. Quelque chose traversa son visage, une infime crispation des lèvres, un plissement à peine perceptible des sourcils. De l’irritation ? Se demanda Stryker. Puis cela passa et le jeune roi dit : « Bien sûr, mon oncle. C’est une occasion capitale et j’ai hâte de commencer ».

« S’il vous plaît, suivez-moi, Votre Majesté », déclara l’Impératrice Vanar. Les grandes portes de la cathédrale s’ouvrirent derrière elle, révélant un vestibule aux murs de pierre blanche, chaque mur portant le symbole de Morrow gravé en or dans la pierre. Au-delà se trouvait la chapelle proprement dite.

L’impératrice et Vlad pénétrèrent dans la cathédrale, suivis de Julius et Leto.

« Garde d’honneur, entrez », dit Stryker en faisant signe à la douzaine de Lames-Tempête qui constituait la garde d’honneur du roi de le suivre. L’intérieur de la cathédrale était à couper le souffle, sa majesté étant un hommage approprié à Morrow et à l’ascendant à qui elle était dédiée, l’un des onze mortels élevé par Morrow pour le servir personnellement.

La propre garde d’honneur de l’impératrice attendait dans la nef, une douzaine de Crocs d’Acier en armure rouge ciselée d’or se tenant devant le grand autel. Un piédestal en marbre avait été placé au centre de la nef et une seule feuille de parchemin était posée dessus. C’était le traité que Julius et l’impératrice signerait.

La nef était remplie de gens, pour la plupart des nobles issus des deux nations, et Stryker reconnut des hommes et des femmes de l’Assemblée Royale Cygnaréenne ainsi que des personnalités plus éminentes, telles que le Duc Kielon Ebonhart, l’un des premiers à soutenir Julius Raelthorne lorsqu’il monta sur le trône. Le calme régnait dans la cathédrale, ce silence fécond précédant souvent de grands événements.

Bien sûr, tous les détails du traité avaient été réglés depuis des semaines par les conseils internes des deux dirigeants. La signature était simplement un spectacle pour les masses, une façon pour Julius de souligner le début de son règne et de trouver la faveur de ses sujets pour mettre fin à la guerre. Stryker n’avait pas grand-chose à voir avec les termes du traité ; le nouveau roi faisait rarement appel à lui, et le présence de Stryker au conseil intérieur n’était que symbolique. L’idée de ce revirement monumental, l’un des nombreux qu’il avait subis au cours des trois dernières années, le plongeait dans le doute. Il avait été le seigneur général du Roi Leto et faisait partie intégrante de l’effort de guerre cygnaréen. L’ancien roi lui avait souvent demandé son avis et ses conseils, mais il semblait désormais qu’il n’était plus guère qu’une figure de proue.

Il avait été informé des termes du traité. La paix entre les deux nations reposait en grande partie sur le reconnaissance par le Cygnar des revendications du Khador sur les parties de Llael dont il s’était emparé, puis par le rétablissement de lignes commerciales lucratives pour soulager l’économie tendue du Khador et sur la promesse de futurs échanges commerciaux, font un passage sans encombre vers la terre exotique de Zu. Julius avait plaidé et réussi à insérer une clause restrictive dans le contrat qui stipulait que si un véritable héritier du trône de Llael se présentait, la prétention du Khador serait annulée et ils retiraient leurs troupes. Bien entendu, il y avait peu de danger à cela. Aucun des descendants du dernier monarque de Llael, le Roi Rynnard, n’avait été vu depuis plus d’une décennie, et tous étaient présumés morts. L’addendum de Julius au traité visait simplement à montrer au peuple llaelais – les alliées de Cygnar - qu’il n’avait pas été complètement abandonné. Stryker avait du mal à comprendre comment les habitants de Llael ne pouvaient pas se sentir trahis par le nouveau monarque de Cygnar.

Les autres dispositions du traité prévoyaient le retrait des troupes  du Khador des terres cygnaréennes saisies au combat, telles que le forêt du Bois d’Épines, et le rétablissement de précieuses routes commerciales sur le Fleuve Noir, une voie navigable majeure traversant le Cygnar et pénétrait dans le Llael occupé par le Khador.

Tout cela semblait trop facile à Stryker. Bien sûr, ils souhaitaient tous la fin de la guerre. Le Khador et le Cygnar s’affrontaient depuis des années, et certaines des batailles les plus sanglantes s’étaient déroulées dans la nation voisine, le Llael, depuis l’invasion du Khador. Stryker avait personnellement dirigé des milliers d’hommes et fait couler plus de sang, qu’il pouvait s’en souvenir en Llael, pour repousser les khadoréens. Il avait également été témoin de la brutale soumissions des llaelais. Alors, les laisser simplement garder leur butin de guerre l’horripilait. Le retour d’une forêt  actuellement remplie d’horreurs cryxiennes et de quelques accords commerciaux lucratifs ne semblait pas être un échange équitable.

Il avait fait part de ses inquiétudes au roi, mais avait été critiqué par d’autres membres du conseil intérieur, dont beaucoup possédaient des terres ancestrales dans les régions du Bois d’Épines saisies par le Khador. Que cela ait joué un rôle dans leurs décisions n’avait pas d’importance ; ils avaient bien plus d’influence sur Julius Raelthorne que Stryker.

Il chassa ces pensées de son esprit alors qu’ils s’approchaient du piédestal. Il leva la main, et les Chevaliers-Tempête derrière lui se déployèrent, s’alignant sur les positions de leurs homologues Crocs d’Acier.

L’impératrice attendait à la table, Vlad un pas derrière elle. Julius s’approcha, et Leto se mit en retrait, correspondant à la position de Vlad. Il y avait un cérémonial dans ces procédures, une partie de spectacle, et tout cela paraissait incroyablement creux à Stryker.

Les dirigeants des deux nations les plus puissantes des Royaumes d’Acier se regardèrent. Le sort de millions de personnes reposait sur le traits de leur plume.

Deux encriers d’argents se trouvaient à côté du traité, ainsi que deux plumes blanches. Julius prit sa plume le premier et attendit que l’impératrice fasse de même.

L’impératrice prit sa plume et les deux souverains les trempèrent dans les encriers.

« À la paix, à l’amitié et à une alliance durable », prononça Julius en griffonnant son nom au bas du traité. Stryker n’ignorait pas que l’impératrice avait attendu que le jeune roi signe en premier.

« Que Cygnar et Khador soient frères à partir de ce jour », dit l’impératrice en apposant son nom en-dessous de celui de Julius.

La cathédrale éclata sous une salve d’applaudissements et quelques acclamations éparses. Stryker n’ajouta pas sa voix au vacarme montant ; il ne pouvait s’empêcher de se demander si les désastres étaient plus souvent annoncé par des applaudissements volontaire que par les cris de douleurs des opprimés.
« Modifié: 21 juillet 2024 à 16:43:25 par elric »
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« Réponse #4 le: 21 juillet 2024 à 16:42:05 »
- 4-
Cinq-Doigts, Ord


ASHET MAGNUS S’ASSIT À UNE TABLE BASSE, posant la lourde masse de sa prothèse de bras mékanique sur celle-ci. Autour de lui, dans cette pièce sordide mais spacieuse au bord du fleuve, se trouvait un groupe d’hommes à l’allure patibulaire, tous des mercenaires, armés et prêts à se battre et à tuer sur son ordre. Le pire de ces hommes – ou le meilleur, selon le point de vue – attendaient dans une petite pièce adjacente, en face de la table de Magnus.

« Qu’est-ce qui lui prend tant de temps ? » demanda Xavius Marlowe, un ordique décharné et ressemblant à un oiseau, qui se tenait près de l’unique fenêtre de la pièce, probablement pour échapper à la puanteur de l’armure de warcaster de Magnus. Magnus avait réglé la chaudière au minimum, mais le filet de fumée qui s’en échappait de la cheminée dans son dos emplissait la pièce d’une brume enfumée. Magnus sourit ; l’odeur de la rue du quai en contrebas ne pouvait pas être bien meilleure.

« Harrow connaît son affaire », déclara Magnus. « Laisse-le travailler ». Les lèvres de Xavius se retroussèrent d’irritation et il se retourna vers la fenêtre. Il était un ancien membre de l’Ordre du Creuset d’Or, un groupe d’alchimistes et d’arcanistes très respecté. Mais il avait fui son ordre, en grande partie à cause de son obsessions pour les poisons et les explosifs et de sa volonté de les tester sur les habitants de la ville ordique de Corbhen. Il était irritant, erratique et très, très compétent, aussi Magnus le tolérait il. En fait, la plupart des hommes dans cette pièce étaient profondément imparfaits et dangereux, le genre d’hommes qui suivaient la force et n’avaient aucune place pour la compassion ni même pour une véritable loyauté.

La porte face à Magnus s’ouvrit et Sebastian Harrow émergea. Les autres mercenaires présents dans la pièce étaient dangereux, mais Harrow était le seul véritable tueur parmi eux. Il était maigre et laid, son visage était un réseau de cicatrices d’où brillaient deux yeux bleu glacés. Il portait un pistolet lourd fixé à une hanche et un sabre à l’autre. Il essuyait ses mains avec un bout de tissu, qui en ressortit taché de cramoisi.

« Je reconnais que ces bâtards de la Section Trois sont des durs à cuire », dit-il.

« Qu’est-ce qu’il a craché ? » demanda Magnus.

Harrow sourit, montrant une bouche pleine de dents blanches et droites, une gueule de prédateur. « Le prince est mort et ils ont jeté son corps dans une forge ».

Magnus grimaça. Julius avait espéré trouver l’héritier llealais vivant et le garder ainsi, s’il était favorable au plans du jeune roi. « Sait-il pour la fille ? »

Harrow haussa les épaules. « Je n’ai pas plu lui soutirer cette information. Et crois-moi, j’ai essayé ».

L’homme le plus proche de Harrow, une ancien Tête d’Acier nommé Silus, frémit. Ils avaient tous vu Harrow interroger un prisonnier, et ses méthodes étaient brutalement efficaces.

« Penses-tu que le prince savait pour elle ? » demanda Silus. « C’était sa cousine, non ? »

« Difficile à dire », répondit Magnus. « La famille royale a été tellement fracturée. Quoi qu’il en soit, il la croyait probablement morte, ainsi que le reste de sa famille ».

« Alors je dis que nous partons de l’hypothèse qu’il savait et qu’il l’a dit aux khadoréens avant qu’ils ne le tuent », répondit Harrow.

Magnus réfléchit un instant. C’était logique. Le chef cygnaréen du SRC, le Commandant en Chef des Éclaireurs, Bolden Rebald, lui avait assuré que personne au sein du gouvernement khadoréen n’était pas au courant de l’existence de la princesse. Ce qu’il ne savait pas et ne pouvait pas savoir, c’était si quelqu’un en dehors des services de renseignement du Khador – quelqu’un ne cherchant pas un héritier llaelais – était au courant. La personne la plus susceptible de le savoir était un membre de sa famille : son cousin Lyan di la Martyn, récemment tué par des agents khadoréens. Puisque Magnus ne pouvait pas s’adresser à Lyan, il devait être d’accord avec Harrow et supposer que le mort avait donné aux khadoréens des informations sur la princesse Kaetlyn di la Martyn, qui semblait maintenant être l’unique héritière vivante du trône de Llael.

Magnus jeta un coup d’oeil dans la pièce. « Nous devons supposer que les khadoréens savent pour Kaetlyn, mais nous devons nous assurer que cette information ne quitte pas cette ville ». Ils avaient encore un problème, cependant, réalisa-t-il. Rebald avait dit qu’il y avait six agents de la Section Trois. Ils en avaient capturé un, mais où étaient les autres.

« J’ai de bonnes nouvelles », dit Harrow. « Il m’a dit où les autres se cachaient. Ils ont eu peur quand nous avons attrapé Ivan ici ». Il leva le pouce vers la pièce sombre d’où il venait de sortir. « Ils recherchent  probablement un navire pour les faire sortir ».

« Alors nous n’avons pas de temps à perdre », déclara Magnus. Il laissa sa conscience dérivers sans l’entrepôt vide en dessous d’eux, jusqu’au warjack léger qu’ils avaient amené avec eux. C’était l’un des modèles conçus par Magnus, assemblés à partir de morceaux d’autres warjacks, mais il n’en était pas moins mortel pour sa construction composite. Il pouvait sentir une petite étincelle dans l’obscurité froide de son esprit, une étincelle qu’il allait bientôt attiser en une flamme rugissante.

« S’agit-il d’une mission de capture ou de mise à mort ? » demanda Silus. Il n’avait pas l’air d’être gêné par l’une ou l’autre.

« Nous réglons les derniers détails », répondit Magnus en sortant le court fusil à mitraille de son étui au niveau de sa hanche. Il vérifia la charge et le rangea. Il plissa les yeux en direction de Silus. « Alors, qu’en penses-tu ? »

« Une mission d’anéantissement, alors », dit Harrow. « Tu n’auras à te plaindre de moi Plus simple ainsi. Et notre invité ? »

Magnus jeta un coup d’oeil par-dessus l’épaule du mercenaire vers la pièce derrière lui. Un léger gémissement ou peut-être un souffle s’échappa de l’obscurité.

« Dernier détail », dit-il.

Harrow sourit.

« Fais vite, Harrow », répondit Magnus, puis il ajouta « et sans douleur ».

Harrow dégaina son sabre. La lame émit un sifflement menaçant en raclant la gorge métallique du fourreau. « Il ne sentira rien ».

Le mercenaire entra dans la pièce derrière lui. Après un moment de silence sinistre, Magnus entendit un soudain éclat de voix khadoréen vacillant et terrifié. Il comprit la langue : l’homme plaidait pour sa vie.

Le doux bourdonnement d’une lame tranchant l’air coupa court à la supplication du khadoréen. Magnus entendit un bruit sourd, comme si quelqu’un avait laisser tomber quelque chose de lourd sur le sol. Quelques secondes plus tard, Harrow réapparut, cette fois essuyant le sang de son sabre.

« J’ai fait un joli nœud », dit-il.


* * *

LE NAVIRE S’APPELAIT Le Corbeau des Mers, et c’était un vieux navire marchand reposant au ras de l’eau. Il était amarré dans le District de la Proue du Capitaine de l’Île du Capitaine, acueillant les navires marchands. Magnus était heureux de voir que c’était le seul navire à son poste d’amarrage – ils bénéficieraient l’isolement dont ils avaient besoin. Cela ne voulait pas dire qu’ils étaient seuls ; on n’est jamais seul à Cinq-Doigts. Même en pleine nuit, sur une jetée au bout de l’Île du Capitaine, il y avait des gens vaquant à leurs occupations. Bien sûr, ces affaires, comme celle de Magnus étaient de toute façon celles qu’ils étaient préférables de mener dans le noir. Aucune des rares personnes qu’ils croiseraient ne laissa son regard s’attarder sur les quatre hommes en armure et la forme imposante du Renégat, dont la moitié supérieure était recouverte d’une toile de jute pour cacher qu’il ne s’agissait pas d’un simple laborjack. Sa scie tronçonneuse dépassait de dessus le linceul, et elle s’animait de temps en temps au fur et à mesure que l’impatience du warjack grandissait. Il voulait se battre. Magnus réprima ces pulsions;cela n’aiderait pas leur mission si le Renégat sciait un passant en deux.

« Pourquoi ce navire ? » demanda Xavius alors qu’ils s’approchaient du Corbeau des Mers. L’ancien alchimiste portait deux grenades alchimiques autour de sa poitrine, et tout le monde l’évitait à cause de cela.

« C’est un petit navire marchand », déclara Magnus. « Ce n’est pas le genre de chose que l’on recherche ».

Il arrivaient entre deux grands entrepôts, à l’abri des guetteurs – probablement des mercenaires – que les espions khadoréens avaient engagés. Ce n’était comme s’ils pouvaient simplement faire appel à un soutien militaire ; ils étaient une escouade de tueurs, intentionnellement coupé de tout soutien militaire pour défendre le déni plausible. Ils étaient acculés, et cela ne ferait que les rendre plus dangereux.

Les marins du Le Corbeau des Mers s’apprêtaient à appareiller. Il est probable que les agents restants de la Section Trois aient décidé que leur membre égaré ne reviendrait pas et qu’il était temps de fuir sans lui.

Ils étaient encore à trente verges du navire lorsqu’ils s’arrêtèrent dans l’ombre entre les bâtiments. « Je pense qu’ils doivent être dans la soute », dit Harrow. « Allons-nous frayer un chemin à travers tous ces hommes pour y arriver ? »

Magnus sourit. « Non, nous prenons une route plus directe ». Il se tourna vers Silus, qui portait un fusil à canon long, caché sous une lourde cape. « Je veux que toi et Harrow occupiez les hommes sur le pont pendant que Xavius et moi perçons un trou ».

Les yeux d’Harrow s’écarquillèrent, puis il sourit. Il avait une idée de ce que Magnus avait prévu. « Cela va faire beaucoup de bruit, et la garde, même à Cinq-Doigts, risque de le remarquer ».

« Alors, nous allons faire vite », dit Magnus.

Harrow acquiesça. « Tu es prêt, Silus ? »

L’ancien Tête d’Acier mit son fusil sur son épaule. « Il y a deux personnes sur le pont qui son manifestement des tireurs », dit-il. « Tu les vois ? »

« J’en ai un », répondit Harrow en dégainant son pistolet lourd à répétition. « Je prends celui se trouvant près du gaillard avant. Tu prends celui près du plat-bord bâbord ».

« Xavius, tu es avec moi ? » demanda Magnus en invoquant sa magie. Il se détourna du navire pour que son corps protège le cercle lumineux de runes se formant autour de sa main gauche. Les runes s’éteignirent et le Renégat devint irréel, ses contours se brouillant. Cela, l’obscurité et les capacités naturelles de Magnus et Xavius à se cacher les rendraient difficiles à repérer ou à abattre.

« Allons-y », dit Magnus, et Xavius et lui s’élancèrent d’entre les bâtiments. Magnus exhorta le Renégat à le suivre, et celui-ci jeta sa bâche et suivit avec empressement.

Ils étaient à mi-chemin du navire lorsqu’ils furent repérés, et des cris retentirent sur le pont du Le Corbeau des Mers, suivis de deux de coups de feu tirés derrière Magnus. Deux des hommes qui se trouvaient au-dessus du Renégat, tous deux armés de fusils, tressaillirent et s’effondrèrent sur le pont.

Magnus et Xavius coururent vers la jetée, parcourant la distante restante en quelques secondes. D’autres coups de feu retentirent, mais Magnus ne put dire s’ils provenaient du navire ou de ses propres hommes. Ils atteignirent le flanc du Le Corbeau des Mers, un mur de lattes de bois, et Magnus exhorta le Renégat à se rapprocher. Une balle ricocha sur sa coque et frappa le champ d’énergie généré par l’armure de warcaster de Magnus. Le mur invisible d’énergie s’embrasa en ralentissant la balle, rendant inoffensif son impact contre son plastron.

« Xavius, accroupis-toi », dit Magnus, accroupi sur la jetée, la tête baissée. L’ordique fit de même, et Magnus ordonna au Renégat d’utiliser son arme la plus puissante, la roquette oblitérateur attachée à son bras droit. Une bouffée de joie revint à travers son lien avec la machine, et il entendit le gémissement profond du lance-roquettes qui s’amorçait. Une balle frappa le champ d’énergie de Magnus, projetant des étincelles, et la balle rebondi sans danger sur la plaque de fer recouvrant son dos, privée de son énergie cinétique.
La fusée oblitérateur était prête et Magnus regarda à travers les yeux du Renégat, choisissant l’emplacement sur la coque du Le Corbeau des Mers.

Feu.

La fusée explosa avec un tonitruant rugissement et un éclair jaune vif. Une rafale d’énergie chauffée à blanc frappa Le Corbeau des Mers et fit un trou de près d’un mètre quatre-vingt de diamètre dans son flanc.

Magnus se leva d’un bond, entraînant Xavius à ses côtés. « Grenades ! »

L’alchimiste parut abasourdi, mais sa stupeur s’estompa rapidement. Il sortit deux cylindres métalliques de la bandoulière sur sa poitrine, appuya sur leurs gâchettes mécaniques et les jeta dans le trou que le Renégat avec fait.

Magnus capta un mouvement dans le ventre du vaisseau juste au moment où les deux grenades explosèrent, doubles explosions de bruit et de lumière. D’autres coups de feu retentirent derrière lui et au-dessus de lui. Magnus les ignora. Il sauta de la jetée et pénétra dans le trou pratiqué dans le flanc du navire.

Il atterrit dans un abattoir. Des corps et des morceaux de corps étaient éparpillés dans la cale et les murs avaient été peints d’un cramoisi criard. Il remarqua immédiatement deux des agents de la Section Trois, ou ce qu’il en restait.

Deux de plus.

La cale était basse de plafond, mesurant environ six mètres de large et neuf mètres de long. Les escaliers menant au pont se trouvaient à l’extrémité. C’était sombre et enfumé, mais un mouvement près des escaliers attira son attention.

Magnus dégaina son épée, la lame mékanique qu’il avait baptisé Pourfendeur, et la plaque runique qui lui conférait son pouvoir arcanique emplit la cale d’une étrange lueur bleue. Les silhouettes près des escaliers devinrent plus claires : trois hommes vêtus des vêtements sombres. Tous étaient encore sous le choc du souffle des grenades. Il ne pouvait pas leur laisser le temps de récupérer. Magnus s’éloigna du trou sur le flanc du Le Corbeau des Mers et convoqua le Renégat. Le saut du quai dans le navire était dangereux ; si le Renégat ratait son coup et tombait dans la baie, sa chaudière serait éteinte et il coulerait directement par le fond.

Le Renégat sauta, guidé par la volonté de Magnus, et atterrit à l’intérieur de la cale du navire, suffisamment fort pour faire tanguer le navire. Sa scie se mit à vrombir, un cri métallique frénétique annonciateur de destruction.

Des coups de feu éclatèrent de l’autre côté de la cale, et des projectiles frappèrent la coque du Renégat, déclenchant une vague de rage en son sein. Puis la cale s’illumina d’une lueur bleue, signe révélateur de la magie, et des runes se formèrent autour de la main tendue de l’un des hommes, qui s’était placé derrière ses compatriotes. Magnus pouvait désormais clairement voir le lanceurs de sorts : grand, aux traits marqués, avec des cheveux noirs clairsemés. Il tenait dans une main une hache de guerre lourde à un seul tranchant. Mais cet homme n’était pas simplement un agent de la Section Trois. Il était bien plus dangereux que son simple titre : c’était aussi un Seigneur Gris, l’un des tristement célèbres sorciers des glaces khadoréens et chercheurs de magie ancienne.

Le sort se déclencha avant que Magnus ne puisse s’écarter, et un souffle de givre glacial traversa la cale. La majeure partie de ce souffle frappa le Renégat, et Magnus sentit les dommages causés à certains de ses systèmes internes qui se grippèrent sous l’effet du sort de froid.

Son champ d’énergie et son armure le protégèrent du pire, mais il serra les dents de douleur quand le froid envoya ce qui ressemblait à des poignards de glace dans sa chair exposée.

« En avant », dit Magnus en serrant les dents, ordonnant au Renégat endommagé d’avancer. Il traversa la cale en trombe, sa scie hurlant dans l’obscurité. Magnus sortit son tromblon et visa l’un des hommes tentant de monter les escaliers menant au pont supérieur. Il pressa la gâchette et déversa sa volonté et sa magie dans les tirs, guidant les trajectoires des lourds projectiles. L’homme, probablement l’un des agents de la Section Trois, reçu les projectiles dans le dos et tomba à la renverse.

Le Renégat avait atteint l’autre côté de la cale. Sa scie s’humecta, déchirant le ventre et le ds d’un des hommes, aspergeant les murs de sang frais. Le Seigneur Gris recula et un autre sort se forma autour de sa main droite tandis que le Renégat dégagea son arme et se tournât vers lui.

De la glace et du givre apparurent soudainement sur la coque et les membres du Renégat, et celui-ci cessa de bouger, maintenu immobile dans une fine cage de glace.

Magnus chargea, jetant son tromblon et saisissant Pourfendeur à deux mains. Le Seigneur Gris leva sa hache. Des runes bleues apparurent sur la lame de l’arme tandis que Magnus abattait Pourfendeur d’un puissant coup.

Le Seigneur Gris était un combattant expérimenté. Il réussit à détourner l’épée de Magnus, mais la force du coup le projeta contre le mur de la cale. Il récupéra instantanément et se lança en avant, balançant la hache dans une large frappe de taille.

Il était plus rapide que Magnus l’avait prévu – il ne parvint pas à placer Pourfendeur à temps pour intercepter le coup. Dans une pluie d’étincelles, la hache, enchantée par de puissantes runes, traversa le champ d’énergie de Magnus et s’enfonça dans son plastron et la chair s’y trouvant. Il sursauta lorsque le métal glacé coupa sa peau, mais la hache s’était logée dans son armure. C’est alors que le Seigneurs Gris commit une erreur cruciale.

Il tenta de la dégager.

La fraction de seconde d’effort le laissa sans défense, et Magnus balaya le cou du Seigneur Gris avec Pourfendeur. Sa tête se détacha de son corps dans une giclée de sang, et son cadavre rejoignit les autres en basculant en arrière.

Magnus arracha la hache de son corps et un flot de sang coula le long de son armure. Il grimaça, non pas à cause de la douleur de sa blessure, mais parce que Bolden Rebald, le Commandant en chef des Éclaireurs de Cygnar, ne l’avait pas avertit que les agents de la Section Trois travaillaient avec un Seigneur Gris. Peut-être qu’il ne le savait pas – mais peut-être qu’il le savait.

Xavius était passé par le trou. L’ordique n’était pas d’une grande utilité dans un combat debout. Il tenait une liasse de papiers dans une main et regardait tour à tour les cadavres au sol. Rebald leur avait fourni des croquis des visages des agents de la Section Trois afin qu’ils puissent être facilement identifiés.

« Bon sang, celui-là n’a plus de visage », déclara-t-il. « Je pense que c’est l’un des salauds de rouges. Celui-ci, définitivement ». Il désigna un cadavre auquel il manquait les deux bras et une jambe, mais dont le visage était parfaitement intact.

« Viens ici et regarde ces deux-là », dit Magnus. « Vite ». Il reporta son attention sur le Renégat tandis que Xavius le rejoignait. Il canalisa une plus grande partie de sa magie à travers le cortex de la machine, brisant ainsi le sort qui la bloquait. La colère, chaude et féroce, reflua à travers sa connexion avec le warjack. On l’avait trompé en le privant d’une mort.

« Oui, ce sont les deux autres », déclara Xavius. « Qui est celui-ci ? » Il désigna le Seigneur Gris décapité.

« Une complication », répondit Magnus en grognant de douleur. La blessure était peut-être un peu plus profonde qu’il ne le pensait. Des coups de feu résonnaient toujours à l’extérieur de la cale. « Nous avons fini ici. Allons-y avant que Harrow ne tue ce foutu équipage ».
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« Réponse #5 le: 21 juillet 2024 à 16:47:16 »
- 5-
Caspia, Cygnar


LA CHAMBRE DU CONSEIL INTÉRIEUR de Julius Raelthorne, premier du nom, convenait au jeune roi. Son père, Vinter Raelthorne, avait rarement utilisé cette pièce, préférant tenir les réunions du conseil dans la salle du trône du Château Raelthorne. Stryker avait assisté à plusieurs d’entre elles en tant que membre de la garde royale, il y a près de quinze ans. Le fils de Vinter, quant à lui, préférait un lieu de réunion moins grandiose. La chambre se trouvait derrière la salle du trône et était autrefois réservée aux réunions privées avec d’importants dignitaires. Elle était petite et la table en forme de U en bois de fer poli occupait la majeure partie de l’espace. Les murs étaient peints en bleu royal du Cygnar et décorés de portraits des différents rois ayant régné sur la nation. Stryker nota que le portrait de Vinter avait récemment été remis à sa place sur le mur.

La table était suffisamment grande pour accueillir tous les membres du conseil, dont Stryker était membre. Bien que son inclusion par le roi ait été autorisée, au mieux, à contrecœur. La plupart des hommes qui constituaient les plus proches conseillers de Julius s’étaient engagés à soutenir le jeune roi lors de la récente guerre civile ou, dans le cas d’Orin Midwinter, étaient des criminels exilés, autre fois loyaux envers son père, qu’il avait graciés. Stryker grimaça en regardant où Midwinter était assis – Midwinter était à la droite du Haut Chancelier Leto, qui à son tour était le plus proche de Julius au centre de l’U. Autrefois inquisiteur en chef sous Vinter Raelthorne, Midwinter avait été forcé de faire profil très bas lorsque son ancien suzerain avait été chassé du trône. Il avait soutenu Vinter puis Julius en exil, et le jeune roi l’avait gracié lorsqu’il était monté sur le trône, accordant à Midwinter le titre de Conseiller aux Arcanes. L’homme était un magicien accompli, mais leurs rumeurs sur ses activités pendant et après le règne de Vinter étaient pour le moins inquiétantes.

À la gauche du roi se trouvait le Commandant en chef des Éclaireurs Bolden Rebald, un maître espion et responsable du Service de Reconnaissance Cygnaréen. L’homme suivant était à la table était le Général Maître de Guerre Kielon Ebonhart, un puissant duc que Stryker connaissait bien. Stryker s’était entraîné sous les ordres du Duc Ebonhart il y a plus de dix ans, lorsque celui-ci était à la tête des Lames-Tempête. Ebonhart avait été l’un des nobles les plus importants à soutenir Julius au cours de la guerre civile.

Les deux autre hommes du conseil assis au bras du U, étaient le Navarch Galten Sparholm III, à la tête de la marine, et Lassiter Polk, maître mékanicien et chef de l’Armurerie Cygnaréenne. Stryker avait peu fréquenté ces deux hommes, mais il les connaissait par leur réputation et ils étaient tous deux capables.

Enfin, il y avait Stryker lui-même, assis aussi loin que possible du roi. Il était Seigneur Général de l’Armée Cygnaréenne, son rang n’étant surpassé que par celui du Maître de Guerre Kielon Ebonhart. Il assistait à toutes les réunions du conseil, mais le roi faisait rarement appel à lui pour obtenir des conseils. Julius écoutant principalement son oncle Leto pour les questions d’état, son maître de guerre pour les questions militaires, et Orin Midwinter pour presque tout le reste. Depuis la bataille de Fharin, Julius semblait accorder une grande confiance à l’ancien inquisiteur. Peut-être était-ce le lien avec son père qui avait attiré Julius vers Orin. Stryker ne comprenait pas pourquoi le roi accordait autant confiance à quelqu’un qui avait fait partie d’une organisation si universellement décriée.

Stryker était un marginal, un marginal dont l’opinion n’était ni recherchée ni appréciée. Sa véritable place était sur le champ de bataille, à la tête des soldats et des warjacks. Qu’il soit membre du conseil était probablement dû à Leto. L’ancien roi et lui avaient été proches, et Stryker souffrait de voir quelqu’un d’autre sur le trône, aussi légitime que soit la prétention du jeune homme.

« Votre Majesté », dit Leto, sa voix ramenant Stryker dans la conversation, « nous avons reçu une copie du traité signé par les envoyés de Khador, et il a été officiellement enregistré ». L’ancien roi sourit. « Nous sommes en paix ».

« Bravo, bravo ! » s’écria le Maître de Guerre Ebonhart, et les applaudissements emplirent la salle. Stryker y ajouta à contrecœur.

« Mais il y a de nombreuses questions qui nécessitent encore votre attention, bien sûr, Votre Majesté », déclara Midwinter après que les applaudissements se soient calmés.

« Sans aucun doute, Midwinter », répondit Julius. « Mais il y a un sujet urgent dont nous devons d’abord discuter. Une chose que je vous ai cachée pendant un certain temps par nécessité, et vous comprendrez bientôt pourquoi. Le Commandant en chef des Éclaireurs Rebald vous informera des détails ». Le roi fit un signe de tête au commandant en chef des éclaireurs.

Rebald s’éclaircit la gorge et se redressa sur sa chaise. Une étrange expression traversa le visage du maître espion. Il avait l’air nerveux. Stryker avait travaillé en étroite collaboration avec cet homme durant des années, et il n’avait jamais vu le commandant en chef des éclaireurs aussi agité. C’était étrange de la part d’un homme ayant tiré les ficelles d’un vaste réseau d’espions et d’assassins pendant des années.

« Oui, Votre Majesté », dit Rebald en se levant. « Je ne vais pas vous faire languir. Un héritier du trône de Llael a été trouvé ».

Un silence stupéfait.

Stryker observa les visages de chaque membre du conseil. Il y avait des yeux écarquillés et des visages cendrés. Lui aussi était choqué. Un héritier du trône de Llael avait des répercussions majeures. Tout d’abord, cela annulait les prétentions de Khador sur le pays, conformément au traité qu’ils venaient de signer – en supposant que le Khador accepte cette prétention.
Stryker retrouva sa voix en premier. « Qui est cette personne ? »

« Son nom est Kaetlyn di la Martyn », déclara Rebald. « Sa mère tait l’une des maîtresses du Roi Rynnard, une femme de petite noblesse ».

« Depuis combien de temps es-tu au courant, Rebald ? » demanda Leto. Le visage de l’ancien roi était pincé par l’irritation.

Rebald jeta un coup d’oeil à Julius, le regard fuyant, tendu. Encore une fois, Stryker fut frappé par le manque de sang-froid de l’homme. Cela ne lui ressemblait absolument pas.

« Le commandant en chef des éclaireurs a localisé la jeune fille peu de temps après mon accession au trône », déclara Julius.

Deux ans ! Pensa Stryker. Cela faisait deux ans qu’ils étaient assis sur ce secret monumental, et ils avaient manoeuvré le Khador pour qu’il signe un traité qui annulerait leurs prétentions sur le Llael. C’était sournois et brillant… et incroyablement dangereux. L’impératrice est trop intelligente pour ne pas sentir l’odeur nauséabonde des manœuvres politiques, et sa réaction une fois l’héritière révélée pourrait replonger les deux nations dans la guerre.

« Rebald a découvert l’héritière en Ord », poursuivit Julius, « et il m’a immédiatement informé de sa découverte, voyant la potentielle influence qu’elle pourrait nous accorder un jour ».

« Julius, c’est un jeu dangereux et insensé auquel tu as joué », déclara Leto, Le haut chancelier avait visiblement été tenu dans l’ignorance, tout comme le reste du conseil.

Les yeux de Julius se plissèrent et la colère apparut sur son visage. Stryker vit la colère de Vinter derrière les yeux de son fils. « Mon oncle, tu t’oublies », dit Julius. « Tu ne parles plus avec la voix d’un roi ».

Leto détourna le regard. « Mes excuses, Votre Majesté », dit-il d’une voix lente et mesurée. « Mais en tant que haut chancelier, je ne peux pas vous servir correctement si vous me cachez de telles choses ».

Julius acquiesça. « Je suis d’accord, mon oncle, et je te promets qu’il s’agit d’un incident isolé ».

« Alors, nous allons asseoir cette fille sur le trône de Llael ? » demanda Stryker. « Le Khador ne reconnaîtra pas la légitimité de sa revendication ».

Leto se tourna vers Stryker. « Seigneur Général », dit-il, « le traité qu’ils ont signé est légitime, tout comme la prétention de la jeune fille au trône. Ils seront obligés de l’honorer ou de violer le traité ».

« Vous allez donc les inviter à la guerre ? » dit le Duc Ebonhart, posant la question suivante de Stryker. « Mes excuses, Votre Majesté, mais nous venons de retrouver la paix. Pourquoi la gâcher ? »

« Je comprends votre réticence, Maître de Guerre Ebonhart », dit Julius. « Et je ne m’engagerais pas dans cette voie si elle ne servait pas à rendre le Cygnar plus fort ».

« Comment une autre guerre rendra-t-elle le Cygnar plus fort, Votre Majesté ? » demanda Stryker. Cela semblait ridicule, mais si Rebald et Midwinter étaient impliqués, il y avait là un angle d’attaque, un avantage à tirer. Julius se tourna délibérément vers Stryker, le fixant de son regard sombre. Pour un homme si jeune et si peu habitué à gouverner, le roi dégageait une force indéniable. C’était le même acier que celui de son père. Stryker espérait que, pour le bien de Cygnar, il serait mieux tempéré.

« Je vais l’épouser », déclara Julius.

« Et ajoutez les prétentions de Cygnar à celles de l’héritière », reprit Rebald. « Julius et ses fils et filles dirigeront les deux nations ».

C’était une démarche agressive, que l’oncle du roi n’aurait ni acceptée ni approuvée, mais si elle réussissait, elle augmenterait considérablement la taille du royaume de Julius et ajouterait au Cygnar ce qu’il restait de la puissance militaire de Llael. Ils deviendrait la plus grande nation des Royaumes d’Acier, contrôlant plus de terres arables et de ressources que toute autre.

« Et la Résistance ? » demanda Leto. « Il peuvent avoir leurs propres idées sur ce qu’il faut faire de cette héritière ».

« S’ils souhaitent continuer à bénéficier du soutien militaire du Cygnar contre le Khador, ils nous suivront ». S’esclaffa Julius. « Je ne m’attends guère à ce qu’ils demandent l’aide des khadoréens ». C’était une attitude froide à l’égard de la Résistance assiégée et ses dirigeants. Stryker avait combattu à plusieurs reprises aux côtés des troupes et des warcasters llaelais contre les khadoréens. Leur chef militaire, Ashlynn d’Elyse, une noble et warcaster llaelaise, était une femme passionnée mais raisonnable, et son opinion pouvait influencer les autres. « Si vous parvenez à convaincre Ashlynn d’Elyse de reconnaître l’héritière, vous pourriez obtenir le soutien de la Résistance », dit Stryker. « Mais nous devons la prévenir immédiatement. Elle n’apprécierait pas d’être tenue dans l’ignorance à ce sujet ».

« Merci pour votre conseil », répondit Julius, « mais ma future femme n’a pas besoin du soutien ou de l’approbation d’Ashlynn d’Elyse. Elle exige sa loyauté, tout comme moi ».

« De plus, la Résistance a oeuvré avec le Protectorat de Menoth », dit Rebald, nommant la nation de fanatiques religieux à l’est ayant revendiqué certaines parties de Llael. « Nous devrions les considérer comme compromis ».

« Quel choix avaient-ils ? » demanda Stryker. « Ils ne peuvent pas combattre à la fois le Khador et le Protectorat ».

« Assez », dit Julius. Il n’éleva pas la voix, mais son ton fut tranchant. « Je n’ai pas réuni mon conseil intérieur pour discuter de la Résistance Llaelaise ».

Stryker se faisait gronder comme un enfant dévoyé, réduit au silence par un roi qui n’était rien d’autre qu’un bâtard en exil il y a à peine trois ans. La voix de Stryker avait toujours été entendue à la cours de Leto. Son conseil était sollicité, on se fiait à son expérience. « Comme vous le souhaitez, Votre Majesté » répondit-il, réprimant sa colère et le ressentiment qui remontaient dans sa gorge telle une marée de vomi.

Il croisa le regard de Leto, et l’expression de l’ancien roi le blessa plus que la réprimande de son neveu. Il avait souvent fait naître la fierté, la joie et même la colère sur le noble visage de Leto à de nombreuses reprises, mais jamais la pitié. C’était subtile à présent, mais elle était présente.

Stryker s’assit dans son fauteuil et laissa les autres membres du conseil détailler les plans du roi. Il écouta, mais ne reprit pas la parole. Il était clair qu’il était un marginal, et sa voix n’avait pas plus de poids qu’un cri dans un ouragan.
« Modifié: 01 septembre 2024 à 21:07:01 par elric »
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« Réponse #6 le: 28 juillet 2024 à 19:30:06 »
- 6-

LA PRINCESSE KAETLYN DI LA MARTYN, héritière du trône de Llael, était une grande fille de dix-sept ans au plus, d’après Stryker. Elle avait de long cheveux noirs, des pommettes hautes, des lèvres minces et des yeux d’un bleu éclatant, son trait le plus marquant. Sa longue robe fluide était ornée de perles dorées et violettes, une chose qui ne faisait que rehausser son apparence royale.

Elle marchait au centre d’un tapis bleu et violet vif bordé d’or, mêlant les couleurs de Cygnar et de Llael, en direction du trône de Julius Raelthorne. Le roi se tenait devant son siège de pouvoir, vêtu de son uniforme militaire ; l’épée de son père, Régicide, était rengainée à son côté. À sa gauche se tenait son oncle Leto Raelthorne, et à sa droite, Orin Midwinter. Le reste du conseil intérieur, y compris Stryker, se tenait à droite et à gauche du trône. Il n’y avait personne d’autre dans la salle, à l’exception des membres de la Garde Royale. Le nouvelle de la découverte de l’héritière n’avait pas été transmise à l’Assemblée Royale, car il était vital de garder son existence secrète jusqu’au moment opportun.

La Princesse di la Martyn était suivie par deux hommes que Stryker ne connaissait pas, sa garde personnelle. Tous deux étaient des hommes à l’allure dangereuse, vêtus de redingotes et de hautes bottes noires. Chacun portait un double pistolet cinémantique à la hanche, et une épingle violette en forme de rose était apposée au revers de chaque homme, le désignant comme un ancien mage balisticien de l’Ordre Loyal de la Rose Améthyste . Certains de ces hommes et femmes avaient juré de protéger les membres de la famille royale de Llael, à l’instar de la Garde Royale de Cygnar. Leur ordre avait été en grande partie dissous après la mort du Roi Rynnard, mais ils en restaient quelques-uns et apparemment ces deux-là avaient protégé l’héritière pendant la majeure partie de sa vie.

La princesse s’arrêta à dis pas de Julius et s’inclina. Ses gardes se tirent silencieusement derrière elle. « Roi Julius », dit-elle. « Je suis ravie de vous rencontrer enfin. Votre commandant en chef des éclaireurs (elle jeta un coup d’oeil à Rebald) m’a beaucoup parlé de vous ».

Julius sourit, montrant ses dents blanches et droites. C’était un vrai sourire. Il s’avança et s’empara doucement de la main de la princesse. Il se pencha, porta sa main fine à ses lèvres et l’embrassa doucement. « Pas plus ravie que moi, Votre Altesse », répondit-il. « J’attendais ce jour avec impatience depuis que j’ai appris votre sort en Ord. Vivre en exil est une difficile, que je connais bien ».

« Vous êtes gentil, Votre Majesté », dit-elle. « Je vous suis reconnaissante de votre soutien, tout comme le peuple de Llael, j’en suis sûre ».

Julius sourit à nouveau et fixa la princesse un instant.

Stryker réprima un sourire. Son roi montrait rarement sa jeunesse, mais c’était un jeune homme, et la princesse était une belle jeune femme. Stryker se demanda si le roi avait craint que sa future épouse soit ordinaire. Peut-être était-il soulagé. Peut-être était-il épris.

« Laissez-moi vous présenter les membres de mon conseil intérieur », dit Julius. « Voici le Haut Chancelier Leto Raelthorne, mon oncle ».

Leto fit une petite révérence. « Votre Majesté ».

« Mon Conseil aux Arcanes, Orin Midwinter ».

Orin s’inclina également, montrant le haut de sa tête. Une légère grimace traversa le visage de la princesse, mais son sourire la recouvrit rapidement. Peut-être peut-elle sentir l’homme pour ce qu’il est, pensa Stryker, espérant.

Julius présenta ensuite le Duc Ebonhart, le Navarch Galten Sparholm III et Lassiter Polk. Puis il arriva à Stryker. « Et voici le Seigneur Général Stryker », dit Julius. « L’un de nos chefs militaires les plus courageux et les plus expérimentés ».

« Votre Majesté », prononça Stryker en inclinant la tête. Il s’attendait à ce qu’elle se retourne vers le roi, mais son regard s’attarda sur lui.

« On m’a dit que vous aviez personnellement combattu en Llael, aux côtés de nos braves soldats, contre le Khador », déclara le princesse.

« Oui, j’ai eu ce privilège. Les llaelais sont un peuple fort et courageux, et ils méritent d'être libérés de la tyrannie », répondit-il, touché par la reconnaissance de la princesse.

« Je vous remercie sincèrement, Seigneur Général, et je suis heureux d’avoir un allié aussi noble ».

« Votre Altesse », prononça encore Stryker, quelque peu embarrassé.

La princesse se tourna vers le roi et Julius ouvrit la bouche pour dire quelque chose, mais on frappa bruyamment aux portes de la grande salle du trône. Julius fronça les sourcils et secoua la tête. Il jeta un coup d’oeil par-dessus son épaule vers l’un des gardes royaux se tenant debout et dit : « S’il vous plaît, allez voir pourquoi nous sommes dérangés en une occasion aussi importante ».

Le garde se précipita vers les portes. Il les ouvrit, révélant un autre membre de la garde royale se tenant à l’extérieur. L’homme portait une épaulière de capitaine, ce qui signifiait que la raison pour laquelle il dérangeait son suzerain était importante.

Une brève conversation à voix basse s’engagea entre les deux gardes, puis le premier ferma la porte et se dirigea d’un pas vif vers Rebald. Il plaça une enveloppe scellée à la cire dans la main du commandant en chef des éclaireurs, puis retourna à son poste derrière le trône.

« Votre Majesté », dit Rebald, « cette lettre provient de l’un de nos principaux espions en Khador ».

« Ouvrez-là alors », répondit Julius.

Rebald jeta un coup d’oeil à la princesse et à sa garde et pinça les lèvres. « Peut-être un peu d’intimité, Votre Majesté ».

Julius agita la main avec irritation. « Elle sera un jour ma reine », déclara-t-il. « Je ne vois pas pourquoi elle devrait être exclue des affaires d’état ».

La princesse garda son sang-froid à la brutale annonce de Julius de leurs futures noces. Elle devait être consciente des intentions du roi, mais les entendre si clairement exprimées lors de leur première rencontre devait être choquant.

Rebald ouvrit l’enveloppe et parcourut rapidement la lettre qu’elle contenait. Il ne dit rien, et son expression ne laissait rien deviner de la lettre. Il la tendit à Leto, qui la lut rapidement. Les yeux de l’ancien roi se lissèrent et il inspira profondément lorsqu’il eut fini.

« Dis-moi », ordonna Julius.

« Il semble pendant que nous faisions des projets de mariage, l’impératrice faisait les siens », dit Leto. « Elle est maintenant fiancée à Vladimir Tzepesci, ce qui fera bientôt de lui le prince régent de Khador et liera sa maison et toute l’influence qu’il exerce à la sienne ».

Stryker comprenait bien les raisons pour lesquelles l’impératrice épousait Vlad. Il était le souverain de l’Ancienne Umbrie, le chef d’une famille ancienne et puissante dont les racines remontaient à la fondation de leur nation. Il représentait les antiques méthodes, la tradition et, plus important encore, le peuple le plus indépendant de l’est de Khador. Nombres de Khadoréens pensaient qu’il représentait une menace pour sa souveraineté, mais elle avait désormais écarté cette menace et ajouté son pouvoir et son influence aux siens.

« Un développement inattendu, mais pas vraiment une grave menace », déclara Julius.

« Je ne suis pas d’accord » répondit Leto. « Elle consolide son pouvoir, et désormais les prétentions de Vlad sur le Llael auront tout le poids de l’impératrice derrière elles ».

« Il semble que nous ayons sous-estimé l’impératrice, et nous ayons été pris au dépourvu, Votre Majesté », dit Midwinter.

« Attendez », dit Ebonhart. « Je suis d’accord avec le haut chancelier sur le fait que le mariae de l’impératrice et du Seigneur Tzepesci renforce sa position, mais cela ne signifie pas nécessairement qu’il se préparent à al guerre ».

« Nous avons déjà vu le Khador rompre des traités », dit Midwinter en se tournant vers le roi. « Votre Majesté, ceci est un signe précurseur à une trahison khadoréenne ».

« La guerre est inévitable », déclara Julius. « Le khador n’acceptera jamais que la princesse soit l’héritière légitime de Llael ». Stryker soudainement réalisa que c’était probablement le plan de Julius le début – le sien et celui de Rebald, et peut-être celui de Midwinter. Julis avait simplement besoin d’une excuse pour partir en guerre, et la princesse venait de lui offrir une situation où le Khador devait refuser les termes du traité, surtout maintenant que l’impératrice avait consolidé ses prétentions sur le Llael.

« Et vous le saviez depuis le début », dit Leto, exprimant ce que Stryker pensait. « C’est pourquoi vous avez gardé la princesse secrète ».

« C’était la meilleur chose à faire, mon oncle », répondit Julius. Stryker nota qu’il ne niait pas l’accusation de Leto.

« Nous devrions annoncer la naissance de l’héritière », dit Rebald. « même si c’est plus tôt que nous l’aurions souhaité ».

Leto prononça : « Votre Majesté, je suis d’accord, mais nous devons attendre la réaction de l’impératrice. Nous ne pouvons pas être considérés comme des agresseurs par le peuple cygnarén ou par l’Assemblée Royale ».

« Attendez », dit une douce voix féminine. Tout le monde se tourna vers la princesse. Son visage était un masque de colère, ses yeux bleus brillaient telle des poignards glacés. « Je ne t’épouserai pas ».

« Votre Altesse ? » dit Julius. C’était la première fois qu’il avait l’air surpris au cours des événements de la journée. « Vous devez certainement comprendre que notre mariage est de la plus haute importance si nous voulons renforcer nos nations contre l’agression khaodréenne qui ne manquera pas de se produire ».

« Non, Votre Majesté, ce que je vois, c’est que mon peuple va subir une nouvelle ruine à cause de Khador pendant que vous et votre conseil attendez que l’impératrice agisse ».
Stryker réprima un rire. Le plan bien conçu de Julius et de Rebald était sur le point de s’effondrer au gré d’une jeune fille de dix-sept ans. Elle était une reine, cela était désormais évident. L’acier de son ton n’admettait aucune discussions, et ses réprimandes au roi étaient précises et ciblées.

« Votre Altesse, soyez raisonnable », dit Rebald en s’avançant vers Kaetlyn. « C’est la meilleur chose à faire ».

« Ce n’est pas le cas, Commandant en chef des Éclaireurs », répondit-elle. « Le meilleur plan d’action consiste à libérer immédiatement le peuple llaelais ». Elle tourna son regard vers Julius. « Si tu veux m’épouser, si tu veux obtenir tout ce que cela implique, alors tu élimine immédiatement le fléau khadoréen de mon pays ».

« Votre Altesse », dit doucement Julius en s’avançant vers elle. Il s’approcha d’elle et prit sa main dans la sienne. Elle tressaillit, mais ne l’arrêta pas. Il y eut un moment de silence tendu, et les hommes présents dans la salle du trône ayant juré de protéger leur dirigeants se raidirent. « Je te le promets, je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour libérer le Llael du contrôle khadoréen et te placer sur le trône. Mais je suis d’accord avec mon oncle : nous devrions laisser le Khador montrer au monde qu’il n’honore pas ses traités que la parole de l’impératrice ne vaut rien de plus que le souffle qui la créer. L’impératrice ne va pas tarder à nier ton droit au trône, et ensuite, je te le jure, j’amènerai toute la puissance de Cygnar en Llael pour écraser les envahisseurs ».

La passion dans la voix du jeune roi était émouvante, et il y avait ici quelque chose qui ne ressemblait pas à son père. Il avait déjà appris qu’il existait d’autres moyens de motiver les gens que par la peur ou le tranchant d’une épée. Un roi qui s’exprimait franchement et avec passion à ses sujets pouvait rassembler une nation derrière lui aussi facilement qu’un tyran qui exigeait leur soutien.

Les paroles de Julius eurent l’effet escompté, peut-être plus que ce que le roi ou tout autre personne présente dans la pièce pouvait deviner. La princesse se pencha en avant. Elle embrassa doucement Julius sur la joue, puis s’éloigna. « Merci, Votre Majesté ».
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Roman - Poudrière
« Réponse #7 le: 28 juillet 2024 à 19:37:09 »
- 7-

« ELLE A NIÉ LA RÉCLAMATION », dit Julius en posant la lettre de l’impératrice de Khador sur la table. Il venait de finir la lettre à voix haute, et n’avait pas l’air en colère ; en fait, il avait l’air satisfait. Il avait fallu un peu plus de deux semaines à Ayn Vanar pour rejeter les prétentions de Kaetlyn di la Martyn au trône de Llael.

Ils étaient de retour dans la salle du conseil intérieur, en présence de tous les membres. De plus, la Princesse di la Martyn était présente, assise à côté du roi. Elle était devenue une habituée des réunions. Elle s’exprimait rarement, mais elle écoutait, et il était de plus en plus clair chaque jour qu’elle avait l’oreille du roi. Stryker l’approuvait d’ailleurs. Malgré sa jeunesse et son inexpérience, Kaetlyn avait une connaissance fine des affaires d’état, et elle était honnête et franche. Elle pourrait peut-être contrecarrer l’influence de créatures telle Orin Midwinter sur le roi.

« Elle sait très bien qu’elle viole le traité », déclara Leto. « Et les conséquences de cela ».

« Parfaitement », ajouta le Maître de Guerre Ebonhart. « Elle ne nous laisse d’autres choix que de faire valoir les prétentions de la princesse ». Il y eut des hochements de tête et des accords autour de la table du conseil.

« Mon oncle, rédige immédiatement une déclaration de guerre », prononça Julius. « Je veux qu’il soit présenté à l’Assemblée Royale dans la semaine ».

Leto hocha gravement la tête. « Oui, Votre Majesté ». Stryker ne pouvait imaginer ce que ressentait son ancien roi. Son propre avait été marqué par des guerres et des conflits presque constants, et il avait fait  de son mieux pour faire ce qui était juste pour son peuple. Il vu la paix s’installer sur le Cygnar durant un bref instant, pour ensuite à nouveau la voir consummée par les flammes de la guerre.

« Maître de Guerre Ebonhart, Navarch Sparholm, Seigneur Général Stryker, vous allez commencer à planifier l’invasion de Llael immédiatement », prononça Julius.

Le mot invasion ne plaisait guère à Stryker. Au cour de toutes ses années au sein de l’armée cygnaréenne, il s’était battu pour défendre le Cygnar ou le Llael, en réction à l’agression des nations ennemies. Désormais, le Cygnar deviendrait l’agresseur et commencerait le combat au lieu de le subir.

« Reblad », poursuivit Julius, « quand Asheth Magnus arrivera-t-il de Cinq-Doigts ? »

Ce fut comme si quelqu’un avait porté un coup de pied dans l’estomac de Stryker. Ses yeux s’écarquillèrent et il ouvrit la bouche pour exprimer l’indignation bouillant en lui, pour crier contre la pure folie des paroles du roi. Mais il se contrôla. « Votre Majesté, vous ne pouvez pas être sérieux », finit-il par prononcer.

La salle du conseil devint silencieuse, et les yeux de Julius se rétrécirent. « Seigneur Général, je suis bien conscient de votre histoire avec Asheth Magnus, mais il a été et est toujours l’un des meilleurs esprits militaires des Royaumes d’Acier. De plus, je ne serais pas assis sur ce trône sans Ashet Magnus. J’ai une dette envers cet homme ».

« C’est un criminel de guerre », répondit Stryker en serrant les poings. Asheth Magnus avait servi le père de Julius et avait été l’un de ses serviteurs les plus impitoyables. Il avait également éét été le mentor de Stryker, développant ses talents de warcaster et lui attribuant une place dans la Garde Royale. Lorsqu’il devint évident à quel point le Roi Vinter était dangereux et que Magnus le suivait aveuglément, Stryker s’était joint aux côtés de Leto Raelthorne pour renverser Vinter lors d’une brève et sanglante appelée le Coup d’État du Lion. Magnus avait été gravement blessé au cours du combat, mais s’était échappé. Il avait ensuite passé les quinze années suivantes à travailler au rétablissement de Vinter sur le trône. Il avait également servi de mentor à Julius pendant que le garçon était en exil. Certes, au cours des derniers instants de la guerre civile, Magnus tua Vinter, portant le coup fatal alors que l’ancien roi combattait Leto et Stryker. Mais Vinter avait également tenté de tuer Julius, et le nouveau roi avait gracié Magnus lors de son accession au trône.

Tous les regards se tournèrent vers Stryker, et il put voir qu’il n’était pas le seul à avoir une opinion sur Magnus. Leto, Reblad et Ebonhart semblaient tous préoccupés, voir inquiets, mais aucun d’entre eux ne dit quoi que ce soit.

« Seigneur Général Stryker », dit Julius en soupirant avec exaspération. « Je m’attendais à une réaction de votre part à cette nouvelles, mais je ne m’attendais pas à ce que vous oubliez votre place et insultiez votre roi ».

Encore une fois, la réprimande. Julius ne lui avait pas crié dessus ni même menacé ; au contraire, son ton calme, presque parental, était bien pire, bien plus humiliant.

« Votre Majesté, je vous demande pardon », répondit Stryker en se levant. Il croisa le regard de chaque membre du conseil. « Membres du Conseil, Asheth Magnus est un homme dangereux et fourbe. Vous le savez tous. Vous savez tous combien de morts cygnaréennes peuvent lui être imputées- ». »

« Tenez votre langue, Seigneur Général », dit Julius en se levant d’un bond, renversant sa chaise avec fracas. À côté de lui, la princesse recula visiblement devant son emportement.

Les visions de Vinter Raelthorne se bousculèrent dans l’esprit de Stryker, comme si le tyran était à nouveau sur le trône. Il tremblait de fureur, et son don, la magie faisant de lui un warcaster, se rassemblait à l’arrière de son crâne, un bourdonnement désespéré, une tempête électrique désireuse d’être libérée. La Garde Royale présente dans la pièce se raidit, les mains remontant vers leurs pistolets. Était-il si proche de la violence qu’ils craignaient qu’il n’attaque le roi ?

« Seigneur Général Stryker », dit Leto en se levant également. Sa voix était calme et mesurée. « Vous ne faîtes peut-être pas confiance à Magnus, et sincèrement » - il regarda son nouveau - « j’ai aussi des doutes, mais c’est la volonté de votre roi. Mon neveu a eu une vision du caractère de Magnus qu’aucun de nous ne possède ».

Stryker était déconcerté. Comment Leto pouvait-il même envisager l’idée que Magnus reprenne sa place à la cour cygnaréenne ? Au cours de son règne, Leto s’était acharné à retrouver Magnus et à le traduire en justice. Pire encore, Magnus avait failli tuer Leto après avoir tuer Vinter, et seule la présence et la rapidité d’esprit d’un warcaster nommé Allister Caine l’en avait empêché. À présent, Leto accueillait l’homme dans la capitale, dans la salle du trône, où il pourrait influencer un autre roi cygnaréen. Les yeux du nouveau roi étaient toujours braqués sur lui, pénétrants et froids. Stryker était plus seul qu’il ne l’avait jamais été. L’idée de démissionner lui vint à l’esprit – il ne doutait pas que Julius accepterait une telle démission – mais il y avaient encore des personnes qui dépendaient de lui, des hommes et des femmes qui l’avaient suivi au combat parce qu’ils lui faisaient confiance. Il ne pouvait pas les abandonner à Magnus, qui serait presque certainement promu Seigneur Général une fois Stryker parti.

« Pardonnez-moi, Votre Majesté », répondit-il en baissant la tête. C’était une marque de respect, mais cela cachait aussi la crispation de sa mâchoire.

Le roi ne dit rien pendant un moment, mais il se rassit, lissant sa veste. « Vous êtes pardonné, Seigneur Général », dit-il enfin, rompant le long et inconfortable silence qui s’était installé dans la salle. « Je sais que votre histoire avec Asheth Magnus est difficile et, en vérité, j’ai moi aussi en désaccord certaines de ses .. méthodes par la passé. Mais j’attends de vous que vous mettiez cela de côté pour le bien du Cygnar. En êtes-vous capable ? »

Stryker inspira profondément. « Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour travailler avec … lui ». Il ne pouvait pas se résoudre à prononcer quelque chose d’aussi simple que « oui ». La situation était bien trop complexe et chargée d’émotions pour cela.

« Bien », répondit Julius. « Alors revenons à des question plus importantes. Nous avons une guerre à planifier ».

* * *

STRYKER SE DÉPLAÇAIT DANS LE HALL PRINCIPAL de la résidence royale, une aile du Château Raelthorne abritant le roi et les membres de la famille royale. Il avait assez entendu le roi, assez entendu parler de guerre, et il n’y avait qu’un seul homme qui pouvait les détourner de la voie que Julius avait choisie.

Les gardes royaux à l’extérieur des appartements du Haut Chancelier Leto reconnurent Stryker alors qu’il approchait. L’un deux, un petit homme à la barbe grise nommé Harken, était en service lorsque Stryker était devenu membre de la garde il y a près de vingt ans.

« Sergent Harken », dit Stryker. « Cela fait longtemps ».

Le visage du vieux garde semblait taillé dans la pierre – il avait passé près de trente ans au garde-à-vous, immobile et vigilant – mais un léger sourire plissa ses lèvres. « Tu as un rendez-vous avec le haut chancelier, Seigneur Général ? » demanda-t-il. « Il ne t’attends pas ».

C’était vrai, mais il espérait toujours que Leto lui parlerait. « Non, mais c’est une affaire urgente. Veux-tu informer le haut chancelier que je souhaite m’entretenir avec lui ».

Harken grogna et fronça les sourcils, mais se tourna vers la porte et frappa deux fois.

« Entrez ». La voix de Leto traversa la porte.

Harken ouvrit la porte et pénétra dans la chambre. « Le Seigneur Générall Stryker attend dans le hall, monseigneur. Il demande une audience ». Il fut une époque où Stryker aurait pu simplement passer devant les gardes et exiger une audience, mais il devait garder la tête froide. Il n’était pas sur le champ de bataille et c’était une guerre d’un type très différents.
« Faites-le entrer », dit Leto.

Le vieux garde se tourna vers Stryker. « Le haut chancelier va te recevoir ».

Stryker passa devant le garde et pénétra dans la chambre de Leto. Elle était spacieuse et bien aménagée, mais pas encombrée. Leto était un homme simple, et la chambre reflétait ses goûts. Le haut chancelier était assis à un large bureau près d’une fenêtre, et le soleil déclinant entrait à flots, accrochant le bleu brillant de l’uniforme de Leto. Il avait l’air majestueux, royal.

Leto posa sa plume et empila une liasse de papiers devant lui. L’ancien roi du Cygnar faisait de la paperasse pour son neveu ; c’était indigne de l’homme suivait depuis si longtemps. « J’ai pensé que tu pourrais venir me parler », dit-il en désignant une chaise moelleuse devant le bureau.

« Je souhaitais parler en privé, juste un instant, Votre Altesse », dit Stryker. C’était quand même étrange de ne pas dire Votre Majesté.

Leto croisa les mains devant lui sur le bureau. « Alors exprime toi ».

« Je veux savoir pourquoi vous soutenez les plans du roi d’envahir le Llael pour déclencher une nouvelle guerre avec le Khador ».

La franchise de Stryker ne sembla pas perturber Leto, et il fixa Stryker un moment avant de parler. « Je pense que tu veux poser une question différente », déclara-t-il. « Je ne pense pas que tu veux me demander pourquoi je suis mon neveu si volontiers, aveuglement même ».

« Monseigneur, je n’aurais jamais- » commença Stryker, mais Leto leva la main pour le faire taire.

« T’es-il venu à l’esprit que je suis réellement d’accord avec Julius ? » demanda Leto.

Stryker fut à court de mots. Le haut chancelier avait raison : Stryker pensait que Leto soutenait le roi par obligation, par loyauté, peut-être même par loyauté. Il n’avait pas imaginé que Leto était réellement favorable à une guerre qui pourrait tout leur coûter.

« Je ne comprends pas », répondit Stryker. « Vous – nous – avons combattu le Khador pendant si longtemps, vu tant de vies perdues, et maintenant nous avons la paix, pour la première fois depuis plus d’une décennie. Pourquoi tout gâcher ? »

Leto se leva et se tourna vers la fenêtre. Les épaules de l’ancien roi étaient crispés, comme si les paroles qu’ils allaient prononcer étaient douloureux. « Nous les avons combattus, oui » prononça-t-il. « Nous avons défendu le Cygnar et le Llael là où nous le pouvions, mais nous n’avons pas éliminer le Khador. Nous nous sommes battus, mais nous nous sommes repliés, nous avons perdu des hommes et des terres, puis nous nous sommes contentés de ce traité ». Il se tourna vers Stryker. « Je sais que tu t’es battu courageusement pour le Cygnar, pour moi, et je te serai à jamais reconnaissant de la loyauté : qu’avons-nous gagné pendant toutes ces années ? »

« Qu’avons nous gagné ? » dit Stryker interloqué. « Nous avons protégé le Cygnar. Nous avons assuré la sécurité de notre peuple ».

« Mais notre ennemi demeure, et maintenant, il es plus fort », déclara Leto. Son regard était devenu dur, amer. « Mon neveu a beaucoup de son père en lui. Je sais que cela te dérange, mais mon frère n’a pas toujours été le montre qu’il était devenu. Il avait de la force Son fils à de la force ; peut-être une force que je ne connais pas ».

« Ce n’est pas vrai, mon seigneur », répondit Stryker en se levant. « Vous étiez un bon roi, un homme que j’ai suivi sans hésitation, une homme que j’aurais suivi jusqu’à la mort ».

Leto sourit. « Tu es un homme bon, Coleman, et un bon soldat, mais je n’ai fait que défendre, et ce faisant, nous avons perdu du terrain en tant que nation. Julius a la force de reprendre ce que nous avons perdu, de rendre le Cygnar plus fort qu’il ne l’a jamais été, de combattre nos ennemis. C’est un roi qui mérite d’être suivi ».

Leto était un homme que Stryker avait admiré, qu’il s’était efforcé d’imiter. Il était étrange de l’entendre parler de lui de cette façon. « Monseigneur, les risques sont trop grands. Si nous envahissons le Llael, et que nous sommes repoussés par le Khador, cela pourrait les encourager à envahir le Cygnar. Les pertes que nous avons subies au cours de la guerre contre votre frère n’ont pas été compensées, et de nouvelles pertes nous rendraient vulnérables ».

« Tu as raison, bien sûr », déclara Leto. « C’est un risque, mais un risque que nous devons prendre sinon nous perdrons le Cygnar petit à petit au profit de ses ennemis ». Il traversa la pièce et posa ses mains sur les épaules de Stryker. « Je recommande que tu diriges les force d’invasion. Tu es la meilleure chance de Cygnar, et si tu n’as aimé en tant que roi, offre à Julius la même loyauté, le même courage que tu m’as donné ».

Stryker ne put regarder Leto dans les yeux et tourna la tête. « Et Magnus ? Approuvez-vous cela également ? »

Leto le relâcha et recula. Son visage se durcit. « Je ne lui ferai jamais confiance, mais le roi lui fait confiance, et Magnus lui a été fidèle. Je ne pense pas qu’il saperait délibérément les objectifs de Julius.

« Le monde que je connaissais a disparu », dit Stryker, plus pour lui-même que pour Leto. « Je ne connais pas ma place dans celui-ci ».

« Tu es un Seigneur Général de Cygnar », répondit Leto. « Cygnar existe aujourd’hui grâce à tes actions. Des hommes comme Magnus ne pourront te l’enlever si tu leur permets pas ».

« Vous avez raison, Votre Altesse », dit Stryker. « Je m’excuse si j’ai dépassé les bornes ». Il était bon d’entendre que Leto appréiait encore tout ce qu’il avait fait et sacrifié pour protéger le Cygnar.
« Je suis désolé de vous avoir dérangé », dit-il. « Je vais vous laisser ».

Leto acquiesça tandis que Stryker se dirigeait vers la porte. Il l’ouvrit, mais avant de la franchir, il entendit la voix de Leto. « Tu es un élément important de l’avenir de Cygnar, Coleman. Ne l’oublie pas ».
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Roman - Poudrière
« Réponse #8 le: 28 juillet 2024 à 19:43:47 »
- 8-

LA GARNISON CASPIENNE ABRITAIT près de deux cents membres de l’infanterie Lame-Tempête ainsi qu’un bon nombre de leurs homologues de la cavalerie, les Lances-Tempête. La plupart de ces troupes provenaient de la Division Tempête de Stryker, qui n’avait pas de quartier général fixe et avait été en grande partie retirée de la structure des quatre armées de Cygnar ; par conséquent, ils pourraient théoriquement être déployés n’importe où. La vérité était que la majeure partie de la Division Tempête était en garnison à la frontière entre le Khador et le Cygnar, même si une large partie de ses Chevaliers-Tempête et de ses warjacks seraient rappelés pour l’invasion de Llael.

Lorsqu’elle était beaucoup plus petite, la Division Tempête était autrefois hébergée à Caspia dans le cadre de la garnison générale, et Stryker utilisait l’ancien complexe Lame-Tempête comme QG générale et quartiers personnels.

Sa section préférée de la garnison était le terrain d’entraînement réservé aux éléments de la Division Tempête. Il avait passé de longues heures dans ce genre d’endroit pendant sa jeunesse, s’entraînant avec les Lames-Tempête nouvellement formés et recevant des instructions d’hommes comme Garvin Tews. La cour était petite mais toujours utilisable. Il s’agissait d’un carré de terre battue de cinquante verges de côté, avec des cloches en bois à une extrémité pour l’entraînement au couteau et des bermes en terre à l’autre pour s’entraîner au lancer d’éclair.

Il n’y avait qu’une seule autre personne dans la cour d’entraînement. Stryker sourit en voyant Garvin Tews, ressemblant à un ours, s’attaquer à un pylône de bois à l’aide d’une glaive-tempête émoussé. Tews le regarda approché, planta la pointe de son épée dans le sol et s’appuya dessus.

« Dure journée, Seigneur Général ? » demanda-t-il lorsque Stryker s’approcha.

Stryker grimaça. Que savait déjà Tews ? « On pourrait dire ça, Capitaine ».

« Maudit Magnus », dit Tews en secouant la tête. Donc, il avait entendu. Stryker se demanda de qui il tenait ces informations. Il décida que cela n’avait pas d’importance. « Difficile de croire que ce fils de pute de traite entrera en Caspia en tant qu’homme libre et à la demande du roi en plus ».

Stryker réprima une pointe de colère à la mention de Magnus. « Je ne suis pas ici pour parler de Magnus », dit-il. « Je suis là pour te tabasser comme un gobber unijambiste dans le cercle d’entraînement ». Il fit un large sourire au capitaine Lame-Tempête. « Enfin, si un vieil homme comme toi peut encore soulever un glaive-tempête ».

« Oh, c’est un fait ? » répondit Tews en posant son glaive d’entraînement sur son large épaule. « Peut-être as-tu oublié qui t’as appris à utiliser un glaive-tempête en premier lieu ? »

« Non, je ne l’ai pas oublié », reprit Stryker. Cette partie était vraie, mais un souvenir troublant de Magnus lui apprenant à utiliser la grande épée caspienne le long de la route Ruissepêche à Caspia lui vint instantanément à l’esprit. C’était Magnus qui lui avait montré les bases du maniement de l’épée. Il repoussa le souvenir et se força à sourire. « Je suis juste meilleur que toi maintenant ».

« Tu veux mettre cela à l’épreuve ? » demanda Tews. Il avait laissé tombé les messieurs et les seigneurs généraux. Ils étaient amis et ici, maintenant, leur rang n’avait plus d’importance.

« Quoi, avec Vif-Argent ? » dit Stryker en tapotant le manche de sa lame mékanique toujours fixée au dos de son armure de warcaster. « Tu as peut-être un petit avantage » ; dit Tews en montrant râtelier de glaives d’entraînement à proximité.

« D’accord », répondit Stryker en s’emparant d’une lame sur le support. Il retira Vif-Argent de son dos et la plaça à la place de l’arme d’entraînement.

« Prêt », dit Stryker en se dirigeant vers l’un des cercles d’entraînement situés à proximité. Tews sourit et le rejoignit.

Tews saisit sa lame d’entraînement émoussée à deux mains. Comme tous les glaives-tempête, elle avait une longue poignée et se maniait plus comme une grande épée que comme une arme d’hast. Tews portait une armure de plate usée, son armure d’entraînement, bien cabossée et éraflée par d’innombrables heures d’entraînement.

Cela faisait longtemps que Stryker n’avait pas utilisé de glaive-tempête ; il avait la taille et le poids de Vif-Argent, mais son arme à lui était calquée sur la grande épée caspienne, plus traditionnelle. Stryker portait son armure de warcaster, mais il avait désactivé la turbine arcanique ; le champ d’énergie qu’elle générait lui donnerait un autre injuste avantage.

Elle leva son arme en garde haute, orientant la pointe vers son adversaire. « Prêt ? » demanda-t-il ?

Tews hocha la tête et adopta une position plus défensive, tenant sa propre arme avec la poignée proche du ventre, la lame projetée vers l’extérieur. Ils s’étaient affrontés à de nombreuses reprises et, en vérité, Tews était meilleur épéiste. Stryker était un expert avec la lame, mais sa capacité à canaliser son don de warcaster dans ses frappes, augmentant leur précision, leur vitesse et leur impact, en faisant de lui un adversaire de taille, même pour les meilleurs épéistes dépourvus de ce don, à condition qu’il se batte avec son armement uniquement. Bien sûr, une règle tacite entre lui et Tews voulait qu’il n’emploie pas ces armes et ces dons pour faire pencher la balance en sa faveur. Ce serait antisportif. Cela signifiait généralement qu’il se retrouvait avec une série de bleus douloureux à la fin de leur séance d’entraînement.

« Trois touches ? » demanda Tews.

« Comme toujours », répondit Stryker.

« Viens les chercher ».

Stryker ne perdit pas de temps et se précipita en avant, sa lame s’abattant en une puissance frappe diagonal. Tews leva son arme et se déplaça sur le côté avec une grâce et une rapidité dont la plupart des gens penseraient qu’un homme aussi grand était incapable. Leurs lames se rencontrèrent dans un choc retentissant, et Tews dévia la lame de Stryker, manquant son épaule droite de quelques pouces.

Tews utilisa son mouvement latéral pour lancer une riposte, une frappe rapide vers l’avant autour de la lame de Stryker n’ayant pas la force d’un élan complet, mais avec un épéiste de la taille et de la force considérable de Tews, cela n’avait guère d’importance. Si la turbine arcanique de Stryker avait été activée, le champ d’énergie généré par l’appareil aurait privé l’arme de Tews d’une partie de son énergie cinétique, voire l’aurait arrêtée net. Mais sans cette protection, la pointe de l’arme du Lame-Tempête s’écrasa sur le plastron de Stryker avec un bruit sourd et le fit trébucher en arrière, grimaçant.

« Une », dit Tews en levant un doigt.

« Morrow, tu es trop rapide pour un homme de ta taille », répondit Stryker, sachant qu’il aurait une ecchymose sur la poitrine la semaine prochaine. « Et pour ton âge », ajouta-t-il avec un sourire ironique.

« La vitesse est l’un des nombreux dons, et avec l’âge viennent la sagesse et les compétences », déclara Tews.

Stryker reprit la garde haute et Tews reprit sa lame en garde moyenne. Il se rencontrèrent à nouveau. Cette fois, Stryker lança une feinte à la tête de Tews, qui leva sa lame pour l’intercepter. Stryker dévia sa frappe à la dernière seconde et inversa sa direction pour porter une frappe basse. C’était une technique difficile avec une lame aussi grande mais il n’était pas dépourvus de dons.

La lame frappa la jambière gauche de Tews avec craquement satisfaisant, cabossant l’acier et faisant trébucher le grand Lame-Tempête sur le côté.

Tews rit. « Je ne vois jamais celui-là la première fois que tu le lances », dit-il en secouant sa jambe gauche.

« C’est pourquoi je le lance à chaque fois », répondit Stryker. « Oh, et une pour moi ».

« Égalité, alors », répondit Tews, et il leva son glaive en garde haute, imitant Stryker. Cela signifiait que Tews passait à l’offensive, et Stryker gémit intérieurement. D’autres bleus en perspective.

Ils se battirent encore pendant dix minutes et Tews remporta le match, comme il le faisait habituellement, trois touches à deux. La dernière « touche » avait été une autre riposte à l’un des coups de Stryker, et elle avait été si forte et si rapide qu’il n’avait pas pu la ralentir, ni même la toucher avec sa propre lame. Tews l’avait complètement désarçonné ; à bout de souffle. S’il s’était agi d’un véritable glaive-tempête, Stryker aurait été coupé en deux. Bien sûr, à certains moment, si Stryker avait été en duel avec Vif-Argent, il aurait pu canaliser sa volonté dans ses attaques, utilisant ses dons innés pour ajouter de la vitesse. et de la précision à ses coups. Mais pour cette entraînement, Vif-Argent n’était pas présente. Après tout, lui et Tews avaient un accord.

Tews s’approcha de Stryker qui était assis sur par terre, essayant de faire coopérer ses poumons. Tews sourit d’une oreille à l’autre. « Ça fait trois. Tu veux une autre série ? »

Stryker leva les yeux vers son vieil ami et secoua la tête. Il tendit la main et Tews le releva. Il grimaça alors que le soudain mouvement provoquait une nouvelle douleur dans sa poitrine meurtrie. « Non, Capitaine, j’ai eu mon compte », répondit-il après avoir réussi à faire pénétrer suffisamment d’air dans ses poumons pour cette tâches. « Les combats d’entraînement avec toi donnent à un homme l’envie de choses faciles, comme une invasion et une guerre à grande échelle ».

Tews s’esclaffa. « Nous savons tous les deux que je ne suis pas de taille à t’affronter si tu employais ne serait-ce qu’une infirme partie de tes réelles capacités ».

« Peut-être », répondit Stryker. « Mais Morrow au-dessus, mec, je suis content que tu sois de nôtre côté ».

Le visage de Tews devint sérieux. Je serai toujours à vos côtés, monsieur. Peu importe ce qui arrive ».

Stryker sourit avec lassitude. « Je n’en ai jamais douté », déclara-t-il. « Maintenant, vas-tu me dire comment lancer cette fichue riposte que tu m’as assénée à la fin ? »

« Vous devriez demander au Major Maddox, monsieur », répondit Tews avec un sourire narquois. « C’est elle qui me l’a montré ».

« Me demander quoi ? » prononça une voix derrière eux.

Stryker se retourna et vit une warcaster, apparemment de son âge, traverser la cour d’entraînement vers lui. Elle était grande, mince, avec des cheveux courts couleur paille, des pommettes saillantes et des yeux bleus. Elle se déplaçait comme une guerrière, avec grâce et une certaine économie de mouvement que tous les épéistes habiles semblaient acquérir. Le Majour Elizabeth Maddox portait une armure similaire à celle de Stryker – elle aussi était alimentée par l’énergie galvanique plutôt que par la vapeur – bien qu’un peu plus légère. Elle tenait d’une main une énorme lame mékanique à deux mains. Cette arme ressemblait à un glaive-tempête, mais elle réservait de nombreuses surprises aux ennemis de Cygnar. Stryker avait vu cette arme, Tempête, en action de nombreuses reprises.

« Beth », dit Stryker. Il connaissait depuis plus de quinze ans, et il avaient servi ensemble sur de nombreux champs de bataille, à commencer par le premier conflit en Llael. Elle était membre de l’infanterie Lame-Tempête et un vétéran chevronné lorsque son talent de warcaster avait été découvert, et elle était maintenant l’une des meilleurs warcasters de l’armée cygnaréenne.
Maddox lui offrit un rare sourire, qui effaça momentanément la touche de tristesse qui semblait toujours présente sur son visage, un détachement qui la faisait paraître froide. Maddox avait de bonnes raisons de souffrir, comme le savait Stryker. Elle avait passé trois ans comme prisonnière de guerre au mains du Protectorat de Menoth. Elle avait été libérée il y a des années, mais les tortures qu’elle avait endurées…

« Bonjour, Beth », dit Tews. Il lui sourit, mais il y avait une certaine tristesse dans ses yeux. Ils avaient été ensemble avant qu’elle ne soit capturée par le Protectorat ; cette relation était visiblement terminée.

Elle fit un signe de tête à Tews puis se tourna rapidement vers Stryker, comme si elle ne supportait pas de regarder le grand Lame-Tempête. « J’ai entendu dire que vous vous cachiez ici », dit-elle. Le sourire avait disparu, mais il y avait un ton ironique dans sa voix. Tout comme Tews, elle ne s’embarrassait pas de protocole formel, ils étaient tous amis ici.

« je ne me cachais pas », déclara-t-il. « Je faisais juste un peu d’exercice.

« J’ai vu », répondit Maddox. « Vous en voulez un peu plus ? »

Stryker réfléchit à la proposition. Cela faisait des années qu’il ne s’était pas entraîné avec un autre warcaster. Il avait certes combattu plus d’un warcaster ennemis, mais il avait depuis longtemps dépassé le besoin de s’entraîner avec l’un de ses compagnons doués. Il ne l’avait pas fait avec Maddox depuis l’époque où ils étaient ensemble au sein des Lames-Tempête, bien avant que son talent ne soit rendu public et que le sien ne se manifeste. Il soupçonnait que sa proposition avait une arrière-pensée. Maddox n’avait jamais hésité à partager ses opinions avec ses supérieurs, et Stryker lui accordait plus de latitude que la plupart des autres. Un sermon de sa part allait certainement arriver.

« Prends une lame d’entraînement », dit Stryker. « Tu te souviens encore comment utiliser un glaive-tempête ? »

Elle ricana par-dessus son épaule. « Je crois que je peux m’en sortir ». Elle choisit une lame d’entraînement et posa Tempête sur le support à côté de Vif-Argent.

Elle revint vers Stryker en tenant la lame dans une main. Son armure de warcaster, comme la sienne, accroissait la force de celui qui la portait lorsque la turbine arcanique était mise sous tension.

« Avant de commencer », dit Maddox, « j’aimerais vous dire que vous plein de merde de buffle, monsieur ».

Il savait que sa franchise ne devrait pas le surprendre, mais c’était toujours le cas. Depuis son retour en Cygnar, elle avait assumé un poste de commandement au sein des Lames-Tempête, et Stryker comptait sur elle pour obtenir des conseils - elle était compétente, honnête et n’avait pas peur de dire ce qu’elle pensait, même à un officier supérieur. Cela avait toujours son utilité – si l’officier supérieur n’était pas trop égocentrique pour supporter la critique. Parfois, Stryker se demandait s’il était à la hauteur.

« Eh bien, c’est mon signal que cette conversation est au-dessus de mes compétences », répondit Tews en replaçant sa lame d’entraînement sur le râtelier. « Je vais vous laisser régler ça tous les deux ».

Stryker regarda Tews disparaître dans le bâtiment principal de la garnison, puis prononça, « Les dents de Thamar, Beth. Dis-moi ce que tu penses vraiment ».

« Avec plaisir. Tu dois accepter que Magnus fasse à nouveau partie de ta vie, et plus important encore, de celle du roi ». Elle ne luis laissa pas le temps de répondre et s’élança vers l’avant, sa lame jaillissant dans une frappe basse et ascendante.

Elle l’avait pris au dépourvu, mais il parvint à abaisser sa propre lame pour parer la sienne. L’impact lui fit mal à la tête – elle avait utilisé son talent arcanique pour ajouter de la vitesse et de la puissance à ce coup. Avant qu’il ne puisse riposter, elle recula d’un bond, souple et agile.

Il tourna sur sa gauche. « Bon sang, tu étais là. Tu as vu à quel point il était un monstre, à quel point il était disposé à servir un tyran, à quel point il était disposé à tuer des cygnaréens ».

« Oui, j’étais là, et je me souviens très bien du genre d’homme qu’était Magnus », dit-elle, en le rejoignant pas à pas. « Mais cela n’a pas vraiment d’importance. Nous avons un nouveau roi et ce n’est pas un tyran ».

Cette fois, Stryker passa à l’offensive et attaqua avec son arme. Il retira sa main supérieur de la poignée et la balança avec sa main inférieure tout en s’élançant vers l’avant. Balancer un glaive-tempête à une main n’était pas une tâche facile, même avec une armure de warcaster, mais ce mouvement lui donnait près de trente centimètres d’allonge. Le mouvement surpris Maddox et elle bondit en arrière, mais pas assez rapidement. Son champ d’énergie s’enflamma lorsque la lame de Stryker le percuta, puis le traversa. La pointe de son glaive-tempête l’atteignit au-dessus de la hanche droite. Son champ d’énergie lui avait volé une partie de la force de son coup, mais il fut encore assez puissant pour la faire chanceler sur le côté. Elle récupéra instantanément et repoussa le coup suivant avec le plat de sa lame.

« Cela reste à voir. C’est le fils de son père », dit Stryker en respirant difficilement. « Il y a déjà des influences douteuses au sein de son conseil ».

Maddox secoua la tête. « Il est jeune et il est peut-être un peu téméraire, mais ce n’est pas Vinter Raelthorne. De plus, il y a d’autres membres de son conseil qui peuvent contrecarrer les influences dont tu parles. Son oncle, le Duc Ebonhart, et si tu veux bien te sortir la tête du cul, toi ».

Stryker émit un son dégoûté. « Est-ce que tout le monde sait que tu parles ainsi à un seigneur général ? »

Elle grimaça, mais sa réponse fut une fente soudaine, alors qu’elle utilisait son glaive-tempête comme une grande rapière. Elle était plus rapide que lui, plus rapide que Tews, et la parade de Stryker fut loin d’être à temps. La pointe de l’arme de Maddox s’écrasa sur sa poitrine avec la force d’un train – elle n’y était allé de main morte. Ce coup aussi avait été augmenté et l’avait fait reculer de trois pas, jusqu’à ce qu’il ait un genou à terre. Seul son champ d’énergie lui avait évité d’être totalement assommé.

« Il ne m’écoute pas. L’unique raison pour laquelle je fais partie du conseil intérieur, c’est à cause de Leto », répondit Stryker en se redressant péniblement. Maddox le laissa se relever.

« Coleman, il ne s’agit pas de toi ; il s’agit de ce qui est bon pour le Cygnar », déclara-t-elle. « Allez. Tu vaux mieux que ça. Je le sais. Pourquoi il te faut tant de temps pour que tu le remarque ? »

Stryker sourit malgré la réprimande. « Tu as autant de tact que le poing d’un Cuirassé ».

« Je ne suis pas fait pour la diplomatie, je suppose. Et franchement, si je pensais que cela te ferait entendre raison, je laisserai Arsouye t’en mettre plein la vue. Mais je peux probablement encore le faire moi-même. Elle se lança à nouveau en avant, mais Stryker l’attendait celle fois. Elle avait anticipé en mettant du poids sur sa jambe avant. Il leva sa lame et attrapa la sienne en hauteur, laissant la partie médiane complètement exposée. Il lança un coup de pied frontal dans le ventre armuré de la jeune femme, mettant toute sa magie dans le coup. Il l’attrapa et l’envoya s’écraser trois pas en arrière, puis sur les fesses.

« Je suis devenue rouillée », dit-elle en se levant et en grimaçant. « J’aurais dû le voir venir ».

Il recula et la laisser se relever, comme elle l’avait fait pour lui. « J’entends bien ce que tu dis », dit-il. « Mais je crois que personne ne connaît Magnus comme je le connais. Personne ne sait vraiment à quel point il est dangereux ».

Elle se pencha au niveau de la taille, reprenant son souffle. « C’est peut-être vrai », dit-elle aprus un moment. « C’est une raison de plus pour que tut te taises et que tu reste dans les bonnes grâces du roi ».

Il poussa un long soupir irrégulier. « Pour que je puisse le surveiller. Je sais ».

« Exactement ». Elle brandit son épée. « On en est où, deux touches à une ? »

« Oui, tu veux appeler... » Elle n’annonça pas son attaque suivante. C’était une charge, mais elle venait d’un angle oblique – elle avait fait un saut à gauche et s’était précipitée vers l’avant pratiquement en même temps. C’était un degré d’agilité et de vitesse qu’il ne possédait tout simplement pas.

Il tournoya pour répondre à l’attaque de la jeune femme, qui cumula avec un coup de poing dans le dos au niveau de sa poitrine, et leva sa propre arme pour intercepter la sienne. Trop lent. Son champ d’énergie brilla, puis il se retrouva au sol, ses côtes palpitant de douleur.

Maddox se tenait au-dessus de lui, triomphante, et lui tendit la main. « Cela fait deux pour moi. Appelons cela un match nul ».

« Ça me va », grogna-t-il alors qu’elle le relevait. « Ils auront besoin de moi intact quand j’arriverai sur le champ de bataille ».
« Modifié: 04 août 2024 à 19:15:44 par elric »
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Roman - Poudrière
« Réponse #9 le: 04 août 2024 à 19:20:37 »
- 9-

LE TON DE LA VILLE CHANGEA au cours des semaines suivantes. Une fois la déclaration de guerre rédigée, elle fut rapidement ratifiée par l’Assemblée Royale, et c’est alors que débuta l’inévitable diffusion d’informations au sein de la population. Aucune annonce officielle n’avait été faite au peuple de Cygnar, et les différents nobles avaient juré de garder le silence jusqu’à ce que le roi leur donne l’autorisation d’en parler aux habitants de leurs provinces et de leur domaines. Mais avec plus d’une centaine de nobles dans l’Assemblée Royale, il y avait forcément des bavards.

Stryker entendait des murmures de guerre dans les rues et, en général, partout où il se rendait en Caspia. Sa seule présence était susceptible d’inciter les gens autour de lui à discuter de la probabilité d’une guerre.

Il avait passé les dernières semaines dans la garnison de Caspia, où étaient stationnés les membres de la Division Tempête, à passer du temps avec les amis et les camarades qu’il avait retrouvé au cours des quinze dernières années. Il n’avait pas beaucoup parlé au cours de ces semaines, préférant lutter contre les doutes et les craintes qui obscurcissaient son esprit plutôt que d’en accabler ses subordonnés. Il passait de longues heures dans la cour d’entraînement avec sa lame et son pistolet, répétition mécanique et effort physique servant à vider son esprit, au moins pour un moment.

Aujourd’hui, cependant, il allait devoir faire face à la source de sa consternation. Il avait été informé de l’arrivée de Magnus en ville. Bien que le warcaster  ne l’ait pas encore cherché, Stryker ne pouvait plus l’éviter. Plus exaspérant encore était que Magnus avait reçu un grade officiel au sein de l’armée cygnaréenne : celui de général, rien de moins. Stryker refusait de s’attarder sur ce point ; la présence de Magnus était bien plus pénible que son grade.

Le roi avait convoqué un conseil de guerre pour définir le plan d’invasion, plan auquel il avait contribué lors de réunions privées avec le Maître de Guerre Ebonhart et d’autres membres essentiels de l’Armée Cygnaréenne. Tout ce qu’ils avaient décidé serait probablement contesté ou modifié par Magnus ; Stryker ne doutait pas que l’homme voudrait faire connaître sa présence dès son retour à Caspia.

Stryker quitta la garnison tôt, attendant avec impatience la longue marche vers le palais pour rassembler ses pensées. Maddox l’attendait devant les portes du palais, et il était reconnaissant de la voir. Il serait bon d’avoir un ami à ses côtés pendant cette épreuve qui s’annonçait difficile.

« Major Maddox », prononça-t-il en s’approchant des portes principales.

« Vous êtes prêt, monsieur ? » Dit-elle et s’installa à côté de lui.

Il acquiesça. « Bien sûr », répondit-il. « Je ferai mon devoir. On m’a récemment rappelé, assez douloureusement, que je devais pas me comporter comme un cadet morveux se plaignant de… Comme dirais-tu ? »

« Peut-être ne pas être autorisé à manger à la table des officiers, monsieur », suggéra Maddox.

Il grimaça. « C’est déjà pas mal. Eh bien, quand je mangerai avec les autres officiers, il semble que le Général Magnus se joindra à moi ».

* * *

ASHETH MAGNUS ÉTAIT AUSSI ARRIVÉ TÔT au château, et il se tenait dans la grande antichambre à l’extérieur de la salle du trône. Le conseil de guerre s’y tiendrait au lieu de la plus petite salle de réunion du conseil intérieur. Le voir réveilla une tempête d’émotions de colère, de trahison et, plus que tout, d’une surprenante peur.

Asheth Magnus était plus ou moins tel que Stryker s’en souvenait de lui. Il était grand et avait les cheveux noirs, même si ses cheveux étaient maintenant parsemés d’argent. Son visage était maigre et belliqueuse, ses yeux sombres et pénétrants. Magnus portait une armure de warcaster, mais contrairement à celles fabriquées par l’Armurerie Cygnaréenne que portaient Stryker et Maddox, le kit de Magnus semblait rudimentaire, mais Magnus avait un don pour la mékanique – ma puissante technologie combinant les arcanes avec les machines – et ses créations étaient souvent d’une efficacité mortelle. Ses compétences en ingénierie se reflétaient dans la prothèse mékanique ayant remplacé son bras droit. Le membre avait été écrasé par la chute d’un warjack, un warjack renversé par la magie de Stryker lorsqu’il s’était retourné contre son ancien mentor. Le membre mékanique était une vilaine chose d’acier et de bronze et semblait tout aussi délabré que l’armure de l’homme.

Magnus n’était pas seul. Il était accompagné de deux hommes, et aucun d’eux ne semblait faire partie de l’armée cygnaréenne régulière. En fait, ils avaient l’apparence de mercenaires, probablement servi Magnus pendant son exil. Les rapports indiquaient qu’il avait fréquenté toutes sortes de personnages peu recommandables, y compris certains des criminels les plus infâmes des Royaumes d’Acier.

« Essayer de rester courtois, monsieur », prononça Maddox à Stryker. Le fait qu’elle l’ait appelé monsieur signifiait que le protocole était à nouveau en place – pour eux deux.

Il fit un signe de tête rigide et serra les dents. Même parler à Magnus lui retournait l’estomac, mais les conseils de Maddox pendant leur séance d’entraînement, en particulier son insistance sur le fait qu’il devait rester au conseil pour garder un œil sur Magnus et contrecarrer son influence du mieux qu’il pouvait, étaient la première et la plus importante de ses préoccupations.
Stryker traversa l’antichambre en direction de Magnus, qui se retourna pour l’accueillir, un léger sourire aux lèvres.

« Général Magnus », dit Stryker, son estomac se tordant à prononciation de ces deux mots ensemble.

« Seigneur Général Stryker », répondit Magnus. « tu t’es bien débrouillé. Ce n’est plus tout à fait le garçon que j’ai arraché de Ruissepêche il y a tant d’années.

Magnus avait tiré le premier coup, rappelant à toutes les personnes présentes que c’était lui qui avait amené Stryker à Caspia, lui qui avait autrefois servi de mentor à Stryker. Coup au but, mais Stryker avait de quoi répondre.

« Général Magnus, je sais que vous avez quitté la structure militaire depuis un certain temps, mais, comme vous vous en souvenez certainement, il est approprié d’appeler un officier supérieur, monsieur, lorsque vous vous adresser à lui ».

Le sourire de Magnus s’élargit, peut-être en reconnaissance de la réprimande de Stryker, peut-être juste pour qu’il puisse montrer ses dents tel le prédateur qu’il était. « Bien sûr, monsieur », dit-il. « Comme vous le dîtes, je suis en dehors de tout cadre militaire standard depuis un certain temps. Pendant mon temps, j’ai été forcé de recourir à un système de commandement plus… méritant ».

L’un des hommes qui accompagnait Magnus, un homme brutal au crâne chauve et à la poitrine et aux bras épais, gloussa. Il portait un plastron, cabossé mais peut-être un peu plus brillante pour l’occasion, orné du symbole délavé de l’organisation de mercenaires connue sous le nom de Tête d’Acier. Stryker doutait que cet homme ait servit au sein de cet organisation réputée depuis un certain temps. Il portait également une barre de lieutenant – de lieutenant cygnaréen – sur son épaule droite. Avant que Stryker ne puisse demander pourquoi cet ancien mercenaire avait reçu une commission d’officier dans l’Armée Cygnaréenne, Maddox s’avança devant lui.

« Général Magnus », dit-elle. Elle avait dû ressentir la tension entre eux En fait, toutes les personnes dans l’antichambre, y compris six membres de la Garde Royale au garde-à-vous devant les portes de la salle du trône. « Je suis le Major Elizabeth Maddox ».

Magnus la salua d’un signe de tête, tout en gardant les yeux rivés sur Stryker. « Oui, je me souviens de toi… avant. Tu étais l’une des Lames-Tempête de Leto ». Il jeta un coup d’oeil sur son armure de warcaster. « Je remarque que tu es plus que cela maintenant ».

« Vous avez une bonne mémoire, monsieur », répondit Maddox. « J’ai hâte de travailler avec vous ».

Stryker essaya de ne pas rouler des yeux et n’y parvint que partiellement. Maddox ne faisait que ce qu’il devait faire , c’est-à-dire cacher les griefs du passé et maintenir le décorum professionnel, mais le qu’il qu’elle ait dû appeler cet homme monsieur l’horripilait.

Avant qu’aucun d’eux ne puisse en dire davantage, les portes de la salle du trône s’ouvrirent et le Haut Chancelier Leto sorti de l’antichambre. Lorsqu’il vit Magnus et Stryker debout l’un à côté de l’autre, ses yeux s’écarquillèrent. Stryker ne put lui en vouloir.

« Seigneur Général Stryker, Major Maddox … Général Magnus », dit-il. « Le roi est prêt à commencer dès que les autres membres du conseil de guerre seront arrivés. « Prenez place, s’il vous plaît ».

« Très bien, tout le monde. Allons-y », dit Stryker en se dirigeant vers la salle du trône.

« Oui, monsieur », dit Magnus derrière lui. « J’ai hâte de me remettre au travail ».
« Modifié: 04 août 2024 à 19:25:47 par elric »
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« Réponse #10 le: 04 août 2024 à 19:25:28 »
- 10-

LA SALLE DU TRÔNE AVAIT ÉTÉ MODIFIÉE depuis la dernière fois que Stryker l’avait vue. Trois grandes tables avaient été apportées, leurs surfaces en inox polies. Elles étaient disposées en forme de U avec le trône au milieu. Stryker, Magnus et le Maître de Guerre Ebonhart s’assirent à la table centrale – il était préférable que de s’asseoir en armure de warcaster. D’autres membres du conseil intérieur étaient assis aux autres tables, et ils étaient rejoints par d’autres hommes et femmes importants, qui, bien que ne faisant pas partie du cercle intérieur du Roi Julius, constituaient son conseil consultatif élargi. Cela incluait le Seigneur Trésorier ; les deux dirigeants les plus éminents de la Ligue Mercarienne, le Duc Waldron Gately de Mercir et le Seigneur Ethan Starke, premier échevin ; Arland Calster, dirigeant de la branche caspienne de l’Ordre Fraternel de la Magie et ancien conseiller aux arcanes de Leto ; et le Commandeur Birk Kinbrace, Chancelier de l’Académie Stratégique. Stryker était heureux de voir Kinbrace – il connaissait bien le warcaster vieillissant, et Kinbrace était un homme honnête et direct ayant également contribué au renversement de Vinter Raelthorne.

La seule personne semblant ne pas être à sa place était le Major Maddox, mais sa présence était probablement due à son rôle actuel de pièce maîtresse d’une campagne de propagande destinée à promouvoir le soutien de l’armée et au nouveau roi.

« Je le répète, une attaque contre Merywyn, le siège du pouvoir khadoréen en Llael, est le moyen le plus direct de briser leur pouvoir dans la région », déclara Stryker. Il avait exposé le plan que lui et Ebonhart avaient élaboré, qui prévoyait un siège de l’ancienne capitale de Llael. Sans surprise, Magnus estima que ce n’était pas le bon plan d’action.

« Votre Majesté, vous vous êtes rendu à Merywyn récemment », demanda Magnus en s’adressant à Julius. Le roi s’était peu exprimé. Il s’était assis tranquillement sur son trône, écoutant ses conseillers. Stryker répugnait à l’admettre, mais c’était un autre trait qui différenciait Julius de son père. Vinter avait rarement tenu compte des conseils de quelqu’un d’autre que le sien.

« Vous avez remarquez à quel point elle était puissante », poursuivit Magnus. « Les khadoréens ont consacré beaucoup de temps et d’efforts à la restauration de la cité, et ses murs sont épais et bien défendue. Un siège serait long et son issue incertaine ».

« Je suis d’accord, Votre Majesté », dit le Chancelier Kinbrace, décevant Stryker. Il ne pouvait imaginer que cet homme soit d’accord avec Asheth Magnus concernant quoi que se soit. « Elle est trop bien fortifiée ».

« Pourtant, nous avons des informations fiables selon lesquelles une seule division défend la ville », dit Ebonhart. « Ce n’est pas beaucoup d’hommes, et si nous frappons rapidement et en force, nous pourrions les submerger ».

Magnus secoua la tête. « Il n’y a peut-être qu’une division là-bas pour le moment, mais n’oubliez pas que les khadoréens contrôle la Ligne Ombrienne, qui est directement reliée à Rynyr et Laedry. Ils pourraient envoyer des troupes à Merywyn en quelques heures.

La présence militaire à Laedry et Rynyr est minime », déclara Stryker. « Vous devriez le savoir, Général, si vous aviez étudié les rapports qui vous ont été remis ».

« Seigneur Général », répondit Magnus en se tournant vers Stryker. Le Duc Ebonhart se tenait entre eux, quelque peu éclipsé par les deux warcasters armurés qui le flanquaient. « J’ai lu vos rapports et ceux du Duc Ebonhart, et ils étaient complets … lorsqu’il s’agissait de l’armée khadoréenne ».

« Où veux-tu en venir, Magnus ? «  demanda Ebonhart. Il était manifestement frustré par la remise en cause de son plan, même s’il avait plus de tolérance pour l’homme que Stryker. Ebonhart avait rejoint Julius au début de la guerre civile, il y a trois ans.

« Ce que je veux dire, c’est que le prince régent, Vladimir Tzepesci, a rassemblé ses lieutenants et leurs troupes à Laedry. Il y a dix mille chevaux lourds : des uhlans Croc d’Acier et des drakhun ».

« Comment savez-vous cela ? » demanda Leto. Il se tenait à coté du trône et écoutait l’échange, le front plissé d’inquiétude.

« Votre Majesté », dit Magnus, puis il s’arrêta et sourit. « Mon pardon, Haut Chancelier. J’ai plus l’habitude de vous considérez comme le Roi Leto ».

La rage monta en Stryker. Le lapsus de Magnus n’était pas accidentel. C’étaut un autre subtil coup pour rappeler à ceux qui avaient été ses ennemis, ceux qui l’avaient forcé à l’exil, qu’il avait résisté à leur tempête et que leur pouvoir avait diminué tandis que le sien s’était accru.

Leto garda son sang-froid et balaya le faux pas. « Continuez ».

« J’allais dire que j’ai des hommes loyaux à Laedry depuis un certain temps. Personne ne remarque un mercenaire, et il peuvent pénétrer dans des endroits que même les espions du commandant en chef des éclaireurs ne peuvent atteindre ».

« Rebald », dit Julius, « que vous ont dit vos espions à propos de Laedry ? »

Rebald se racla la gorge et se leva. Il était assis à la table à gauche de Stryker, assis à côté d’Orin Midwinter. Les deux ne semblaient jamais très éloignés l’un de l’autre ces derniers temps. « Votre Majesté, j’ai quelques rapports selon lesquels des hommes de Vlad sont rassemblés à Laedry, mais pas dans les chiffres suggérés par le Général Magnus ».

« Je fais confiance aux hommes que j’ai en place là-bas », dit Magnus. « Et il s’ensuit simplement que le prince régent prendrait des mesures pour faire valoir ses récentes prétentions sur la région ».

Stryker fronça les sourcils. Il était difficile de contester la logique de Magnus. L’homme était vif d’esprit, cela ne faisait aucun doute. Pourtant, il ne pouvait pas laisser Magnus mettre ses plans d’exécution aussi facilement. « Votre Majesté, même s’il y a une certaine logique dans les arguments du Général Magnus, les hommes avec lesquels il s’est associé ces dernières années ne sont ceux que j’appellerais dignes de confiance. Si ce qu’il dit est vrai, Reblad le saurait sûrement ».

Julius regarda Stryker, le visage indéchiffrable. Rien n’indiquait qu’il ne faisait confiance au rapport de Magnus. Stryker s’autorisa à espérer que le jeune roi l’écouterait, lui et Ebonhart. Mais cet effort fut rapidement douché.

« Puis-je vous rappeler, Seigneur Général, que j’ai été l’un des hommes avec lesquels le Général Magnus était associé », déclara Julius. Il regarda Magnus. « Général, si ce que vous dites est vrai, avez-vous un autre plan d’action ? »

Magnus acquiesça. « Bien sur, Votre Majesté ».

« Veuillez en faire part au conseil de guerre ».

Magnus quitta son siège et se dirigea vers le milieu de la pièce, debout devant le trône pour s’adresser au conseil de guerre rassemblé. « Mon plan est simple », commença-t-il. « Nous allons faire marcher notre armée à travers le Llael libre jusqu’à Croix-des-Fleuves ». Il regarda Stryker et Ebonhart. « C’est que vous ferez le siège ».

La ville de Croix-des-Fleuves était située au confluent du Fleuve Noir et de la Grisonnante dans le nord du Llael occupé. C’était une importante cité marchande, mais elle avait pratiquement été détruite par le Khador lors de l’invasion initiale.

« Pourquoi Croix-des-Fleuves ? » demanda Stryker, sincèrement curieux. « C’est un long trajet pour déplacer une importante armée ».

« Oui, mais la muraille de Croix-des-Fleuves a été presque entièrement détruite et n’a pas été reconstruite. De plus, la ville n’a actuellement en garnison que deux bataillon », déclara Magnus. « Si nous nous en emparons, nous avons accès au Fleuve Noir et nous avons la possibilité de rapidement déplacer des troupes vers Merywyn lorsqu’il sera temps d’attaquer la capitale ».

« C’est le Kommandeur Harkevich qui commande là-bas, n’est-ce pas ? » demanda Leto.

Reblad répondit. « C’est exact, Haut Chancelier. C’est un chef compétent et un warcaster, mais ses talents résident davantage dans la prise de villes que dans leur contrôle.

Stryker n’avait jamais affronté Harkevich au combat, mais le khadoréen était connu pour ses talents d’artilleur et utilisait souvent ses warjacks comme emplacements d’armes à feu à grand effet.

« Maître de guerre Ebonhart, Seigneur Général Stryker », dit Julius. « Dites-moi, dans quelle mesure le plan du Général Stryker est-il réalisable ».

Stryker regarda Ebonhart, mais le maître de guerre regardait droit devant lui. Il était le supérieur de Stryker, et il serait inconvenant pour Stryker d s’exprimer en premier. Mais il savait ce qu’Ebonhart allait dire avant même que l’homme prenne la parole, car la logique de Magnus était implacable. Son plan promettait une victoire rapide, vitale pour le moral, puis une position stratégique en Llael occupé pour mener le reste de l’invasion. Indépendamment des pensées personnelles de Stryker à propos de Magnus, l’homme avait un talent pour la stratégie militaire.

« Il … s’agit d’un plan solide », déclara Ebonhart. Sa mâchoire se contractait, comme s’il mâchait quelque chose de particulièrement coriace et de mauvais goût. « Et honnêtement, un meilleur plan que le mien ».

Stryker se demanda s’il aurait été capable de dire cela, même si c’était la vérité.

« J’apprécie votre franchise, Duc Ebonhart », déclara Julius. « Seigneur Général Stryker, êtes-vous d’accord avec le maître de guerre ? »

C’était une question très pointue, un test après son éclat au conseil intérieur. La question n’était pas de savoir s’il était d’accord avec Ebonhart, mais plutôt de savoir s’il pouvait se résoudre à être publiquement d’accord avec Asheth Magnus. Le poids de la question pesait sur lui, et il était parfaitement conscient que toutes les personnes dans la salle du trône le regardait.

Il jeta un coup d’oeil à Maddox. Elle secoua brièvement la tête, une subtile insistance à garder son sang-froid. Il essaya de repousser cet enchevêtrement d’émotions noires qui tournaient autour de ses souvenirs d’Asheth Magnus et de penser comme le Seigneur Général de l’Armée Cygnaréenne, quelqu’un de soucieux de la sécurité et du bien-être de ses hommes et de sa nation.

Il se surprit à réussir.

« Oui, Votre Majesté », répondit Stryker, même si les paroles avaient un goût de vinaigre sur sa langue. « Maintenant que j’ai entendu le plan du Général Magnus expliqué plus en détail, je vois qu’il est solide ».

La tension régnant dans la pièce sembla se dissiper et le roi acquisça. « Bien, mes chefs de guerre les plus expérimentés sont d’accord. Nous exécuterons le plan du Général Magnus, et il servira sous votre commandement, Seigneur Général, lorsque vous dirigerez la force d’invasion de Llael ».

« Bien sûr, Votre Majesté », répondit Stryker. Il jeta un coup d’oeil à Magnus. Le visage du warcaster était passif, inerte. Si la décision du roi le dérangeait, il ne le montrait pas. « J’aimerais que le Major Maddox soit également affecté à la force d’invasion ».

Julius réfléchit, puis demanda : « Duc Ebonhart, avons-nous besoin du Major Maddox en Cygnar ? »

« Elle est devenue très populaire auprès du peuple, Votre Majesté, et son histoire inspire le soutien à l’armée et à la couronne », déclara Ebonhart. « Nous pourrions en avoir besoin plus que jamais dans les jours à venir ».

Stryker se demanda comment Maddox se sentait lorsqu’on parlait de sa carrière de cette façon, comme si elle était une pièce sur un plateau de jeu, déplacée selon les caprices de puissances supérieures à elle. Il savait ce qu’elle en pensait.

« C’est peut-être vrai, Maître de Guerre Ebonhart », dit le Haut Chancelier Leto, « mais je pense que le Major Maddox nous servira bien mieux en Llael. Une autre guerre avec le Khador ne sera pas bien accueillie par le peuple de Cygnar, mais si le Major Maddox fait partie de la force d’invasion, cela pourrait adoucir la réaction du public ».

Julius réfléchit. « Je suis d’accord, mon oncle. J’aime l’idée que le Major Maddox, récemment libérée, aille libérer le peuple opprimé de Llael et hisse le drapeau de la liberté sur Croix-des-Fleuves ».

« Parfait, Votre Majesté », répondit Leto.

Il y avait une certaine logique là-dedans, mais Stryker d’entendre parler de Maddox de cette façon. Elle était plus un objet de propagande, plus qu’un symbole, c’était une warcaster expérimentée. « N’oublions pas que le Major Maddox est un officier expérimenté compétent et une warcaster talentueuse. Je suis d’accord que sa présence sera une source d’inspiration, mais ne vous y tromper pas, ma demande d’inclusion est basée sur ses prouesses martiales ».

« Bien sûr, Seigneur Général », dit Leto, avant de se tourner vers Maddox. « Mes excuses, Commandant, il semble que nous ayons pris à la légère vos accomplissements sur le champ de bataille. Ce n’était pas mon intention ».

« Il n’y a rien à pardonner, Haut Chancelier », déclara Maddox en inclinant la tête. « Je suis heureuse de servir le Cygnar de toutes les manières possibles ».

Elle était bien meilleure diplomate que moi, pensa Stryker.

« Excellent », dit Julius. Son visage rayonnait et sa voix était pleine d’enthousiasme. Il était clair pour toutes les personnes présentent dans la salle : le jeune roi était impatient de laisser sa marque sur le monde. « Alors, discutons des détails de notre libération de Llael ».
« Modifié: 04 août 2024 à 19:34:04 par elric »
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« Réponse #11 le: 04 août 2024 à 19:33:37 »
- 11-

LE CONSEIL DE GUERRE SE POURSUIVIT encore pendant trois heures, tournant autour de la composition de la force d’invasion, de l’allocation des ressources et du ravitaillement, et du déplacement des troupes nécessaires de tout le Cygnar vers la forteresse de Nordgarde, à la frontière de Cygnar et de Llael, le point de rassemblement le plus logique.

La force d’invasion proviendrait en grande partie de la Cinquième Division en garnison à Corvis et comprendrait un grand nombre de pionniers, les bourreaux de travail polyvalents de l’armée cygnaréenne. La 31ème Compagnie de Chevalier-Tempête, commandée par le vieil ami de Maddox et de Stryker, le Capitaine Tews, ajouterait un soutien d’infanterie lourde et de warjack, tout comme la 21ème Compagnie de Chevalier de l’Épée. Il s’agissait d’un formidable rassemblement de quelques-unes des meilleures ressources militaires de Cygnar, même si, à mesure qu’ils peaufinaient les détails, les poids de ce qu’ils faisaient réellement – planifier une invasion – se posa sur Stryker. Cela faisait des semaines qu’ils se débattait avec cette idée, mais elle lui était encore étrangère.

Il fut soulagé lorsque le Roi Julius interrompit finalement les débats, qui devaient reprendre le lendemain. Il était fatigué, physiquement et moralement, et complètement pris au dépourvu par le spectacle qui l’attendait à l’extérieur de la salle du trône.

Il entendit d’abord des voix s’élever, puis un mugissement profond qu’il reconnut. Tews. Il avait ordonné au capitaine Lame-Tempête de le rejoindre ici avec un petit contingent de Lames-Tempête de haut rang afin qu’il puisse commencer à les informer des plans de bataille.

Stryker se précipita vers les portes, suivi de près par Maddox et les autres membres du conseils.

Les portes s’ouvrirent et Stryker remarqua Tews, en armure complète, à quelques centimètres d’un homme que Stryker avait longtemps cru mort. Il s’appelait Sbastian Harrow et avait été un mercenaire au service de Magnus bien avant l’exil du warcaster. Stryker avait eu plus d’un accrochage avec cet homme, le dernier l’ayant incité, jeune et effronté, à prendre la contrôle d’un warjack dans la fonderie de ‘jack de Ruissepêche pour protéger son père. Il avait perdu le contrôle, et les dégâts causés par le warjack avaient presque ruiné Joseph Stryker. Tout cela avait été conçu par Magnus, qui avait utilisé Harrow pour manipuler Stryker.

Harrow était grand et décharné, son visage était un réseau de cicatrices et de laideur. Il portait une longue épée et un pistolet lourd, et Stryker avait pu constater à quel point il était rapide avec son arme. Sa main planait maintenant sur la crosse de son arme. Il portait également ce qui semblait être une armure de pionnier avec des barrettes de capitaine sur son plastron. Il semblait que le Général Magnus avait promu certains de ses mercenaires les plus fiables à des postes au sein de l’armée cygnaréenne, s’entourant ainsi d’homme sur lesquels il pouvait compter.

Trois Lames-Tempête de haut rang se tenaient derrière Tws, tous trois lieutenants. Ils n’avaient pas les mains sur leurs armes, mais leurs visages étaient blêmes par l’incertitude. Ils n’avaient probablement jamais vu Tews dans un tel état. Harrow n’était seul non plus ; les deux mercenaires qui accompagnaient Magnus se tenaient derrière lui. Ils n’avaient pas l’air incertains, ni même inquiets – au contraire, ils avaient l’air impatients.

« Tu vas retiré ça, espèce de clébard mercenaire, ou je t’abats », dit Tews, pratiquement en rugissant.

Harow sourit, sans se laisser impressionner le Lame-Tempête géant. « Je n’ai dit que le vérité, Capitaine. Le Khador vous a chassé de Nordgarde sans trop d’efforts ».

Le visage de Tews était cramoisi. « Des hommes honnêtes sont morts là-bas, espèce de misérable », dit-il. Sa main était sur la poignée de son glaive-tempête, la puissante épée à énergie voltaïque des Lames-Tempête. Stryker avait vu Tews trancher en deux des hommes armures avec cette lame.

La Garde Royale se rassemblait autour des deux hommes, et cela deviendrait moche si Stryker n’intervenait pas, même s’il n’aimerait rien de plus que voir Tews décapiter Harrow.

« Capitaine ! Retirez-vous. Tout de suite.

Tews se tourna vers Stryker, et la rage sembla s’évacuer de lui à la vue de son commandant. Il recula d’un pas, s’éloignant d’Harrow, et laissa sa main s’éloigner de la poignée de son glaive-tempête.

« Capitaine Harrow, que s’est-il passé ici ? » demanda Magnus derrière Stryker. Le vieux warcaster contourna Stryker et s’approcha de son homme. Leto et le Duc Ebonhart les avaient suivis, et Stryker pouvait entendre le reste du conseil s’approcher derrière eux. Il espérait que le roi s’était retiré dans ses appartements, accessibles par l’arrière de la salle du trône.

Harrow recula d’un pas, sans toutefois retirer la main de la crosse de son pistolet. « Juste un amical débat », dit-il en adressant un sourire à Tews. « Il semble que j’aie malencontreusement touché un point sensible ».

Tews jeta un regard meurtrier au mercenaire puis se tourna vers Stryker. « Je suis désolé, monsieur », dit-il. « Il a insulté le 31ème et les hommes qui sont mort à Nordgarde. Il a dit que nous étions des lâches ».

Tews avait perdu des proches là-bas. Stryker aussi, et il comprenait la colère du capitaine, mais tous les regards étaient tournés vers yeux. « Tews, retournez immédiatement au complexe ; nous en discuterons plus en détail ».

« Oui, monsieur », dit Tews et il s’éloigna.

« Mes excuses, Capitaine », lança Harrow au grand Lame-Tempête. « Il semble que je t’ai causé des ennuis avec les gradés ».

La rage bouillait en Stryker, chaude et âcre. Il voulait garder son calme et montrer à Magnus et au reste du conseil qu’il ne se laisserait pas provoquer, mais les dernières heures avaient amoindri ses défenses. « Magnus, si tu ne mets pas un muselière à ce clébard, je le ferai chasser de la ville ».

Magnus dit quelque chose à Harrow que Stryker ne put entendre, et le mercenaire acquiesça avant de s’éloigner. Magnus répondit : « Je vais m’occuper de mon subordonné, Seigneur Général, tout comme vous vous occuperai du vôtre ».

Ce n’était pas suffisant. Stryker avait résisté à la tempête provoquée par Magnus qui l’avait supplanté dans la salle du conseil, mais revoir Harrow avait ravivé de vieilles blessures qu’ils ne pouvait ignorer. « Comment avez-vous pu introduire cet homme dans le palais ? » demanda-t-il. « Harrow est un voyou et un tueur. Vous le savez ».

Magnus haussa les épaule. « Il est loyal et j’ai eu besoin de voyous et d’assassins ces quinze dernières années. Nous pourrions avoir besoin d’eux maintenant ».

« Ce qui se ressemble s’assemble », dit Stryker. « Le fait que vous laissiez de tels hommes vous servir me dit que vous n’êtes pas différents d’eux. Vous ne l’avez jamais été ».

« Oh », dit Magnus. « Je crois que vous avez vous même employé des mercenaires, Seigneur Général. Les avez-vous tous contrôlés pour vous assurer qu’il étaient d’une grande moralité ? »

Stryker s’approcha de Magnus. « Tu es un traître et un menteur », dit-il ? « Tu l’as toujours été. Je ne sais pas quel sort tu as jeté au roi, mais je sais ce que tu es. Ta place n’est pas ici. Ta place est au bout d’une corde ».

« Stryker, cela suffit », déclara le Haut Chancelier Leto.

Stryker se tourna vers l’ancien roi, vous lui, vous, entre tous, SAVEZ ce qu’il est, mais il tint sa langue, se mordant le palais assez fort pour faire couler du sang.

« Ne vous inquiétez pas. Je ne suis pas offensé, Haut Chancelier’, dit Magnus. « Coleman - pardon, Le Seigneur Général Stryker – et moi avons un … passé compliqué. Je suis sûr que nous allons bientôt dépasser cela ».

« Allons-y, monsieur ». Maddox posa sa main sur l’avant-bras de Stryker. « Nous devons briefer les hommes ».

« Écoutez le major, Stryker », prononça le Duc Ebonhart. « C’est un ordre ».

Maddox le tirait maintenant, et il voulait résister, rester et insulter ceux qui accepteraient de réintégrer ce traître parmi eux. C’est peut-être la présence de Maddox qui l’influença. Il prit une profonde inspiration irrégulière et froide, et ravala sa rage.

« Oui, monsieur », dit Stryker. « Mes excuses pour cet accès de colère, Haut Chancelier ». Chaque mot était un acquiescement grinçant. Magnus l’avait fait passer pour un imbécile, et il l’avait fait assez facilement.

Il se tourna et s’éloigna, Maddox à ses côtés. Elle ne dit rien jusqu’à ce qu’ils soient sortis du palais. Une fois qu’ils furent hors de portée de toutes les oreilles, elle se tourna vers lui et dit : « Permission de parler librement, monsieur ? »

Il grimaça. Cela signifiait qu’une chose. Elle voulait le réprimander pour s’être ridiculiser. Il pourrait le refuser. Il avait ce droit en tant qu’officier supérieur. Mais il la respectait trop pour cela. « Vas-y ».

« Merci. Au nom de Morrow, qu’avez-vous fait là-bas ? Dit-elle.

« Vous ne connaissez pas ce mercenaire, Harrow », répondit Stryker. « Le fait qu’il soit ici, avec Magnus, en dit long sur notre nouveau général ».

Maddox soupira. « Le seul qui en disait long sur quoi que ce soit là-bas, c’était vous. Devant le Haut Chancelier et vos officiers supérieurs, pourrais-je ajouter ».

« Je sais, mais j’ai l’impression que tout le monde ferme les yeux sur Magnus, ignorant qui il est vraiment ».

« Ce qu’il est en ce moment, c’est l’un des favoris du roi, un homme en qui Julius a probablement plus confiance que n’importe qui d’autre au conseil. Vous devez savoir que vous ne convaincrez personne en l’affrontant directement ».

Stryker s’arrêta et posa sa main sur les épaules armurées de Maddox. « Vous me croyez ? » demanda-t-il. « Vous pensez que Magnus est dangereux ? »

Elle le regarda sans broncher. Après une longue pause, elle dit. « Je ne sais pas. C’est la vérité. En fait, j’aimerais le savoir. Vous avez une histoire avec cet homme qui vous donne un aperçu de son caractère que personne d’autre n’a, mais cela fait quinze ans. Qui sait ce qu’il est aujourd’hui ».

« Les gens ne changent pas comme ça », déclara Stryker.

« Il a vécu une vie difficile depuis la destitution de Vinter, et je sais que cela peut vous changer. Beaucoup ».

Il ne faisait aucun doute que son séjour en tant que prisonnière du Protectorat l’avait changée, et pas en bien, mais Stryker ne pouvait pas se résoudre à mettre sa misère sur le main plan que ce qui s’était passé pensant l’exil que Magnus s’était imposé. « Ce n’est pas la même chose. Au fond de lui, il est toujours le monstre ambitieux et assoiffé de pouvoir qu’il était avant ».

« Eh bien, disons qu’il l’est », dit Maddox en s’arrêtant. Un groupe de soldats remontant la route vers eux les salua au passage. Stryker et Maddox rendirent le salut, puis se tournèrent dans l’autre sens. « Mon point de vue reste donc valable. Julius est peut-être aveugle, et cela signifie qu’il a plus que jamais besoin de vous, même s’il ne le réalise pas. Vous devez au moins donner l’impression que vous pouvez travailler avec Magnus, ne serait-ce que pour pouvoir le surveiller ».

Elle avait raison, bien sûr, comme souvent, mais Magnus réveillait une telle tempête d’émotions chez Stryker qu’il lui était difficile de penser clairement. Il y était parvenu au conseil de guerre, en partie grâce à ses conseils, mais l’idée de contenir sa colère jour après jour pendant sa marche vers le Llael lui semblait une tâche presque impossible ».

Il inspira profondément et expira lentement. « Tu es un bon officier », dit-il. « J’aimerais parfois avoir ton sang-froid ».

Elle rit. « Eh bien, le fait d’être irréfléchi et tête t’as servi … parfois ».

« Ici et là », dit-il. Il n’était pas un planificateur comme Magnus, mais il avait toujours fait confiance à son instinct, et celui-ci l’avait rarement trompé. Il s’efforçait d’être le genre d’homme que les autres hommes voulaient suivre. Cela avait toujours été son objectif principal.

« Écoute, je n’aime pas ce que Rebald et Ebonhart ont fait de moi », dit-elle, le visage durci. « Je ne suis guère plus qu’une affiche de recrutement ce jours-ci, n’est-ce pas ? Mais je dois suivre les ordres et toi aussi ».

« Ici, il y a plus en jeu que la chaîne de commandement », déclara Stryker.

« Bien sûr que oui », dit-elle, « mais tu dois donner l’exemple au reste des hommes. Tu dois leur montrer que tu peux accepter une situation que tu n’aimes pas, que tu déteste même, si c’est ce qu’il faut pour que le travail soit fait ».

« Je ne nie pas cela. C’est juste que je n’arrive pas à oublier ce qu’il est ».

« Essaye plus fort », dit-elle. Il y avait de l’acier dans sa voix.

« Je le ferai. Je le promets. Mais ne t’y trompe pas, quand Magnus révélera ce que je sais qu’il est, je promets aussi que je serai là ».

Elle acquiesça. « Bien, Assure-toi en ».

Il est clair que Maddox avait fini de parler de Magnus. Ils marchèrent en silence, mais alors qu’il s approchaient de la garnison, elle reprit la parole. « Au fait, merci de m’avoir sorti de là. Je pense que je serai peut-être devenue folle si vous aviez marché jusqu’au Llael sans moi ».

Stryker sourit. « Je pensais tout ce que j’ai dit là-dedans. Tu es l’une des meilleurs warcasters de Cygnar et je veux que tu combattes à mes côtés ».

« Je l’apprécie, monsieur. Alors, qu’allez-vous faire à propos du Capitaine Tews ? »

« Lui dire à peu près ce que tu viens de me dire », déclara Stryker. « Je ne peux pas lui reprocher de vouloir tuer Harrow. Cela fait plus de dix ans que je veux le tuer ».

Elle renifla. « Ça semble juste ».
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« Réponse #12 le: 04 août 2024 à 19:34:54 »
PARTIE II

- 12-
À l’extérieur de Corvis, Cygnar

LE WAGON REBONDISSAIT ET ROULAIT à travers la campagne, et les bousculades, la sensation constante de mouvement apaisaient Stryker. Il avait voyagé dans une voiture de troupes plus confortable avec les autres officiers de Caspia jusqu’à Brainmarché, supervisant le chargement des troupes et du matériels aux arrêts de Vigneroy et Fharin. Lors de la dernière étape de leur voyage vers Corvis, il avait repéré l’une des lourds wagons renforcés transportant les warjacks de l’armée.

Maintenant, il était assis dans le noir, son armure de warcaster bourdonnant, ses relais galvaniques peignant les murs d’une lumière bleue vacillante. Le wagon contenait quatre warjacks lourds – deux Cuirassés et deux Cuirassés-Tempête – tous fixés avec de lourdes chaînes aux parois du wagon. C’étaient des d’imposantes ombres vagues, voûtées et silencieusement menaçantes, telle des gargouilles d’acier broyant du noir. Ils étaient tous éteints, sauf un.

Il avait alimenté Vî Arsouye lors de l’arrêt à Brainmarché, et les yeux du vieux warjack flamboyaient dans le wagon plongé dans l’obscurité. Stryker était connecté au cortex du warjack, le cerveau mékanique d’Arsouye, et il dérivait à travers ses souvenirs. Arsouye était avec lui depuis quinze ans, il lui avait été assigné pendant son circuit de compagnon Avant cela, il avait servi d’autres warcasters pendant trente-cinq ans et avait été l’un des premiers Cuirassés à être assemblés. Le warjack était imprévisible, acariâtre et dévastateur au combat, une combinaison qui le rendit difficile pour tout le monde sauf pour Stryker. Un lien les unissait, et certains suggéraient qu’ils étaient des âmes sœurs, si tant une telle chose pouvait être dite à propos d’un warjack et de son warcaster.

Stryker avait participé à de nombreuses bataille avec Arsouye, et les souvenirs du warjack étaient remplis de sang et de flammes. Stryker ne reculait pas devant ces images - il les embrassait. Elles l’aideraient à affronter le chaos des batailles à venir. Mais il y avait une autre raison pour laquelle Stryker visitait souvent les expériences limitées stockées dans le cortex de Vî Arsouye. Les visages de ses amis et des hommes qu’il avait dirigé remontaient parfois, des hommes qui avaient donné leur vie pour protéger le Cygnar et tout ce qu’il représentait. Avant chaque campagne, il se soumettait aux fantômes de ceux qui étaient tombés au combat, leurs visages falsques et leurs corps déchirés lui rappelant ce qui était en jeu à chaque fois qu’il posait le pied sur un nouveau champ de bataille.

Stryker savait que cela pouvait être sinistre, et qu’il ne pouvait pas nier que revisiter le cimetière éthéré dans le cortex de Vî Arsouye lui faisait du tort, mais cela le galvanisait aussi, lui rappelant son devant en tant que meneur d’hommes. Chaque décision qu’il prenait sur le champ de bataille coûtait des vies, et lui incombait d’atténuer ces pertes du mieux qu’il pouvait.

Les souvenirs étaient généralement colorés par la perception qu’avait Vî Arsouye des événements. Les warjack avaient des personnalités rudimentaires pouvant devenir plus fortes et mieux définies au fur et à mesure qu’ils restaient en service. Et un warjack pouvait développer des émotions simple comme la colère,l’agressivité, voire le chagrin, ce qui le rendait plus difficile à contrôler. Certains warcasters considéraient le développement de la personnalités d’un warjack comme un obstacle à son emploi sur le champ de bataille. Mais Stryker n’était pas d’accord avec cela. Ses warjacks étaient des soldats comme les autres, et les liens qui se développaient entre eux ne faisaient que rendre le warcaster et le warjack plus fort, plus en phase, augmentant ainsi l’efficacité de leur relation symbiotique.

Stryker fut tiré de ses souvenirs par l’arrêt brutal du wagon. Il s’éloigna du cortex d’Arsouye et laissa dériver son esprit dériver vers le cerveau mékanique des autres warjacks dans le wagon. Ils étaient inertes, semblables à un humain endormi mais il sortit chacun d’eux de son sommeil mékanique, lui ordonnant de se mettre sous tension. Bientôt, le wagon fut éclairé par six paires d’yeux lumineux.

La porte du wagon s’ouvrit brusquement, laissant entrer la lumière et le bruit d’un millier d’hommes et de machines. Ce n’était que le premier d’une longue série de trains de troupes, qui se retrouveraient tous au même point de rassemblement, près de Nordgarde. Les soldats mirent en place une lourde rampe, suffisamment large et solide pour supporter le poids de plusieurs tonnes que représentait le déchargement des warjacks.

Stryker fit tourner la turbine arcanique de son armure, injectant plus d’énergie dans la combinaison et se prêtant suffisamment de force pour manipuler facilement son arme, la lame mékanique géante à deux mains Vif-Argent. Elle était inspirée de la grande épée caspienne, une lourde épée à deux mains appréciées par les chevaliers de Cygnar, mais elle était considérablement plus longue et plus lourde. Son augmentation mékanique la rendait plus légère et plus agile, mais elle pesait encore plus de vingt-sept kilogramme et était impossible à manier sans la force supplémentaire offerte par son armure de warcaster.

Stryker plaça Vif-Argent dans son dos, des plaques magnétiques retenant la lame en place, et ordonnant à chaque warjack d’allumer sa chaudière et de commencer à produire la vapeur donnant de l’énergie à ses membres.

« Vous vous êtes bien reposé, monsieur ? » demanda Maddox en remontant la rampe d’accès au wagon. Elle portait son armure de warcaster et sa lame mékanique, Tempête, dans le dos.

« J’avais besoin de passer un peu de temps avec Arsouye », répondit-il. « Il se sent seul pendant les longs voyages ».

En réponse, le grand warjack émit un sifflement strident de vapeur et regarda dans leur direction.

« Oui, c’est de toi qu’on parle », dit Stryker. « Maintenant, lève-toi ».

« Vous êtes sûr que vous n’essayer pas d’éviter quelque chose ou quelqu’un, monsieur ? » Suggéra Maddox en souriant.

« Non, Major, ce n’est pas le cas », dit-il, légèrement irrité. Elle ne connaissait pas son rituel d’avant-bataille avec Vî Arsouye, et il ne voulait pas le partager avec elle, mais son accusation le blessait quand même un peu. « Prenez trois Cuirassés-Tempête et déplacez-les. Je vais prendre Arsouye et les autres Cuirassés ».

« Oui, monsieur », dit-elle et le subtil bourdonnement de la magie remua l’air alors qu’elle se connectait aux warjacks qu’il avait indiqués

Les chaudières des warjacks étaient suffisamment chaudes pour assurer la locomotion, et tous les six se tenaient debout, leurs chaînes d’attaches cliquetant, la fumée s’échappant de leurs cheminées.

Ensemble, Stryker et Maddox conduisirent les grandes machines le long de la rampe et sous le soleil de l’après-midi. La ligne de chemin de fer s’arrêtait à quarante-huit kilomètres de Corvis, et ils devraient marcher le reste du chemin jusqu’à Nordgarde. Il regarda la longue rangée de wagons et les centaines de soldats qui en débarquaient. C’était le chaos en ce moment, mais il faisait confiance à ses officiers, et les hommes seraient bientôt prêts à partir.

Il y avait une petite ville au bout de la voie ferrée, et des centaines de citadins s’étaient rassemblés pour voir l’Armée Cygnaréenne. La nouvelle de l’invasion s’était répandue, et la réaction de la population avait été meilleure que Stryker ne l’avait prévu. Cela avait beaucoup à voir avec une personne en particulier.

« Le Major Maddox ! La Libératrice de Llael ! », entendit-il quelqu’un crier dans la foule des citoyens cygnaréens, un cri se répercutant tout au long du rassemblement. Ils avaient vu Maddox et avaient immédiatement reconnu le nouveau visage de l’Armée Cygnaréenne.

Maddox se força à sourire et se retourna pour saluer la foule. Les applaudissements fusèrent.

« Tu es sacrément célèbre, Beth », dit Stryker en gloussant. Il avait vu des réactions similaires dans les autres villes où ils s’étaient arrêtés. La « Libératrice de Llael », comme on l’avait surnommée, était devenue plus grande que nature, un symbole de justice et de fin de la tyrannie khadoréenne.

« Avec tout le respect que je vous dois : allez-vous faire foutre, monsieur », dit-elle avec un sourire crispé, tout en continuant à faire signe de la main.

Il rejeta la tête en arrière et rit. « Très bien, alors. Si vous en avez fini avec vos fans, faisons bouger cette armée ».

« Morrow au-dessus, s’il vous plaît », dit-elle. « Des chariots en provenance de Corvis devraient nous rejoindre dans les prochaines heures. Ils prendront en charge les warjacks pendant que nous marcherons vers le nord jusqu’au point de rassemblement à l’extérieur de Nordgarde ».

« D’accord. Je sais que je vais je regretter, mais où est Magnus.

Elle se retourna et pointa du doigt.

Le vieux warcaster se déplaçait a milieu des troupes grouillant autour du train. Les pionniers et même les chevaliers de l’épée s’écartèrent de son chemin sans un mot. Il portait la même amure bricolée qu’il avait portée à Caspia, bien qu’il y ait ajouté une couche de peinture bleue et qu’un Cygnus ait été ajouré au plastron. Sa propre épée mékanique, Pourfendeur, était rangée dans son étui dans son dos, à côté d’un fusil à mitraille.

Harrow se déplaçait à côté de Magnus et, au grand dégoût de Stryker, l’homme portait une armure de pionnier, une armure de capitaine, pour être exact. Il avait reçu ce grade peu avant qu’ils ne quittent Caspia. Le reste des officiers de Magnus le suivait, tous d’anciens mercenaires.

Une soudaine poussée de colère envahit l’esprit de Stryker. Vî Arsouye se tenait à proximité, et le warjack réagit au brusque changement des émotions de Stryker en voyant Magnus. Il s’approcha et posa une main sur la coque du warjack, puisant sa force dans sa masse et sa chaleur.

« Seigneur Général », dit Magnus en s’approchant. Il leva les yeux vers l’imposant warjack à côté de Stryker. « C’est bon de voir Arsouye toujours en service ».

Le grand Cuirassé laissa échapper de la vapeur, un hululement sourd et irrité, et fit un pas en direction de Magnus.

« Doucement, Arsouye », dit Stryker en réprimant l’agression du warjack. « C’est un loyal soldat », déclara-t-il à Magnus.

« Sans aucun doute ». Magnus n’avait pas bronché lorsque Arsouye s’était approché de lui, même si le warcaster avait ressenti la poussée d’animosité du warjack. Il reporta son attention su Stryker. « Je suggère que nous réunissions le officiers supérieurs afin de coordonner la marche vers le Llael ».

C’était le prochain mouvement prévu par Stryker, et il détestait que Magnus l’ait suggéré avant qu’il ne puisse en donner l’ordre. Ne voulant pas paraître mesquin, il acquiesça. « D’accord, Général. Maddox, rassemblez les officiers supérieurs. Nous nous retrouverons près de la locomotive ».

« Monsieur », dit Maddox. Son regard s’attarda un instant sur Stryker. Il était évident qu’elle ne voulait pas les laisser seuls, Magnus et lui.

« Maintenant, s’il vous plaît, Major », répondit Stryker. Maddox se retourna et se déplaça le long la voie ferrée.

« Donc, c’est une marche vers Nordgarde puis remonter la Grande Route Commercial du Nord jusqu’en Llael », dit Magnus. « Nous devrions mettre trois semaines pour atteindre Croix-des-Fleuves.

« C’est ce que j’ai calculé, Général », répondit Stryker. La raison pour laquelle Magnus jugeait nécessaire de lui répéter ces détails bien connus était un mystère. « Comment vos hommes s’adaptent-ils au service dans une véritable armée ? » Il jeta un coup d’oeil à Harrow. L’homme affichait le même sourire narquois que Stryker avait vu à l’extérieur de la salle du trône à Caspia : Harrow portait également une armure de pionnier avec des barrettes de capitaines sur l’épaule droite. Stryker ne pouvait pas comprendre. Stryker n’arrivait pas à accepter que Harrow donne des ordres à des soldats cygnaréens, mais le roi avait accédé à la demande de Magnus de permettre à certains de ses hommes de le servir à titre officiel.

« Assez bien », dit Magnus. « Tout comme moi, ils se décrassent un peu ».

« J’en suis sûr ».

« Cela me convient », dit Harrow, son sourire s’élargissant. « J’aime bien donner des ordres à des hommes se battant pour autre chose que de l’argent. Ça donne l’impression d’être un homme convenable ».

Stryker l’ignora. Il ne pouvait se résoudre à s’adresser directement à Harrow. Il fut soulager de voir Maddox revenir avec les officiers supérieurs, parmi lesquels le Capitaine Tews.

Une fois réunis, il donna un bref aperçu de leurs ordres de marche. « Une fois que le transport des warjack arrivera de Corvis, nous nous rendrons au point de rassemblement à l’extérieur de Nordgarde. Nous rejoindrons le Colonel Bartlett et des éléments du 82ème Régiments de Cavalerie Lourde. Ensuite, nous remonterons le Fleuve Noir jusqu’en Llael.

Tout le monde acquiesça. Rien de tout cela n’était nouveau ; c’était la suite.

« Nous marcherons jusqu’à la Tour Gris-vent, où nous rencontrerons le Colonel Stoyan Jarov de la Résistance Llaelaise ». Stryker fit une pause, le temps d’assimiler la nouvelle. Il avait envoyé un message à la Tour Gris-vent peu de temps après leur départ de Caspia. Bien qu’il ait été décidé que la Résistance ne ferait pas officiellement de la partie de la force d’invasion cygnaréenne, il serait stupide d’ignorer la potentielle valeur qu’elle représentait pour cet effort de guerre.

« Je pensais que nous n’impliquions pas la Résistance », déclara le Capitaine Tews, exprimant ce que tout le monde pensait probablement.

« Officiellement, ce n’est pas le cas », répondit Stryker. « Mais le colonel possède des informations vitales sur Croix-des-Fleuves dont nous ne pouvons pas nous passer ».

« Il voudra envoyer des troupes avec nous », dit Magnus. « Jusqu’où vas cette implication officieuse, monsieur ? »

« Je compte utiliser certain de ses éclaireurs, s’il nous le permet, mais pas de troupes de première ligne ».

Magnus ne dit rien de plus pendant que Stryker informait le reste des officiers de ce qui les attendait au cours des semaines à venir. Le temps qu’il les congédie tous, on pouvait voir les chariots de provenant de Corvis travers les plaines du nord en direction de la voie ferrée. Les officiers se hâtèrent de préparer leurs hommes et leur équipement pour la longue marche. Magnus, cependant, s’attarda.

« Tu me surprends, Stryker », dit-il d’un air étrange.

« Comment ça ? » Stryker se doutait qu’il s’agissait d’une sorte d’appât.

« Que tu implique la Résistance me surprend », dit Magnus. « Ne te méprends pas. Je suis d’accord avec toi. La Résistance a probablement des informations vitales qui sont bien plus importantes que les ramifications politiques de leur implication ».

Stryker ne dit rien.

« Tu me surprends parce que c’est exactement ce que j’aurais fait », dit Magnus. Il salua et s’éloigna.

Stryker le regarda partir, détestant la fierté qu’il ressentait face au légers éloges de son ancien mentor.
« Modifié: 01 septembre 2024 à 21:06:19 par elric »
Citation de: Maître Yoda
Trop gentil tu seras, dans le côté obscur tu l'auras.

Si vous constatez des fautes d'orthographe et/ou de conjugaison, des phrases à remanier pour une meilleur compréhension.
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« Réponse #13 le: 01 septembre 2024 à 21:14:51 »
- 13-
Tour Gris-vent, Llael Libre, 9ème Solesh, 611 AR


LES CRÉNEAUX DE TOUR GRIS-VENT S’ÉLEVAIT au dessus des collines à l’est de Llael, une sinistre sentinelle, altérée et éprouvée par les batailles. La tour mesurait vingt-quatre mètres de haut et était suffisamment grande pour contenir plusieurs centaines de soldats. La Résistance avait effectué des travaux de réparation sur la forteresse tricentenaire en ruine, de sorte que l’antique pierre grise était piquées de roches plus claires extraites des collines voisines.
Une petite ville s’était développée autour de la tour, une ville composée principalement de réfugiés fuyant la tyrannie khadoréenne. La ville était un conglomérat délabrés de tentes, de cabanes et de quelques bâtiments en dur. Les gens ici soutenaient les résistants avec ferveur, fournissant aux soldats de la tour diverses tâches nécessaires : cuisine, réparation d’uniformes, réparation d’armes, tout ce qui pouvait les aider.

La ville semblait vide à mesure qu’ils approchaient. Stryker ne pouvait pas leur en vouloir. Ces gens en étaient venus à se méfier de toute armée qui n’arborait pas le drapeau llaelais, et huit mille soldats cygnaréens, appuyés par des warjacks et des chevaux lourds, les avaient sans doute effrayés.

Stryker avait ordonné au gros de leur armée d’établir un camp à trois kilomètres au sud de la tour, et il avait choisi une petite délégation pour rencontrer le Colonel Jarov. Cette délégation comprenait le Major Maddox, le Capitaine Tews et le Général Asheth Magnus. Il avait voulu laisser Magnus derrière lui, mais il ne pouvait pas l’exclure de réunions aussi importantes sans compromettre la mission.

Ils traversèrent la ville en silence et trouvèrent le Colonel Jarov et deux autres hommes devant les portes de la tour. Des soldats les regardaient depuis les créneaux qui les surplombaient. Jarov était un homme de petite taille, solidement bâti, âgé d’une cinquantaine d’années. Ses traits bruts et son nom de famille suggéraient une descendance khadoréenne, même si sa lignée n’avait pas affecté son ascension au sein de la Résistance. Les deux hommes se tenant à côtés du colonel attirèrent immédiatement l’attention de Stryker. L’homme de droite avait l’air d’avoir une quarantaine d’années, était grand et mince, voire maigre, avec une fine moustaches et des traits marqués. Ses cheveux noirs étaient longs et attachés en catogan. Son manteau noir était rabattu au niveau de la taille, exposant le pistolet cinémantique à double canon sur sa hanche droite et un long sabre mékanique sur sa gauche. L’arme ne laissait aucun doute dans l’esprit de Stryker quant à la profession de l’homme, mais la rose stylisée épinglée sur son revers le confirmait. Il avait clairement été un mage balisticien du défunt Ordre Loyal de la Rose Améthyste, et un vétéran de plus.

L’homme à la gauche de Jarov se heurta à la menace silencieuse du mage balisticien lui faisant face. Le second homme était de taille moyenne, bedonnant, le visage caché par une barbe sombre  et mal entretenue. Stryker aurait pu le pendre pour un réfugié si son armure, qui n’était de fabrication llaelaise. Il s’agissait d’une armure de pionner cygnaréenne, très réparée, et bien que des morceaux avaient été remplacés, elle était toujours reconnaissable pour ce qu’elle était. De nombreux soldats cygnaréens avaient été laissés sur place après le retrait de Merywyn, et certains avaient choisi de continuer à se battre aux côtés de la Résistance. Techniquement, ces hommes et femmes étaient des déserteurs, mais Stryker pouvait comprendre leur position, même s’il était courageux -et un peu téméraire – pour cet homme de s’exposer ainsi.

« Bienvenue, Seigneur Général Stryker », prononça le Colonel Jarov lorsqu’ils s’approchèrent. Il s’avança et lui tendit la main. Stryker n’avait jamais rencontré le colonel, mais Jarov avait la réputation d’être un chef et un tacticien compétent.

Stryker saisit la main de Jarov. « Merci, Colonel. J’apprécie que vous nous rencontriez, surtout à la lumière du refus de mon gouvernement d’impliquer la Résistance dans cette invasion ».

Jarov grimaça et relâcha la main de Stryker. Stryker voulait d’abord en finir avec l’horrible vérité de la situation avant qu’ils ne parlent d’avantage. « Oui, il est regrettable que votre nouveau roi ne nous fasse pas confiance pour libérer notre propre nation ... » Il marqua une pause, puis adressa un sourire fatigué à Stryker. « Mais nous sommes des soldats, n’est-ce pas ? Et nous devons faire ce qu’on nous dit. Au bout du compte nous voulons la même chose – un Llael libre ».

« Quand tout sera terminé, le Llael et le Cygnar seront frères, unis par les liens de la bataille et du mariage », déclara Stryker.

« Nous serons un état vassal de Cygnar, vous voulez dire », déclara le mage balisticien derrière Jarov. « Avec une reine fantoche sur le trône ».
Jarov lança un regard noir à l’homme, puis reporta son attention sur Stryker. « Seigneur Général, voici le Capitaine Vayne di Brascio de l’Ordre Loyal de la Rose Améthyste. C’est un féroce combattant, mais pas un diplomate, j’en ai bien peur.

« Tout va bien », déclara Stryker. « J’admire depuis longtemps l’habilité de votre ordre, Capitaine. Et je suis reconnaissant pour votre aide. Avez-vous rencontré la Princesse Kaetlyn.

Le mage balisticien secoua lentement la tête.

« Alors, faites-moi confiance quand je dis vous dis que cette fille … cette femme, ne sera pas la marionnette d’un homme. Elle une di la Martyn, ne vous y trompez pas ».

« J’ai beaucoup entendu parler de vous, Seigneur Général », dit le Capitaine di Brascio. « Et je sais que vous êtes un ami de Llael. Vous avez vaillamment combattu pour elle, mais votre roi nous insulte, et certains disent qu’il ressemble trop à son père ».

« Cela suffit, Capitaine », dit Jarov. « Ce n’est ni le moment, ni l’endroit pour de telles discussions, si vous le voulez bien ».

Stryker ne répondit pas, mais l’homme était perspicace, et il faisait écho aux craintes de Stryker à propos de Julius.

« Comme vous voulez, monsieur », dit le capitaine.

« Permettez-moi de vous présenter mes officiers supérieurs, Colonel », dit Stryker, « désireux de changer de sujet. « Voici le Commandant Elizabeth Maddox ».

« La Libératrice de Llael », dit Vayne avec un rire amer. Stryker l’ignora, mais Maddox grimaça en réaction.

« Cette brute de la taille d’un warjack est le Capitaine Tews. Il commande mon infanterie Lame-Tempête ». Le grand Lame-Tempête fit un signe de la tête au colonel. Stryker se prépara à la dernière présentation. « Et voici le Général Asheth Magnus, mon second ».

L’homme en armure de pionner, derrière Jarov, inspira brusquement, les yeux écarquillés. « Il s’avança vers le colonel. « Monsieur, cet homme est un traître et un criminel », dit-il. « Nous ne pouvons pas traiter avec lui ».

L’homme était indéniablement un ancien militaire cygnaréen, et son évaluation directe et peu diplomatique de Magnus n’était pas surprenante. Jarov fronça les sourcils. « Mes excuses, Seigneur Général, mais le capitaine Gibbs a raison. Pourquoi Asheth Magnus est-il parmi vous ? »

« J’ai été gracié par le Roi Julius », dit Magnus avant que Stryker ne puisse répondre. « Et je suis à nouveau un fidèle sujet de Cygnar ».

L’estomac de Stryker se noua. Il pouvait comprendre leur méfiance à l’égard de Magnus mais il avait besoin de leurs informations, et il se retrouvait donc dans la position peu enviable de défendre un homme qu’il détestait. « C’est vrai, colonel. Le Roi Julius a la plus grande confiance dans le général, et son expérience militaire nous sera très utile ici. Les paroles lui brûlaient la langue ».

Jarov secoua la tête. « Je vous ai promis de vous donner toutes les informations dont je dispose, et je le ferai ». Il était visiblement perturbé par la présence de Magnus, mais Stryker était soulagé que le colonel soit un homme de parole. « Suivez-moi ».

Les portes de la Tour Gris-vent s’ouvrirent. Des dizaines de soldats étaient déployés dans la cour au-delà. Ils se tenaient au garde-à-vous, le fusil à l’épaule. Qu’il s’agisse d’une subtile menace ou d’une démonstration de discipline llaelaise, Stryker ne pouvait le dire. Il se tourna vers Magnus, dont le visage était impassible et indéchiffrable. « Après vous, monsieur », dit Magnus, et Stryker franchit les portes.

* * *

LE COLONEL JAROV ÉCOUTAIT AVEC INTÉRÊT Magnus lui exposer dans les grandes lignes leur plan d’attaque de Croix-des-Fleuves. Ils étaient assis dans les appartements relativement somptueux du colonel, autour d’un feu de cheminée, un verre d’un bon vin llaelais à la main. Ils allaient passer la nuit à la tour, une dernière chance de dormir dans un lit et manger un repas chaud avant la longue marcher vers Croix-des-Fleuves.

Le Capitaine Vayne di Brascio s’était joint à deux, et l’expression du mage balisticien devenait de plus en plus sombre au fur et à mesure que Magnus exposait sa stratégie. La Capitaine Gibbs n’était pas présent ; peut-être craignait-il de passer trop de temps parmi des hommes qui pourraient le ramener en Cygnar en tant que déserteur, imagina Stryker.

Maddox ajouta de petits détails à l’explication de Magnus, principalement la logistique des troupes et la façon dont elles seraient déployées. Stryker et Tews restaient tous deux silencieux. Stryker se sentait de plus en plus mal à l’aise à l’idée que le Colonel Jarov n’ai rien dit jusqu’à présent.

Lorsque Magnus eut terminé, Jarov se racla a gorge et dit : « Votre plan est solide. En théorie, mais la réalité de la situation est bien différente de ce que vous aviez prévu ».

Magnus fronça les sourcils. « Veuillez expliquer, Colonel ».

« Je vais laisser le Capitaine di Brascio s’expliquer. Il a dirigé plusieurs patrouilles dans cette région et a été témoin de la situation a Croix-des-Fleuves. Capitaine ».

« Vous avez raison, Général, la partie ouest de la ville est toujours affaiblie, et ils s’attendent à ce qu’une attaque vienne de cette direction, c’est pourquoi vous avez choisi d’attaquer la partie occidentale de la ville ».

Stryker dit : « Mais ? »

« La partie orientale de la ville est fortement fortifié », poursuivi di Brascio. « Cette partie de Croix-des-Fleuves est restée en grande partie intacte après l’assaut initial khadoréen, et Harkevich a épuisé presque tous ses hommes et toutes ses ressources pour la reconstruire ».

« Bien sûr, nous nous attendions à ce que le Kommandeur Harkevich ne soit pas complètement préparé à un assaut », déclara Magnus, une pointe d’irritation s’insinuant dans sa voix.

« Il est plus que préparé », répondit di Brascio. « Elle est pratiquement imprenable de ce côté-là. Il a démoli tous les ponts sur le Fleuve Noir, à l’exception d’un seul, la Grande Porte, et c’est le seul moyen de traverser. Il dispose également d’une petite flotte de canonnières patrouillant le fleuve pour décourager quiconque serait assez fou pour tenter un traversée ailleurs ».

« Compris », dit Maddox. « Alors, nous prenons le pont. Quelles sont ses défenses ? »

« Considérable. La Grande Porte est une forteresse en soi, lourdement fortifiée et occupée par un bataillon entier de Man-O-War. Mais c’est pas le pire. Harkevich a récemment pris livraison de deux Conquêtes, et ils montent la garde à l’extrémité du pont ».

C’était un problème. Les conquêtes étaient de gigantesques warjacks, souvent appelés colosses. Ces sont de batteries d’artilleries ambulantes, armées de massifs canons double pouvant tirer des obus explosif jusqu’à mille six cents mètres.

Tews lança un regard noir à Magnus et serra ses énormes poings. « Nous serons embouteillés sur ce pont, ces foutus colosses élimineront nos gens sur le pont, peu importe ce que nos Murs-Tempête feront en retour », déclara Tews, nommant les homologues cygnaréens du Conquête, de gigantesques warjacks galvaniques qui pourraient remplir un champ de bataille de leurs immenses capacités destructrices.

« C’est exact », répondit di Brascio. « Les Conquêtes sont soutenus par des batteries d’artillerie lourde, et croyez-moi, Harkevich sait comment les utiliser ».

Magnus se frotta la bouche et regarda di Brascio. C’était la première fois que Stryker voyait l’homme troublé depuis son retour. Il éprouvait une sombre satisfaction de voir le plan parfait de Magnus s’effondrer, mais l’enjeu était bien plus important que de simplement voir son vieil ennemi humilié.

« Nous pourrions passer plus au sud de Croix-des-Fleuves et attaquer la ville par l’est », dit Stryker.

« Non, ça ne marchera pas non plus », dit le mage balisticien. « Harkevich a détruit tous les ponts suffisamment grands dans un rayon de cent soixante kilomètres autour de la ville. Une fois que vous aurez traversé le territoire occupé, il saura que vous arrivez et vous serez traqué tout au long du chemin. Sans oublier que cela lui donnera le temps d’obtenir des renforts de Rynyr.

« Alors, que recommandez-vous, Capitaine ? » demanda Magnus. Il était évident que celui faisait mal de poser cette question, mais il n’était pas idiot, et di Brascio était désormais leur seule chance.

« Je pense que votre plan est toujours valable », déclara di Brascio. « Attaquer depuis l’ouest vous offre l’élément de surprise. Vous pouvez atteindre la ville sans être inquiété et sans alerter Harkevich. Mais une fois que vous y serez, se sera un casse-tête … à moins que vous ayez une aide à l’intérieur ».

Magnus pencha la tête. « Que voulez-vous dire ? »

« Comme vous le savez sans doute, le Kommandeur Harkevich est le commandant militaire de Croix-des-Fleuves, mais de puissants princes marchands kayazy ont également des intérêts dans la ville ».

Styker n’aimait pas la tournure que prenaient les événements.

« Un homme, le Seigneur Pitor Aleshko, supervise les intérêts commerciaux de la ville ».

« Attendez. Comment cela nous nous aiderait ? » demanda Maddox. « Savez -vous quelque chose d’utile sur cette homme ? »

di Brascio se rassit sur sa chaise et croisa les bras sur sa poitrine. « À vrai dire, je n’en suis pas sûr », admis-t-il. « Ce que nous avons entendu ne sont que des rumeurs, même si elle sont suffisamment intrigantes pour être écoutées. Nous entendons dire qu’il est aussi corrompu que Harkevich est patriote, une homme toujours à la recherche d’un moyen d’accroître sa richesse et son pouvoir. Il a repris toutes les opérations lorsque l’homme qui le précédait a été exécuté par le Protectorat ».

« Magnus ajouta : « De tels hommes sont plus faciles à gérer que des patriotes idéalistes comme Harkevich ». Stryker ne manqua pas le regard en coin que Magnus lui lança.

« Oui, exactement ce que je pense », déclara di Brascio. « Il peut-être approché ».

Stryker réfléchit à ses choix. « Si cet homme est aussi indigne de confiance que vous l’entendez, pourquoi le contacterions-nous ? Il n’est pas assez stupide pour nous ouvrir les portes, peu importe ce qu’on lui versera ».

« Je vous donne cette information uniquement parce que je l’ai et parce que vous ne pouvez pas prendre la Grande Porte par un assaut frontal ».

« Capitaine, j’ai une armée derrière moi et assez de puissance de feu pour raser Croix-des-Fleuves ».

« C’est votre intention, Seigneur Général ? » demanda Jarov. « De nombreux citoyens llaelais fidèles vivent encore sous le joug de l’oppression khadoréenne à Croix-des-Fleuves ».

Une bouffée de chaleur monta au visage de Stryker. « Non, bien sûr que non », dit-il. « Je veux simplement dire que nous pourrions être en mesure de prendre la Grande Porte sans avoir recous au Seigneur Aleshko ».

di Brascio secoua la tête. « Même si vous vous en emparez, vous perdrez beaucoup d’hommes et nous ne pourrez peut-être pas tenir la ville par la suite. Bien sûr, si la Résistance était impliquée ... »

« Mais ce n’est pas le cas », répondit Stryker. Il ne voulait pas s’engager sur cette voie, c’était trop tentant. « Je ne défierai pas mon roi plus que je ne l’ai déjà fait ».

« Alors, que recommandez-vous, Seigneur Général ? » demanda Magnus. La question était tranchante comme un poignard.

« Nous devrions voir le pont et ses défenses par nous-mêmes », déclara Stryker. Il regarda di Brascio. « Je ne doute pas de votre évaluation, mais ce n’est qu’un élément de l’équation. Vous ne comprenez pas les capacités de mes hommes aussi bien que moi ».

« Comme vous le dites », dit di Brascio, « mais je me bats pour le Llael depuis vingt ans. D’près mon expérience, Harkevich vous fera beaucoup de mal si vous l’attaquez de front ».

« J’apprécie votre franchise », répondit Stryker en le pensant. Le mage balisticien lui plaisait de plus en plus. L’homme était manifestement expérimenté, discipliné et bien informé. « Et vous nous avez donné des informations précieuses. Puis-je vous demander une dernière faveur, Colonel ? »

« Demandez », dit Jarov.

« Vos éclaireurs vous ont fournis des bons renseignements sur Croix-des-Fleuves et probablement sur la route entre ici et là. Pourriez-vous me prêter quelques-uns de vos hommes pour nous accompagner jusqu’à la ville ? »

« J’avais anticipé cette demande », dit Jarov. « Le Capitaine di Brascio et une unité de mes meilleurs éclaireurs vous accompagneront ».

« Je ne les mettrai pas en danger si je peux l’éviter », dit Stryker.

di Brascio rit. « Avec tout le respect que je vous dois, Seigneur Général, vous ne pouvez pas éviter cela ».
« Modifié: 08 septembre 2024 à 21:12:35 par elric »
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« Réponse #14 le: 08 septembre 2024 à 21:17:16 »
- 14-
Seize Kilomètres de Croix-des-Fleuves, Llael Occupé


STRYKER REGARDAIT L’IMMENSE CARTE ÉTALÉE devant lui. C’était un plan détaillée de la ville de Croix-des-Fleuves, fourni par le Colonel Jarov. Elle montrait également une bonne partie du Fleuve Noir à l’est de la ville. Ils étaient rassemblés dans sa tente de commandement, au centre du camp cygnaréen. Elle était grande, mais pas somptueuse, offrant suffisamment d’espace pour son armure, ses armes et la grande table basse où était posé la carte. La présence de Maddox et de Magnus la rendait bondée.

« La Grande Porte », dit Maddox en désignant une large pont du côté est. « Si di Brascio a raison, ceux-ci » - elle désigna un certain nombre de petits ponts - « ont été détruits ».

« Et s’il a raison, alors nous devons discuter d’autres options ». Magnus laissa le dernier mot en suspens entre eux.

« J’ai besoin de plus d’informations avant de contacter ce Pytor Aleshko », dit Stryker, ne cherchant pas à cacher son irritation. Magnus avait très clairement fait comprendre qu’il pensait que le kayazy était une piste à explorer immédiatement.

« Je connais des hommes comme lui. Avide, sans loyauté », prononça Magnus. Stryker soupçonna que Magnus venait de se décrire. « Je sais comment manipuler de tels hommes. Je sais ce qui les motive ».

Stryker était sur le point de répondre quand l’un de ses gardes, un jeune Lame-Tempête, pénétra dans la tente. « Monsieur, di Brascio et le reste des éclaireurs sont de retour ».

Stryker hocha la tête. « Merci. Je leur parlerai dehors ».

Tous trois quittèrent la tente et se retrouvèrent dans le bruit et la puanteur de l’immense camp. Des rangées de tentes s’étendant dans toutes les directions, et des hommes et des warjacks se déplaçant parmi eux, se préparant à la marche du lendemain et à la bataille qui allait bientôt suivre. C’était une opération de grande envergure, il ne pouvait pas laisser l’armée inactive plus longtemps. Ils disposaient de considérables réserves de nourriture et d’eau, mais une armée aussi nombreuse pouvait manger chaque jour l’équivalent d’une petite ville.

di Brascio et quatre des meilleurs éclaireurs de Stryker l’attendaient. Les éclaireurs cygnaréens étaient tous des hommes expérimentés, mais deux d’entre eux – recommandés par le Major Tobias Johnson, qui commandait la petite force de rangers, les meilleurs éclaireurs de Cygnar étaient étranges, même pour Stryker. Le Sergent Sharp et son compagnon, le Caporal Horgrum, formaient un duo étrange. Sharp était un homme maigre et hâve, de taille moyenne. Il avait la carrure élancée d’un ranger, et semblait rapide et endurant. L’autre moitié du duo se différenciait comme un canon parmi les pistolets. Le Caporal Horgrum était un trollkin mesurant au moins deux mètres. Il portait une armure de pionnier légère personnalisée et était un mur ambulant de muscles à la peau bleue et coriace. Son visage était large, avec une grande bouche, une énorme mâchoire inférieure et aucun nez. D’épaisses plaques d’écailles rocheuses recouvraient son menton en guise de barbe, et sa tête était couronnée d’un bosquet de piquant épineux. Le trollkin tenait un fusil vraiment gigantesque – Un Raevhan Express, un fusil de tireur embusqué trop grand pour qu’un homme puisse tirer et avec une portée effective de plus de huit cents mètres.

« Caporal Horgrum », dit Stryker. « Je suis heureux de vous compter parmi nous. J’ai beaucoup entendu parler de vous et de votre fusil ».

Le grand trollkin lui rendit son sourire. « Je l’appelle la Miséricorde de Dhunia », dit-il en citant le nom de la déesse que les trollkin vénéraient.

Sharp prit un air horrifié et donna un coup de coude dans les côtes du grand trollkin. « Dis monsieur, gros malotru », dit-il. « C’est à un seigneur général que tu t’adresses ».

« Euh, monsieur », ajouta Horgrum. « Mes excuses. Je m’adapte encore à la vie parmi vous … les militaires ».

Stryker gloussa et balaya le manquement à l’étiquette. « Pas d’offense, Caporal. Vous êtes ici pour tirer, pas pour me courir après ».

Il n’était pas rare que des non-humains servent dans l’armée cygnaréenne. Les gobbers constituaient une bonne partie du corps des mékaniciens, et des trollkin et même des ogrun avaient été acceptés et entraînés comme pionniers. La plupart des trollkin, cependant, étaient des populations tribales vivant parmi les étendues sauvages de l’Immoren occidental, même si certains s’étaient installés dans les villes cygnaréennes et qu’une poignée d’entre eux servaient dans l’armée. Les trollkin était de loyaux et courageux combattants, et le Caporal Horgrum était considéré comme l’un des meilleurs tireurs embusqués de l’armée.

« D’accord, Sergent », dit Streyker en se tournant vers le compagnon du trollkin. « Rapport ». Il n’ignorait pas di Brascio, mais il avait besoin de l’entendre de la part de ses propres hommes.

« Oui, monsieur », répondit Sharp. « C’est comme l’a dit le Capitaine di Brascio. Ce pont est un fichu château et il est gardé par suffisamment de Rouges pour me rendre plus que nerveux, cela ne me dérange pas de le dire ».

« Et les autres ponts ? » demanda Magnus.

« Disparus, monsieur », répondit Horgrum, sa voix étant le grondement sourd de pierres s’écrasant. « Ils les ont tous démolis ».

« Nous ne pouvions pas nous approcher trop près », poursuivit Sharp. « Des bateaux fluviaux patrouillent près du rivage, mais nous avons les colosses et j’ai compté huit Destroyers sur le pont ». Il venait de nommer un châssis de warjack khadoréen armée d’un mortier à longue portée.

Faire fonctionner autant de warjacks jour et nuit consommait beaucoup de charbon, Stryker en était bien conscient. Harkevich devait s’approvisionner depuis la ville minière de Rynyr, à l’ouest. C’était une bonne information – s’ils pouvaient couper cette ligne d’approvisionnement d’une manière ou d’une autre.

« Non pas que je doute de votre parole, Capitaine », dit Stryker en se tournant vers di Brascio. « Mais … »

« Je comprends, Seigneur Général », déclara di Brascio. « Il faut savoir que le pont à trois tours fortifiées. Une à chaque extrémité et une au milieu. Chacune abrite une garnison de troupes de choc Man-O-War et de tireurs embusqués. Elles fournissent également une couverture et obligent une armée ennemie à passer par une série d’étroites portes.

Ce n’était pas bon. Comme l’avait dit le Capitaine Tews à la Tour-gris Vent, il seraient bloqué s et mis en pièces s’ils tentaient un assaut frontal. « Sharp, rompez. Toi et tes hommes mangez, puis je veux que vous retourniez sur le terrain ».

« Monsieur », dit Sharp. Lui et le reste des éclaireurs cygnaréens partirent à la recherche de la tente mess la plus proche.

« Capitaine, si vous voulez bien nous rejoindre dans ma tente », déclara Sryker. di Brascio renvoya ses propres hommes et suivit Stryker.

« J’ai besoin d’options », déclara Stryker une fois que tout le monde est rassemblé autour de la carte.

Maddox dit : « Je suis d’accord avec le Capitaine di Brascio. Un assaut frontal sur le pont, même avec nos Défenseurs et nos Murs-Tempête, va nous coûter cher ». Elle venait de désigner deux de leurs meilleurs warjacks pour le travail de siège.

« Aucune forteresse n’est imprenable », déclara Magnus, « même s’il est parfois plus prudent de contourner un obstacle que de le traverser ».

Stryker savait ce que Magnus sous-entendait, et il détestait que ce soit la seule voix possible pour eux. « Capitaine, savez-vous comment envoyer un message à ce Pytor Aleshko ? » demanda-t-il. Le sourire de Magnus devint béant comme une gorge tranchée.

« Peut-être », dit le capitaine. « J’ai un homme à l’intérieur, mais je n’ai reçu aucun rapport de sa part depuis un certain temps ».

Magnus prononça : « Nous pourrions envoyer certains de mes hommes, peut-être par le Capitaine Harrrow. Ils ne seront pas reconnus comme des soldats cygnaréens, juste des mercenaires à la recherche de travail. Il connaissent leur métier, ils pourraient s’en charger ».

di Brascio acquiesça, tout comme Maddox. « C’est logique », dit-elle. « Une ville comme Croix-des-Fleuves attire les mercenaires comme des mouches, et ils savent se faire discret ».

Stryker serra la mâchoire. Il détestait se battre ainsi. Il voulait affronter son ennemi, le regarder dans les yeux et l’abattre avec courage et acier. Mais il n’était pas un idiot et il comprenait que la guerre ne se gagnait pas toujours sur le champ de bataille. « Pas Harrow », dit-il à Magnus.

« Pourquoi ? C’est mon meilleur », déclara Magnus. « Il s’est retrouvé dans des endroits difficiles et dangereux pendant près d’une décennie. Je lui ai déjà donné des mission comme celle-ci, et il n’a jamais déçu ».

Maddox regarda Stryker. « C’est le meilleur choix, monsieur », dit-elle. « Nous pourrions également envoyer certains hommes de di Brascio. En supposant que vous le vouliez, Capitaine ».

di Brascio regarda Stryker puis Magnus, ses yeux vifs et évaluateurs. « J’irai moi-même », dit-il. « Après la dissolution de mon ordre, je n’ai guère été plus qu’un mercenaire. Je connais la vie et le jargon. On ne me soupçonnera pas ».

Stryker était reconnaissant envers le mage balisticien llaelais. Même si di Brascio ne comprenait pas trop bien la méfiance de Stryker à l’égard de Magnus, il était conscient de la réputation de cet homme et il garderait un œil sur Harrow.

« Très bien », déclara Stryker. « Amenez Harrow ici. Je veux le briefer immédiatement. Nous nous retrouverons dans une heure ».
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« Réponse #15 le: 08 septembre 2024 à 21:22:57 »
- 15-
À l’Extérieur de Croix-des-Fleuves, Llael Occupé


C’ÉTAIT BON D’ÊTRE À NOUVEAU SUR LE TERRAIN, même pour une courte période. L’ennui incessant de son poste donnait souvent à Stryker l’impression d’être plus un administrateur qu’un soldat. Après avoir informé Harrow, il avait été décidé qu’une petite équipe d’éclaireurs l’escorterait, lui et di Brascio, de l’autre côté du fleuve. Contre l’avis de Maddox et de Magnus, Stryker avait choisi de diriger cette équipe.

Ils remontaient la large rive sablonneuse du côté occidental du Fleuve Noir. Croix-des-Fleuves était à quelques kilomètres devant eux. Il était accompagné d’une demi-douzaine de rangers, dont des tireurs embusqué Sharp et Horgrum. Ils devaient se déplacer rapidement, aussi Stryker avait-il choisi un warjack capable d’être à la fois rapide et furtif. Le warjack léger Chasseur qui suivait sa petite équipe était encore une grosse machine, mesurant plus de deux mètres septante de haut, mais il se déplaçait avec une économie de mouvement inhabituelle pour la plupart des warjacks. Il était armée d’une hache au manche court, mais son armement principal était un canon à longue portée tirant des obus perforants capables de pénétrer les armures les plus solides. Sa cheminée était petite, produisant peu de fumée, et les améliorations apportées à son cortex permettaient à Stryker de le diriger à une distance deux fois supérieure à la normale. Il pouvait effectuer des repérages à des centaines de verges devant lui si nécessaire, fournissant ainsi de précieux renseignements au warcaster qui le contrôlait.

Le Capitaine Harrow et le mage balisticien Vayne di Brascio étaient les derniers membres de l’équipe de Stryker. Même si Stryker avait été convaincu de laisser Harrox faire partie de l’équipe chargée d’infiltrer la ville et de transmettre un message au Seigneur Pytor Aleshko, il voulait toujours voir la ville par lui-même. Plus que cela, il voulait s’assurer que di Brascio et Harrow parviendraient à Croix-des-Fleuves sans incident. Maddox n’était pas d’accord avec sa décision d’accompagner leur escorte, mais, au moins cette fois, il ne l’avait pas écoutée.

Ils amenèrent Harrow et di Brascio à moins d’une kilomètre de la ville, bien que Sharp et Horgrum le suivraient un peu plus loin comme derrière mesure de soutien avant qu’ils ne pénètrent dans Croix-des-Fleuves.

Le Fleuve Noir était large et rapide, et si proche du rivage, il émettait un grondement sourd et constant. Le Bruit dissimulerait les bruits de leur passage s’il rencontraient des patrouilles khadoréennes. Il ne faisait aucun doute que Harkevich était conscient de leur présence maintenant ; il était difficile de cacher une armée de dix mille hommes, et, bien sûr, le Khador avait ses propres éclaireurs et espions.

En fin de compte, Harrow et di Brascio devaient approcher la ville par l’ouest, la direction la plus probable d’où viendrait un mercenaire à la recherche d’un emploi. Cela impliquait qu’ils devraient traverser le fleuve, une proposition difficile, car il n’y avait aucun pont intact à l’exception de la Grande Porte. Ils avaient déjà dépassé les ruines de trois ponts ; tous trois avaient été détruits par des explosifs, ne laissant que de la pierre et du bois brûlés.

Ils avaient besoin d’un bateau pour faire traverser Harrow et di Brascio, ce qui était assez facile à fournir pour la horde de mékaniciens de l’armée cygnaréenne, mais Stryker avait eut une autre idée, qui n’avait pas été très appréciée par le Major Maddox. En fait, elle l’avait qualifiée « d’étonnament stupide ». Son but était de s’emparer de l’un des petits bateaux khadoréens patrouillant sur le Fleuve Noir, accomplissant ainsi deux objectifs en même temps. Premièrement, il obtiendrait de précieux renseignements sur un aspect des défenses khadoréennes, et deuxièmement, il s’assurerait une embarcation légère et rapide qui ne serait pas immédiatement remarquée par l’ennemi pendant que Harrow et di Brascio traverseraient.

« Jusqu’où les patrouilles se rendent-elles au sud ? » demada Stryker à Sharp, qui marchait à ses côtés.

« D’après ce que j’ai vu, et ce que j’ai entendu de la part des llaelais, à peine quelques kilomètres. Ils ont tendance à rester assez près de la ville, et il y a de nombreux points de contrôle en aval. Mais nous nous rapprochons des limites de leurs patrouilles.

« Qu’avez-vous en tête, Seigneur Général », demanda Harrow.

« Nous devons en attirer un près de ce côté de la rive, lui donner une raison d’accoster, puis s’occuper de l’équipage », répondit Stryker. Harrow était resté silencieux depuis qu’ils avaient quitté le camp, ce dont Stryker était reconnaissant.

Harrow se frotta les mains. « Peut-être devrions-nous mettre en place un appât alors ».

Stryker regarda le mercenaire. « C’est ce que je pensais. Des suggestions ? »

Harrow pointa le doigt vers l’avant. « Là-bas. Ce bosquet d’arbres à environ cinquante verges du rivage. Bonne couverture. Le mage balisticien – euh, le Capitaine di Brascio – et moi nous tiendrons près de l’eau et attendrons. Lorsqu’un bateau arrivera, nous lui ferons signe de s’approcher. Nous n’aurons pas l’air de soldats et il pourraient s’arrêter pour enquêter ».

« Et si cela ne suffit pas à attirer leur attention ? » demanda Sharp.

Harrow haussa les épaule. « Alors, je leur tirerai dessus ».

« Le but est de nous faire traverser le fleuve en un seul morceau », dit di Brascio, « pas de nous faire tirer dessus tous les deux ».

« Oh, ne vous inquiétez pas. On m’a souvent tiré dessus. Je suis assez difficile à toucher ».

« Je peux faire quelque chose pour ça », proposa Stryker.

Les yeux d’Harrow se rétrécirent un instant, puis il compris. « Vous avez le don, je m’en souviens ».

« J’en suis sûr » Stryker avait fait appel à sa magie pour la première fois il y a quinze ans, au sein de la ville de Ruissepêche. Il avait alors eu une altercation avec Harrow, un combat à mains nues qu’il avait remporté malgré son jeune âge et son manque d’expérience. « Sharp, combien de temps penses-tu que nous allons attendre ? »

Le ranger réfléchit. « Une heure ou deux. D’près ce que j’ai pu voir, c’est la durée de leur boucle de patrouille ».

« Très bien, mais je veux pas de risquer vos deux vie », dit Stryker à Harrow et di Brascio. « Harrow, vous êtes devant moi. di Brascio avec moi ».

« Tout seul, alors, hein, monsieur ? » dit Harrow. « Vous ne seriez pas en train de me faire payer les griefs du passé, n’est-ce pas ? » Son ton était décontracté, voire amical, mais la question irritait tous les nerf de Stryker.

« Est-ce que vous me demandez si je vous mets intentionnellement en danger pour une vengeance mesquine ? »

« Je n’ai pas dit que c’était mesquin, monsieur », répondit Harrow en souriant. Stryker s’approcha du mercenaire. Il était plus grand qu’Harrow et son armure le rendait considérablement plus volumineux. « Vous êtes nouveau dans la chaîne de commandement, Capitaine Harrow, je vais vous laisser une certaine latitude, mais je ne mets pas mes hommes – et, oui aussi désolé que je sois, vous êtes l’un des miens – en danger sans raison valable. Le Capitaine di Brascio est un habile mage balisticien, un chef de la Résistance Llaelaise et un homme honorable. Vous êtes un ex-mercenaire dont le caractère et les intentions sont très discutables, mais qui, pour l’instant, sert à quelque chose. En bref, je préfère vous perdre plutôt que lui, mais même ainsi, je ne vous mettrais pas là si je ne pensais pas que vous aviez de bonnes chances de survivre. Compris ?

Le reste de ses hommes étaient silencieux et même di Brascio parut surpris. Harrow, cependant, resta imperturbable. Lorsqu’il sourit ensuite, c’était comme si une grosse anguille avait rampé sur son visage. « Oh, c’est logique, monsieur. Je ne suis qu’un humble mercenaire, comme vous dîtes. Je vous remercie d’avoir pris le temps de m’expliquer que je ne suis pas indispensable ».

« Je suis heureux que vous compreniez. Maintenant, mettons-nous en position ».

* * *

LE BATEAU DE PATROUILLE KHADORÉEN était plus grand que Stryker avait prévu. Il mesurait de douze mètres de long et quatre mètres cinquante de large et était haut sur l’eau. Il était propulsé par une seule roue à aubes à l’arrière, et Stryker pouvait entendre le grondement de son moteur à vapeur. Le pont était largement ouvert, mais une cabine de pilotage blindée se trouvait à l’arrière. Il pouvait voir quatre hommes sur le pont, l’un derrière le petit canon de poupe et deux autres armées de fusils à canon long se tenant à bâbord et à tribord. Le dernier membre de l’équipage khadoréen se tenait telle une grande sentinelle rouge au milieu du pont. Le Man-O-War troupe de choc était une menace de deux mètres quarante vêtue d’acier, un brave soldat enveloppé dans une armure à vapeur, armée d’une dévastatrice hache mékanique et d’un bouclier équipé d’un canon à courte portée. Les Man-O-War étaient la réponse khadoréenne au warjack léger, car la nation du nord ne disposait pas des ressources nécessaires pour produire des cortex au même rythme que ses ennemis. Stryker devait admirer le courage de ce Man-O-War en particulier. S’il venait à passer par-dessus bord avec cette armure, il irait droit au fond et mourrait atrocement.

Harrow se tenait près du rivage, agitant les bras en direction du bateau. Stryker et le reste de ses hommes étaient à cinquante verges, cachés dans les arbres. Il avait diminué la chaudière du Chasseur pour que sa fumée ne soit pas visible par les khadoréens.

L’un des membres de l’équipage khadoréen pointa Harrow du doigt et cria. Le bateau se dirigea vers le rivage. Ils ne touchèrent pas terre et Stryker pouvait entendre les moteurs du bateau fonctionner tandis que le pilote maintenait le bateau stable contre le courant à trois mètres du rivage.

Intelligent, pensa Stryker. Ils seraient capables de s’enfuir rapidement en cas de problème, et cela changeait le plan de Stryker. Les khadoréens crièrent sur Harrow ; le canon pivota dans sa direction. Stryker se demanda s’ils allaient ouvrir le feu – une partie de lui n’aurait pas été mécontente de voir Harrow se prendre un obus de canon dans la poitrine. Et après tout, il avait encore di Brascio. Cependant, ils ne tirèrent pas. Stryker ne pouvait entendre ce qu’ils disaient, mais cela n’avait pas d’importance. Le bateau était aussi proche qu’il pouvait l’être, et il était temps d’agir.


Stryker établi le lien avec le Chasseur, injectant sa volonté dans son cortex. Il y eut un moment de confusion alors qu’il découvrait le monde à travers ses propres yeux et les relais optiques du Chasseur en même temps, mais cela passa assez vite. Il avait déjà fait cela de nombreuses fois. Il pointa le canon du Chasseur en direction de la cabine de pilotage. Elle était suffisamment petite pour que tout obus pénétrant ne manquerait pas de rater l’homme à l’intérieur. L’impatience du Chasseur pour ce tir se répandit dans leur connexion – c’était ce que le warjack était censé faire, et il voulait y arriver.

« Horgrum », dit-il au grand trollkin. « Tu t’occupes du Man-O-War. Peux-tu l’abattre d’un seul coup ? »

Le trollkin sourit. « Oui, monsieur pas de problème ».

« Concentrez vos tirs sur les autres. Je veux qu’ils soient tous éliminés. Nous n’aurons qu’une seule bonne chance ».

Hochements de tête tout autour et bruit révélateur de fusils en train d’être préparés. « Choisissez vos cibles », dit Stryker, et la tension tout autour de lui s’accrut alors que les rangers visaient. La magie agitait l’air tandis que di Brascio ensorcelait les cartouches à l’intérieur de son pistolet cinémantique.

C’est alors que les choses se gâtèrent.

Le grondement sourd du canon du Man-O-War troupe de choc retentit et le sable devant Harrow s’envola dans les airs. Le projectile l’avait manqué, mais l’onde de choc projeta violemment l’anien mercenaire en arrière. Il atterrit en tas à trois mètres de là.

Pire encore, le bateau s’éloignait de la rive, son unique roues à aube tournant plus vite ; ils avaient senti le piège.

« Merde », dit Stryker en ramenant ses sens dans le cortex du Chasseur. Le bateau s’était éloigné et en mouvement, ce qui rendait le tir d’autant plus difficile. « Feu », dit-il.

Le canon du Chasseur tonna, une tonitruante explosion au-dessus d’eux. Stryker avait mi toute sa volonté dans le tir, le guidant vers sa destination. L’obus perforants déchira la cabine du pilote, la déchiquetant ainsi que tout ce qu’il y avait à l’intérieur.

Le fusil d’Horgrum gronda l’instant suivant, suivi par la rafale staccato des fusils des pionniers. Le casque du Man-O-War disparut avec la tête de son propriétaire dans un volcan de sang et d’éclat d’acier. Le reste de l’équipage du bateau fut touché à reprises pas des balles de fusil, et l’opérateur du canon fut projeté hors du bateau par le projectile enchanté de di Brascio.

Tout cela se produisit en un clin d’oeil. Le bateau, désormais sans pilote, fit une embardée en avant, et Stryker pointa à nouveau le canon du Chasseur et tira. Cette fois, le projectile frappa le navire vers l’arrière, le trouant bien au-dessus de la ligne de flottaison. La force de l’impact fit basculer le bateau, dont le nez pointait désormais vers le rivage. Ses moteurs rugirent, et il traversa le fleuve jusqu’au rivage dans un jet d’eau et de sable – s’échouant comme il l’avait espéré.

Stryker laissa échapper un long soupir. « Beau travail, l’équipe », dit-il. « Ça n’aurait pas pu être plus propre que ça ». Il se tourna vers Horgrum. « Sacré tir ».

Le trollkin haussa les épaules. « Seulement cinquante verges. J’aurais pu le faire les yeux fermés ».

« Merde, Horgrum », dit Sharp, consterné. « Le Seigneur Général vient de te faire un foutu compliment ».

Stryker renifla. « Ne vous inquiétez pas pour ça. Je pense qu’Horgrum a raison d’avoir un poil d’ego. D’accord. Allons voir notre bateau ».

Ils quittèrent les arbres et se dirigèrent vers le bateau fluvial échoué. Harrow essayait de se relever. « Aidez-le », dit Stryker, quelque peu à contrecoeur, à deux des rangers, et ils allèrent le chercher.

L’ancien mercenaire cracha du sable de sa bouche et grimaça. « J’ai essayé d’utiliser les quelques mots khadoréens que je connais pour les attirer », dit-il. « Mais ils ne m’ont pas cru ».

Stryker hocha la tête. Ce n’était pas une mauvaise idée, même si elle n’avait pas fonctionné. « J’apprécie la stratégie. Surveillez le navire, Capitaine ».

Harrow se dirigea vers le bateau, monta à bord et se rendit dans la cabine de pilotage. « On dirait que quelqu’un a déversé un seau de confiture de framboise sur tout », cria-t-il par-dessus les moteurs tournant au ralenti.

« Stoppez-les », dit Stryker. Quelques secondes plus tard, les moteurs ralentirent puis s’éteignirent, laissant le site de leur courte bataille calme et silencieux.

Harrow sortit de la cabine de pilotage, un air dégoûté sur le visage. Il s’essuya les mains sur son pantalon. « Je vous le dis, je ne piloterai pas ce foutu engin.Ça pue comme dans un abattoir là-dedans ».

Stryker l’ignora et désigna deux rangers. « Rassemblez rapidement les corps et dissimulez-les dans les arbres. Sharp, tu sais piloter ce vaisseau ? »

« Je pense que oui, monsieur », répondit-il.

« Bien, parce qu’Horgrum et toi allez avec eux. Je veux que vous emmeniez le Capitaine Harrow et le Capitaine di Brascio de l’autre côté, du moins le plus près possible. Ensuite, vous les suivrez jusqu’aux portes. Une fois qu’ils seront entrés, vous vous dépêcherez de revenir, vous cacherez le bateau du mieux que vous pourrez et vous attendrez leur retour ».

di Brascio prit la parole. « Une fois que nous aurons atteint la ville, cela ne devrait pas prendre longtemps pour transmettre un message à Pytor et organiser une réunion ».

« Ou se faire prendre et finir au bout d’une corde », ajouta Harrow avec un petit rire sinistre. « Mais je suis d’accord avec le capitaine. Nous avons besoin de quelques jours, une semaine maximum ».

« Compris », dit Sharp. « Horgrum et moi avons assez de rations pour tenir tout ce temps, et nous pouvons nous cacher ou nous occuper de toute patrouille qui passerait pas là ».

« Je suis sûr que les khadoréens sont aussi des provisions à bord », dit Stryker. « Vous et Horgrum montez à bord. Harrow et di Brascio, vous aussi. Nous allons déséchouer de la plage ».

Il laissa les autres monter à bord, mais retint di Brascio avant que le mage balisticien ne puisse monter sur le navire. Quand les autres furent hors de porté de voix, Stryker dit : » Surveillez Harrow de près ». Harrow pouvait les voir parler depuis le navire, et cela ne dérangea pas Stryker ; il voulait que l’ex-mercenaire sache qu’il était surveillé.

« Je le ferai », répondit di Brascio. « L’homme est compétent, mais il est couvert d’une merde qui ne s’enlève pas ».

« Je suis content que nous soyons sur la même longueur d’onde alors ».

Le mage balisticien tapota son pistolet cinémantique. « Faites-moi confiance, Seigneur Général, je sais comment nettoyer la merde difficile à enlever ».

Stryker attendit que l’étrange groupe de soldats monte à bord : un mage balisticien llaelais, une équipe d’éclaireur tireur embusqué comprenant un trollkin et un homme qu’il avait autrefois considéré comme un ennemi – même si, s’il était honnête avec lui-même, il le faisait toujours. C’était un groupe hétéroclite, mais il faisait confiance à trois sur quatre. Il espérait que Magnus avait raison au sujet de son homme et qu’on pouvait faire confiance à Harrow, mais il avait un plan de secours : di Brasio collerait une balle dans la tête d’Harrow s’il les trahissait. Cela semblait un plan solide.

Une fois que l’équipe fut à bord du bateau fluvial, Stryker accéda au Chasseur et l’exhorta à s’approcher de la poupe. « Pousse-le », dit-il en transmettant son ordre au cortex du warjack.

La chaudière du warjack vrombit et de la fumée s’échappa de sa cheminée tandis qu’il transferait la force de la vapeur à ses membres. Il appuya son corps contre la coque du bateau, se pencha en avant, ses larges pied s’enfonçant dans le sable. Le bateau se déplaça lentement, mais il se déplaça, et le Chasseur commença à avancer petit à petit, le repoussant dans l’eau.

Le warjack devait s’enfoncer dans le fleuve pour libérer complètement le navire, une dangereuse proposition pour un warjack. La submersion éteindrait sa chaudière et stopperait son cortex. Mais le Chasseur était agile, et avec Stryker le guidant, il n’y avait pas de réel danger.

Le bateau fut bientôt libre et ses moteurs démarrèrent, tournant à contre-courant. Le bateau fit un demi-tour assez maladroit au milieu du large fleuve – Sharp n’était pas un pilote expérimenté, loin s’en faut – mais redressa rapidement et se dirigea vers Croix-des-Fleuves et ce qui, espérons-le, serait le premier pas vers la victoire.
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« Réponse #16 le: 15 septembre 2024 à 16:46:36 »
- 16-
Au Nord de Croix-des-Fleuves, Llael Occupé

ILS ÉTAIENT PLUS PROCHES DE CROIX-DES-FLEUVES[/b] que Stryker ne le souhaitait, mais le prince kayazy, le Seigneur Pytor Aleshko, ne voulait rencontrer personne d’autre. En fait, ils avaient dépassé la ville en direction du nord, vers un territoire contrôlé par le Protectorat de Menoth. Une manœuvre intelligente – Aleshko savait qu’ils ne prendraient pas le risque d’amener une force importante dans les possessions du Protectorat.

« Il a des bateaux », dit Magnus d’un ton appréciateur.

Ils remontaient le Fleuve Noir, longeant la rive pour profiter de la couverture des arbres. Devant eux, les mâts de quatre grandes galères s’élevaient au-dessus d’un petit port. Le port lui-même semblait avoir été construit à la hâte, n’étant guère plus qu’un ensemble de larges piliers de bois.

« Cela pourrait être utile », approuva Stryker. « S’il est prêt à s’en séparer ».

Jusqu’à présent, le plan du warcaster fonctionnait. Harrow et di Brascio étaient revenu quatre jours après être entré dans Croix-des-Fleuves en se faisant passer pour des mercenaires à la recherche d’un emploi. Ils avaient prévenu Aleshko, et le kayazy avait immédiatement accepté de les rencontrer. La rapidité avec laquelle le kayazy avait accepté avait surpris Stryker et l’avait inquiété, mais Magnus avait mis cela sur le compte de l’empressement de l’homme à faire du profit et à éviter le risque d’une bataille ouverte. Stryker comprenait le bien-fondé de cette attitude, mais quelque chose le dérangeait encore.

Magnus et lui étaient seuls ; tels étaient les termes d’Aleshko. Il ne rencontrerait que les chefs de l’Armée Cygnaréenne : pas de warjacks, pas de gardes. Maddox avait de nouveau demandé à ce que ce soit elle qui rencontre le Seigneur Aleshko, et Stryker avait à nouveau refusé. Il voulait être là, avec Magnus, prêt à affronter la duplicité du vieux warcaster, si elle existait.

Stryker n’était cependant pas parti sans assurance. Il avait été impressionné par le Sergent Éclaireur Sharp et son compagnon tireur embusqué trollkin, aussi les avait-il emmenés avec eux, même s’ils suivaient loin derrière, cachés par l’obscurité et les arbres. Ils observeraient la réunion de loin et le Raevhan Express d’Horgrum serait leur première réponse à une trahison.

Ils approchaient du quai, et sur le quai le plus proche, à côté de l’un des gros navires, se tenait un petit groupe d’hommes. Stryker en compta huit. Ils étaient grands, musclés et armés d’un assortiment de couteaux et de pistolets. Il avait entendu de nombreux récits lugubres sur les voyous servant les kayazy, des hommes issus de gangs de rue khadoréens vicieux appelés bratyas. Nombre d’entre eux étaient réputés pour être d’habiles assassins.

« Bienvenue, mes amis », cria une voix autoritaire en cygnaréen alors que Stryker et Magnus étaient à quelques verges du quai. L’un des huit hommes s’avança dans la lueur d’une unique lanterne accrochée à un poteau. Le Seigneur Pytor Aleshko était un homme d’une quarantaine d’années, d’une laideur extrême. Sa chevelure noire grisonnait aux tempes, lui donnant un air de dignité qu’il ne méritait probablement pas. Il avait de grands yeux rappelant à Stryker un animal sauvage acculé et prêt à lutter pour sortir d’un piège. Il était petit, mais bien bâti, un homme musclé semblant à l’aise au combat.

« Seigneur Aleshko », dit Stryker. « Je suis le Seigneur Général Commandant Stryker, et voici le Général Asheth Magnus ».

Les lèvres du kayazy formèrent un sourire crispé. « Bien sûr, je vous connais tout les deux. Des guerriers de grandes renommée… et d’une certaine infamie, hein ? » Il jeta un coup d’oeil à Magnus. « Vos hommes m’ont dit que vous souhaitiez me rencontrer, mais il ne m’ont pas dit pourquoi. Je peux peut-être le deviner, oui ? »

Stryker était curieux de découvrir ce que l’home savait déjà. « Pourquoi pensez-vous que nous sommes venu, alors ? »

« Vous devez entrer dans la ville », dit Aleshko. « C’est simple. Votre armée voudrait traverser le pont et occuper Croix-des-Fleuves ».

Magnus sourit. « Et qu’en pensez-vous, Seigneur Aleshko ? »

Il haussa les épaules. « Je suis un homme d’affaire, je cherche le profit, pas la conquête. Le Kommandeur Harkevich n’a pas été aussi désireux que moi de récolter les nombreuses récompenses que Croix-des-Fleuves a à offrir ».

On parie, pensa Stryker. D’après ce qu’il avait entendu sur Harkevich, l’homme était un féroce mais honorable combattant. Devoir supporter cette brute d’homme devait lui retourner l’estomac autant qu’à Stryker.

« Et vous penseriez que nous pourrions le faire, hein ? » demanda Stryker.

« Des dispositions pourraient être prises, oui », répondit Aleshko. « Une fois Croix-des-Fleuves pris, vous pourriez peut-être m’autoriser à conserver mon poste – pas publiquement, bien sûr, mais j’ai pris goût à superviser le bien-être des citoyens ».

« Bien-être, hein ? Dit Magnus en riant. « Vous voulez dire extorquer chaque centime rouge que vous pouvez pendant que vous continuez à les pressurer. Ça ne marchera pas dans une ville cygnaréenne ou llaelaise ».

Stryker fut surpris. Magnus avait l’air sincèrement dégoûté, et il avait répondu à la demande d’Aleshko tout comme Stryker comme l’aurait fait.

« Comme vous le dites », dit Aleshko en haussant les épaules. « Mais il y a d’autres moyens de gagner de l’argent. Lorsque la ville sera restaurée, le commerce le long du Fleuve reprendra – nourriture, alcools, armes. Un homme pourrait bien s’occuper de ces affaire dans la ville. Mes maîtres à Korsk se moquent de savoir qui tient la ville, tant que l’argent continue de rentrer ».

Stryker pesa ses choix. Laisser cet homme voler d’honnêtes marchands était déplaisant, mais si cela leur permettait d’entre dans la ville, le bien qu’ils pourraient faire aux habitants l’emporterait sur cet insignifiant mal.

« J’ai besoin d’une preuve que vous avez quelque chose à échanger », déclara Stryker. « Sinon, nous en avons fini ici ».

Aleshko sourit. « Bien sûr, Seigneur Général. Bien sûr. Voici ce que je vais vous dire. Vous avez vu la Grande Porte, n’est-ce pas ?

« Oui, je l’ai vue ».

« Impressionnante, oui ? Tant d’hommes et de machines pour le garder, mais ce n’est pas son plus grand danger. Harkevich sait qu’il ne peut laisser personne traverser le pont depuis l’est, et il a pris des mesures pour s’assurer qu’aucun ennemi ne le fasse jamais ».

« Venez-en au fait », dit Magnus.

« Il y a des explosifs sous le pont, à des points faibles. Même si vous battez ses hommes et ses machines, il détruira le pont sous vos pieds ».

C’était le dernier clou du cercueil, Stryker le savait. Attaquer le pont était une voie sans issue.

« Mais je sais où se trouvent les explosifs, et je pourrais envoyer un petit groupe de vos hommes à l’intérieur pour les neutraliser », déclara Aleshko. « Est-ce que cela a assez de valeur, Seigneur Général ? »

Stryker ouvrit la bouche pour répondre, mais Magnus l’interrompit. « Seigneur Aleshko, vous avez ici d’impressionnants vaisseaux. À quoi servent-ils ? »

Aleshko fronça les sourcil. Il avait le vent en poupe, il commandait, et il n’aima pas ce changement de direction. « Le ravitaillement et les hommes vont et viennent de Rynyr depuis la Grisonnante. Mes vaisseaux rendent cela possible ».

« Des hommes, dites-vous ? » dit Magnus en faisant en pas en avant. Les hommes de mains qu’Aleshko avait amenés avec lui se déplacèrent en même temps, faisant un pas vers leur chef, leurs mains se posant sur leurs armes. « Combien d’hommes pourriez-vous embarquer sur un navire comme celui-là. Soixante ? Septante ? »

Les yeux du Seigneur Aleshko se plissèrent et son froncement de sourcils s’accentua. « Mes navires ne sont pas disponible, Général. Je vous révélé ce que je pouvais vous offrir. Si je vous donnais mes navires, ce serait une trahison évidente ; je ne pourrais plus rester dans la ville après cela. Non, vous avez mon offre ».

Magnus regarda Stryker, qui eut un aperçu à la fois excitant et terrifiant de ce qui allait se passer. Magnus et lui portaient leur armure de warcaster et étaient armés de lames mékaniques et de pistolets lourds. Ils faisaient face à huit tueurs endurcis, légèrement armés et armurés. Magnus avait évalué la situation et son issue, et il s’apprêtait à passer à l’action.

Aleshko n’était pas un idiot. Les négociations étaient finies et une décision avait été prise. Il recula précipitamment. « Tuez-les tous les deux », dit-il, sa main s’élançant vers le pistolet qu’il portait à la taille.

Les sbires d’Aleshko se précipitèrent, mais le kayazy avait mal choisi son lieu de rendez-vous. La jetée était suffisamment étroite pour que ses hommes ne puissent pas submerger leurs ennemis et étaient obligés de les attaquer au maximum à deux ou trois à la fois.

« Bon sang, Magnus », prononça Stryker en retenant son souffle et en arrachat Vif-Argent de son dos alors que les hommes de main d’Aleshko se rapprochaient. Ce n’était pas ce qu’il avait voulu. Il serait peut-être nécessaire de forcer la main d’Aleshko, mais il avait espéré éviter un bain de sang.

Magnus dégaina Pourfendeur d’un mouvement fluide, la brandissant pour trancher le premier sbire à sa rencontre. L’homme avait une paire de dagues à larges lame, et il les abattit en X croisé pour stopper l’attaque de Magnus. Stryker avait déjà vu Pourfendeur à l’oeuvre, et l’habile parade du kayazy ne le sauverait pas. Pourfendeur s’élança, heurtant les dagues jumelles de son ennemi et les écarta. La lame mékanique creusa un sillon dans l’abdomen de l’homme, éclaboussant Magnus et Stryker d’une effusion rouge et humide. L’homme tomba, et le combat débuta pour de bon.

Le premier acte de Stryker fut d’invoquer sa magie et de lancer une protection mystique sur lui et Magnus. Des coups de feu retentirent, mais les balles furent détournées inoffensivement des deux warcasters, s’enflammant inutilement contre la barrière mystique de Stryker.

Stryker tenait Vif-Argent au ras du sol, pointant sa pointe vers un sbire en train de charger. Il pressa une détente sur la poignée de la grande épée, et un éclair azur jaillit de l’arme, atteignant le kayazy en pleine poitrine et projetant son cadavre fumant hors du quai.

Stryker et Magnus reculèrent, laissant l’ennemi venir à eux. Stryker para un coup de dague à la tête, puis laissa la seconde dague de l’homme s’écraser inoffensivement contre son armure. Il frappa avec la poignée de Vif-Argent, enfonçant son pommeau dans la visage de l’homme, lui brisant les dents et le faisant chanceler. Il tua l’homme d’une large entaille ouvrant son adversaire du cou au nombril.

Un coup de feu retentit derrière eux, grave et tonitruant, et un autre sbire kayazy bascula en arrière, l’énorme projectile du Raevhan Express d’Horgrum lui ayant prélevé la plus grande partie du crâne.

Magnus manoeuvrait sans effort dans cet espace restreint, et il était clair que l’âge de l’homme et ses nombreuses blessures ne le gênaient pas au combat. Il embrocha un ennemi avec Pourfendeur, laissant l’homme se tordre au bout de sa lame, puis dégaina son fusil à mitraille de la main gauche et en abattit un autre d’un tir dans la poitrine.

Aleshko avait reculé jusqu’au bout de la jetée, et ses hommes survivants s’étaient regroupés autour de lui. Stryker et Magnus avançaient, deux warcasters couverts de sang ayant massacrés cinq de ses hommes en quelques secondes. Aleshko n’avait nulle part où aller, alors il fit ce qu’il faisait de mieux : il négocia.

« Assez ! » cria-t-il en faisant signe à ses hommes restant. « Jetez vos armes ».

Ses hommes semblaient prêts à mourir pour leur maître, ou si ce n’était pas pour lui, pour leur propre honneur, mais ils bougèrent pas pendant quelques instants, apparemment confus. Magnus s’avança à grand pas, levant son arme, mais Stryker posa une main sur son épaule et le tira en arrière. Le warcaster jeta un regard venimeux derrière lui – son sang ne faisait qu’un tour – mais il s’arrêta.

Les armes s’entrechoquèrent sur la jetée, les sbires comprenant qu’il était inutile de poursuivre la bataille.

Stryker leva un poing et invoqua un autre sort. Il envoya un projectile mystique dans les air, un orbe d’énergie bleu crépitant projetant un lueur pâle sur l’eau. C’était un signal pour Sharp et Horgrum de les rejoindre.

« À genoux », dit Magnus, et les khadoréens obéirent. « Ce n’est pas nécessaire », déclara Aleshko. « Vous avez fait valoir votre point de vue. Nous pouvons inclure les navires dans le négociations à venir ».

Magnus rit. « Les négociations sont terminées, mon ami. Vous et vos navires sont à nous. Je suis sûr qu’il y a beaucoup de chose que vous ne nous avez pas révélé à propos de ce pont ».

« Votre réputation de duplicité est bien méritée, Général Magnus », dit Aleshko en crachant.

Stryker ne put s’empêcher d’être d’accord avec l’homme.

* * *

« VOUS N’AVEZ PAS DONNÉ D’ORDRES CONTRAIRES, Seigneur Général », dit Magnus. « J’ai seulement agi comme je le pensais, une réponse appropriée à la situation ».

« Je n’ai donné aucun ordre du tout », déclara Stryker, regardant Magnus à travers la grande table. Ils étaient dans sa tente de commandement, et il y avait des gardes à l’extérieur, des gardes pouvant mettre Magnus en garde à vue dans un avenir très proche. « Vous avez agi sans mon autorisation et vous nous avis mis tout les deux en danger ».

« En danger ? » Magnus fit un geste dédaigneux de la main. « Deux warcaster armés et armurés avec l’un des meilleurs tireurs embusqué de l’armée pour surveiller leurs arrière contre une poignées de sbires kayazy ? Vous êtes bien placé pour le savoir, monsieur. Nous n’étions pas en danger ».

Dans une certaine mesure, Magnus avait raison. Aleshko et ses hommes avaient été largement surpassés. Stryker attribua cela à l’excès de confiance de l’homme selon lequel il avait accepté de rencontrer deux warcasters avec seulement un minimum de gardes en premier lieu. Mais ce n’était pas le sujet. Magnus avait agi seul, comme il l’avait fait au cours des deux dernières décennies.

« Je suis votre commandant », dit Stryker en grinçant des dents. « Et si cela doit vous trouer le cul, vous suivrez mes ordres, et vous m’informerez de tous vos plans à l’avenir ».

Les yeux de Magnus se rétrécirent et sa mâchoire se serra. Il était en colère, et Stryker éprouva une certaine satisfaction à l’idée d’avoir pu provoquer ce genre de réaction chez l’homme. Mais Magnus acquiesça lentement. « Oui, monsieur », répondit-il.

« Messieurs ». Maddox avait été pratiquement oubliée dans la tente. Stryker avait convoqué le commandant pour l’informer de ce qui s’était passé. « Bien que je ne sois pas d’accord avec les méthodes du général, nous avons une issue favorable ici. Concentrons-nous là-dessus ».

Stryker inspira profondément. « Très bien », dit-il. « Nous avons Aleshko en détention, et je conviens qu’il en sait peut-être plus sur les défenses de la ville qu’il ne nous a révélé ».

« Je pense qu’il a y peu de doutes à ce sujet », dit Magnus. « Cet homme est comme un oignon pourri – plus on enlève de couches, plus il pue ».

Sryker fut à nouveau frappé par le dégoût évident de Magnus pour Aleshko. C’était palpable et, pour Stryker, cela semblait déplacé. Il y avait de nombreuses similitudes entre les deux. C’était peut-être la motivation et non la méthodologie qui irritait Magnus. Il s’était battu pour une cause, aussi déplacée soit-elle, et Aleshko faisait tout pour le pouvoir et l’appât du gain.

« Qu’en est-il des navires ? » demanda Maddox.

« Ils sont un atout, sans aucun doute », répondit Stryker. « Chacun peut contenir près de cinquante hommes, mais ce ne sont pas des navires de guerres, et nous n’osons pas les faire naviguer sur le fleuve.

« Avons-nous des hommes capable de les faire naviguer ? » demanda Magnus.

Maddox acquiesça. « Quelques-uns. Suffisamment pour former un équipage réduit pour chaque navire ».

« Nous pourrions les utiliser pour faire traverser le fleuve à une petite force et éventuellement attaquer la ville par l’ouest », dit Stryker.

« Nous ne pouvons rien faire, des deux côtés du fleuve, tant que nous n’en savons pas plus sur les explosifs sur ce pont, et sur tout ce que sait le Seigneur Aleshko », dit Magnus en se frottant le menton.

« Comment voulez-vous que nous obtenions ces informations ? » demanda Stryker. « C’est un homme dur et têtu. Il ne va pas se plier de sitôt à un interrogatoire ».

« Qui avez-vous pour lui ? » demanda Magnus.

Stryker trouva cette question étrange, mais il y répondit. « Le Lieutenant Dayton Sims », déclara Stryker. « Il travaille au SRC depuis un certain temps et c’est un interrogateur compétent ».

« Nous avons besoin de ces informations rapidement », déclara Magnus. « Et je ne pense pas que les méthodes du Lieutenant Sims nous permettront de les acquérir assez rapidement ».

« Vous parlez de torture. On va y aller fort contre Aleshko, mais il y a une ligne que je ne veux pas franchir ».

Magnus rit. « Si vous pensez que le Cygnar est trop noble pour employer d’autres méthodes d’interrogatoire, j’ai un rude réveil pour vous. Elles sont utilisées depuis des années. Certains ne sont pas aussi délicats que vous, Seigneur Général ».

« Je suis ni naïf, ni dégoûté. Il y a tout simplement des limites que les hommes civilisés ne franchissent pas. Je sais qu’à votre époque, sous Vinter, la torture n’était qu’un outil parmi d’autres, mais pas sous mon commandement ».

« Donc, vous risqueriez la vie de soldats cygnaréens parce que vous êtes trop civilisés pour saisir le seul avantage qui pourrait les sauver … monsieur », dit Magnus. Son ton était moqueur, incrédule.

Stryker considéra les gardes à l’extérieur. Comme il serait facile de leur demander d’emmener Magnus, de l’enfermer pour insubordination et de le mettre hors était de nuire. Une partie de lui le souhaitait ardemment, mais il n’en sortirait rien de bon. Les hommes de Magnus n’avaient de loyauté envers personne d’autres que lui, et une fois cette entrave levée, ils déserteraient. Ou pire.

Stryker regarda Maddox. Elle fixait Magnus, les lèvres serrées, le regard aussi vif et perçant qu’un couteau dans les tripes. Il n’était pas difficile de savoir ce qu’elle pensait du plan d’action proposé par Magnus.

« Vous avez entendu ma décision, Général », déclara Stryker. « Et vous la respecterez ».

« Vous faîtes une erreur », répondit Magnus. « Nous avons besoin de ces- »

« Vous êtes congédié », dit Stryker. « Je vous informerai de la ligne de conduite que nous prendrons avec le Seigneur Aleshko demain ».

Magnus se mordit la lèvre, peut-être pour ne pas dire quelque chose qu’il regretterait. Cela faisait plaisir à Stryker de savoir qu’il pouvait mettre cet homme en colère. « Comme vous le souhaitez, Seigneur Général », prononça Magnus et il sortit de la tente.

Maddox s’attarda. Elle semblait vouloir dire quelque chose, et Stryker attendit. Finalement, elle prononça : «  Vous avez pris la bonne décision, Seigneur Général ». Elle marqua une pause et sembla se ressaisir. « Et je ne dis pas cela à cause de ce qui m’est arrivé ».

« Merci », dit Stryker, et une vague de compassion pour Maddox l’envahit. Il aurait voulu en dire plus, pour la réconforter s’il le pouvait, mais ce n’était pas ce qu’elle voulait et, de plus, Maddox en avait fini avec la conversation.

« Bonne nuit, monsieur », dit-elle et elle sortit dans la nuit, laissant Stryker réfléchir aux décision difficiles à venir.
« Modifié: 15 septembre 2024 à 16:48:20 par elric »
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Roman - Poudrière
« Réponse #17 le: 15 septembre 2024 à 16:54:43 »
- 17-
Au Sud du Campement Cygnaréen

VOUS SAVEZ, SEIGNEUR ALESHKO, je dois remercier vos compatriotes d’avoir ajouté un nouvel ensemble de compétences à mon répertoire », dit Harrow en posant une matraque en caoutchouc sur la petite table à côté de Pytor Aleshko. La matraque rejoignait un marteau à tête boule sur la table en bois.

Le prince kayazy était solidement attaché à une solide chaise. Il était torse nu et ses chaussures avaient été enlevées. C’était un spécimen physique impressionnant et les cicatrices sur sa large poitrine suggérait qu’il n’était pas étranger à la douleur. Il regardait Harrow, ses yeux écarquillés pleins de haine.

Ils se trouvaient dans l’un des structures les plus permanentes du camp cygnaréen, un lourd chariot en acier contenant de nombreux outils et équipements pour les mékaniciens des warjacks. Ses parois d’acier atténueraient les cris qui ne manqueraient pas d’arriver, mais Magnus l’avait fait tirer à près d’un kilomètre au sud du camp et avait placé des gardes – ses propres hommes – pour empêcher quiconque de s’en approcher.

Moins il y avait de personnes au courant de ce qui allait se passer ici, mieux c’était. Le chariot rectangulaire était assez grand pour contenir Aleshko et Harrow tout en laissant de la place au mercenaire pour oeuvrer. Magnus se tenait à l’autre bout de la structure, près de la porte.

« C’est vrai », poursuivi Harrow. « Je travaillais pour le Général Magnus » - il s’arrêta, regarda Magnus et lui fit un clin d’oeil - « Eh bien, il n’était pas général à l’époque, mais vous comprenez. Nous travaillions avec les Têtes d’Acier en Ord et je collectais des renseignements sur les activités khadoréennes à la frontière, près de Midfast.. Eh bien, je n’avais pas été aussi discret que je le pensais, et une patrouille de Garde des Glaces m’a tiré balle dans l’épaule et m’a ramené à leur Kapitan pour un interrogatoire ».

Aleshko demeura assis en silence, mais Magnus remarque que ses yeux avaient pris un air curieux. Il avait toujours l’air provocant, résolu, mais il commençait à avoir l’air effrayé. Il y avait quelque chose d’agréable dans le ton presque chantant de Harrow, qui évoquait un sentiment d’effroi. L’attitude enjouée de l’homme était si déplacée ici, si inappropriée qu’elle rendait ce qui allait se passer encore pire. Magnus avait vu Harrow à l’oeuvre à plusieurs reprises, et même s’il était familier avec les techniques de torture, le plaisir évident de l’ancien mercenaire à accomplir sa tâche était plus que déconcertant.

Harrow s’accroupit devant Aleshko, les mains sur les genoux de l’homme. C’était un geste incroyablement intime, une invasion de l’espace personnel d’Aleshko, et les lèvres du prisonnier s’écartèrent en signe de colère et de répulsion.

« Quoi qu’il en soit, le kapitan était un interrogateur sacrément compétent, et Morrow, il m’a bien travaillé », poursuivit Harrow. « J’étais assez doué pour ce métier à ce moment-là, mais à travers la douleur et le sang, et, je n’ai pas peur de l’admettre, les cris, j’ai appris que je n’étais qu’un amateur en présence d’un maître ».

« Je ne vous dirai rien », répondit Aleshko. C’était la première fois qu’il parlait, et malgré la bravade que cela était censé véhiculé, cela eut l’effet inverse. Aleshko avait déjà un peu craqué.

Harrow tapota le genou du kayazy. « Chut maintenant », dit-il. « Nous y reviendrons. Quoi qu’il en soit, ce kapitan – Yeltzin, je crois qu’il s’appelait – connaissait son métier, et il m’a fait chanter comme un rossignol en peu de temps. Bon sang, je lui aurais dit n’importe quoi pour que la douleur s’arrête, jusque quelques minutes pour que je puisse pleurer et saigner ».

L’aveu par Harrow d’une chose que la plupart des hommes considéraient comme honteuse créa une sombre tension dans la pièce. C’était une intimité que les étrangers évitaient, mais c’était prononcé avec tant de désinvolture. Magnus était parfaitement conscient que l’interrogatoire avait débuté, et que Harrow utilisait le meilleur outil à sa disposition : son esprit et son manque total d’empathie.

Harrow se leva et se dirigea vers la petite table où se trouvaient ses outils. « Voyez-vous, Seigneur Aleshko, le Kapitan Yeltzin était un artiste parce qu’il croyait en la simplicité. Il n’y avait de pas tisonniers, de scalpels, d’étaux, ou quoi que ce soit d’aussi sophistiqué ou, si je puis me permettre, d’inutile. Non, Yeltzin n’avait besoin que de trois choses. La première, c’était ses poings ». Harrow brandit son poing droit, dont les jointures étaient marquées par d’innombrables combats et probablement par les coups qu’il avait portés aux hommes ligotés. « Le deuxième chose, c’est ceci ». Il prit la matraque en caoutchouc. Ce n’était qu’un morceau d’un tuyau en caoutchouc, suffisamment épais pour servir d’efficace gourdin. Harrow posa la matraque et s’empara du marteau à tête boule, un simple outil de forgeron s’avérant très utile dans cette situation. « Et c’est la dernière chose dont il avait besoin ».

Magnus pouvait voir de petites goûtes de sueur sur le visage d’Aleshko malgré la fraîcheur de l’air à l’intérieur de la voiture.

« Harkevich aura ta tête pour ça », dit Aleshko.

Harrow rit. « D’après ce que j’ai entendu, le Kommandeur Harkevich pourrait me décerner une médaille pour l’avoir débarrassé de vous ». Il reposa le marteau sur la table. « Maintenant, établissons des règles de base. Voici ce qui vas se passer. Je vais vous poser des questions, et peu importe comment vous répondrez – la vérité, la demi-vérité ou le mensonge pur et simple – je vais vous faire mal.

La tension dans la pièce s’intensifia et la peur d’Aleshko était désormais palpable. « Mais voici le problème, Seigneur Aleshko », déclara Harrow. « C’est à vous de décidé comment je vais vous faire mal. Si vous me donnez une bonne réponse, vous aurez ceci ». Harrow leva son poing. « Si vous me donnez une mauvaise réponse, ce sera ceci ou cela. Il posa un doigt sur la matraque, puis le marteau à tête boule ».

La réaction d’Aleshko fut surprenante. Il rejeta la tête en arrière et cracha directement au visage d’Harrow. Il était plus courageux que Magnus ne l’avait imaginé. Harrow sourit et essuya le cracha. « Cette fois, c’est gratuit, Seigneur Aleshko », dit-il. « Recommencez, et - » Harrow tira de sa ceinture un long poignard effilé « - nous développerons un peu la technique d’Yeltzin ».

Il brandit la dague un instant pour qu’Aleshko puisse la voir, puis la rengaina.

« D’accord, première question », dit Harrow. « Êtes-vous prêt ? »

Magnus avait longuement informé Harrow des informations qu’Aleshko pourrait posséder, et le mercenaire avait reçu pour instruction de prioriser ses questions en fonctions des réponses d’Aleshko à l’interrogatoire.

Aleshko ne répondit pas.

« Je prends cela pour un oui. Combien de patrouilleurs Harkevich possède ? »

Aleshko fixa Harrow, ses lèvres tremblant de rage ou de terreur, ou des deux, mais il ne dit rien.

« Seigneur Aleshko », dit Harrow, « je vais compter jusqu’à trois, et si vous n’avez rien dt  d’ici là, je vais considérer cela comme une mauvaise réponse. « Un ».
Alesko se tut.

« Deux ».

Rien.

« Trois ».

« Eske morda », dit Aleshko, les yeux flamboyants de haine.

Harrow se tourna vers Magnus.

« Mange de la merde », répondit le warcaster.

Harrow rit. « C’est impoli, Seigneur Aleshko ». Il ramassa le marteau à tête boule. « C’est aussi une très mauvaise réponse ».

Harrow se plaça derrière le kayazy, et l’homme tourna la tête d’avant en arrière pour essayer de voir le mercenaire. Harrow regarda Magnus et pencha la tête. La question restait en suspens, et Magnus était heureux qu’Harrow tente au moins de respecter le protocole militaire.
«
 Continue », dit Magnus.

La main gauche d’Harrow jaillit, à toute vitesse, et attrapa une touffe de cheveux d’Aleshko. Il tira la tête du kayazy en arrière pour que l’homme regarde le plafond, et avant que le khadoréen ne s’en défaire, Harow abattit le marteau d’un rapide et puissant coup. Il frappa Aleshko en pleine bouche. Magnus entendit les dents de l’homme se briser, et des éclats jaillirent de ses lèvres.

Aleshko poussa un long hurlement strident et Harrow le relâcha. La tête de l’homme bascula en avant, et du sang coula le long de son menton et sur son torse nu. Il avait cessé de crier, mais il respirait de manière irrégulière et pesante.

Harrow revint lentement vers la table et posa le marteau. Il attendit quelques minutes, puis se plaça devant Aleshko. « Combien de patrouilleurs Harkevich possède-t-il ? »

Aleshko réévalua la tête et Magnus remarqua que le marteau lui avait arraché les dents de devant et fendu la lèvre supérieure presque en deux. Il cracha du sang sur le sol – pas sur Harrow, nota Magnus – et ses lèvres bougèrent. Un faible murmure.

Harrow se pencha à côté du kayazy. « Qu’est-ce que c’était ? »

« Douze », dit Aleshko, sa voix brouillée par ses dents cassées.

Harrow se leva et sourit. « Excellent. C’était un une bonne réponse, Seigneur Aleshko ».

Il porta un coup de poing sec et puissant dans le plexus du khadoréen. Le souffle quitta précipitamment la poitrine d’Aleshko, et il cracha du sang, éclaboussant l’uniforme d’Harrow. Le mercenaire n’y prêta pas attention et recula. « Là, tu vois la différence entre une bonne et un mauvaise réponse ? Laquelle est la pire, à votre avis ? »

Aleshko avait encore du mal à respirer et Harrow le laissa tranquille encore quelques minutes.

« Question suivante », dit Harrow. « C’est une question importante, vous devez donc bien faire les choses. Avec quel type d’explosifs Harkevich a-t-il piégé la Grande Porte ?

Aleshko gémit. « Je ne sais pas ».

« Ce n’est pas possible, Seigneur Aleshko », répondit Harrow, la voix dégoulinante de châtiment moqueur. « Je veux dire, vous avez dit au Général Magnus et au Seigneur Général Stryker que vous le saviez. En fait, c’est avec cela que vous avez négocié. Voulez-vous reconsidérer votre réponse ? »

Aleshko prononça quelque chose en khadoréen, et Harrow se tourna à nouveau vers Magnus.

« Quelque chose à propos de ta mère et d’une chèvre, je crois », dit Magnus.

Harrow rejeta le tête en arrière et rit. « Eh bien, vous ne pouviez pas connaître ma mère, alors je vais appeler ça un coup de chance ». Il se déplaça vers la table. « Mais ce n’est pas une très bonne réponse à ma question, n’est-ce pas ? » Il ramassa la matraque en caoutchouc. Aleshko gémit.

Magnus avait déjà vu des hommes être torturé – il l’avait lui même endurée – mais la façon dont Harrow s’acquittait de ses tâches était effrayante. Il ne jouissait pas de la douleur d’Aleshko, du moins pas directement, mais il s’amusait de la même manière qu’un homme bon dans son travail apprécie sa journée de travail. Il y avait un niveau de détachement par rapport à ce qu’il faisait que Magnus avait recherché au cours de sa carrière militaire, mais qu’il n’avait jamais vraiment atteint. Il lui était venu à l’esprit qu’Harrow était peut-être dément – il était certainement fou – il était certainement instable – et que c’était peut-être ce qui lui permettait d’exceller dans ce genre de travail.

Harrow s’approcha d’Aleshko avec la matraque, la frappant dans sa paume, le son était un signe avant-coureur de ce qui allait arriver. « Maintenant, Seigneur Aleshko, je vous frapper avec ceci, et laissez-moi vous dire que ça va vous faire mal. Mais si vous voulez me donner une autre réponse à ma question, je vous laisserez le choix de l’endroit où je vous blesserai ».

« Je … pas … » dit Aleshko, essayant de rester déterminé  face à la terreur et à l’impuissance absolues. Il échoua. « Il a trouvé les explosifs dans la ville. Dans les ruines. Je n’en sais pas plus que ça ».

Harrow se tourna vers Magnus. « L’Armée Llaelaise était-elle présence ici ? »

« Oui, et Harkevich a peut-être trouvé un stock de munitions. Je ne sais pas pourquoi il aurait utilisé des explosifs llaelais plutôt que les siens ». Magnus regarda longuement Aleshko. « Il dit probablement la vérité ».

Harrow se retourna vers son prisonnier. « Voilà, vous voyez ? Ce n’est pas si difficile. Vous m’avez révélé la vérité, maintenant, vous devez choisir. Couilles ou genoux ».

Aleshko regarda Harrow avec horreur. « Je … ne peux pas », murmura-t-il.

« Si vous ne choisissez pas, je choisirai à votre place », déclara Harrow.

« Les genoux », laissa échapper Aleshko.

Harrow claqua la langue. « Vous savez, on ne le croirait pas, mais c’est le pire des deux ». Il lança la matraque dans les airs une fois, deux fois. Le claquement humide qu’elle produisit contre le corps d’Aleshko fut choquant dans l’espace restreint, et les cris de douleurs du kayazy résonnèrent sur les parois d’acier, persistant un certain temps même après que les hurlements se soient transformés en légers sanglots.

De nombreuses questions restaient en suspens.
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« Réponse #18 le: 29 septembre 2024 à 18:57:16 »

- 18-


« COMMENT ÇA, IL EST PARTI ? » dit Stryker aux trois agents terrifiés du SRC se tenant devant une tente vide, la tente vide où Stryker avait laissé le Seigneur Pytor Aleshko.

« Le Général Magnus et quelques-uns de ses hommes sont venus il y a quelques heures et ont ordonné que le prisonnier soit remis à sa garde, monsieur », dit le Lieutenant Drayton Sims. C’était l’officier du SRC le plus gradé, et Stryker avait laissé Aleshko sous sa garde.

Stryker serra les poings le long de son corps et se détourna. Sims était un bon officier, et il ne voulait pas que l’homme remarque la fureur dans ses yeux et pense qu’elle était dirigée contre lui. Une fois qu’il se fut maîtrisé, Stryker revint sur ses pas. « Le Général Magnus vous a-t-il dit où il emmenait le prisonnier ? »

« Non, monsieur, il ne l’a pas fait », répondit Sims. « J’ai tout gâché, n’est-ce pas, monsieur ? »

« Non. Vous n’avez que suivre les ordre d’un officier supérieur, et je n’ai laissé aucune instruction vous demandant de faire autrement ». Le soulagement sur le visage de Sims était palpable. « Mais j’ai besoin de savoir où Magnus a emmené le Seigneur Aleshko. Je veux que vous et vos hommes le découvriez et me rendiez compte immédiatement ».

« Tout de suite, monsieur », dit-il. « Nous le trouverons ». Il se tourna vers ses hommes. « Avec moi ». Et ils s’enfoncèrent dans le camp cygnaréen.

Stryker inspira profondément pour se calmer. Son esprit était ébranlé. Il savait que Magnus serait un défi, mais il était encore surpris que le warcaster le défie ouvertement. Il ne pouvait rien faire d’autre que d’attendre et espérer que Sims découvre où Magnus avait emmené Aleshko avant qu’il ne soit trop tard. Les agents du SRC étaient bien équipés pour dénicher des informations, mais le temps manquait, et Stryker voulait désespérément arrêter Magnus dans un acte qui lui permettrait d’être traduit en cours martial. Il en avait très envie.

Il retourna à sa tente de commandement pour attendre.

* * *

« QU’ALLEZ-VOUS FAIRE lorsque vous le trouverez ? » demanda Maddox alors qu’ils sprintaient tous les deux dans l’obscurité du début de soirée en direction de la périphérie du camp. Sims avait découvert où Magnus avait emmené Aleshko et Stryker avait immédiatement réagi. Il avait voulu y aller seul, mais Maddox ne l’avait pas voulu, et il ne voulait pas avoir affaire à deux officiers désobéissant à des ordres directs.

« C’est passible de pendaison, Beth », déclara Stryker en courant. « Il a désobéi à un ordre direct en temps de guerre ».

« Je sais, mais je vous demande simplement d’obtenir tous les faits avant d’agir, monsieur ». Elle faisait ce qu’elle faisait souvent pour lui, ajoutant un contre-argument froid et rationnel à son argument plus émotionnel. Il n’était pas d’humeur à le faire maintenant.

« Vous ne pouvez pas être d’accord avec ce qu’il a fait », dit Stryker. « Il a peut-être tous mis en péril, pour ce que nous en savons ».

« Bien sûr que non, mais vous devez contrôler vos émotions », dit-elle « Je sais que c’est ce que vous craigniez. Peut-être même que vous l’espériez. Mais notre objectif premier est de mettre le prisonnier en sécurité ».

« Je suis bien conscient de ce qu’il faut faire », dit Stryker. Ils approchaient du fleuve, et leur destination se profilait à l’horizon. Magnus avait tracté le chariot loin du camp – probablement en s’appropriant quelques warjacks de l’armée – et l’utilisait comme salle d’interrogatoire de fortune. Il était visible près d’un petit bosquet d’arbres, à une trentaines de verges du bord du fleuve. Deux hommes se tenaient à l’extérieur, tous deux vêtus d’une armure de pionnier.

Les deux gardes sursautèrent à l’approche de Maddox et Stryker. Ils ne s’attendaient pas à voir deux warcasters en armure courir vers eux à toute vitesse.

« Éloignez-vous du chariot », dit Stryker en s’arrêtant à trois mètres des gardes de Magnus. Tous deux avaient cet air brutal que semblaient avoir tous les hommes de Magnus. Il s’agissait probablement d’anciens mercenaires l’ayant servi pendant son exil. Que Julius ait permis à Magnus de leur donner des postes au sein de l’armée le stupéfiait encore.

Les deux gardes hésitèrent, et l’un d’eux porta sa main sur un pistolet à son flanc.

« Si tu n’éloigne pas ta main du pistolet et que vous ne vous écartez pas, je vous tue sur place », déclara Stryker. Il n’avait pas dégainé Vif-Argent, mais ce n’était pas une menace en l’air. Un warcaster en armure n’avait pas besoin d’arme pour tuer.

Les yeux des deux gardes s’écarquillèrent, car ils comprirent enfin le danger qui les menaçait. Ils s’écartèrent tous les deux. L’un d’eux se contenta même d’un « Désolé, monsieur ».

La porte du chariot était fermée et probablement verrouillée de l’intérieur. Peu importe ; Stryker n’allait pas frapper. Il s’approcha, saisit la porte par la longue barre de verrouillage sur le devant et tira. Les bobines galvaniques le long de son dos brillèrent d’un bleu vif tandis que la turbine arcanique de l’armure déversait sa force dans ses membres. Le métal commença à gémir, puis la porte sortit de ses gonds avec un cri de satisfaction d’acier déchiré. Il jeta la porte au loin et s’élança dans le chariot.

Stryker vit ce à quoi il s’attendait. Aleshko était attaché à une chaise à l’une des extrémités du chariot, affaissé et en sang. Harrow se tenait derrière lui, une matraque en caoutchouc en main. Magnus se tenait devant le prisonnier, un petit filet de fumée s’échappant de la cheminée au dos de son armure de warcaster.

Le visage de Magnus était impassible, glacial. Cela rendit Stryker furieux, au point que Magnus ne lui donnerait même pas la satisfaction d’avoir l’air surpris. On aurait dit qu’il s’était même attendu à la présence de Stryker. Le warcaster ouvrit la bouche pour parler, mais Stryker se précipita en avant, saisit Magnus par la taille, pivota et le projeta à travers la porte ouverte du chariot. Stryker entendit Magnus atterrir avec fracas à l’extérieur et bondit à sa suite.

Magnus gisait par terre avec Maddox se tenant debout au-dessus de lui. Elle paraissait surprise. « Monsieur, je- »

« Sécurisez le prisonnier, major », dit Stryker en serrant les dents. « Et sa chose vous pose problème, abattez-le ».

Pour une fois, Maddox ne discuta pas avec lui. « Oui, monsieur », répondit-elle en se dirigeannt vers le chariot.

Magnus se relevait. Son plastron était cabossé là où il avait atterri sur son ventre. Son champ d’énergie avait probablement absorbé la majeure partie de l’impact. « Coleman, attends, je dois- »

Stryker le chargea,lui assénant un violent coup de poing droit. Le champ d’énergie de Magnus s’embrasa au moment où le poing de Stryker entra en contact avec lui, ce qui ralentit quelque peu le coup de poing ; sinon, il aurait pu briser la nuque de Magnus. Le coup avait tout de même assez de force pour le faire s’écrouler au sol.

La rage que Stryker avait ressentie quelques instants plus tôt s’était transformé en quelque chose d’autre : la vengeance. Une vieille haine remontait de l’endroit où il l’avait cachée, et il la laissa prendre le dessus, la laissa le mener. Cet homme méritait de mourir pour tant de raisons, et Stryker y mettrait fin ici même.

Magnus tenta de se relever, et Stryker envoya son genou dans la poitrine du warcaster, l’écrasant au sol. Il maintint Magnus au sol avec le considérable poids de son armure et ramena son poing en arrière, canalisant sa magie dans la frappe qui allait fracasser le crâne de Magnus. Mais quelque chose le frappa durement dans le dos, et il fut projeté en avant dans les airs. Il toucha le sol sur le ventre, son champ d’énergie s’illuminant de bleu au moment de l’atterrissage.

Stryker se retourna pour voir Maddox se tenir au-dessus de Magnus, le visage assombri par le choc et la colère.Elle lui avait donné un coup de pied dans le dos. « Au nom de Morrow, à quoi pensez-vous ? » demanda-t-elle.

« C’est un traître », répondit Stryker en se relevant. « J’ai le droit de l’exécuter ».

« Avec vos poings ? Il ne se défendait même pas », dit Maddox. « Vous valez mieux que ça ».

En ce qui concerne Magnus, Stryker se demanda s’il l’était, mais les paroles de Maddox évacuèrent une partie de sa colère et il secoua la tête. Magnus se contentait de le fixer.

« Je me suis pas battu contre vous parce que j’espérais que vous reprendriez vos esprits à un moment ou l’autre », dit Magnus en essuyant un filet de sang coulant de son nez. « Pour que je puisse vous révéler ce que nous avons appris ».

« Je me fiche de ce que vous avez appris », dit Stryker. « Vous avez désobéi à un ordre direct, et je vous ferai pendre pour cela. « Harrow était sorti au chariot, un sourire suffisant sur le visage. « Et il sera pendu juste à côté de vous ».

« Vous et moi savons tous les deux que vous êtes heureux de l’excuse », répondit Magnus. « Le Seigneur Général Stryker, si moral, si juste. Je vous connais mieux que vous ne le pensez ».

« Alors c’est un moyen de parvenir à une fin », dit Stryker. « Même sans les règles et les ordres, c’est mal. Vous avez tort.

Vous devriez écouter ce que Magnus a à dire », dit doucement Maddox. « Puis décidez ce que vous voulez faire de lui ».

Stryker la regarda fixement, en serrant les dents. Elle essayait de calmer le jeu, de le faire réfléchir. Une partie de lui la détestait pour cela, la détestait pour avoir fait dérailler la rage qu’il se sentait si justifié de ressentir. Mais elle avait raison, et une autre partie de lui lui en était reconnaissante.

« Parle », dit-il.

« Il nous a parlé des explosifs de la Grande Porte », dit Magnus. « C’est plus que des explosifs c’est une sorte d’agent alchimique ».

Cela choque Stryker, et les implications de ce que cela signifiait vidèrent le reste de sa colère meurtrière. « Aleshko a révélé ça ? »

Il l’a fait », répondit Magnus. Et encore plus. Vous voulez que je vous informe ou simplement lancer une corde à un arbre voisin et vous pendre ? »

Harrow et les deux hommes qui gardaient le chariot se placèrent à côté de Magnus, peut-être pour le protéger ou peut-être  pour chercher à se protéger de lui. Stryker ne l’entendait pas de cette oreille.

« Vous, les hommes, retournez immédiatement au camp », dit-il.

Harrow regarda Magnus d’un air interrogateur. Le warcaster ne croisa pas son regard.

« Où vous pouvez être abattus sur place ».

La menace fonctionna. Harrow et les deux gardes s’éloignèrent silencieusement dans la nuit.

Une fois qu’ils furent partis, Stryker se tourna vers Magnus. « Aleshko survivra-t-il ? »

« Harrow n’a causé aucun dommage permanent », déclara-t-il. « Il va récupérer ».

« Il y avait d’autres moyens d’obtenir ces informations », déclara Maddox en s’adressant à Magnus pour la première fois.

« Pas aussi rapidement », répondit Magnus. « J’ai fait ce qu’il fallait faire. Ce que le seigneur général n’a pas pu faire ».

« Soyez maudit, Magnus », dit Stryker. Il ne pensait pas que sa haine pour cette homme puisse devenir plus intense.

« Oui, que je sois maudit, pour que vous n’ayez pas à vous salir les mains, Seigneur Général », dit Magnus, ses yeux affichant enfin une pointe d’émotion. Colère. « Les hommes comme vous ont besoin d’hommes comme moi. Vous voulez que la guerre soit honorable et propres, alors que nous savons tous deux qu’elle ne l’est pas ». Il fit un geste en direction du chariot. « Voilà à quoi ressemble parfois la guerre, et parfois elle sauve plus de vies que toutes les glorieuses batailles sur Caen ».

Stryker avait fait des choses au nom de la guerre dont il n’était pas fier, mais il avait toujours pensé qu’il y avait une limite à ne pas franchir. Pour des hommes comme Magnus, cependant, cette limite n’existait pas. Une partie de lui, bien qu’à contrecœur, admettait que Magnus avait raison. Les informations qu’il avait obtenues d’Aleshko sauveraient probablement des vies cygnaréennes, mais il ne pourrait jamais approuver ses méthodes.

« Je pense que vous avez tort », déclara Stryker. « Je pense que les hommes comme vous font les choix qu’ils font parce qu’il est plus facile de s’abaisser au même niveau que votre ennemi et de considérer cela comme nécessaire plutôt que de donner l’exemple de ce que les hommes peuvent et devraient être ».

Magnus sourit. « Acceptons d’être en désaccord, monsieur », dit-il. « Maintenant, vous voulez que je vous informe ou pas ? »

« Vous avez désobéi à un ordre direct », dit Stryker, puis « Demandez pardon ».

Le sourire de Magnus s’effaça. « Quoi ? »

« Demandez mon pardon ou j’invoquerai mon droit de vous exécuter ». C’était un pari. Magnus était déjà irrité de servir sous son commandement, mais admettre son autorité si ouvertement, si docilement, était un coup dont il ne se remettrait pas promptement. Bien sûr, Stryker était dans une impasse ; si Magnus refusait, il devrait le tuer.

« Vous n’êtes pas sérieux ». Mais Magnus hésité, jetant un regard noir au seigneur général, tous deux silencieux pendant une longue minute. Puis Magnus dit : « Vous voulez m’entraîner au sein de votre temple de moralité égocentrique ».

« Vous allez au moins regretter du bout des lèvres votre désobéissance et votre immoralité ». Stryker toucha la poignée de Vif-Argent. « Demandez pardon ».

Un filet de sueur coulait sur le front de Magnus et se mêlait au sang de son nez. Il serra et desserra les poings.

« Pardonnez-moi, Seigneur Général », dit-il enfin. Il détourna le regard.

« Pardonner quoi ? » demanda Stryker. Un changement subtil s’était produit dans la tension les entourant ; l’équilibre des forces avait changé. Stryker était à nouveau aux commandes, il ne se contentait plus de réagir à Magnus.

Les yeux de Magnus se rétrécirent de fureur, mais il se maîtrisa. « Pour ma désobéissance ».

« Pour avoir torturé Aleshko », poursuivit Stryker. Son ton, condescendant mais ferme, avait clairement mis Magnus en colère, mais le pragmatisme froid qui le caractérisait se manifesta.

« Pour avoir torturé le prisonnier », déclara Magnus. « Et obtenir des informations vitales pour notre missions ». C’était un petit défi, mais Stryker le laissa passer. Il avait ce qu’il voulait. Pour l’instant. « Pouvons-nous revenir aux affaires en cours, maintenant ».

« Ce n’est pas fini, Magnus », dit Stryker.

« Non, probablement pas », répondit Magnus. Ses lèvres se retroussèrent en un sourire fatigué. « Vous et moi serons une épine dans le pied de l’autre jusqu’à ce que l’un de nous meure ».

Pour une fois, Stryker fut entièrement d’accord avec le warcaster.
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Roman - Poudrière
« Réponse #19 le: 29 septembre 2024 à 19:02:36 »

- 19-
Campement Cygnaréen, Llael Libre


LA GRANDE TENTE AU CENTRE
du campement cygnaréen était spacieuse, suffisamment grande pour accueillir tous les officiers supérieurs de Stryker et un certain nombres leurs aides importants. Ils se tenaient autour d’une grande table, sur laquelle était étalée la carte de Croix-des-Fleuves.

« Nous avons recueilli des informations vitales sur les défenses khadoréennes à Croix-des-Fleuves, et le Général Magnus et moi même avons élaboré un plan d’attaque », déclara Stryker, croisant les regards des hommes et femmes l’entourant.

« Monsieur, comment avez-vous obtenu ces informations ? Aleshko a-t-il craqué ? » demanda un grand et robuste jeune commandant. Il s’agissait du Major Tobias Johnson, une étoile montante de l’armée cygnaréenne et un membre haut placé du SRC, le Service de Renseignement Cygnaréen, au sein de l’Armée.

Stryker avait tenu secrète l’affaire avec le Seigneur Aleshko, mais ses officiers savaient qu’un nombre de kayazy avaient été capturés. Il ne voulait pas que ses hommes sachent ce que Magnus et Harrow avaient fait pour faire parler l’homme. En fait, il voulait l’oublier lui-même. Aleshko avait survécu à l’interrogatoire d’Harrow, et ses blessures étaient relativement légères.

« Oui, l’un des hommes du Général Magnus est doué pour les interrogatoires, et les informations d’Aleshko se sont avérées valables », déclara Stryker. Sa poitrine se serra à l’idée de nommer Harrow autrement que comme un tueur brutal et insensible.

Le Major Johnson acquiesça, il était clair qu’il comprenait que le mont interrogatoire signifiait beaucoup plus que questionnement ici, et il ne dit rien de plus.

« Nous savons qu’Harkevich a piégé le pont avec des explosifs contenant un agent alchimique inconnu », dit Magnus, reprenant là où Stryker s’était arrêté. Aleshko ne savait pas quel type d’agent Harkevich utilisait, seulement que c’était quelques chose que le prisonnier n’avait jamais vu auparavant. Magnus avait assuré à Stryker qu’un de ses hommes, un ancien alchimiste de l’Ordre du Creuset d’Or, pourrait probablement identifier la substance. C’était encore une autre raison pour laquelle Magnus n’avait pas été enchaîné ; Stryker doutait qu’il puisse convaincre les hommes fidèles aux warcaster de suivre ses ordres s’il avait arrêté Magnus. Il déserteraient probablement à la première occasion. « Ce que nous ignorons, c’est la location exact de ces explosifs sur le pont ».

« Alors, nous sommes de retour à la case départ », dit le Capitaine Tews. « Nous ne pouvons pas attaquer le pont ».

« Pas exactement, Capitaine », répondit Stryker. « Le Seigneur Alesho possède une petite flotte de navires marchands, que nous nous sommes appropriés. Chacun de ses navires peut contenir cinquante hommes et tout leur équipement et leur faire traverser le fleuve.
Tews acquiesça. « Et ensuite ? »

« La meilleure façon de désamorcer ces explosifs est depuis de l’autre côté du pont », dit Magnus. « Je mènerai la force qui traversera le fleuve, et nous pénétrerons dans la ville par l’ouest. Ils ne s’attendront pas à une attaque par là, et les khadoréens seront distraits. Mon homme pourra identifier l’agent alchimique une fois sur place ».

Stryker n’était pas très enthousiasmé par cette partie du plan. Il n’était pas du tout enthousiaste à l’idée de travailler avec Magnus, mais il devait sauver les apparences. Pour l’instant, Magnus était toujours un général de l’Armée Cygnaréenne, et Julius l’avait choisi personnellement pour diriger une partie de la force d’invasion.

Attaquer la ville des deux côtés à la fois était stratégiquement logique, mais Magnus avait insisté pour que la petite force traversant le fleuve soit composée de ses propres hommes, ceux qui l’avaient servi pendant son exil. Il ne faisait aucun doute que nombre de ces hommes étaient doués pour les opérations secrètes, car Magnus n’avait eu d’autre choix que de se déplacer en toute discrétion lorsque l’ancien roi cygnaréen, Leto Raelthorne, le poursuivait, mais tous n’étaient guère plus que des mercenaires déguisés dont la loyauté allaient à Magnus et non au Cygnar. Il ne pensait pas que Magnus le trahirait, mais uniquement que si l’un d’eux échouait, cela signifiait la destruction de l’autre. Ses hommes, en revanches … Magnus faisait trop confiance à des hommes comme Harrow, des hommes qui n’avaient d’autres maîtres que l’argent et leurs propres pulsion. Stryker avait besoin de quelque chose pour équilibrer cela.

« Capitaine Tews, vous accompagnerez le Général Magnus, ainsi que quatre de vos meilleurs éléments ».

Les yeux du grand Lame-Tempête s’écarquillèrent, puis une expression de dégoût et de résignation s’installa sur son visage. « Oui, monsieur », prononça-t-il.

« Heureux de vous avoir à bord, Capitaine », dit Magnus d’un ton égal. Il devait se douter pourquoi Stryker incluait le capitaine Lame-Tempête, mais peut-être considérait-il Tews comme un atout et non comme un chien de garde.

Stryker poursuivit le briefing. « Pendant que le Général Magnus pénètre dans la ville par l’ouest, le Colonel Bartlett et moi mèneront sur le pont. Nous allons leur lancer tout ce que nous avons, donnant ainsi à la force de Magnus le temps d’atteindre le pont et de neutraliser les explosifs ».

« Morrow, il faut que notre coordination soit bonne, sinon Harkevich va nous éjecter dans le fleuve », déclara Bartlett. C’était une grande femme d’une trentaine d’années, aux cheveux noirs striés de gris. Elle était un chevalier avec une noble lignée et un excellent commandant de l’Armée Cygnaréenne sur le champ de bataille.

« Vous avez raison, bien sûr », dit Magnus. « Le choix du moment sera déterminant. S’il fait exploser le pont, mes hommes seront piégés dans la ville et massacrés. Alors, faisons les choses correctement du premier coup, hein ? »

« C’est le moment, tout le monde. C’est notre unique chance », poursuivit Stryker, répondant aux regards interrogateurs de ses officiers. « Harkevich sait très probablement que nous détenons Aleshko, nous devons donc frapper avant qu’il ne puisse renforcer ses défenses ou obtenir des renforts de Rynyr ».

Un murmure d’assentiment parcouru les officiers rassemblés. C’étaient tous de bons soldats et il avait la plus grande confiance en eux.

« Et quel sera mon rôle dans cette attaque ? » demanda Vayne di Brascio. Il avait tranquillement écouté le briefing. Stryker l’avait invité à y assister plus par respect pour l’homme qu’autre chose, mais di Brascio était aussi un soldat, et il n’appréciait pas d’être laissé pour compte.

« Capitaine di Brascio, je suis reconnaissant pour l’aide que vous et la Résistance avez apportée jusqu’à présent, mais je ne peux pas vous demander de risquer votre vie et celle de vos hommes dans un assaut frontal », dit Stryker.

Vous vous souvenez de ce que je vous ai dit à la Tour Gris-vent » dit di Brascio avec un sourire torve.

« Je m’en souviens. Et vous n’êtes pas sous mon commandement ».

« Alors, je vous verrai à Croix-des-Fleuves », répondit le mage balisticien llaelais en sortant de la tente. De nombreux officiers jetèrent des regards confus sur le capitaine de la Résistance ; il était un personnage un peu énigmatique, mais Stryker estimait que leurs chances étaient un peu meilleurs avec l’habile mage balisticien llaelais à ses côtés.

« D’accord ». Magnus et ses hommes partiront ce soir et traverseront le fleuve. Les navires sont équipés et prêts à partir. Le reste d’entre nous marchera à l’aube et atteindra le pont en milieu de matinée ». Stryker regarda Magnus. « Une fois que nous aurons atteint le pont, j’estime que v ous aurez environ trois heures pour retirer les explosifs »

« Nous serons là », répondit Magnus. « Mais je ne me plaindrai pas si vous pouviez me faciliter la tâche en tuant autant de khadoréens que possible avant que nous y arrivions ».

Stryker ignora la pointe d’humour, principalement parce qu’il savait combien de cygnaréens rejoindraient les khadoréens décédés. « Vous savez tous ce qu’il faut faire. Alors, mettons-nous au travail », dit-il. « Rompez ».

La tente se vida rapidement, les officiers s’empressant de préparer l’assaut. Il serait inondé de rapports dans les deux heures à venir concernant leurs progrès.

Magnus s’attarda, comme Stryker s’y était attendu. « Vous ne me faites toujours pas confiance, n’est-ce pas ? » dit-il quand ils furent seuls.

Si vous me demandez si je pense que vous allez ignorer mes ordres quand cela vous arrange, alors non, je ne le pense pas. Si vous me demandez si je pense que vous êtes assez stupide pour commettre à nouveau une haute trahison avec un roi que vous soutenez sur le trône, … Eh bien, je ne pense pas que vous soyez stupide », déclara-t-il.

« Trahison, hein ? » Magnus eut un mince sourire. « Si vous vous souvenez bien, je soutenais le roi légitime, je me défendais contre un coup d’état, quand j’ai été qualifié de traître. Je soutiens toujours le roi légitime. La seule différence, c’est que mon opinion et ma loyauté sont désormais populaires ».

« C’était un tyran, et le Cygnar vivait dans la peur avec Vinter sur le trône. Je me souviens que vous étiez l’architecte de cette peur, que vous la répandiez et la nourrissiez », déclara Stryker. Il ne criait pas, mais ses paroles étaient formulées dans un murmure forcé, minimal et impératif. « Pouvez-vous vraiment dire que le Cygnar n’a pas été mieux loti sous Leto ? »

« Ce n’est pas à moi de juger, ni à vous », déclara Magnus. « Nous sommes des soldats. Nous faisons de notre mieux pour servir nos rois même lorsque nous ne sommes pas d’accord avec eux ».

C’était la première fois qu’il entendait Magnus laisser entendre qu’il n’était pas d’accord avec les méthodes de Vinter. Cela le surpris. « Non, vous vous trompez. Il est de notre devoir en tant que soldats et serviteurs de Morrow de protéger le Cygnar et de lutter pour protéger les innocents ».

« C’est ce que nous faisons ici ? Protégez les innocents ? »

Stryker détourna le regard. C’était une remarque juste. Ils étaient une armée d’invasion, et même si leur cause était juste, il ne pouvait pas dire avec certitude que son but l’était. « C’est ce que je fais », dit-il, « au mieux de mes capacités. Et tant que vous porterez cet uniforme sous mon commandement, vous ferez de même ».

Magnus le regarda, ses yeux évaluant. Finalement, il dit. « Ce n’est pas son père, vous savez. Julius ».

Stryker dut réfléchir attentivement à ses prochaines paroles. Magnus connaissait ses sentiments à l’égard du jeune roi et il pourrait l’entraîner dans des propos séditieux. Sa position auprès de Julius était déjà précaire. « D’après mon expérience, la pomme ne tombe jamais loin de l’arbre ».

« C’est vrai ? Dites-moi, l’homme qui se tient devant moi ressemble-t-il à son père ? J’ai combattu avec lui pendant plus de dix ans. Il était habile et courageux, mais son coeur n’était pas celui d’un guerrier ».

L’évocation de son père le frappa durement. Joseph Stryker était un mékano de warjack, servant au sein de l’Armée Cygnaréenne sous les ordres du Commandant Magnus. Joseph avait été horriblement blessé lors des tristement célèbres Invasions Schardes, lorsque l’Empire du Cauchemar avait envahi les côtes occidentales de Cygnar, et il avait été démis de ses fonctions. Il ne s’en était jamais remis et avait développé une répugnance pour la guerre, ainsi que pour les hommes qui la pratiquaient. « Il ne fut plus le même après son retour, après avoir combattu sous votre commandement », déclara Stryker. « Et il ne s’est jamais remis de la mort de ma mère ».

Quelque chose passa sur le visage de Magnus, adoucissant momentanément sa féroce sévérité. Était-ce du regret ? Du Chagrin ? « Sa mort nous a tous affectés ».

Stryker agita une main dédaigneuse. « Général, j’ai fini de ressasser le passé. Rompez ».

Magnus s’attarda un instant, et Stryker se demanda s’il allait désobéir. Puis il sourit. « Bonne chance pour demain, Seigneur Général ».

Stryker ne répondit rien et fixa la carte sur la grande table jusqu’à ce que Magnus soit parti. Il n’est pas son père. Julius était féroce et têtu, mais il n’avait pas encore fait montre du penchant pour la cruauté de son père. Cela viendrait-il avec le temps ? Magnus allait-il encourager la tyrannie chez le jeune roi ?

Il écarta cette idée, sortit et se dirigea vers sa propre tente. Il avait besoin de dormir, même si les spectres du passé le tiendrait éveillé longtemps.
« Modifié: 07 octobre 2024 à 00:23:27 par elric »
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« Réponse #20 le: 07 octobre 2024 à 00:27:57 »

- 20-
Campement Cygnaréen, Llael Libre, 28 Solesh, 611 AR


STRYKER SE TROUVAIT À LA TÊTE d’une longue colonne de soldats et de warjacks. Ils serpentaient derrière lui sur plus d’un kilomètre à travers le paysage meurtri llaelais. Bien que la Résistance contrôlait cette partie du pays, les preuves de l’agression khadoréenne étaient visibles partout. Ils passaient souvent devant les ruines de petits villages, et il y avait un sentiment permanent de vide mettant Stryker mal à l’aise.

Maddox chevauchait à côté de Stryker, luttant pour contrôler  son cheval et jurant tout bas. Elle n’était pas une habile cavalière et sa monture servait simplement à la transporter. Comme la plupart des Lames-Tempête, elle combattait à pied.

Lui aussi avait passé une grande partie de sa carrière militaire au sein de l’infanterie, mais ces dernières années, il avait appris à apprécier la cavalerie. Il s’était battu à de nombreuses reprises parmi les Lances-Tempête, ces cavaliers lourds cygnaréens équipés de mortelles électro-lances capables de générer de dangereux éclairs. Sa propre monture avait été spécialement élevée pour porter la lourde barde la protégeant de cela, ainsi que le considérable poids d’un warcaster en amure complète. Autant Stryker était ravi de contrôler un warjack, autant il y avait quelque chose à dire que le fait de balancer une lame depuis le dos d’un cheval de guerre entièrement bardé.

Ils suivaient le fleuve et la ville de Croix-des-Fleuves se profilait au nord-est. Les triples tours du pont de la Grande Porte apparaissaient, de grands monolithes de pierres lourds renforcées par un blindage d’acier suffisamment solide pour repousser les tirs de canons légers. Stryker se retourna vers la colonne, surplombée par deux Murs-Tempête, des warjacks de dix mètres de haut propulsés par une combinaison de vapeur traditionnelle et d’énergie galavanique. Chacun d’eux était armé de deux canons lourds, d’une paire de mitrailleuse à grande vitesse et de poings chargés d’énergies voltaïque capables de détruire un bâtiment. Ils étaient impressionnants, terrifiants pour l’ennemi, mais il fallait les approcher suffisamment pour qu’il soient efficaces, et les Conquêtes d’Harkevich avaient une meilleure portée avec leurs propres canons.

Ils pouvaient déjà entendre le bruit sourd des canons khadoréens, ainsi que le gémissement strident des obus d’artillerie tombant. Des éléments de l’Armée Cygnaréenne, principalement des pionniers, étaient allés de l’avant, préparant des emplacements d’artillerie et mettant en position des warjacks lourds armés d’armes à longue portée - comme les Défenseurs et les Chasseurs. Leur tâche serait simple : tirer suffisamment de projectiles sur les khadoréens pour offrir à Stryker et à ses Lances-Tempête une chance de s’approcher suffisamment pour charger sur le pont. Derrière lui viendrait Maddox, à la tête de l’infanterie Lame-Tempête et des fusiliers pionniers, pour occuper les tireurs embusqués khadoréens dans les tours.

Stryker freina sa monture et fit signe aux Lances-Tempête derrière lui de faire de même. Chacune montait un cheval de guerre lourdement bardé comme le sien, et tous étaient des chevaliers des plus habiles, à la fois avec leurs dévastatrices lances et avec la demi tonne du cheval le portant. L’un des chevaliers se détacha des autres et s’approcha de Stryker.

« Colonel », déclara Stryker, « ils vont nous lancer tout ce qu’ils ont quand nous attaquerons ce pont, et vous et moi devons faire un trou assez grand pour que Maddox et ses Lames-Tempête puissent passer à travers.

Bartlett répondit : « Tant que les ‘jacks peuvent nous faire un trou, tout cela fait partie du job d’une journée, Seigneur Général. Chevauchez droit dans les dents des canons et des tireurs embusqués et essayer de ne pas vous faire tuer ». Elle sourit.

Stryker rit. Il avait toujours aimé le colonel ; elle avait un sens de l’humour sinistre la rendant très populaire auprès des autres chevaliers. Elle était aussi une véritable meurtrière à la lance et à l’épée. « Ne vous inquiétez pas, Maddox et moi allons faire notre trou ».

« Pensez-vous que le Général Magnus s’en est sorti ? » demanda Maddox, se déplaçant inconfortablement sur sa selle. « Je n’ai pas envie de me prendre un bain dans le fleuve. Il a l’air glacial ».

« Pas moyen de le savoir », déclara Stryker. « Mais je répondrai ceci, malgré mes réserves sur son caractère, le Général Magnus est l’un des combattants les plus ingénieux de Caen ».

Bartlett ricana. « Quand il se bat pour le Cygnar ; sinon, c’est un dangereux et sanglants tueur mercenaire ». C’était l’autre raison pour laquelle Stryker aimait le colonel – elle partageait sa haine pour le général récemment gracié.

« Comme je l’ai dit lors du briefing, s’il échoue, nous aurons tous des ennuis. J’attends au moins de lui qu’il s’efforce de sauver sa propre vie ».

Maddox lui lança un regard désapprobateur. Il était clair qu’elle ne pensait pas qu’il était approprié de parler d’un autre officier, même de Magnus, devant ses subordonnés. Il tut le reste de ce qu’il voulait dire – elle avait raison, comme d’habitude. « Maddox, avance et assure-toi que le reste des Lames-Tempête sont prêtes pour l’assaut ».

« Ils le seront, monsieur », répondit-elle, puis elle éperonna son cheval et partit.

« Prêt, Colonel ? » demanda Stryker à Bartlett et il regarda derrière elle les vingt Lances-Tempête attendant leurs ordres. Leurs visières étaient relevées, leurs armures bleu vif brillaient sous le soleil du matin. Ils étaient affûtés et enthousiastes, tout comme leur commandant.

« Absolument, Seigneur Général. Faisons gronder le tonnerre ».

* * *

STRYKER AVAIT SOUVENT ENTENDU l’expression « Au combat, il n’y a pas de loi ». Il n’avait jamais été d’accord avec cela ; il y avait de nombreuses lois et règles régissant la guerre. Ce qui manquait, c’était la notion du temps. Au combat, on n’avait pas le temps. Il avait déterminé que le monde rétrécissait et que le flux des minutes et des secondes semblait disparaître, nous laissant dans un vide intemporel où la vie et la mort se mesuraient en fonction de l’habilité, du temps de réaction et de la chance.

La dernière partie de cette équation s’était manifestée à vingt verges du pont. Bartlett et lui chargèrent le petit talus devant le grand pont, les Lances-Tempête chevauchaient derrière eux en un coin serré, les obus d’artillerie cygnaréennes sifflant par-dessus leur tête. Il aperçut l’un des Conquêtes à l’extrémité du pont, à travers les doubles herses des tours leur barrant le passage – un monstre d’acier rouge et de canons noirs – se retournait, les doubles canons sur son dos pivotant dans leur direction. Il entendit la tonitruante explosion de ses tirs, et puis plus rien.

Il s’était préparé à l’impact, s’attendant à une bouffée de chaleur et de pression. Au lieu de cela, il entendit Bartlett rire alors qu’ils parcouraient les dernières verges jusqu’au pont. Elle pointa du doigt devant eux. L’énorme obus du Conquête dépassait du sol telle un javelot court et gros. Un raté.

« Si ce n’est pas un signe de Morrow, je ne sais pas ce que c’est », cria Bartlett.

Stryker espérait qu’elle avait raison. Il tourna son attention vers les trois warjacks se déplaçant devant eux, deux Défenseurs armés de canons longs et de marteaux lourds disruptifs et Arsouye armée uniquement de ses poings. Stryker avait fait déboulonner le marteau sismique de sa main droite. C’était tout simplement trop dangereux d’avoir une telle arme sur un pont truffé d’explosifs. La déception d’Arsouye d’avoir perdu son marteau était évidente alors qu’il balançait son bras droit d’avant en arrière avec irritation.

Il y avait une centaines de verges de pont entre eux et la première tour. La herse était abaissée, et derrière elle, Stryker pouvait voir les imposantes formes rouges des Troupes de Choc Man-O-War, d’expérimentés chasseurs enfermés dans une armure à vapeur découplant leur force et leur résistance. Ils étaient prêts à intervenir si les cygnaréens venaient à percer une brèche dans la tour. La tour s’élevait au-dessus de sa tête, trapue et bardée d’acier. Des canons de fusils sortaient des nombreuses fentes parsemant sa surface. Les projectiles de ces armes pleuvaient sur les Défenseurs, mais leur blindage était trop lourd pour que les tirs d’armes légères puissent les affecter, et les projectiles ricochaient sur eux.

Les warjacks atteignirent le pont avec Stryker avec ses Chevaliers-Tempête juste derrière eux, et les Conquérants ne tiraient plus sur eux de peur frapper le pont et de le faire s’effondrer.

Stryker joignit les Défenseurs et leur ordonna de s’arrêter à trente verges de la porte. Feu ! Exhorta-t-il, et la double détonation de leurs canons retentit. Les lourds projectiles défoncèrent al herse et les trois Man-O-War s’y trouvant ; ils se désagrégèrent en morceaux d’armure et de chair sanglante.

« Attrape-les, Arsouye », prononça Stryker dans sa barbe et le Cuirassé lâcha un jet de vapeur triomphant avant de foncer sur la porte. Les Man-O-War se remettaient encore des explosions des Défenseurs, ce qui permit à Arsouye d’atteindre la porte, Le warjack enroula ses mains autour des barreaux de la herse et tira. L’acier gémit et plia sous la titanesque force d’Arsouye, et la porte fini par se détacher.

Pousse-là, encouragea Stryker et Arsouye plaqua son poids sur la herse détachée, la faisant tomber dans la cour sous la tour. Il invoqua sa magie et jeta un sort de bouclier sur Arsouye, juste au moment où les Man-O-War ouvraient le feu sur le warjack avec leurs canons boucliers. Une demi-douzaine de projectiles frappèrent Arsouye, mais son épais blindage et le sort de Stryker annulèrent la plupart des dégâts. Stryker envoya alors les Défenseurs se précipiter à l’intérieur, et derrière lui, il entendit les rafales saccadées des mitrailleuses du Cyclone tandis que Maddox parsemait la tour de balles, forçant les tireurs embusqués à se cacher à l’intérieur ou à être mis en pièce.

« Baissés lances », cria Stryker, haussant la voix pour se faire entendre la cacophonie du bombardements d’artillerie. À côté de lui, les Lances-Tempête abaissèrent leur électro-lances en position. Il ne maniait pas de lance, mais il place Vif-Argent dans la même position.

Ils étaient à dix verges de la herse, et ils lancèrent leurs montures au galop.

Le gémissement cyclique des mékanismes voltaïques à l’intérieur de chaque Lances-Tempête hurla à l’unisson, et vingt et un éclairs d’électricités bleue brillante jaillirent des chevaliers chargeant. Stryker ajouta la décharge électrique de Vif-Argent à la volée, poussant sa volonté dans l’explosion, augmentant son intensité grâce à sa force arcanique. Les éclairs crépitèrent autour des warjacks à l’intérieur de la cour et percutèrent les Man-O-War, tuant ou blessante une demi-douzaine d’entre eux.

Puis ils passèrent à travers l’arche de la tour et pénétrèrent dans une vaste cour. Les Man-O-War avaient verrouillé leurs boucliers en ligne serrée contre les trois warjack, mais ils étaient tout simplement dépassés. Arsouye avait remplacé son marteau manquant en saisissant un Man-O-War d’une main et en utilisant le malheureux khadoréen comme une massue, fracassant le corps armuré du soldats contre les ennemis l’entourant, et transformant rapidement son arme de fortune en une épave réduite en bouillie.

Les Lances-Tempête frappèrent ensuite et Stryker fut le premier à atteindre un ennemi. Il dépassa Arsouye et abattit Vif d’un brutal coup, portant toute sa force et l’élan du cheval dans la frappe. Le Man-O-War qu’il visait leva son bouclier pour parer le coup, mais Vif le traversa de part en pat, son tranchant arcanique transperçant l’acier et pénétrant dans le casque du khadoréen, lui tranchant la tête en deux.

Les Lances des Chevaliers derrière lui étaient presque aussi efficaces. Il jeta un coup d’oeil à sa droite alors que Bartlett embrochait un Man-O-War, soulevant du sol près d’un quart de tonne d’homme et d’armure. Ce fut un coup mortel, mais il brisa sa lance en deux, ne lui laissant que la poignée en forme de hache pour se défendre.

Ils avaient traversé les rangs de Man-O-War, tuant de nombreuses personnes. Ils avaient également subi des pertes : trois Lances-Tempête avaient été abattues par les redoutables Exterminatrice khadoréennes, des armes conçues pour pénétrer le blindage des warjacks. Au-dessus d’eux, les tirs des tireurs embusqué reprirent alors que Maddox, les rangs des Lames-Tempête et les deux Cyclones remontaient le pont derrière la charge initiale de Stryker.

Il y eut un moment chaos rouge tandis que la cour s’embrasait. Les hommes et les chevaux hurlaient, le choc de l’acier sur l’acier résonnait, et la puanteur des décharges voltaïques se mêlait de manière nauséabonde à la saveur cuivrée du sang. Les warjacks faisaient des rages sur l’ennemi et bientôt les corps écrasés de Man-O-War jonchèrent la cour.

Maddox et ses forces pénétrèrent  dans la cour peu après la fin de la bataille, bien que ses Cyclones soient restés à l’extérieur, parsemant la tour au-dessus de rafale de mitrailleuse. « Ils vont débuter le bombardement de cette tour », déclara-t-elle. Les Conquètes et plus d’une demi-douzaine de warjacks Destroyers plus petits étaient visibles à l’autre bout du pont, à travers les herses des tours restantes. « Je suis sûre qu’ils discutent de la valeur de la vie des hommes se trouvant à l’intérieur ». Elle désigna l’étage de la tour au-dessus d’eux, où se trouvaient jusqu’à cinquante soldats et tireurs embusqué khadoréens.

Stryker hocha la tête. « Alors faisons venir les warjacks ici. Je veux des Défenseurs dans cette tour immédiatement pour donner matière à réflexion à ces Conquêtes.

Les yeux de Maddox prirent un regard vide et lointain Elle se connectait aux cortexes des warjacks lui étant assignés. Après quelques secondes, elle revint à elle. « Compris, monsieur ». Stryker observa la tour suivante. Comme la précédente, la herse était abaissée, et il pouvait voir des formes rouges se déplacer derrière elle.  Plus loin, il pouvait voir les troupes khadoréennes, la Garde des Glaces, apparemment, traverser le pont en direction de la deuxième tour.

Des pionniers remontaient le pont derrière Stryker. Ils sécuriseront la tour, élimineront les derniers tireurs embusqué et aideront à la tenir pendant que Stryker avancera. « Les renforts son en route », dit Stryker à Maddox. « Une fois que nous nous serons emparé de la seconde tour, avancez et continuer à bombarder les Conquêtes à partir de là ».

« On va se frayer un chemin dans la ville, hein ? » dit Maddox. « Cela vous semble-t-il un peu trop facile de prendre cette tour, monsieur ? »

« Oui », déclara Stryker. « Harkevich nous veut sur le pont. Si les choses tournent mal aux deux tours suivantes, où doit le trouver le gros de ses forces, il peut tout faire sauter, nous éjecter dans le fleuve et réduire ses pertes ».

« C’est aussi ce que je pense », dit Maddox.

« Avec un peu de chance, Magnus mettra un frein au plan d’Harkevich ». Il essayait de donner l’impression qu’il le croyait. Les chevaliers autour de lui avaient besoin d’entendre ça. Il se tourna vers Bartlett. « À cheval ».
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« Réponse #21 le: 07 octobre 2024 à 00:33:57 »

- 21-
À l’Est de Croix-des-Fleuves, Llael Occupé

ASHETH MAGNUS SE SENTAIT NU ET VULNÉRABLE sans son armure de warcaster. Il l’avait laissé derrière lui parce qu’avec elle il serait immédiatement reconnaissable, et la furtivité était désormais la clé.

Ils avaient trouvé une section du mur extérieur côté ouest de Croix-des-Fleuves qui n’avait pas été réparée. Ils avaient attendu que le bruit de l’artillerie vienne troubler l’air matinal, puis étaient entrés, lui et dix autres hommes. Il en avait emmené trois cents avec lui de l’autre côté du fleuve ? Mais ils patientaient en réserve à environ à un kilomètre six cents mètres de la ville, attendant le signal pour attaquer la ville une fois que les explosifs sous le pont auraient été désamorcés.

Il était accompagné de neuf de ses meilleurs éléments, dont Harrow,et d’un seul capitaine Lame-Tempête en colère avec lequel le Seigneur Général Stryker l’avait enchaîné. Tews était un soldat compétent – il avait servi comme Lame-Tempête pendant près de vingt ans – mais il n’était avec eux que pour une unique raison. Il était le chien de garde de Stryker. Magnus comprenait les motivations du seigneur général, mais il aurait préféré envoyer ce mage balisticien llaelais, di Brascio, à la place. Au moins il avait quelques notions de furtivité et d’opérations secrètes. La vitesse et la discrétion étant primordiales, Tews s’était débarrassé de sa volumineuse armure Lame-Tempête et de son glaive-tempête pour se vêtir d’un indescriptible cuir bouilli et maniait une grande épée caspienne. Le poids et les dimensions de l’arme étaient similaires à ceux de son glaive-tempête.

Ils étaient à l’intérieur de la ville, accroupis dans les ruines d’une petite maison. Il avait envoyé Harrow et trois de ses meilleurs éclaireurs en reconnaissance de la zone et déterminer le nombre de soldats présents.

Ses genoux lui faisaient mal, son dos lui faisait mal, et seule la lourde attelle à sa jambe droite lui permettait de marcher sans boiter du tout. Ce n’était là qu’une partie du tribut que les années de guerre et d’exil avaient fait payer à son corps. Son armure apportait un certain soutien à ses membres meurtris, mais sans elle, le poids de ses cinquante-cinq ans reposait sur ses épaules. Il fléchit sa main mékanique, fronçant les sourcils en entendant les légers grincements qu’elle émettait. L’un des relais galvaniques avaient besoin d’être ajusté ; il faudrait qu’il s’en occupe bientôt.

Magnus leva les yeux et remarqua que le Capitaine Tews le regardait depuis l’autre côté de la pièce jonchée de décombres, ses yeux profondément enfoncés étant remplis d’un mélange de colère et de dégoût. C’était un regard auquel Magnus s’était habitué depuis son retour en Cygnar. « Quelques chose vous préoccupe, Capitaine ? »

« Je me souviens quand et pourquoi vous avez eu ce bras, Général », répondit Tews.

« C’est vrai » dit-il d’un ton égal.

« Je m’en souviens parce que vous étiez à deux doigts de m’abattre, moi et toute mon escouade », dit-il en haussant le ton.

Certains des hommes de Magnus remuèrent et leurs mains se posèrent sur leurs armes. C’étaient tous d’anciens mercenaires, promus à différents grades parmi les pionniers à sa demande. Ils lui étaient fidèles et ils tueraient pour lui sans doute aucun. Il leva sa mains, celle encore de chair et de sang. Tews avait besoin de se défouler. Mieux valait le laisser faire maintenant que pendant le travail plus délicat qui l’attendait.

« Vous souteniez un renversement violent du roi légitime, Capitaine Tews », dit Magnus en souriant.

Il aurait tout aussi bien pu frapper le grand Lame-Tempête. Tews se leva, les poings serré sur le côté. Magnus maintint sa position. « Tu te souviens de cette partie ? »

« Nous avons renversé un tyran », répondit Tews, la mâchoire serrée. « Un tyran que vous avez servi sans poser de questions. Nous avons rendu le Cygnar meilleur, plus fort ».

Magnus se leva, refusant de grimacer à la douleur sourde traversant ses articulations. « Avez-vous vraiment amélioré le Cygnar ? » demanda-t-il. « Je pense que vous avez simplement déclenché une séquence d’événements ayant conduit à une guerre civile et davantage de morts cygnaréens ».

« Ce n’est pas vrai ». Les yeux de Tews s’enflammèrent. « Vinter était un monstre. Nous avons sauvé des vies en vous écartant du pouvoir, lui et vous ».

Magnus soupira. Il avait eu ce même argument plus de fois qu’il ne voulait l’admettre. Peu importe ce qu’il faisait maintenant ou peu importe que Julius lui fasse confiance, il ne serait jamais accepté par des hommes comme Tews. Ils avaient trop enduré, perdu trop d’amis. C’était fatiguant, un lourd fardeau que Magnus voulait simplement déposer pour se consacrer à rendre à Cygnar sa grandeur.

« Très bien », dit-il. « Vous avez exprimé ce que vous aviez à dire. Vous vous sentez mieux ? Allez-vous maintenant suivre mes ordres comme un vrai soldat ? »

« Je suis les ordres du Général Stryker », dit Tews. « Pas les vôtres ».

« Dois-je rappeler la chaîne de commandement ? Je suis un général nommé par le roi légitime de Cygnar. Votre roi. Vous suivrez mes ordres lorsque le général n’est pas présent. Vous pouvez me détester, vous pouvez maudire mon nom. Bon sang, si ça peut vous aider à vous sentir mieux, vous pouvez remplacer ‘monsieur’ par ‘salaud de traître’. Je m’en contre-fou. Mais ce que nous faisons ici est bien plus grand que toutes ces conneries mesquines semblant vous obséder, vous et … d’autres au sein de l’Armée Cygnaréenne. Êtes-vous d’accord avec ça, Capitaine ? »

Tews le regarda fixement, mais après un moment, il hocha lentement la tête.

Un mouvement détourna les yeux de Magnus du Lame-Tempête. Harrow et les trois hommes qu’il avait envoyés avec l’ancien mercenaire étaient de retour. Ils entrèrent discrètement dans la maison en ruine.

« Rapport », prononça Magnus.

« Comme vous l’avez dit, général », répondit Harrow. « L’attaque de l’autre côté du fleuve a regroupé la plupart des troupes de la ville dans la moitié est de Croix-des-Fleuves ».

« Bien. Nous bougeons immédiatement. Stryker doit avoir pris la première tour à l’heure qu’il est ».

Harrow pencha la tête. « Vous pensez que c’est le cas ? » La question n’était pas une question de militaire de carrière ; c’était une question de mercenaire. Elle exprimait le doute, voire le mépris. Magnus n’était pas le seul à avoir des cicatrices causées par Stryker.

« Le seigneur général est un chef compétent », déclara Magnus. Il le croyait, mais Stryker aurait pu être bien plus que cela. « Il réussira ».

« Eh bien, il appris des meilleurs, monsieur », dit Harrow avec un sourire en coin.

Tews laissa échapper un rire bref et aigu, attirant à nouveau l’attention de Magnus sur lui. Magnus soupira. « Alors, Capitaine, allez-vous suivre mes ordres ou dois-je vous laisser ici ? »

Les lèvres de Tews se retroussèrent de dégoûts et il serra les poings, mais il répondit : « Je suivrai vos ordres ».

Magnus sourit. « Je suivrai vos ordres quoi ? »

« Je suivrai vos ordres, espèces de salaud de traître … monsieur ».

« Excellent », répondit Magnus. « Allons-y ».

* * *

LES BRUITS ASSOURDISSANTS DE L’ARTILLERIE et le gémissement strident de leur chute mortelle emplissaient l’air à mesure qu’ils se rapprochaient de la Grande Porte. Ils avaient atteint la partie de la ville qui était en grande partie intacte et n’offrait que peu de couverture immédiate. Cependant, les rues étaient encombrées par les habitants fuyant les combats. Il n’était pas difficile de se déplacer parmi les citoyens paniqués et d’éviter l’attention des nombreux soldats khadoréens. Avec leurs armures et leurs armes quelconques, ils ressemblaient à des mercenaires comme il y en avait tant à Croix-des-Fleuves.

Les khadoréens avaient bâti un mur d’enceinte autour de l’entrée de la Grande Porte, et ils avaient fortifiés le corps de garde pour en faire une imposante structure de pierre recouverte d’acier.

Les troupes khadoréennes grouillaient autour d’elle, et trois imposants warjacks Juggernaut, un mortel moyen de dissuasion, se tenaient près de l’entrée. Au-dessus du mur d’enceinte se dressaient les formes gigantesques de deux Conquêtes. Magnus n’avait jamais vu de près l’un des gigantesques warjacks ; ils étaient impressionnants. Pour ponctuer ce point, les deux colosses tiraient avec leurs doubles canons montés sur la coque. Même à une centaine de verges de distance, l’onde de pression de la décharge lui faisait claquer les dents.

Ils étaient suffisamment proches pour que les troupes khadoréennes les remarquent s’ils s’approchaient. Il y avait un no man’s land bien défini entre la ville proprement dite et la grande porte.

« Là ». Magnus désigna une ruelle étroite entre deux bâtiments. Son petit groupe se fraya un chemin à travers la foule et disparut dans la ruelle. C’était le milieu de la matinée, mais il y avait suffisamment d’ombres pour les cacher à un simple coup d’oeil.

« Mon dieu, nous ne passerons pas à travers ce mur », dit Harrow.

« Ce n’est pas notre objectif », dit Magnus. « Les explosifs sont sous le pont ».

Il se tourna vers l’un des hommes de son groupe, un ordique grand et grêle au visage sérieusement brûlé. Il s’appelait Xavius, et comme Magnus, c’était un autre exilé, un homme qui avait été contrait de gagner sa vie en dehors des limites de la loi. Xavius avait été membre de l’Ordre du Creuset d’Or, un groupe d’arcanistes étudiant l’alchimie, la mékanique et d’autres connaissances ésotériques. La spécialité de Xavius était les explosifs, et les décombres carbonisés de la salle de la guilde de l’ordre à Corbhen témoignaient de son talent et de la raison pour laquelle son adhésion avait été révoquée de force.

« Xavius, jetons un œil à cette carte », dit Magnus.

L’alchimiste fouilla sous son plastron et en sortit un morceau de papier roulé, l’étala et l’aplatit contre un mur voisin. C’était un croquis tiré du plan de Croix-des-Fleuves, et il montrait le plan de la Grande Porte. Plusieurs croix avaient été tracées sur le pont – les endroits les plus probable pour les explosifs.

« Si je voulais faire péter le pont, c’est ici que je poserais les explosifs », dit Xavius. Sa voix tremblait, mais ne ce n’était pas de peur. C’était d’excitation. Xavius aimait son travail, peut-être trop. De plus, la perspective d’un agent alchimique attaché aux explosifs ne faisait qu’accentuer l’impatience de l’homme.

« Comment pouvons-nous les atteindre ? » demanda Tews. « Ils sont sous le pont ».

Xavius semblait confiant. « Nous n’avons pas besoin de les atteindre tous, juste un. Harkevich dois les faire exploser à distance, donc ils sont probablement reliés entre eux et câblés à un dispositif central de détonation sur le pont. Si nous parvenons à atteindre le premier, nous pourrons désactiver le premier, nous pourrons désactiver le dispositif de liaison et les désarmer tous ».

« Cela fait beaucoup de ‘si’ », déclara Tews. « Et s’il y a plusieurs détonateurs ? »

Xavius rit. « Un autre ‘si’ ? Les khadoréens ne sont pas si intelligents ». Tews n’avait pas l’air satisfait. « Magnus, c’est un pari trop important ; nous risquons tout sur l’intuition de cet homme ».

« J’en suis venu à faire confiance aux intuitions de Xavius, et il connaît son métier », dit Magnus. « S’il dit qu’ils sont tous reliés, je le crois. Vous devriez en faire autant ». C’était une demi-vérité. Xavius connaissait son métier, mais l’ordique fou serait probablement tous aussi satisfait de faire détonner les explosifs que de les désarmer.

« Celui-là, juste là, est le plus proche », dit Harrow en pointant une croix sur la carte, indiquant un explosif sous l’un des principaux piliers de soutien les plus proche du rivage. « Le kit d’escalade est assez solide, mais nous devons amener Xavius là bas sans qu’il se fasse tirer dessus.

« Je peux faire quelque chose », dit Magnus. « Je vais l’accompagner. Les autres, trouvez un abri près de la rive. Nous pourrions avoir besoin de vous pour faire diversion ».
« Quel genre de diversion ? » demanda Tews.

« Faites en sorte qu’ils vous tirent dessus, Capitaine, pour qu’ils ne nous tirent pas dessus », répondit Magnus.

Tews blêmi, mais il acquiesça.

« Tout le monde à compris ? » demanda Magnus. Hochement de tête. Il sortit sa montre à gousset. « Nous avons environ trente minutes pour y parvenir ou Harekvich envoie Stryker dans le fleuve ».

« Pourquoi se presser, alors ? » dit Harrow en souriant, suscitant un regard meurtrier de la part de Tews.

« Cela suffit », prononça Magnus. « Si le seigneur général ne réussit pas, nous serons piégés derrière les lignes ennemies. À quel point as-tu envie de te familiariser à nouveau avec les méthodes de torture khadoréennes ? »

Le sourire disparut du visage d’Harrow. « Je pense avoir tout appris de ces foutus bâtards la dernière fois ».

Magnus se détourna. « Capitaine Tews, vous prenez le commandement pendant que Xavius et moi rendons sur le pont ».

Tout le monde eut l’air choqué, mais Tews était l’officier supérieur, et malgré l’aversion de la Lame-Tempête pour Magnus, Tews était fiable.

« L’heure tourne, messieurs », poursuivit Magnus. « Allons-y ».
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« Réponse #22 le: 13 octobre 2024 à 21:49:30 »

- 22-
À l’Est de Croix-des-Fleuves, Llael Occupé

LE HURLEMENT DES MITRAILLEUSES DES CYCLONES fut le bienvenu lorsque Stryker et les Lances-Tempête sortirent de l’abri de la première tour pour se diriger vers la troisième, après s’être occupé de la deuxième. La surface devant lui se couvrit d’étincelles lorsque des centaines de balles s’y écrasèrent. Certaines balles rencontrèrent plus que de l’acier et de la pierre, et quelques canons de fusil en saillie disparurent par diverses fentes.

Malgré le tir de couverture des Cyclones, le bouclier arcanique de Stryker s’illumina autour de lui alors que les balles le frappaient. Certaines d’entre elles pénétrèrent, mais le champ d’énergie généré par la turbine arcanique dans son armure draina suffisamment de leur énergie cinétique mortelle pour qu’elles ne pénètrent pas l’armure en dessous.

L’attaque de la deuxième tour s’était déroulée de la même manière que la première. Ils avaient percé une brèche dans la herse, livré une bataille furieuse dans la cour sous la tour et avaient été victorieux. Ils avaient perdus plus d’hommes, mais le fait de tenir deux tours lui avait permis de déplacer plus d’hommes et de warjacks sur le pont. Maddox et ses warjacks, dont les Défenseurs et leurs canons à longue portée, tenant la deuxième, Stryker avait plus de chances de s’emparer de la troisième et dernière tour. Le problème, c’est qu’ils s’en sortaient bien, ils gagnaient, et cela signifiait que la décision d’Harkevich de faire exploser le pont devenait de plus en plus facile à prendre chaque minute passant. Stryker était forcé de faire confiance à Magnus, et cela ne lui convenait pas.

Il ne pouvait, cependant, pas s’inquiéter de Magnus maintenant, alors il laissa son esprit s’entraîner dans le chaos familier du combat. Arsouye chargeait à leurs côtés, de la fumée s’échappant derrière le grand warjack en un flot noir. L’enthousiasme, voire la joie, du warjack face à la bataille s’annonçant été contagieux, et le lien qu’ils partageaient. Arsouye faciliterait le travail lors de la dernière tour.

Ils étaient presque arrivés à la troisième tour. Il ordonna la charge et envoya Arsouye à l’assaut de la herse, mais contre attente, celle-ci se releva. Le mouvement déconcerta Stryker un moment, puis il comprit.

Le Kommandeur Izak Harkevich était un homme imposant avec une longue barbe noire et, alors qu’il sortait sur le pont, son armure de warcaster cramoisie brillait dans la lumière du soleil matinal. À ses côtés se trouvait un tout autant imposant warjack, dont la coque était peinte en noir. Stryker reconnut le châssis, un Destructeur, la bombarde à longue portée installée sur son bras gauche ne laissait aucun doute. Cependant, ce warjack avait été personnalisé ; au lieu de la hache que la plupart des Destructeurs maniait de leur main droite, l’appendice droit de celle-ci avait été remplacée par d’épouvantable griffes déchiqueteuses.

Les Man-O-War sortaient derrière le warcaster khadoréen et formaient une ligne devant lui, leurs canons boucliers pointant vers les Lances-Tempête chargeant.

Il n’eut pas le temps d’interrompre la charge et Stryker serra les dents lorsque le bras d’Harkevich se leva puis s’abaissa brusquement. L’enfer se propagea de bouclier en bouclier de Man-O-War tandis que leurs canons se déchargeaient, et derrière eux, le warjack d’Harkevich y allait du sien. Il y eut un moment de silence inquiétant qui sembla étirer le temps tandis que les obus se dirigeaient vers leur cibles en hurlant.

Les obus frappèrent, et Stryker sentit plus qu’il ne vit l’une des explosions frapper Valorous, son cheval, sous lui. Puis il s’envola en avant, en apesanteur, alors que la force le propulsait dans les airs. Il percuta le sol trois mètres plus loin, son armure et son champ d’énergie absorbant la plus grande partie de l’impact, mais pas la totalité. Son souffle s’échappa de ses poumons et il entendit les épouvantables cris des chevaux et des hommes déchiquetés par les explosions.

Il essaya d’entrer en contact avec Arsouye, mais son cerveau n’était qu’un mélange de douleur et de panique. Le grand warjack n’était pourtant pas étranger à la guerre, et Stryker et lui avaient combattu ensemble pendant plus d’une décennie. Arsouye se dressa soudainement au-dessus de lui, inclinant son châssis pour dévier les balles et même les obus d’artillerie visant son maître.

Stryker reprit rapidement ses esprits et se releva. De nombreux Chevaliers-Tempête étaient à terre, y compris Bartlett, mais il n’avait pas le temps de compter les morts. Les Man-O-War avançaient pour achever le travail.

Stryker se tourna vers les autres warjacks de son groupe de bataille, poussant les Cyclones vers l’avant. Maddox devrait avoir vu ce qui s’était passé, mais ses warjacks mettraient du temps à arriver, et Harkevich tentait maintenant d’éliminer la tête de l’Armée Cygnaréenne d’un seul coup.

Stryker attrapa Vif-Argent au sol où elle était tombée et se retourna pour remarquer le mur d’armure rouge se rapprocher d’eux. Il ordonna aux Cyclones d’ouvrir le feu avec leurs mitrailleuses, mais les boucliers verrouillés des Man-O-War déviaient suffisamment les balles pour que peu des guerriers lourdement armés meurent. Au milieu des Man-O-War se trouvait Harkevich en personne, armé d’une masse mékanique à l’aspect brutal brillant d’un bleu glacial. Son warjack le suivait de près.

« À moi ! » cria Stryker. « Formez une ligne ! »

Les Chevaliers-Tempête restants répondirent à son appel et se dirigèrent vers lui. Un rapide décompte lui apprit qu’ils étaient sept. Sept contre quinze Man-O-War, un warjack et un warcaster.

Ils réussirent à former une ligne de bataille irrégulière avant que les khadoréens ne les attaquent. Stryker para un coup d’exterminatrice et donna un coup de pied à son propriétaire, le faisant reculer. Il envoya Arsouye en avant, et le warjack frappa un Man d’un coup de poing, et le khadoréen s’envola du pont se noyer dans le fleuve en contrebas.

Stryker frappa avec Vif-Argent, fendant un bouclier Man-O-War et l’homme derrière lui. Il essaya d’atteindre Harkevich, et à sa grande surprise, le warcaster l’y aida.
Il vit à travers les yeux d’Arsouye que le warjack avait trouvé son propre
homologue et avait engagé le Destructeur d’Harkevich. Stryker canalisa une partie de sa volonté dans les frappes initiales d’Arsouye contre le ‘jack ennemi, et la coque de la machine khadoréenne se déforma sous les coups. Il continua à déplacer les Cyclones jusqu’à la tour, les mitrailleuses détruisant la maçonnerie et empêchant les soldats khadoréens de leur tirer dessus. Puis il recula et se concentra sur Harkevich.

Ils étaient au milieu des combats et un cerce de combattants s’était formé autour d’eux. Stryker ne put dire si c’était intentionnel, mais il n’y avait nulle part où fuir. Il jeta un coup d’oeil en arrière ; les warjacks et les troupes cygnaréennes se précipitaient vers eux, mais Harkevich avait manifestement prévu cela. Du sommet de la tour derrière lui jaillit une brillante flamme orangée – d’autres Man-O-War tirant aux canons boucliers sur les cygnaréens chargeant. Le warcaster khadoréen avait décidé de risquer de bombarder le pont s’il parvenait à paralyser l’offensive cygnaréenne ici même. Les obus étaient imprécis mais efficaces en masse, et l’avancée cygnaréenne fut stoppée un moment pour éviter ce qui était essentiellement un peloton d’exécution ci-dessus. Stryker exhorta les Cyclones à concentrer leurs tirs sur les Man-O-War au sommet de la tour. Ils ne parvenaient pas à former correctement un mur de bouclier là-haut et étaient obligés de se mettre à l’abri de la pluie de balles.

Harekvich se précipita en avant, visant la tête de Stryker avec sa masse.Il était rapide pour un homme de grande taille, et Stryker plaça Vif-Argent en garde haute pour repousser le coup, tournant son corps pour en atténuer l’impact. Il riposta en faisait pivoter son poignets et en ramenant Vif-Argent autour de lui pour lui asséner un coup de taille au niveau de l’abdomen de son ennemi. Harekvich fit un bond en arrière, mais un peu trop lentement, et la lame de Stryker se heurta au champ d’énergie du warcaster, pénétra, et racla le plastron du khadoréen, laissant une ligne blanche éclatante.

Harkevich sourit, ses dents blanches visibles à travers l’enchevêtrement de sa barbe noire.

« Joli coup, Seigneur Général », dit-il dans un cygnaréen avec un fort accent. Puis le warcaster khadoréen se précipita en avant, des runes magiques se formant autour de sa main gauche tandis que sa droite abattait sa masse en un coup à la tête.

Le sort frappa en premier, une explosion glaciale de vent arcanique traversa le champ d’énergie de Stryker puis son épaulettes gauche, coupant et gelant la chair en dessous. Il tituba en arrière, la douleur la forçant à retirer une main de Vif-Argent alors qu’il la levait pour parer la masse d’Harkevich. L’arme du khadoréen s’abattit, traversant la parade de Stryker et s’enfonçant dans son plastron. L’acier se froissa, enfonçant des éclats de métal dans sa chair, et il fut projeté en arrière.

Stryker atterrit lourdement à quelques pas d’Harkevich et la force du coup le sauva. Il avait eut le temps d’invoquer sa propre magie. Des runes apparurent autour de son corps, et il pointa son poing vers Harkevich, qui chargeait pour finir le travail. Des éclairs bleus jaillirent du poing tendu de Stryker, et des éclats d’électricité tombèrent du ciel autour d’Harkevich ; l’un d’eux le frappa à la poitrine et le fit chanceler, son armure fumant. D’autres éclairs frappèrent deux Man-O-War à proximité. L’un d’eux tomba, son corps secoué par les terribles affres de l’énergie voltaïque.

Stryker se releva et invoqua à nouveau sa magie, remplissant ses membres de fureur et de force mystique. Il chargea, frappant Harkevich d’un coup d’épaule alors que le warcaster se tournait vers lui. L’impact envoya des étincelles d’agonie dans son bras blessé, mais il eut l’effet escompté. Harkevich recula en chancelant et sa garde baissa un instant. Vif-Argent sortit. La lame décrivit un arc de cercle et mordit la jambe droite d’Harkevich au-dessus du genou. L’acier s’ouvrit, puis la chair en dessous, et la lame de Vif-Argent cogna contre l’os.

Harkevich ne cria pas, ni même céda du terrain. Au contraire, il serra les dents et frappa Stryker au visage avec point ganté. Le cartilage du nez de Stryker craqua et du sang chaud éclaboussa son visage. Il trébucha, ses yeux se brouillant alors qu’ils se remplissaient de larmes. Il leva Vif-Argent pour repousser Harkevich, mais le warcaster s’éloignait en boitant à travers la ligne de Man-O-War, qui se resserraient les rangs derrière lui.

Stryker décida de retrouver Arsouye et la peur l’envahi. Le cortex du warjack n’était qu’une faible étincelle, et non le vibrant brasier qu’il était habituellement. Il ne pouvait pas voir à travers les yeux du warjack, alors il utilisa les siens. Arsouye était allongé sur le flanc, le warjack khadoréen noir se tenant au-dessus de lui. Stryker pouvait sentir les dégâts subis par Arsouye – d’énormes déchirures dans la coque du warjack, les circuits hydrauliques coupés dans les deux jambes et le bras droit. Arsouye était à deux doigts de la casse.

Stryker s’avança vers son ‘jack. Le warjack khadoréen se repliant avec Harkevich et les Man-O-War. Les Chevaliers-Tempête survivants les laissant partir.

Une nouvelle canonnade provenant du sommet de la tour attira l’attention de Stryker vers le haut. Les Man-O-War bombardaient toujours les cygnaréens avançant, bravant les mitrailleuses des Cyclones, mais les cygnaréens progressaient malgré tout, et maintenant Maddox, flanqué de deux Défenseurs, apparut à travers la fumée et les nuages de débris. Les Défenseurs tirèrent ensemble, et le sommet de la tour éclata en une pluie de maçonnerie. L’un des Man-O-War, trop proche du bord, tomba en avant, s’écrasant sur le pont quinze mètres en contrebas. Il s’écrasa telle une météore rouge, explosant dans une pluie d’armure et de sang.

« Sortez Arsouye d’ici », cria-t-il tandis que Maddox se précipitait vers lui. Son visage pâlit lorsqu’elle vit les blessures de Stryker, mais elle directement elle cria des ordres. Il avait déjà perdu Valorous, et il n’allait certainement pas abandonner Arsouye.

La herse de la troisième tour s’abattit derrière Harkevich battant en retraite, et Stryker comprit que sa victoire ici lui coûterait cher. Il n’y avait aucune raison pour que le warcaster khadoréen ne fasse pas sauter le pont maintenant.

« Dépêche-toi, Magnus », murmura Stryker dans l’air enfumé.
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« Réponse #23 le: 13 octobre 2024 à 21:52:27 »

- 23-
À l’Est de Croix-des-Fleuves, Llael Occupé

MÊME SI LA PERTE DE SON BRAS lui faisait souvent mal et lui rappelait d’autres choses qu’ils avait perdues, il y avait des moments où Magnus était reconnaissant de la force mékanique de son remplaçant. Il était actuellement suspendu à une solide corde sous un massif pont de pierre, le tonnerre des canons et des coups de feu ébranlant les fondations de la structure au-dessus de lui. Il tenait la corde avec sa main mékanique, laissant sa force supporter la plus grande partie de son poids.

Xavius et lui étaient attachés à un harnais d’alpiniste, quelque chose qu’un homme utiliserait pour escalader un flanc de montagne. La corde fonctionnait tout aussi bien sous le pont, et les pitons forgés par les rhuliques s’enfonçaient dans pierre d’un simple coup de marteau. Les khadoréens avaient été suffisamment distraits par l’attaque ci-dessus pour ne pas l’avoir remarqué, lui et l’ancien alchimiste du Creuset d’Or escalader le dessous de leur pont et, ce n’était pas un geste de salutations entre voisins. Les petites faveurs sont des bénédictions, pensa-t-il.

« Tu le vois ? » lança-t-il à Xavius, qui se balançait à quelques pas sous le tablier le pont au dessus de lui.

« Oui », répondit l’ordique. « Mais ce ne sont pas des explosifs khadoréens ».

« Je m’en fiche. Désarme juste cette foutue chose ».

Xavius ne dit rien pendant un moment, et le pont trembla à nouveau, cette fois non pas à cause des tirs, mais du lourd pas des warjacks. Les choses devenaient sans doute désespérées là-haut. « C’est plus compliqués que ça. Les explosifs sont connectés, mais ils sont beaucoup plus sophistiqués que je ne l’avais prévu ».

« Combien de temps ? » Pas le temps de s’attarder sur les implications de la découverte de Xavius.

« Dix minutes », répondit Xavius.

Magnus laissa pendre sa montre à gousset pour pouvoir y jeter un coup d’oeil. Ils auraient peut-être ce temps, ou bien il finiraient ses jours suspendu au-dessous d’un pont juste avant qu’il ne lui tombe sur la tête.

« Cesse de causer et bouge ton cul », dit-il.

Une soudaine pluie d’éclats de pierre s’abattit sur le visage de Magnus, tandis qu’une balle ricochet sur le pont à quelques centimètre de sa tête. Il fut soudainement très conscient de l’absence du champ d’énergie généré par son armure de warcaster. Il baissa les yeux. Un groupe de Garde des Glaces se tenait sur le rivage, leurs fusils pointés sur lui.

Il invoqua rapidement sa magie, les runes se formant autour de son corps en une barrière protectrice. Il laissa le sort englober Xavius, et le contour du corps de l’ordique vacilla et devint flou et indistinct. D’autres balles claquèrent sous le pont, manquant leur cible mais remplissant l’air d’éclats de pierre.

« Tu sais faire quelque chose à ce sujet ? L’interpella Xavius, irrité. Il s’accrochait au pont telle une araignée géante, son visage pressé contre ce que Magnus devinait être suffisamment d’explosifs pour le réduire à l’état de brouillard rouge.

Magnus ne répondit pas ; au lieu de cela, il dégaina son canon à main de son étui de la main gauche et visa. Il avait laissé son tromblon derrière lui, sachant que la portée accrue du canon à main serait plus utile. Un autre projectile le rasa et Magnus aperçut l’un des Gardes des Glaces sur le rivage. Il canalisa sa puissance arcanique dans le tir et sa visée se stabilisa. Sa cible était à deux cents verges – un tir incroyablement difficiles dans des circonstances normales. Il pressa sur la gâchette et l’arme aboya dans sa main. La lourde balle, guidée par sa magie, trouva sa cible. Le chef des Gardes des Glaces recula brusquement et il s’effondra au sol.

Le canon à main de Magnus, bien que puissant, était un modèle à un coup, et il ne voulait pas lâcher la corde dans autre main pour recharger. D’autres tirs retentirent d’en bas, mais ils ne visaient ni lui ni Xavius. Un autre membre de la Garde des Glaces s’effondra au sol. Trois hommes chargeaient sur l’étroite bande de plage en direction des gardes – ils étaient en infériorité numérique, mais Magnus ne doutait guère qu’Harrow, Tews et un autre de ses hommes, un ex-Tête d’Acier, ne feraient qu’une bouchée des soldats. Il avait une vue plongeante littéralement, sur le massacre qui s’ensuivit.

Tews n’avait pas pris la peine de dégainer son arme et il abattit le premier Garde des Glaces qu’il rencontra – le khadoréen avait tenté de parer la grande épée caspienne à l’aide d’une hache courte. Tews trancha la hache, puis le cou de l’homme derrière elle. Harrow abattit deux gardes avec son arme à répétition, et Silus s’était occupé du dernier avec son tromblon.

Harrow fit signe de main à Magnus après la mort du dernier garde. Ils restèrent sur la plage, probablement au cas où d’autres troupes khadoréennes se présenteraient. Vu le bruit sur le pont, Magnus ne pensa que cela soit probable.

« Où en es-tu avec cette foutue bombe ? » appela Magnus.

« J’y suis presque » répondit Xavius. « Nous avons de la chance. Le relais du détonateur est connecté à celui-ci. Si je peux l’enlever … Voilà ».

« Tu as fini ? »

« Pas tout à fait. Je veux embarquer l’appareil avec nous ».

« Attends. C’est une mauvaise idée. As-tu identifié l’agent chimique ? »

« Je l’ai fait, et crois-moi, Général, tu voudras voir ça ».

D’autres coups de feu retentirent en bas. Magnus s’avait qu’il s’était trompé, et maintenant ce n’était plus seulement d’autres gardes en route. Des Man-O-War escortaient ce qui semblait être un duo de tireurs embusqué prendre des positions de tir. Harrow, Tews et Silus battirent en retraite, déchargeant leurs armes sur l’ennemi au fur et à mesure.

Magnus rengaina son pistolet et sortit Pourfendeur. « Xavius, nous devons partir maintenant. Tu sais nager ? »

L’ordique le regarda, les yeux écarquillés. Magnus ne lui laissa pas le temps de répondre et trancha les cordes qui les retenaient au pont.

Ils chutèrent.
« Modifié: 21 octobre 2024 à 20:01:37 par elric »
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« Réponse #24 le: 21 octobre 2024 à 20:06:15 »

- 24-
À l’Est de Croix-des-Fleuves, Llael Occupé

UNE ÉRUPTION VERTE BRILLANTE S’ÉLEVA AU-DESSUS de la ville de Croix-des-Fleuves et une vague de soulagement déferla sur Stryker. C’était le signal qu’il attendait. Magnus l’avait fait.

Le médecin s’occupant des blessures de Stryker grogna d’irritation. « Monsieur, s’il vous plaît, restez tranquille », dit-il. Il avait retiré l’épaulière gauche de Stryker et s’occupait de la blessure en dessous. Le sort d’Harkevich avait à la fois gelé et coupé la chair, et le médecin faisait de son mieux pour refermer la plaie. Stryker avait laissé Maddox réparé son nez cassé peu de temps après qu’ils se soient retirés vers la seconde tour, après qu’Harkevich ait battu en retraite. Elle avait pris un certain plaisir à remettre le cartilage en place et à la grimace douloureuse que cela avait provoqué.

« Et bien, peut-être ne vous n’affronterez pas le prochain warcaster comme si vous étiez une sorte de cadet sans cervelle, monsieur », avait-elle dit.

Le médecin acheva et aida Stryker à remettre son épaulette. Il bougea son bras. Il était sensible, mais il pouvait désormais manier son épée à deux mains.

« Maddox », dit Stryker en se tournant vers le commandant se tenant au-dessus de l’épave de Vî Arsouye, faisant le point sur les dégâts. Ils avaient utilisés les Cyclones pour ramener le warjack à l’abri de la seconde tour. Stryker essayait de ne pas regarder l’épave – c’était comme regarder le cadavre d’un vieil ami. « Faites venir les Murs-Tempête ici. Je veux neutraliser ces Conquérants tout de suite. Ils ne pourront peut-être pas faire sauter le pont avec des explosifs, mais les canons de ces engins pourraient faire le travail à leur place. « Et déplacez l’artillerie jusqu’au rivage. Je veux commencer à frapper les emplacements des canons khadoréens immédiatement ».

Maddox se retourna et cria des ordre à deux commandos pionniers, qui partirent en direction de la ligne de front cygnaréenne pour transmettre les ordres de Stryker. Stryker les accompagna avec l’un de ses Cyclones. Le warjack couvrirait les pionniers jusqu’à ce qu’ils atteignent le Sergent-Chef Halverson, l’expérimenté pionnier contrôleur actuellement en charge des colosses cygnaréens.

Les Cyclones et les Défenseurs restants rendaient la cour sous la tour plus qu’encombrée, sans parler de l’étouffement de la fumée provenant des cheminées de warjacks. Ce qui restait des Lances-Tempête de Stryker se trouvait également ici ; il avait perdu plus de la moitié d’entre eux, y compris le Colonel Bartlett. Elle avait été frappée par un projectile d’un Man-O-War et on n’avait pas trouvé suffisamment de morceaux d’elle pour la retrouver. Cela le rendait malade ; elle avait été une sacrée soldate et une chef respectée, et sa perte leur ferait mal. Mais il ne pouvait pas se concentrer dessus – elle ne serait pas le dernier bon soldat qu’il perdrait dans les jours et les mois à venir. Il ne pouvait qu’honorer leur mémoire en se battant avec tout le courage et la conviction qu’i possédait.

En plus des Lances-Tempête, il avait toujours une escouade complète de rangers, et ils avaient pris d’assaut le niveau supérieur de la tour, tuant les tireurs embusqués et les Gardes des Glaces s’y trouvant. C’étaient désormais eux les tireurs embusqués qui ripostaient contre les soldats khadoréens dans la troisième tour. Stryker dit, « Je vais de l’avant avec les Défenseurs et le Cyclone briser cette troisième tour. Reste ici et prend le contrôle des Murs-Tempête à leur arrivée. Ensuite, je veux que tu lances tout ce que tu as sur ces Conquêtes. Compris ? »

« Oui, monsieur », répondit Maddox en souriant. « Ce sera la première fois que je contrôle deux de ces monstres. J’ai hâte d’y être ».

« Lieutenant Sims », dit Stryker en se tournant vers l’expérimenté ranger qui aurait été l’homme idéal pour interroger Pytor Aleshko si Magnus n’était pas intervenu. « Couvrez-moi, je vais m’occuper de la porte de la troisième tour ».

« Parfaitement, monsieur ». Il se déplaça pour transmettre les ordres au rangers dans la tour au-dessus.

Stryker ferma les yeux et se concentra, renforçant son lien avec les trois warjacks qu’il commandait. Il en avait contrôlé jusqu’à sept à la fois, mais au-delà de quatre ou cinq, les capacités d’un warcaster vétéran étaient mises à rude épreuve ; c’était comme essayer de résoudre des équations mathématiques complexes dans sa tête tout en essayant de ne pas se faire tirer dessus, poignarder ou exploser.

Stryker puisa au sein de ses réserves arcaniques et lança l’un de ses sorts les plus puissants. Des runes l’enveloppèrent ainsi que les warjacks sous son commandement, remplissant d’une énergie furieuse qui finirait par préserver son propre pouvoir.

« Allons-y », cria Stryker, et il s’élança sur le pont. Ses warjacks le suivirent, et derrière eux, les Lances-Tempête survivants, désormais à pied, arrivèrent avec une escouade complète d’infanterie Lame-Tempête qui avait été avancée.

Les balles commencèrent à marteler la pierre devant et autour de Stryker et il exhorta ses Défenseurs à ouvrir le feu sur la tour devant lui. Leurs canons lourds pivotèrent et visèrent avant de décharger dans explosion de flammes et de fureur. Les obus frappèrent la tour en plein centre, faisant exploser la pierre et l’acier et créant un trou béant dans le mur, exposant les silhouettes des soldats khadoréens à l’intérieur.

Le Cyclone tira ensuite, ses mitrailleuses plus légères et plus précises visant les ennemis à l’intérieur du bâtiment, envoyant une pluie de balles à travers la brèche faite par les Défenseurs et déchiquetant les hommes.

La pluie de balle en provenance de la tour ralentit et Stryker cibla de suite la herse. Il envoya les Défenseurs en avant attaquer la herse de fer et d’acier avec leurs marteaux disruptifs. Le herse se déformait, mais ce n’était pas les Man-O-War qui menaçaient les warjacks – ils s’agissaient d’hommes vêtus de lourdes plaques baroques, non propulsé par la vapeur et étaient armés de boucliers et de longues piques à pointes coniques, des charges creuses pouvant percer un trou dans le blindage d’un warjack. Les marteaux des Défenseur avaient fait leur œuvre. La herse s’effondra, mais pas avant qu’une demi-douzaine de Crocs d’Acier n’aient frappé l’un des warjacks avec leurs lances. Des gerbes de flammes éclatèrent autour de la coque du Défenseur, l’acier et le système hydraulique se rompirent, puis brusquement la présence du Défenseur disparut dans l’esprit de Stryker lorsqu’un coup chanceux d’une pique explosive d’un Croc d’Acier détruisit le cortex du warjack.

Alors qu’ils fonçaient sur l’ennemi, les canons lourds d’un Mur-Tempête retentirent, projetant un énorme projectile siffler par-dessus le pont. Il heurta l’un des Conquêtes, faisant reculer la gargantuesque machine d’un pas et laissant un cratère roussi dans sa coque. Stryker sourit alors que d’autre obus suivirent, et furent rejoints par le retentissant tonnerre de l’artillerie cygnaréenne.

Un mur de boucliers et de piques de Crocs d’Acier les attendaient dans la troisième tour. Derrière eux venaient deux warjacks, de massifs Juggernauts, les effroyables bêtes de somme de l’armée khadoréenne. Chacun d’eux était armé d’une redoutable hache mékanique générant un froid glacial. Harkevich n’était pas avec les ‘jacks ; ils suivaient les ordres criés d’une officier Croc d’Acier.

Les cygnaréens ne ralentirent pas leur charge. Au contraire, ils foncèrent tête baissée sur les piques des Crocs d’Acier. Une série d’explosions ébranla les dents de Stryker, alors même qu’il évitait la pointe d’une pique et abattait l’homme derrière. Il poussa le Défenseur dans la mêlée. Il balaya les piquiers pour s’attaquer aux deux Juggernauts. Son Cyclone s’avança également, utilisant ses poings pour écraser les troupes, bien que quelques lances explosives explosèrent contre sa coque alors qu’il fonçait sur l’ennemi. Heureusement, les dégâts n’étaient pas critiques.

Stryker traversa les Crocs d’Acier et se retrouva face à l’officier, une homme de grande taille maniant une lourde hache à deux mains. L’officier était plus qu’un vétéran expérimenté – il contrôlait probablement les warjacks khadoréens, une manière non-magique de commander des machines par des instructions verbales et des signaux manuels. Stryker espérait que l’éliminer rendrait les Juggernauts beaucoup moins efficaces. Il frappa de taille les jambes de l’homme, mais le khadoréen sauta agilement par-dessus la lame et abattit sa hache dans un coup direct. Stryker se tordit sur le côté, et son champ d’énergie clignota lorsque la hache le frappait en oblique. Il s’avança, à portée de la hache du Croc d’Acier, et enfonça le pommeau de Vif-Argent dans la gorge de l’ennemi. Le gorgerin du Croc d’Acier, le morceau de métal protégeant sa gorge, se froissa et il chancela, haletant. Stryker recula, inversant la direction de sa lame, pressa la gâchette sur la poignée de Vif-Argent et tira un éclair sur l’homme à bout portant. L’officier Croc d’Acier fut projeté en arrière, un trou fumant dans son plastron et sa poitrine. Il chuta au sol mort et Stryker reporta son attention sur ses warjacks. Le Défenseur frappait l’un des Juggernauts avec son marteau disruptif, envoyant des vagues d’énergies voltaïques à travers les cortexes de warjacks ennemis Le Cyclone ne s’en sortait pas aussi bien avec ses poings, et Stryker sentit l’impact tressaillant d’une hache de glace sur sa coque. Il canalisa une plus grande partie de sa volonté dans ses coups, les guidant, les rendant plus précis et plus percutants, puis il reporta son attention sur le bataille autour de lui. Ses chevaliers étaient engagés brutal combat avec les Crocs d’Acier, mais il était clair qu’une fois passées les lances des troupes khadoréennes, les cygnaréens étaient plus habiles au corps à corps. Les cadavres en armure rouge s’accumulaient.

Le tonnerre résonnait de plus belle au-dessus de nous tandis que les Murs-Tempête poursuivaient leur assaut. Puis un autre son submergea tous les autres. L’un des Conquêtes, la coque criblée de trous déchiquetés et roussis, vacillait sur le bord du pont telle un énorme marin ivre. Puis il s’écrasa contre la balustrade en pierre et plongea dans le fleuve en contrebas. Lorsque la chaudière du colossal heurta les eaux froides du Fleuve Noir, elle explosa comme une bombe, projetant un geyser d’eau et de débris de trente mètres de haut.

Une acclamation saccadée s’éleva des troupes cygnaréennes, une acclamation qui résonna sur le pont. Ils gagnaient.
Citation de: Maître Yoda
Trop gentil tu seras, dans le côté obscur tu l'auras.

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Hop, -> Mp  ;)