Auteur Sujet: Roman - À Quel Prix  (Lu 1836 fois)

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Roman - À Quel Prix
« le: 22 avril 2024 à 14:16:22 »
À QUEL PRIX

DOUGLAS SEACAT

BIENVENUE DANS LES ROYAUMES D’ACIER

AVANT-PROPOS

PROLOGUE

PARTIE UNE

PARTIE DEUX

PARTIE TROIS

PARTIE QUATRE

PARTIE ∞
« Modifié: 24 avril 2024 à 16:07:56 par elric »
Citation de: Maître Yoda
Trop gentil tu seras, dans le côté obscur tu l'auras.

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Roman - À Quel Prix
« Réponse #1 le: 24 avril 2024 à 16:07:02 »
BIENVENUE DANS LES ROYAUMES D’ACIER

Le monde dans lequel vous vous apprêtez à pénétrer est celui des Royaumes d’Acier, un endroit où le pouvoir et la présence des dieux sont incontestables, où l’humanité s’affronte elle-même ainsi que toutes sortes de races fantastiques et de bêtes exotiques, et où un mélange de magie et de technologie appelée mékanique façonne l’industrie et la guerre. En dehors des Royaumes d’Acier eux-mêmes – les nations humaines du continent appelé Immoren – le vaste monde inexploré de Caen s’étend jusqu’à des contrées inconnues, stimulant l’imagination et les ambitions d’une nouvelle génération.

Les conflits secouent fréquemment ces nations et, parmi les batailles de la région, l’arme la plus puissante est le warjack, un automate à vapeur doté d’une grande mobilité, d’un épais blindage et d’armes dévastatrices, lorsqu’il est commandé par un warcaster, un puissant soldat-sorcier pouvant nouer un lien mental avec la grande machine afin d’en décupler les capacités. Maîtres des arcanes et des combats martiaux, ces warcasters sont souvent le facteur décisif dans la guerre.

Pour les Royaumes d’Acier, ce qui est passé est un prologue. Aucun événement ne définit plus clairement ces nations que l’âge sombre subi sous le joug des orgoth, une race brutale et sans pitié venue des terres inexplorées de l’autre côté du grand océan occidental connu sous le nom de Meredius. Durant des siècles, ces redoutables envahisseurs ont asservi les habitants de l’Immoren occidental, maintenant une emprise semblable à un étau jusqu’à ce que le peuple se rebelle enfin. Ce fut le début d’un long et sanglant processus de batailles et de défaites. Cette rébellion aurait été vouée à l’échec si un sombre arrangement des dieux n’avait pas conféré le Don de Magie aux immoréens libérant ainsi des pouvoirs insoupçonnés.

Toutes les efficaces armes employées par la Rébellion contre les orgoth sont le fruit de la mise en œuvre de talents arcaniques par de grands esprits. Non seulement la sorcellerie permettait l’évocation du feu, de la glace et de la tempête sur le champ de bataille, mais les érudits combinaient les principes scientifiques pour allier la technologie à l’arcane. Les progrès rapides de l’alchimie ont donné naissance à la poudre explosive et à l’invention d’armes à feu mortelles. Des méthodes ont été mises au point pour fusionner des formules arcaniques avec des plaques de métal, créant ainsi des outils et des armes améliorés : c’est l’invention de la mékanique. Le point culminant de ces efforts fut l’invention des premiers colosses, précurseurs des modernes warjacks. Ces imposantes machines de guerre ont donné aux immoréens une arme que les envahisseurs ne pouvaient pas contrer. Grâce aux colosses, les armées de la Rébellion ont chassé les orgoth de leurs forteresses et les ont renvoyés à la mer.

Les peuples des terres ravagées tracèrent de nouvelles frontières, donnant naissance aux Royaumes d’Acier : Cygnar, Khador, Llael et Ord. Il ne fallut pas longtemps pour que d’anciennes rivalités éclatent entre ces nouvelles nations. La guerre devint un simple fait de la vie. Au cours des quatre derniers siècles, les guerres périodiques ont été entrecoupées de brèves périodes de paix tendues mais prudente, tandis que le technologie progressait constamment. L’alchimie et le mékanique ont à la fois facilité et compliqué la vie des habitants des Royaumes d’Acier, tout en faisant évoluer les armes employées par leurs armées en ces temps de révolution industrielle.

L’inimité la plus ancienne et la plus amère de la région est celle opposant le Cygnar, au sud, et le Khador, au nord. Les khadoréens sont un peuple militant occupant un territoire rude et impitoyable. Les armées de Khador se sont régulièrement battues pour récupérer les terres dont leurs ancêtres s’étaient emparés par la conquête. Les deux plus petits royaumes de Llael et d’Ord ont été forgés à partir de territoires contestés et ont donc souvent servi de chap de bataille entre les deux puissances les plus fortes. Le Cygnar, nation méridionale prospère et peuplée, s’est périodiquement allié à ces nations pour tenter de contrer les aspirations impériales de Khador.
Il y a un peu plus d’un siècle, le Cygnar a connu une guerre civile religieuse ayant abouti à la création du Protectorat de Menoth. Cette nation, la plus récente des Royaumes d’Acier, est une impitoyable théocratie entièrement dévouée à Menoth, l’ancien dieu à l’origine de la création de l’humanité.

À l’époque actuelle, la guerre s’est déclenchée avec une férocité particulière. Cela a débuté avec l’invasion khadoréen de Llael, qui a réussi  à renverser le petit royaumes en 605 AR. La chute de Llael a déclenché une escalade du conflit ayant embrasé la région au cours des trois dernières années. Seul l’Ord est demeuré neutre dans ces guerres, profitant du fait qu’il est devenu un refuge pour les mercenaires. Le Protectorat de Menoth a lancé la Grande Croisade afin de convertir toute l’entièreté de l’humanité au culte de Menoth. Les autres nations étant occupées par la guerre, cette croisade a pu faire de significatifs progrès et s’emparer de territoires dans les nord-est de Llael.

D’autres puissances ont été entraînées dans ce conflit, soit emportées par les événements, soit en profitants pour leurs propres fins. Les Îles Scharde, au ponant de l’Immoren, abritent l’Empire du Cauchemar de Cryx, qui est gouvernée par le dragon Toruk, envoyant d’incessantes vagues de morts-vivants et de leurs maîtres nécromanciens pour renforcer ses armées avec les morts d’autres nations. Au nord-est, la nation elfique insulaire d’Ios abrite une secte radicale appelée la Rétribution de Scyrah, traquant les arcanistes humains, qu’elle considère comme des anathèmes pour ses dieux.

Les régions sauvages à l’intérieur et au-delà des Royaumes d’Acier contiennent diverses factions se battant pour leurs propres objectifs. Depuis le grand nord, un dragon désincarné appelé Everblight dirige une légion de warlocks et de rejetons draconiques dynamiser par la corruption. La fière race tribale connue sous le nom de trollkin s’efforce d’unir son peuple autrefois disparate pour défendre ses terres. Au plus profond des terres sauvages de l’Immoren occidental, un ordre secret de druide ordonne aux bêtes de s’opposer à Everblight et de faire avancer leurs propres plans. Loin à l’est, à travers les Marches Sanglantes, la nation guerrière de l’Empire Skorne se rapproche inexorablement, déterminée à conquérir ses anciens ennemis d’Ios pour mieux les dominer. D’obscures conspirations ont surgis de forteresses dissimulées pour jouer leur propre rôle dans le déroulement des événements. Ceux-ci incluent la Convergence de Cyriss, un énigmatique culte des machines vénérant une lointaine déesse des mathématiques, ainsi que de leurs acharnés ennemis, les cephalyx, une race d’esclavagiste extrêmement intelligents et sadiques transformant chirurgicalement leurs captifs en asservis sans cervelle.
Citation de: Maître Yoda
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Roman - À Quel Prix
« Réponse #2 le: 24 avril 2024 à 16:08:55 »
AVANT-PROPOS

Cette histoire a connu un parcours assez long pour en arriver là, mais le Major Victoria Haley aussi.

Le personnage de Haley m’a toujours fasciné car elle représente le potentiel infini des mortels dans notre environnement. Les Royaumes d’Acier ont leur part de dieux, leurs puissants intermédiaires, d’immenses dragons invulnérables, des seigneurs morts-vivants, d’immortelles carognes et d’autres entités surnaturelles. Certains joueurs de Cygnar ont déploré l’absence d’une warcaster incarnant l’un de ces concepts. Si vous vous voulez mon avis, ce que Cygnar a de plus inspirant chez des personnes comme Victoria Haley – des mortels tenant tête à des terreurs immortelles et parfois même gagnent.

Victoria Haley a traversé de nombreuses épreuves et tribulations : ses parents et sa maison lui ont été arrachés lors d’un événement horrible durant son enfance, elle a survécu seule à seulement treize ans, a découvert que sa sœur jumelle était en fait vivante mais complètement corrompue par Cryx, a tué sa sœur après avoir perdu un bras lors d’un combat.

Bien que son passé soit rempli de tragédies, depuis qu’elle est devenue warcaster, Haley a montré à plusieurs reprises sa capacité à briser les lois de la réalité par sa seule volonté et la force de sa magie. Cela m’a amené à réfléchir à la façon dont elle réagirait si on lui retirait ce pouvoir. Qu’est-ce que cela signifierait pour son sentiment d’identité ? Plus j’y réfléchissais plus je sentais que ce serait plus terrifiant pour elle que tout ce qu’elle avait pu affronter, sur le champ de bataille ou en dehors.

L’émergence de la mystérieuse Convergence de Cyriss pourrait changer bien des choses pour les habitants de l’Immoren occidental. Les adorateurs des machines représentent cependant une tentative unique pour Haley, une tentation qu’elle ne pourrait peut-être pas refuser.

Dans cette histoire, nous Haley dans ses ses heures les plus sombres, dépourvue de magie et aux prises avec une maladie incurable, essayant de comprendre qui elle est au fond d’elle-même et si elle a encore de l’importance. Comment peut-elle au mieux remplir son devoir d’officier, servir sa nation en tant que warcaster, et atteindre son potentiel en tant qu’individu ? Qu’est-ce qui est le plus important pour elle ? Pour la première fois, elle se voit contrainte de choisir entre les idéaux qui lui sont chers. Elle apprend qu’elle peut échapper à sa propre mortalité… mais à quel prix.

Douglas Seacat.
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Roman - À Quel Prix
« Réponse #3 le: 24 avril 2024 à 16:10:56 »
PROLOGUE

Le Bois d’Épines, Fin 608 AR

Le Major Victoria Haley n’eut pas le temps de réfléchir lorsque la terre se mit à trembler pour révéler de nouveaux esclaves asservis sans cervelles et des nécroserfs morts-vivants grimpant à travers les fissures élargies dans le sol. Ils s’en prirent immédiatement aux soldats cygnaréens désorganisés tout autour d’elle. Les mitrailleuses de son Cyclone virèrent à l’orage sous la chaleur des incessants tirs et envoyaient de la vapeur s’élever sous la pluie. Son esprit était relié au cortex de la machine, la poussait, dirigeait ses tirs. Peu importe le nombre de balles tirées, ce n’était qu’une marée sans fin d’ennemis.

Le warjack léger Luciole combattant sur son flanc gauche était déjà bien amoché, mais elle l’envoya intercepter plusieurs nécroserfs se rapprochant d’une de ses escouades de pionner, effectuant un repli tactique de ce côté. L’engin était illuminé par de l’énergie voltaïque bleue, mais sa lumière fut rapidement avalée par la pluie battante et ses pieds s’enfoncèrent profondément dans une épaisse boue. Le sergent pionnier continuait à faire avancer et tirer ses hommes, mais elle peut lire la panique dans les yeux. Son flanc droit était tenu par la warcaster morrowéenne Constance Blaize, ainsi que par ses warjacks et ses Chevaliers Précurseurs désormais vêtus d’armures argentées. Ils résistèrent à l’assaut, mais furent abattus l’un après les autres.

Un énorme fracas secoua le sol alors que deux Krakens déchaînés renversaient l’un des Conquêtes khadoréen plus proche de la forteresse principale cryxienne. Haley s’approcha à grand pas, l’adrénaline lui faisant momentanément oublier son état de faiblesse. Elle avait gardé un warjack Chasseur à proximité, utilisant son canon et ses obus perforants sur des cibles difficiles. Elle l’incita mentalement à tirer sur le Kraken le plus proche. C’est alors qu’elle aperçut Deneghra. Sa jumelle corrompue se tenait en retrait entre les colosses cryxiens, les dirigeant.

Du flanc droit de Haley surgit la forme brillante du Seigneur Commandeur Striker, les bobines sur son dos renforçant son armure de warcaster. Il leva son épée Vif-Argent au-dessus de sa tête et s’élança avec son warjack Vî Arsouye vers le Kraken le plus proche. Son épée brillait de mille feux lorsqu’elle trancha l’un des tentacules griffus et cisailla la jambe blindée la plus proche. Vî Arsouye frappa le Kraken de l’autre côté avec son marteau sismique. Le colosse chancela, puis s’inclina lorsque Stryker bondit pour lui enfoncer son épée dans les entrailles, dans une gerbe d’étincelles et de métal tordu. Le Kraken commença à basculer, et Stryker dut plonger pour s’écarter.  Vî Arsouye s’interposa pour dévier la machine paralysée, dont la masse pressa le warjack dans la boue, le clouant partiellement au sol.

L’un des Krakens déchira le Mur-Tempête paralysé et fut assailli par le Dernier Conquête, tandis qu’un autre se rapprochait de Stryker. Haley sursauta en voyant un tentacule s’élancer, le manquant de peu. Vî Arsouye se débattait toujours, essayant de dégager une jambe pliée sous la masse du Kraken abattu. Sans réfléchir, Haley tendit la main et rassembla son pouvoir, essayant d’atteindre le cortex étranger du Kraken pour stopper son attaque alors que son autre tentacle se cabrait tel un serpent en colère. Une douleur lancinante et une lumière blanche éclatèrent dans sa tête comme si un tison l’avait frappée, et la douleur se propagea dans sa poitrine et ses jambes, faisant battre son coeur de manière erratique. Elle tomba à genoux, luttant pour respirer, sa vision se brouillant.

Le tentacule du Kraken s’abattit sur Stryker, brisant son champ d’énergie, froissant son armure de warcaster et le renversant dans la boue. Les griffes du Kraken s’approchèrent à nouveau de lui. Se compressant la tête de douleur, Haley ne pouvait rien faire. Une griffe s’empara de lui et le souleva dans les airs, et son épée lui échappa des doigts. L’iris d’une trappe le long du côté de la coque centrale s’ouvrit, et en une seconde Stryker avait disparu, entassé à l’intérieur pour être méthodiquement désassemblé par la machine, sa vitalité et son âme extraites pour alimenter ses armes nécromantiques. L’instant d’après, les canons écorcheurs du colosse tirèrent, envoya,t des pointes noircies perforer l’armure de Constance Blaize. Elle chancela et tomba en toussant du sang.

Autour de Haley, il n’y avait rien d’autre que du carnage, et elle voyait de flamboyantes flammes vertes se propager pour consumer les soldats n’ayant pas fui. Elle tenta de se relever, mais ne ut bouger. Toujours haletante de douleur, elle cria tandis que d’atroces crampes tordaient ses jambes et ses bras et forçaient ses mains à se serrer. La tour cryxienne surgie avec une puissance impie, et le corps de Deneghra semblait être un phare, la source du feu de forêt se propageant.

Haley ne s’était jamais sentie aussi désespérée. Lorsqu’elle croisa le regard de sa jumelle, elle fut surprise de voir de la pitié dans l’expression de la sorcière-fantôme. Elle s’entendit crier alors que sa peau commençait à brûler.
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Roman - À Quel Prix
« Réponse #4 le: 24 avril 2024 à 16:19:38 »
PARTIE UNE

Port Bourne, Premières Semaines de 609 AR

Le coeur de Haley s’emballe douloureusement lorsqu’elle se réveille de son cauchemar, une expérience désormais familière. Elle cligna des yeux et regarda autour d’elle, découvrant les murs familiers de la simple chambre d’hôpital qui était devenue son indésirable foyer. Une aide-soignante s’approchait d’elle, lui apportant un verre d’eau fraîche et un carré de tissu propre pour sécher son front. Le jeune femme prononça des paroles apaisantes et calmes, mais Haley les écouta à peine. Le départ de la femme fut un soulagement.

Le réveil paniqué de Haley n’était pas moins déconcertant pour s’être produit de nombreuses fois auparavant. Chaque fois qu’elle était confrontée à ces horribles rêves, elle sentait réelle et fraîche, sans aucune impression de fouler à terrain familier. Après son réveil, elle pouvait dire que les détails étaient subtilement précédents, les morts mourant de manière distincte mais tout aussi horrible. La principale constante était un totale sentiment d’impuissance.

Lors de la réelle bataille du Bois d’Épines, c’était la warcaster morrowéenne Constance Blaize qui était venu au secours de Stryker. Heureusement, aucun d’eux n’était mort, mais Haley n’y était pour rien. Elle s’était contentée d’assister, impuissante à aider. L’instinct du champ de bataille, ancré depuis longtemps, l’avait poussée à utiliser son pouvoir arcanique sans prendre le temps de réfléchi à la façon dont un tel acte se retournerait contre elle. Cela avait provoqué un emballement du poison réactif à la magie persistant dans ses veines, libérant des toxines destructrices inonder ses muscles et ses organes internes et l’avaient presque tuée. Depuis son retour à Port Bourne, son état ne s’était pas améliorer.

Le Pair Vigilant Carrick Dolan entra dans la pièce et s’approcha de Victoria Haley. Elle remarqua vaguement qu’il était de plus en plus négligé et que ses yeux étaient assombris. Elle soupçonna qu’il dormait encore moins qu’elle.

Prenant sa main pour sentir son pouls, il demanda : « Comment nous sentons-nous aujourd’hui ? » Elle ignora la question ; il avait été répété assez souvent pour avoir perdu tout sens. Il poursuivit : « je suis convaincu que les cauchemars ne sont qu’un effet secondaire du poison. Je ne m’attarderais pas dur eux. Il ne veux tien dire ».

Lorsqu’ils s’étaient rencontrés pour la première fois à Corvis, immédiatement après son empoisonnement, il lui avait été présenté comme le plus grand expert de l’Église de Morrow sur les afflictions cryxiennes, un érudit de l’Ordre de l’Illumination. Ses références impressionnantes références lui avaient donné l’espoir, ce qu’elle regrettait de plus en plus à mesure que le temps – et sa malade – s’écoulait. Il n’avait montré aucun signe de progrès dans l’amélioration de son état. Pourtant, ce n’était pas la faute de Carrick si elle était en train de mourir. Les efforts qu’il déployait pour l’aider ne faisaient que souligner la futilité de trouver un remède.

Lorsqu’elle s’était permise d’écouter les paroles empoisonnées de Deneghra, elle avait eu l’impression de se rendre. Même à ce moment-là, elle avait su avec une absolue certitude qu’elle était manipulée. Mais elle ne pouvait pas ignorer l’avertissement de Deneghra - elle ne pouvait pas permettre que le Général Nemo soit assassiné. Sa voie avait été tracée pour elle. Elle avait dansé comme une marionnette sur des ficelles.

D’autres fois, elle rêvait qu’elle se hâtait d’arriver à Corvis, qu’elle remontait le Fleuve de la Langue du Dragon tandis que les nécroserfs sortaient des eaux sombres pour envahir le bateau. Dans ces rêves, elle se réveillait haletante après avoir été entraînée sous l’eau. Parfois, elle atteignait Corvis pour trouver l’assassin avec sa lame empoisonnée debout au-dessus d’un cadavre, les yeux de Nemo plats et sans vie alors que le vent remuait ses cheveux blancs, le sol imbibé de sang répandu.

Même dans les rêves, sa magie ne répondait pas à sa volonté.

Dans une certaine mesure, ces cauchemars avaient perdu de leur impact, du moins après son réveil. Mais son esprit était inventif et trouvait de nouvelles façons de la laisser à bout de souffle et le coeur battant de panique. Carrick l’avait réprimandée pour avoir stressé son corps alors qu’elle devait se reposer, comme si elle avait le moindre contrôle sur les échos extraits de ses souvenirs.

Il emmena la seringue de sang au fond de la pièce, où une série de tubes et de béchers en verre étaient alignés sur une table. Peu de temps après qu’elle ait été atteinte pour la première fois, Dolan avait tenté une transfusion sanguine, avant de constater que la substance envahissante s’était répandue dans tout son corps, et pas seulement dans son sang. Depuis, il avait essayé d’autres méthodes pour isoler la toxine, y compris les tests alchimiques qu’il effectuait maintenant sur le sang fraîchement prélevé. Une batterie familière d’autres tests s’ensuivit. Sa respiration s’avéra superficielle ; essayer de prendre des respirations plus profondes provoqua une douleur fulgurante dans sa poitrine. Lorsqu’elle essaya de serrer sa main aussi fort qu’elle le pouvait, voulant sincèrement le voir se tortiller, il ne montra aucune gêne  et elle resta haletante. Carryck fit des bruits neutres et écrivit des notes sur son registre, mais elle n’eut pas besoin de les lire.

Son état s’aggravait.

Avant de partir, Carrick se tourna vers elle et lui dit : «  Vous devez savoir que nous partons pour Caspia dès que certaines dispositions auront été prises. Je voulais éviter de vous déplacer, mais je pense pas que nous puissions attendre plus longtemps ».

« Caspia ? » demanda-t-elle. « Mais une opération d’envergure se prépare au Bois d’Épines. Je dois être ici, au cas où ils me rappelleraient. Ils auront besoin de tous ceux qu’ils peuvent rassembler ». Elle détestait que sa voix semble plus désespérée que déterminée.

« Major nous en avons déjà parlé. Je comprends votre désir de reprendre du service, mais vous devez admettre que c’est impossible. Vous seriez une distraction et un préjudice pour les personnes vous entourant. Pensez-vous honnêtement que vous êtes prête au combat dans votre état ? »

Haley savait qu’il avait raison, mais cela ne changeait rien à son indignation. « Il y a certainement quelques chose que vous pourriez me donner, une potion ou une pilule, qui donnerait de la force et me garderait alerte si je devais me battre. À quoi servirais-je à Caspia ? »

« Nous avons dépassé ce stade Major. Vous devez vous concentrer sur la préservation de vos forces. Dans la capitale, nous pouvons faire en sorte que les meilleurs esprits de Cygnar oeuvrent à guérir votre maladie ».

« Je pensais que c’était déjà le cas », dit-elle.

Il lui rendit un triste sourire. « Il est clair que nous avons besoin d’un nouvel avis. D’un regard neuf. Sans parler de meilleure installations. C’est notre meilleure chance. J’ai épuisé tout ce que je pensais pouvoir faire ». Il fronça les sourcils et déglutit. Elle soupçonnait qu’il regrettait d’avoir dit cette dernière chose, mais elle appréciait son honnêteté. Elle en avait assez des tentatives d’instiller de faux espoirs. Il s’éclaircit la gorge et dit : « Essayez de ne pas vous forcer en attendant. Reposez-vous autant que vous le pouvez. Il partit en fermant la porte derrière lui ».

Ses paroles lui donnaient seulement l’envie d’en faire plus. Elle sortit de son lit et se força à faire plusieurs pompes et redressements assis, même si cela la fatigua et la rendit étourdie. Bien trop consciente qu’elle était capable d’en faire tellement plus, elle continua jusqu’à ce qu’elle puisse à peine se remettre au lit.

* * *

Elle était reconnaissante que la noirceur l’ait emportée, son esprit trop épuisé pour rêver. La prochaine fois qu’elle ouvrit les yeux, elle ressentit une viscérale poussée de soulagement devant le visage l’observant, les sourcils blancs en désordre. « Général Nemo », dit-elle. Elle se redressa, ce qui provoqua un vertige et une explosion de taches devant ses yeux.

Il tendit la main et la stabilisa, le regard inquiet. « Doucement, Major. Moi aussi, je suis content de vous voir ».

Elle se remit dans une position assis plus naturelle. Le général avait l’air fatigué. Il était manifestement venu la voir dès son retour du terrain, sans prendre le temps de se reposer ou de se rafraîchir. Il s’assit lourdement sur une chaise tirée à côté de son lit, semblant content du répit.

« J’ai entendu dire que vous aviez été appelé pour des troubles à Clabeck », dit-elle en essayant de reprendre ses esprits. Elle se sentait encore groggy par le sommeil. Nemo ne portait pas son armure de warcaster, mais d’innombrables petits indices dans son attitude, son expression et l’était de son uniforme suggéraient qu’il avait récemment participé à une bataille. « C’est résolu ? »

« En quelque sorte », répondit-il sombrement. « Une vilaine affaire avec laquelle je ne vous dérangerai pas ». Il resta silencieux un moment et elle le laissa faire, même si des questions envahissaient son esprit. Il regarda par la fenêtre, perdu dans ses pensées. Finalement, il ajouta : « Nous avons perdu des gens. Y compris un vieil ami ».

« Je suis désolée », déclara Haley. Elle savait très peu de choses sur les officiers les plus proches de lui. Elle ne put s’empêcher de demander : « À  quoi faisiez-vous face ? J’ai entendu quelques rumeurs, mais rien de solides ». Il lui lança un regard mesuré et elle ressentit une vague d’indignation. « Je suis allongé ici depuis des jours, et tout le monde semble déterminé à me garder dans l’ignorance ». Ses yeux s’adoucirent et il gloussa. « Je comprends. La situation à Calbeck était inattendue. Il a trop de chose à dire, mais pour résumer, la ville a été prise d’assaut par une dangereuse branche de cyrissiste ».

« Des cultistes de la mort ». Elle trouva le terme étrange dans ce contexte, venant en particulier de quelqu’un s’étant battu pendant des décennies contre le Cryx. « Les cyrissistes ne sont-ils pas obsédés par les mathématiques, l’ingénierie, l’astronomie ? »

« Oui, mais ceux-là ont d’autres . . . intérêts. Ils veulent devenir des machines, pas seulement les construire. Nous savions depuis un moment que certains d’entre eux avaient réussi à se transformer en mécanique, mais je ne savais pas jusqu’où ils étaient allés. Ils étaient des centaines à Calbeck, mais très peu étaient encore de chair et de sang. Des rangs entiers de ce qui était autrefois des hommes et des femmes désormais logés dans des corps faits d’engrenages et d’acier. Leurs âmes sont arrachées de leurs corps et scellées dans des boîtes de métal et de cristal intégrées aux corps ». Il marqua une pause et secoua la tête, son dégoût étant évident. « Ils sont bien organisés et bien armés, et leur technologie est étonnamment sophistiquée. Maintenant, nous savons qu’ils ont aussi une armée ».

« Morrow ! Je n’en avais aucune idée ».

« Personne ne le savait ». Il avait examiné ses mains tout en parlant, mais il leva les yeux et se redressa sur sa chaise. « Nous les avons repoussés, mais non sans mal. Ce que nous avons vu à Calbeck qu’ils avaient de plus grandes aspirations. Ils veulent changer Caen. Nous les reverrons, j’en suis certain. J’espère que nous avons obtenu un sursis ».

Il était clair qu’ils retenait beaucoup qu’il retenait beaucoup – de nombreuses choses demeuraient inexprimées. Elle ajouta : « Nous n’avons vraiment pas besoin d’une autre menace à l’intérieur du pays ».

Il eut un rire de surprise. « C’est un euphémisme. Nous trouverons un moyen de nous occuper d’eux, j’en suis sûr. Jusqu’à ce qu’ils fassent un autre geste, nous n’avons qu’à attendre qu’ils se révèlent. Il fronça les sourcils et admit après une pause : « Ils ont même essayé de me recruter ».

« Vous avez parlé avec eux ? »

« Oui, l’un d’entre eux, encore en vie, m’a approché. Une fille ». Il sembla se rappeler à qui il parlait et se racla la gorge. « Une jeune femme, je veux dire. Elle s’appelle Aurora. Peut-être plus jeune que vous de quelques années seulement et également warcaster. Mais naïve. Protégée. Elle a été élevée en ne connaissant rien d’autre que cette étrange religion. Elle espérait me convaincre de les rejoindre ».

« Il était clair qu’elle était mal informée », dit Haley, considérant que Nemo avait offert tout sa vie à la défense de Cygnar. « Qu’est-ce qu’elle vous a proposé ? »

Son expression devint plus neutre, mais la lassitude semblait s’accumuler dans ses yeux. « Immoralité ». Au bout d’un moment, il leva la main et fit geste pour se désigner. « Ils ne laissent pas leur semblables devenir vieux. Ils pensaient que je leur donnerais mon âme en échange de l’absence de maux de dos et de perte d’audition. Je leur ai dit que je n’étais pas intéressé par un corps en métal ».

Ils échangèrent un regard. Elle ajouta : « Cela a dû être tentant. Une vie ne semble pas suffisante, n’est-ce pas ? »

« Une vie, c’est beaucoup. Ce qu’ils font est contre nature, impie. Ce n’est pas si différent de devenir mort-vivant. Non, je vais juste garder mon dos douloureux, merci beaucoup ». Il poussa un familier et attachant grognement.

Haley sourit. « Vous avez entendu parler de la promotion de Stryker, je présume ? »

Nemo se renfrogna, même si sa colère était clairement, au moins en partie, feinte. Il dit : « Je jure que ce garçon a essayé de trouver un moyen de me surpasser pendant la moitié de sa carrière militaire. Lord Généra, en effet ».

« Que savez-vous de sa mission ? Il a embarqué la plupart des soldats de la ville et s’est dirigé vers le nord. Je n’ai pas été invité au briefing ».

« Honnêtement, je n’ai pas encore été entièrement informé de la mission de Stryker, même si j’ai entendu certaines choses. Un espion ordique a découvert que des cryxiens essayant de faire passer quelque chose d’important à travers l’Octelande. Stryker est avide de victoire, ce que je peux comprendre. Nous en aurions bien besoin. J’espère juste qu’il ne prendre pas trop de risque pour l’obtenir ».

« Allez-vous le rejoindre ? Demanda-t-elle.

Il secoua la tête. « Je me concentrerai sur la planification  de notre éventuel retour au coeur du Bois d’Épines. Nous ne pouvons pas donner à Cryx une chance de se regrouper. Il y a beaucoup à faire pour se préparer, et c’est à moi et au Général Duggan qu’il incombe de le faire. En attendant, je serai là si vous avez besoin de quoi que ce soit ». Sa voix grossit sur ce dernier point. Cela lui rappela qu’il avait perdu sa femme à cause de la maladie alors qu’il était en mission et que par la suite il s’était éloigné de sa fille. C’était un sujet qu’il n’aimait pas aborder.

Leur conversation s’orienta vers d’autres sujets et elle parvint finalement à lui soutirer des détails sur les combats de calbeck, une histoire qu’il accepta une fois qu’il eut surmonté sa réticence initiale. Puis il remarqua qu’elle faiblissait et insista sur le fait qu’il devait s’occuper de certaines affaires urgentes. Elle ne put s’empêcher de tendre la main pour lui prendre le bras.

« Ils m’envoient à Caspia », dit-elle.

Ils plissa les yeux. « C’est sans doute mieux ainsi », répondit-il après un bref instant.

« Je préférerais rester proche du front. Je peux aider ici. Je peux toujours contrôler les warjacks ». Elle le prononça avec fermeté, avec confiance, mais elle savait que son désespoir était évident. « Je ne serai pas envoyé à Caspia pendant que tous ceux que je connais et que je respecte mettent leur vie en jeu ».

Il retira son bras, le regard sévère. « Vous n’êtes plus en service actif, Major, et pour une bonne raison. Vous l’avez persuadé de risquer votre vie une fois, mais pas une seconde fois. Votre seule tâche est d’obéir à vos médecins et de vous rétablir. Je veillerai à ce que des lettres soient envoyées pour vous tenir au courant de la situation ». Son expression s’adoucit et il lui tapota la main. « Mais jusqu’à ce que vous partiez, je suis là pour vous, vous comprenez ? Envoyez-moi chercher s’il y a quoi que ce soit que je puisse faire ? Compte tenu de son apparence habituellement bourrue, cette tendresse était plus déstabilisante que tout ce que Dolan avait dit.

* * *

Ce soir-là, Haley passa un certain temps à regarder les élégants mais anguleux contours de la prothèse métallique remplaçant son bras droit manquant. Elle ne la portait pas pendant son sommeil, mais la fixation de l’épaulière et des sangles à son mignon faisait désormais partie intégrante de sa routine matinale.

Elle la portait sans son armure de warcaster, qui avait été conçue pour s’y intégrer. Elle possédait ses propres petits condensateurs pour fonctionner seul, mais sans l’énergie de la turbine arcanique de son armure, sa force était considérablement diminuée. D’ordinaire, cela ne la dérangeait pas, car elle pouvait encore fonctionner de la même manière qu’une main vivante. L’utilisation du bras ne stimulait pas le poison dans son système, probablement pour les mêmes raisons qu’elle pouvait toujours contrôler les warjacks. Elle était en sécurité tant qu’elle ne puisait pas dans l’énergie arcanique et n’invoquait pas la magie runique.

Elle se souvenait parfaitement d’avoir essayé de s’habituer à la prothèse alors qu’elle se remettait du traumatisme causé par la terrible blessure infligée par son ancienne jumelle. Une partie de l’angoisse de ces jours-là venait de l’écoeurant sentiment d’avoir tué sa sœur, même s’il ne faisait aucun doute qu’elle avait eu raison de le faire. Elle avait également fait des cauchemars récurrents, revivant l’affrontement au cours duquel son conflit avec Deneghra avait trouvé son inévitable conclusion.

Au début, elle avait considéré son bras artificiel avec dégoût, grimaçant intérieurement lorsque ses innombrables engrenages et servomoteurs émettaient des clics doux et métalliques. Sa chair avait l’habitude de démanger et de gratter à l’endroit où elle s’unissait au mécanisme. Il avait fallu du temps pour l’accepter. En quelques semaines, elle s’acclimata, cependant, et bientôt elle trouva que cela lui servait aussi bien que son bras vivant. Mieux, à certains égards, bien qu’elle soit encore parfois prise au dépourvu lorsqu’elle voit son reflet. Il était facile de l’oublier.

Maintenant, elle se retrouvait à la regarder avec quelque chose qui approchait de la tendresse. Elle préférait l’attacher dès le matin pour ne pas avoir à fixer le moignon de son bras. Celui lui permettait de devenir symétrique, entière. Elle tourna le poignet et ouvrit les doigts métalliques un par un. Les composants bougeait avec son qu’elle trouvait rassurant, presque méditatif. Cela la distrayait de la douleur profonde dans sa poitrine et ses poumons.

Était-ce mal de ressentir quelques chose qui ressemblait à l’espoir sur la base de ce que Nemo avait décrit ? Il était impossible de ne pas se demander si cette technologie pourrait être appliquée pour guérir son état, d’une manière ou d’une autre, même si elle n’était pas poussée à l’extrême. Elle devait en savoir plus, mais comment ? Si elle voulait vraiment poursuivre dans cette voie, il lui faudrait entrer en contact avec un membre de la foi ayant connaissance sa technologie la plus avancée. Et elle avait peu de temps.

Il y avait aussi le fait que des membres armés de cette religion venaient d’entrer en guerre contre le Cygnar, mais elle savait à quel point les fidèles de Cyriss étaient variés. D’après elle, la plupart des cyrissistes étaient des gens ordinaires – des professeurs d’université, des ingénieurs, des astronomes. Elle avait rencontré plusieurs adorateurs de Cyriss au cours de sa carrière militaire, remontant à sa première formation de warcaster. Ils lui avaient fait une impression généralement favorable de personnes intelligentes et réfléchies. Certaines des innovations attribuées à Sebastian Nemo avaient impliqué l’étude de leur technologie. Il était clair qu’ils avaient accompli des choses que d’autres pouvaient à peine imaginer. Le contingent armé que Nemo avait affronté à Calbeck ne devait être qu’une branche particulièrement dangereuse.

Cela semblait une piste à explorer. Rien contre Carrick Dolan, mais l’Ordre de l’Illumination était une organisation surtout connue pour traquer et tuer les infernalistes et les nécromanciens, pas pour ses percées innovantes. L’Église de Morrow ou ses organisations affiliées étaient-elles le meilleur endroit pour trouver une réponse ? Elle se considérait comme une morrowéenne et avait parfois trouvé du réconfort en priant l’un ou l’autre des ascendants de la Trinité Martiale. Mais même selon la doctrine morrowéenne, la prière ne suffisait pas, il fallait poser des questions, agir, chercher des solutions, parfois en empruntant des voies que d’autres craignaient d’emprunter.

La porte s’ouvrit et Carrick Dolan entra, secouant la tête d’un air désapprobateur de la trouver encore éveillée, la lampe toujours allumée. « Vous devriez être endormie à l’heure qu’il est, major ». Il entra, apportant avec lui une petite fiole de verre remplie d’une liquide violet familier. « Cela devrait vous aider. J’ai fait des ajustements qui devraient atténuer les cauchemars ».

Haley accepta la fiole et se sentit agacée lorsqu’il attendit qu’elle la boive, comme sil elle était une enfant. Les jours où la douleur était la plus forte, elle acceptait parfois les médicaments, mais aujourd’hui elle était réticente. Elle ne voulait pas que ses facultés s’émoussent. Pourtant, sous son regard attentif, elle se sentit obligée de pencher la fiole et d’en avaler le contenu, grimaçant à l’amertume qu’elle ressentit sur sa langue.

Il dit : « Oh, je voulais vous dire que nos plans ont été accélérés. Nous prendrons le Dame Ellena au départ de Braimarché demain. Il faudra partir tôt. J’espère être à Caspia dans la soirée ». Il inclina la tête et partit en refermant la porte.

Les mots lui causèrent un choc de peur. L’idée d’être envoyée à Caspia la remplit de panique. Elle avait l’impression de se rendre, de faire un dernier geste futile. Cela montrait à quel point ceux qui la traitaient pataugeaient dans l’obscurité. Elle mourrait si elle allait à la Cité des Murs en ce moment. Elle le savait, avec une froide certitude défiant toute raison.

Avant même qu’elle ne se rende compte qu’elle avait une décision, elle se précipita hors du lit, ignorant les pointes de douleur qui lui montaient aux jambes. Elle récupéra un bol à laver sur une cuvette aussi silencieusement que possible, elle introduisit un doigt dans sa gorge et s’étouffa, puis vomit dans la cuvette aussi silencieusement que possible, en grimaçant contre le goût de la bile. Le liquide violet remonta en même temps que son repas. Elle espérait avoir purgé suffisamment de drogue pour qu’elle ne l’affecte pas.
Citation de: Maître Yoda
Trop gentil tu seras, dans le côté obscur tu l'auras.

Si vous constatez des fautes d'orthographe et/ou de conjugaison, des phrases à remanier pour une meilleur compréhension.
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« Réponse #5 le: 24 avril 2024 à 16:22:04 »
PARTIE DEUX

Alors qu’elle se tenait derrière une épaisse haie à la périphérie de l’hôpital de la garnison, Victoria Haley savait qu’elle n’avait pas réfléchi. Elle était consciente d’être impulsive et imprudente ; il lui avait semblé nécessaire de faire un geste avant qu’elle ne s’en dissuade. Pourtant, malgré l’air frais, elle ressentit un frisson d’excitation.

Demain, lorsqu’ils découvriraient qu’elle était partie, elle serait coupable d’une absence non autorisée, une faute grave. Non pas que son arrestation soit la préoccupation première de ses supérieurs, étant donné que leur principale préoccupation était de la maintenir en vie. Ils pourraient même conclure que son affliction l’avait rendue déséquilibrée, ce qui l’admettait, était peut-être vrai. Quoi qu’ils fassent de ses motivations, en tant que warcaster, sa vie valait plus que celles des autres. C’était un calcul froid, mais avec lequel elle était assez familière. Elle était un atout militaire spécial et sa vie n’était pas la sienne – elle appartenait à l’armée. Sa maladie avait-elle changé sa valeur perçue ? Ils devaient savoir que ses perspectives étaient sombres. Peu importe ce que les autres pensaient, cependant, elle savait que Nemo enverrait des gens à sa recherche.

Elle se demandait ce qu’elle pouvait bien espérer gagner seule dans ces conditions. Quelque chose au plus profond d’elle-même la poussait à agir, à prendre les choses en main. Elle ne pouvait pas rester sans tien faire alors que son destin reposait sur d’autres, surtout s’ils se raccrochaient à des bouts de ficelles. Dolan avait assez de son sang pour poursuivre son œuvre.

Repoussant le doute, elle se glissa dans les rues sombres de Port Bourne, loin de l’hôpital. Elle ralentit en approchant du périmètre extérieur du quartier militaire, où une sentinelle gardait la route la plus proche. Elle fut heureuse de constater que la porte était ouverte, même si elle était surveillée.

Lorsque la ville avait été récemment assiégée, le quartier militaire s’était refermé sur lui-même. Cela lui avait permis de rester en grande partie intact alors que le reste de la ville était envahi. Depuis que le Cygnar avait repris les rues et repoussé le Cryx dans le Bois d’Épines, le quartier militaire avait rouvert ses portes et accueilli de nombreux réfugiés de la ville, leur offrant un logement temporaire jusqu’à ce qu’ils puissent restaurer leurs propres maisons au milieu des rues dévastées par la guerre. Les soldats surveillaient toujours les allées et venues, attentifs aux potentiels troubles. Les deux postés ici semblaient ennuyés mais pas inattentifs, bien dans cette transe de vigilance familière à tous ceux qui montaient la garde.

Elle resta en retrait, cachée par l’ombre d’un bâtiment en briques adjacent à la route. Elle aurait pu se frayer un chemin devant les gardes en invoquant son rang. Mais elle n’était pas en uniforme, ce qui rendrait la rencontre plus mémorable, et elle voulait donner le moins d’indices possibles à ceux qui chercheraient à la retrouver. Elle attendit, réfléchissant à ce qu’elle savait de la disposition du quartier et de la ville.

« Ne bougez pas ! » dit vivement l’un des gardes. Haley sursauta, mais ils lui tournaient le dos, observant un groupe d’une demi-douzaines d’hommes et de femmes s’approchant depuis l’extérieur du quartier.

C’était un groupe de jeunes soldats, peut-être des cadets de l’Académie Stratégique revenant de permission. Ils s’arrêtèrent et s’efforcèrent de répondre aux questions des vigiles. Ils parlaient trop bas pour qu’elle entende leurs paroles, mais la posture et le rituel lui étaient familiers. C’était juste la distraction dont elle avait besoin. Sans chercher à se dissimuler, elle se dirigea vers la porte d’un pas assuré, choisissant son chemin pour éviter le regard des sentinelles.

L’un des plus jeune soldats de retour l’aperçut. Elle lui adressa un rapide sourire, et il cligna bêtement des yeux avant que le garde lui posant des questions n’exige à nouveau son attention. Haley s’éclipsa avant que quelqu’un d’autre ne regarde ce qu’il fixait. Elle s’inclina son corps de manière à ce que son bras mékanique soit moins visible à son passage. Elle tourna rapidement dans une autre rue latérale et attendit à nouveau dans l’ombre, contrôlant sa respiration et écoutant tout bruit de poursuite. Même ce peu d’excitation lui avait coupé le souffle, et elle dut en faire une pause pour récupérer.

Une petite victoire, mais qu’elle savoura. Elle continua d’emprunter les rues secondaires pour se rapprocher du fleuve. L’installation de maintenance de ‘jack de Lyle Garner était située au nord de la ville, facilitant l’accès aux lignes de ravitaillement desservant le front. Elle pouvait entendre le bruit de l’eau dévalant les chutes servant à détourner les eaux de ruissellement des écluses du fleuve.

Haley était si heureuse d’avoir atteint sa liberté sans se faire remarquer qu’elle ne réalisa pas tout de suite que le quartier qu’elle traversait était particulièrement en mauvais état. Elle ralentit son allure et fit le point, remarquant que plusieurs des bâtiments autour d’elle avaient été entièrement réduits en décombres et n’avaient pas encore été reconstruits. Même lorsque la ville était intacte, il s’agissait d’un quartier pauvre, souvent négligé par la garde municipale tard le soir.

Il semblait que cette zone avait subi des bombardements de la part des khadoréens avant qu’ils ne passent, probablement pendant qu’ils repoussaient les défenseurs cygnaréens se repliant vers le quartier militaire. Il y avait également des signes de l’incursion cryxienne, comme la pierre fondue et les débris de métal bloquant une porte voisine ayant été arrachée de ses gonds. L’entrée était arrosée d’un liquide, et même à cette distance, elle reconnut l’odeur âcre de la bile.

Haley avait entendu de nombreuses histoires sur ce que la ville avait enduré, mais c’était autre chose que de voir la destruction de ses propres yeux. Elle avait manqué les batailles ici alors qu’elle s’était empressée d’aller à Corvis pour avertir Nemo de la tentative d’assassinat. Elle ressentit une pointe de culpabilité à cela, sachant que son absence avait été précisément ce que Deneghra avait prévu, facilitant l’invasion de Cryx sur les talons de Khador. Peut-être aurait-elle pu affaiblir ou ralentir les morts-vivants, permettant à davantage de civils de fuir. Les horreurs qu’ils avaient endurés aux mains des cryxiens ayant déferlés dans les rues sur les talons des khadoréens avaient été atroces – des milliers de personnes systématiquement massacrées et leur cadavres transformés en nécroserfs.

La lumière scintillante derrière les fenêtres au volets de plusieurs des bâtiments à moitiés détruits, suggérait une occupation, même si elle doutait que ce quartier ait été déclaré sûr. Ceux qui vivaient ici devaient donc être des squatteurs, et non des résidents légaux. Elle ne pouvait pas leur en vouloir d’essayer de survivre, en particulier avec la menace de l’hiver.

Alors qu’elle tournait eu coin de la rue, elle fut surprise de se retrouver face à un trio d’hommes rassemblés autour d’un baril de métal ouvert dans lequel ils avaient allumé un feu. Leurs vêtements n’étaient guère plus que des haillons superposés – vestiges de ce qui avaient été meilleurs vêtements, maintenant déchirés et salis. Leurs joues négligées et mal rasées étaient enfoncées sous des yeux maussades scintillant sombrement à la lumière des flammes. Elle s’arrêta brusquement et ses yeux rencontrèrent ceux du plus grand des trois, à sa gauche. Autour de sa tête était nouée une bande de tissu, mais dont les taches de sang étaient devenues noircies et sèches.

Les trois hommes se regardèrent et semblèrent parvenir à une sorte d’accord tacite. Le chef hocha la tête dans sa direction d’une manière que Haley n’aima pas. Ils s’avancèrent vers elle.

« Hé, vous avez de la monnaie madame ? » demanda la plus proche sur la droite, une homme avec la barbe la plus touffue du groupe. Il s’avança en même temps qu’il parlait, tendant sa main gauche. Sa main droite était posée contre sa jambe, tenant ce qui ressemblait  à une fine massue ou à un bâton lisse mais lourd.

Une lueur de ce qui pourrait être du métal dans la main du grand homme bandé à gauche attira son attention, bien qu’il cacha immédiatement ce qu’il tenait derrière sa jambe. Il s’avança également vers elle, tandis que le troisième se tenait un peu à l’écart et se déplaçait sur le côté, autour d’elle, en décrivant un arc de cercle de quelques pas. Elle recula de quelques pas. L’homme au bandage tenta un sourire, même s’il semblait vide « Ne vous inquiétez pas. Donnez-nous de la nourriture et nous vous laisserons tranquille. Aidez-nous ».

« L’autre dit : « J’ai perdu ma maison lors de l’invasion. Vous pouvez me donner un peu d’argent, n’est-ce pas ? »

Malgré leurs assurances, leur posture était prédatrice . « Je n’ai pas d’argent », déclara Haley. Alors qu’ils recommençaient à se rapprocher d’elle, elle lança un avertissement, « Vous ne voulez pas faire ça ».

L’homme au bandage perdit son sourire. Le troisième homme, celui qui boitait légèrement, semblait s’efforcer de se placer derrière elle pour lui couper la retraite. « Ce n’est pas une question de volonté, madame. C’est une question de besoin », revendiqua le premier. « Donnez ce que vous pouvez, et vous ne serez pas blessé ». Elle pouvait sentir l’alcool dans son haleine et vit que ses yeux étaient injectés de sang. Il puait le désespoir. Dans d’autres circonstances, elle aurait pu le plaindre, mais alors qu’ils s’efforçaient de l’entourer, elle ressentit une soudaine pointe de peur.

Jamais au cours de sa vie d’adulte elle n’avait eu peur des gens ordinaires. Le plus souvent, elle avait peur pour eux. Sur le champ de batailles, les occasions de ressentir la peur, voire le désespoir, n’avaient pas manqué. Plus que pour elle-même, elle avait craint pour ceux qui servaient à ces côtés, les inévitables victimes. Sa magie l’avait toujours accompagnée. La capacité de s’emparer des objets, des personnes, avec son esprit et de les déplacer où elle le souhaitait. Déchaîner une explosion d’énergie arcanique par une simple pensée. Créer une bulle de protection ou le temps s’écoulait différemment pour elle que pour ceux qui s’opposaient à elle. Avec son pouvoir à sa disposition, être encerclée n’était pas du tout intimidant. Elle pouvait séparer les ennemis un par un à sa guise, en particulier lorsqu’elle dirigeaient ses warjacks comme des extensions de sa personne. Celui lui avait semblé divin, et elle l’avait pris pour acquis, s’en délectait, sachant que cela faisait partie d’elle, comme ses poumons et son coeur.

Maintenant, c’était parti – ou inaccessible, du moins. Elle pouvait sentir sa magie juste au-delà de sa portée. Si elle l’a joignait maintenant, le poison arcanique persistant dans son corps pourrait la tuer. Étendant ses sens, elle sentir la lueur des cortexes de warjack au loin, mais aucun n’était assez proche.

Mais elle était plus qu’une warcaster, il y avait sa formation de soldat, d’officier. Elle redressa les épaules et projeta sa confiance, fixant le chef apparent. « Reculez », ordonna-t-elle. « Je suis officier dans l’armée. Vous ne voulez pas vous attirer de graves ennuis ».

Elle vit immédiatement qu’elle avait fait une erreur. Peut-être que d’autres personnes, à un autre endroit et à un autre moment, auraient été intimidées, mais elles ne l’étaient pas. L’expression de l’homme bandé passa de vide et affamée à furieuse : ses yeux et ses narines s’écarquillèrent, et sa bouche se crispa. La posture des deux autres trahissait une colère commune similaire.

« C’est censé nous impressionner ? » demanda l’homme à la tête bandée, en haussant le ton. « C’est de votre faute si c’est arrivé ! C’est de votre faute si ma femme est morte, si ma maison a été détruite ! L’armée n’a pas réussi à les arrêter et s’est cachée derrière ses murs. Malédiction sur l’armée ! » Il lui cracha dessus et s’élança, tendant sa main libre. Elle pouvait voir un petite couteau dans l’autre. Son ami se rapprochait également.

Haley aurait dû les éviter et s’enfuir, mais elle vit le couteau et ses réflexes entrèrent en action. Jusqu’à ce moment, son bras mékanique était caché sous sa veste, qu’elle avait drapée sur le côté. Sans réfléchir, elle attrapa le poignet du couteau de l’homme avec sa main mékanique. Elle n’avait pas autant de force qu’elle en aurait avec sa turbine arcanique, mais c’était suffisant pour contrôler ses mouvement. Elle serra, espérant le forcer à lâcher le couteau. Cela fonctionna, peut-être trop bien.

Dès que l’acier froid de sa prothèse le saisit, il poussa un cri étranglé, ses yeux s’agrandissant de panique. Elle serra trop fort, et quand il recula, elle sentit et entendit quelque chose céder dans son poignet. Le couteau tomba de ses doigts, mais ses yeux devinrent fous, à la fois terrifiés et furieux. Il se balança maladroitement sa main libre, essayant de la frapper du revers de la main.

Haley esquiva hors de sa portée, mais se retrouva trop près de l’homme au gourdin, qui la frappa en serrant les dents. Elle dévia le coup avec son bras vivant, ne pensant pas qu’elle portait pas d’armure à cet endroit. L’impact provoqua une poussée de douleur lancinante qui lui traversa le coude. Elle riposta avec un coup de poing de représailles, mais la douleur et sa faiblesse la privèrent de sa force. En pleine santé, elle l’aurait aplati, mais au lieu de cela, elle se contenta d’ébranler légèrement sa tête. Le troisième homme, maintenant proche d’elle, lui porta un coup de pied à l’arrière du genou.

Elle se tordit et chuta, atterrissant durement sur les pavés. Elle donna un coup de pied et ressenti un choc accompagné d’un grognement de douleur. Puis le bâton retomba, s’enfonçant dans ses côtes. Une explosion de douleur la traversa, envoyant des points lumineux dans ses yeux et l’empêchant de penser. Elle se mit en boule et se couvrit la tête avec son bras mékanique tandis qu’ils donnaient des coups de pied encore et encore, évacuant leur rage. Haley s’était habituée à la douleur, mais elle la submergeait toujours. Elle paniqua alors qu’elle peinait à respirer.

Après ce qui sembla être un long moment, les coups de pieds s’arrêtèrent, puis des mains se posèrent sur sa taille, tâtonnant autour de sa ceinture. Elle se tordit et donna un nouveau coup de pied, couvrant toujours sa tête avec ses bras. Les mains se retirèrent. Elle leva les yeux et vit l’homme couvert de bandage se faire tirer en arrière par les autres. Sa main blessée pendait à son côté. « Elle n’a rien »dit-il, la voix tremblante. Il respirait difficilement, les yeux écarquillés.

Les oreilles d’Haley bourdonnaient, mais elle aspira en une irrégulière bouffée d’oxygène dans ses poumons.

« Allons-y », dit le premier d’une voix suppliante. « Nous allons avoir des ennuis ».

Une autre demanda : « Elle est morte ? Ça risque d’être grave ? »

La première à nouveau : « Non, elle est vivante. Il faut qu’on sorte d’ici ! » Ce n’étaient pas de véritables criminels, juste des hommes désespérés et brisés.

Le temps qu’Haley parvienne à respirer à un rythme plus normal, ils étaient partis. Les taches s’estompèrent lentement, mais chaque respiration produisait une nouvelle douleur dans ses côtes. Elle se surpris à glousser, le son légèrement étourdi. Elle reprit le contrôle d’elle-même et s’assit, puis se força à se remettre sur ses pieds vacillant. Le monde tourna.

C’était à cela qu’elle était réduite. Trois hommes désespérés et affamés ayant été chassés de chez eux l’avaient vaincue. Elle avait repoussé une interminable marée de khadoréens à Nordgarde – combattu le Seigneur Liche Asphyxious et Deneghra au Temple de Garrodh – et s’était faufilée à Morteseaux pour affronter le reine des pirates satyxis. Elle connaissait désormais sa véritable valeur : elle n’était rien sans son pouvoir. Elle regarda sa main mékanique. Elle avait méprisé cette partie d’elle-même, mais maintenant, c’était tout ce sur quoi elle pouvait compter.

En grimaçant, elle boita vers le bruit de l’eau tombant, vers les écluses. Elle sentait quelque chose au loin, de petites lueurs telles des étoiles scintillant au fond de son esprit. Les cortexes des steamjacks et des warjacks. Heureusement, cela n’avait pas provoqué l’apparition du poison, et elle pouvait sentir où ils se trouvaient. Trouver la plus grande concentration d’entre eux la guiderait vers sa destination.

* * *

Elle devait faire peine à voir lorsque le Chef Lyle Garner ouvrit la porte latérale de son atelier, et la trouva là, appuyée contre l’encadrement, battue, sale et à bout de souffle. C’était un homme corpulent au visage large et amical, dont la majeure partie de sa joue gauche tachée par une grande tache de vin. Elle ne fut pas surprise de constater qu’il avait travaillé. Sa salopette était tachée de graisse et il s’essuyait les mains avec un chiffon en ouvrant la porte.7
« Major Haley ! Tu n’es pas censé être à l’hôpital ? » Ses yeux s’écarquillèrent lorsqu’il constata son état. « Est-ce que tu vas bien. Qu’est ce qui s’est passé ? » Il regarda par dessus son épaule, comme s’il s’attendait à voir des poursuivants derrière elle.

« Ça a l’air pire que ça ne l’est », répondit-elle, en entrant et en le dépassant. « Mais j’ai besoin de m’asseoir ».

L’intérieur de cette partie de l’atelier avait été transformé d’un bureau en habitation. Il contenait un chaos légèrement ordonné qui était d’une certaine manière réconfortant et familier pour Haley, rappelant des bâtiments similaires, souvent érigés à la hâte dans des garnisons ou des tentes attachées aux forces armées s’installant n’importe où pour une période de temps donnée. Elle pouvait voir où il dormait, un lit avec des couvertures froissées à côté d’une petite cuisinière à bois. Il y avait aussi une simple table qu’il utilisait probablement pour prendre ses repas et son café du matin. De l’autre côté de la pièce, un solide bureau était jonché de pièces de machines, d’engrenages et d’un assortiment d’outils éparpillés.

Par une porte intérieure ouverte, elle vit l’obscurité d’une autre pièce, beaucoup plus grande, le garage principal de l’atelier. La faible lueur des appareils mékaniques, provenant des condensateurs alchimiques et des accumulateurs arcanodynamiques. La lueur révélait de grands dispositifs squelettiques, des étaux et des cadres pour contenir des pièces de machine plus grande afin qu’elles puissent être examinées ou usinées sous tous les angles. Elle savait qu’il y aurait des grues attachées aux machines à vapeur pour soulever les pièces trop lourdes pour être portées par une personne. Elle pouvait sentir quelques cortexes là-dedans, et bien d’autres au-delà de ces pièces spécifiques. Cet atelier n’était qu’un petit bâtiment d’un complexe plus vaste où des centaines de mékaniciens militaires travaillaient sur une infinie série de machines cassées et abîmées, essayant de les rendre aptes au combat pour l’armée.

Le chef mékano l’a dirigea vers l’une des nombreuses vieilles chaises et en pris une autre pour lui. Elle ressentit un soulagement immédiat en s’enfonçant dans la chaise défoncée et laissa échapper un profond soupir. Sa tête tournait et une douleur profonde coïncidait avec les battements de son coeur. Même sans les coups qu’elle venait de recevoir, elle avait dépassé les limites de son endurance.

Garner se pencha en avant, visiblement inquiet. « Tu as été attaquée, »

« Une tentative d’agression en venant ici. Ça n’as pas d’importance ».

Il eut l’air confus. « Dois-je monter la garde ? »

« Non ». Elle s’exprima d’une voix austère, même si l’effort provoqua un choc de couleur dans sa tête. « Maintenant, arrête de faire des histoires et écoute ! » Il obéit immédiatement, les yeux écarquillés. « Personne ne doit savoir que je suis ici. C’est extrêmement important. J’ai besoin de ton aide ».

Elle se redressa sur sa chaise et un brasier d’agonie balaya son flanc, la faisant grimacer. Elle passa doucement sa main valide sur ses côtes, sondant l’étendue des bleus. Elle ne pensait pas quelque chose soit cassé, mais le poison l’avait rendue particulièrement vulnérable. Tout ce qu’elle faisait lui faisait mal.

« Bien sûr, major. Tout ce que tu veux ».

Rassuré par la rapidité et la sincérité de sa déclaration, elle déclara : « Tu as toujours été là pour moi, mais je prends un risque ici. J’ai une requête inhabituelle ».

« Je ne sais pas réparée les gens, major, seulement les machines. Peut-être devrions-nous faire venir ton médecin ».

« Dolan est la dernière personne à qui je veux parler. Il a déjà fait tour ce qu’il pouvait pour moi.  Écoute, Chef . . Lyle. Je sais que nous n’avons pas eu le temps de nous parler avant. Mais j’ai beaucoup apprécié ta visite à l’hôpital ». Elle réalisa qu’elle n’était pas très logique et s’arrêta pour rassembler ses pensées. « Écoute, nous avons vu beaucoup de choses depuis que tu m’as rejoint pendant la Guerre en Llael. Tu as fait fonctionner mes machines dans les pires circonstances. Je ne confie Thorn à personne d’autre qu’à toi. Ces machines que tu répares me maintiennent en vie. Je l’ai pris pour acquis, je ne sais si je t’ai jamais remercié pour ça ». Elle se sentit devenir étonnamment émotive, ses yeux larmoyant légèrement. Il lui fallut un effort de volonté pour se contenir. C’était la douleur, le contrecoup de l’adrénaline dépensée. Elle se sentait fatigué et la pièce tournait.

« Tu n’as pas besoin de- »

« Si », l’interrompit-elle. « Si, j’en ai besoin. Il y a des dizaines de personnes autour de moi, tout le temps, qui m’aident à faire mon travail, en tant qu’officier, en tant que warcaster. Ils m’ont été invisibles, ou presque. Ce n’est pas normal. Depuis que mon pouvoir m’a été ôté, je suis devenue plus conscient des choses que j’ai mal faites. Des choses que j’ai négligées. Je n’aurais pas pu faire ce que j’ai fait sans des gens comme toi ».

« Nous ne faisons que notre devoir, major ». Son visage rougit d’un nuance plus proche de sa tache de naissance, et elle put voir que ses paroles l’avaient affecté, suscitant à la fois fierté et embarras. « Mais je ne pense pas que tu sois venu ici pour me remercier ».

Haley déglutit et dit ; « Écoute, Lyle, je suis en train de mourir. Non, c’est vrai. Je n’ai pas voulu y faire face. Tout le monde a essayé de garder espoir, mais cela ne changera rien. Personne à l’hôpital ne peut rien faire pour changer ce qui m’arrive. Ni le Pair Vigilant Dolan, ni les prêtres de Morrow, ni le Général Artificier Nemo. Le temps nous est compté. Je le sens ».

Maintenant, c’est lui qui pleurait. « Qu’est-ce que je peux faire ».

Elle prit une grande inspiration. « J’ai une idée, étrange et improbable. Pour l’instant, c’est le seul véritable espoir que j’ai ». Elle s’arrêta une seconde, puis dit : « J’espérais que tu pourrais me mettre en contact avec une personne vénérant Cyriss ».

Il cligna des yeux à cette question. Elle remarqua un bref éclair de peur et d’appréhension avant que son expression ne devienne prudente. « Je n’ai rien à voir avec ces gens. Pourquoi me demande-tu ça ? »

Sa véhémence la fit sursauter, mais elle comprit rapidement à quel point la question devait lui sembler pertinente depuis les événements de Calbeck. Les rumeurs se répandaient comme une traînée de poudre à Port Bourne au sujet de l’attaque de la ville voisine, dont les disciples de Cyriss étaient responsables. Le Général Nemo était respecté et aimé parmi les équipes d’assistance, et sa vie était en jeu.

Ses souvenirs remontèrent au début de la Guerre Caspia-Sul, lorsque les soldats non-morrowéens commencèrent à dissimuler leurs menofixes. Du jour au lendemain, l’Armée Cygnaréenne était devenue un endroit inhospitalier pour un ménite pratiquant, même si la plupart des cygnaréens qui adoraient le Législateur n’avaient rien de commun avec les fanatiques du Protectorat. Les choses avaient empiré après le le Seigneur Commandeur Stryke ai débuté la traque de traîtres présumés, rassemblant les menites à l’est du Cygnar afin de les interroger. Le Cygnar s’enorgueillissaient de sa tolérance, mais celle-ci s’était évanouie lorsque le royaume avait été menacé.

Elle se pencha en avant et dit : « Je me fiche de qui tu vénères, Lyle. Chaque foi a différentes sortes de croyants. Même au sein de l’Église de Morrow, chacun trouve sa propre voie. Je sais que tu n’as rien à voir avec Calbeck. Je ne serais pas là si tu n’avais pas ma confiance ».

Elle avait toujours été morrowéenne, même si sa relation avec la religion avait été parfois difficile. Après la mort de ses parents, elle avait été recueillie dans une abbaye où les sœurs avaient été effrayées par les premières manifestations de son pouvoir arcanique et avaient été de le faire disparaître. Pendant des années, elle avait nourri du ressentiment à l’égard de l’église. Elle n’avait pas passé beaucoup de temps à passer à de telles choses jusqu’à son hospitalisation.

Le Chef Garner se rassit et sembla se détendre légèrement. Il secoua la tête et dit : « Tous les technophiles et mékanos-vapeur ne sont pas des disciples ».

« Je comprends. Mais je sais que certains mékano la vénèrent, et j’ai cru te voir avec son symbole une fois ».

Son visage rougit à nouveau. « Je m’y suis intéressé brièvement. Je suis allé à une réunion ou deux, mais ce n’était pas pour moi. M’a mis mal à l’aise. Maintenant, je suis content d’avoir de pas avoir accepté ».

Haley s’avachit. « Oh », dit-elle. « Je n’avais pas envisager cette possibilité. Je dois les trouver ».

« Pourquoi ? » Il se rongea l’ongle du pouce.

Elle s’arrêta un instant, ne sachant pas quoi dire étant donné qu’elle n’avait qu’un début d’idée. « Il pourrait y avoir une solution à ma maladie connue des membres de cette secte. Une mince chance, mais c’est tout ce que j’ai. J’ai besoin de savoir si c’est possible. Et ce n’est pas quelque chose que mes supérieurs autoriseraient ».

Il fronça les sourcils et dit : « Je ne suis pas vraiment membre, mais je connais des gens qui le sont ». Il leva les yeux vers elle et s’empressa d’ajouter : « Des gens bien. Il ne feraient jamais rien contre le Cygnar ».

Elle se pencha à nouveau en avant. « Je dois les rencontrer. Où plutôt, je dois organiser une rencontre avec quelqu’un s’y connaissant en corps mécanique ». Les mots semblaient étranges au moment où elle les prononça. Il était clair, à son expression de surprise, qu’il ne s’attendait pas à quelque chose de ce genre. Elle expliqua : « J’ai entendu dire que certains cultes les utilisaient. J’ai besoin de trouver quelqu’un qui comprenne comment cela fonctionne – quelqu’un qui connaisse leur technologie avancée, et pas seulement leurs croyances. Tout ce que je veux, c’est parler. Je ne suis pas une menace pour eux, bien au contraire ».

« Sais-tu ce que tu me demande, major ? » La voix de Garner était rauque. « C’est pas le bon moment pour poser des questions sur Cyriss. Je pourrais perdre mon travail. Ou pire.

Haley regarda sur le côté. Elle n’avait pas pleinement considéré le péril qu’elle lui faisait courir. « Je comprendrai si tu ne veux pas faire ça. Si tu décide de m’aider, je ferai tout ce que je peux pour te protéger d’une éventuel retour de bâton ».

Il se leva et commença à faire les cent pas ; « Cela va prendre du temps, si tant est que je puisse le faire. Tes gens vont te chercher ».

« C’est vrai », admit-elle. « Ils commenceront à me chercher dès demain matin, quand ils se rendront compte que je suis partie ».

« Tu devras rester ici et faire profil bas. Il ne devrait pas être difficile pour moi de m’assurer que personne n’entre ici ; la plupart de ce que je fais ici concerne mes propres projets. Je travaille de l’autre côté de la rue, à la fonderie centrale . . . Je ne sais pas,ça pourrait marcher. Je ne sais pas combien de temps il faudra pour prendre les dispositions nécessaires. Il faudra me promettre de ne pas mettre le nez dehors ».

Elle sentit sa vision se troubler sous l’effet des larmes avant de réaliser consciemment que ses paroles impliquaient qu’il était d’accord de l’aider. Elle ressentit une intense bouffée de gratitude lui voler presque la voix. « Tu va le faire ? »

« Bien sûr », répondit-il, comme offensé. « Mais il va falloir faire de la place. Je peux dormir par terre, peut-être sous la table ou dans le garage. En premier, débarbouillons-nous. Je ne suis pas médecin, mais je connais les premiers soins. Je vais chercher ma trousse ».

* * *

Au cours des jours suivant, Haley considéra qu’elle avait échangé un lit d’hôpital contre un autre. Celui-ci était plus sale, puant, sombre et confiné que le précédent. Néanmoins, elle ressentit un regain d’énergie et d’enthousiasme stimulé par une pointe d’espoir. Elle avait le temps de réfléchir – trop de temps en fait. Elle chercha à se distraire, d’abord par de simples exercices, mais même ceux-ci devenaient plus difficiles. Elle se sentait chaque jour plus faible.

La première nuit Garner l’aider à panser et envelopper ses blessures, principalement des éraflures superficielles et de nombreuses ecchymoses. Lorsqu’elle vérifia ses côtes, elle constata que les grandes taches violacées s’étendaient sur une bonne partie de son torse, affichant un éventail de couleurs meurtries. Son armures de warcaster la protégeait généralement de ce genre de mauvais traitements. Malgré des années de guerre et de bataille, Haley n’avait été malmenée à ce point qu’une seule fois : lorsqu’elle s’était battue contre sa sœur et qu’elle avait perdu son bras. C’était un souvenir sur lequel elle ne voulait pas s’attarder.

Garner revint le lendemain soir, l’air prudemment optimiste. Il avait pris contact avec des personnes, qui lui avaient dit qu’elles pouvaient organiser une rencontre avec quelqu’un de plus haut placé. Il éluda ses questions sur les identités. Elle pouvait comprendre qu’il protège ses amis. Ils seraient tous en danger s’ils étaient découverts. Elle se souvenait de la colère couvant chez Nemo lorsqu’il avait décrit son expérience à Calbeck. Cultistes de la mort, il les avaient appelés. Elle devait s’en tenir à l’idée que les cyrissistes que Garner connaissait étaient différents - et suffisamment raisonnables pour parler avec des étrangers.

La nuit suivante, le chef lui fit visiter son garage, lui parlant de ses composants comme s’il présentait ses proches. Avec une discrète fierté, il dévoila l’un de ses projets favoris, un vieux warjack léger Sentinelle abîmé qu’il avait restauré. C’était l’une des machines mises à la ferraille, tellement endommagées qu’elles ne valaient pas la peine d’être réparées. Les innombrables soudures et les morceaux de métal dépareillés montraient clairement qu’il avait travaillé longtemps sur l’engin, reconstruisant pratiquement tout son moteur à vapeur.
Haley ne l’interrogea pas sur la façon dont il avait obtenu cette machine. Les cortex fonctionnels comme celui qu’elle contenait étaient censés être récupérés pour être installés ailleurs, si possible. Mais elle savait que les procédures étaient parfois quelque peu rapides et vagues parmi les mékaniciens. Les officiers mékaniciens fermaient les yeux si un subordonné de confiance se chargeait d’un travail comme celui-ci, y voyant un moyen d’affiner leurs compétences. Si Garner réussissait, le Cygnar obtiendrait une Sentinelle fonctionnelle restaurée, celle qu’ils avaient radiés des registres. Dans le cas contraire, ils pourraient récupérer le cortex plus tard, et Garner serait probablement meilleur dans son travail grâce à tout ce qu’il aurait appris en essayant.

Haley toucha son châssis avec sa main mékanique tout en tendant son esprit pour se connecter au cortex, qui réagit immédiatement. Elle éprouva un sentiment de satisfaction à établir à nouveau cette connexion, à faire coulisser les verrous corticaux et laisser son esprit fusionner avec elle. Elle regarda à travers ses yeux et se vit, choquée de voir à quel point son propre visage était pâle et frêle. Elle passa un certain temps à communier silencieusement avec son esprit artificiel pendant que Garner parlait de conduits réflexes grillés, de fuites hydrauliques et de pistons tordus.

Bien qu’elle ait toujours favorisé le Lancier au combat, elle nourrissait un certain penchant pour la Sentinelle. Mesurant deux mètres quarante de haut et pesant plus de trois tonnes, c’était un ‘jack lourdement blindé et utile. La mitrailleuse remplaçant son bras droit était parfaite pour détruire les nécroserfs cryxiens ou les Gardes des Glaces khadoréen approchants, tandis qu’un épais bouclier à pointes était attaché à son bras gauche. Les Sentinelles étaient conditionnées pour se mettre en danger pour les soldats vivants ; plusieurs de ses officiers durent la vie à l’intervention d’un de ces warjacks. La surface du bouclier de celui-ci était criblée d’innombrables marques d’impacts, de bosses et de fissures.

Quelque chose dans ce bouclier lui fit réaliser que cette Sentinelle lui était très familière. En observant la machine de plus près, elle remarqua un mot inscrit sur son blindage d’épaule gauche confirmant son intuition.« Marque » était grossièrement gravé dans la peinture bleue, comme s’il avait gravé avec un couteau de tranchée il y a longtemps, peut-être des décennies. Elle ignorait si le nom désignait la machine elle-même, un ancien contrôleur ou quelqu’un à qui elle avait sauvé la vie, mais à un moment donné, elle avait certainement contrôlé cette machine. Étant donné le temps que Garner avait passé avec elle, il pouvait s’agir d’un engagement parmi d’autres. Il avait probablement été détruit en guise de sacrifice tactique et oublié, du moins par tout le monde sauf par le Chef d’Équipe Lyle Garner.

« Marque », prononça-t-elle à voix haute. Il était éteint, son moteur immobile, mais ses capteurs auditifs l’entendirent et elle sentit que son cortex la reconnaissait.

Durant sa convalescence, elle regardait Garner travailler sur le ‘jack après la fin de ses quarts de travail. Elle était trop faible pour directement aider. Ils comprirent vite que sa connexion mentale avec le cortex de Marque pouvait l’aider à tester ses connexions avec le reste du châssis. Garner expliqua qu’il n’avait pas été en mesure d’isoler un problème au sein du complexe réseau de conduits réflexes servant de système nerveux.

Ensemble, ils parvinrent à trouver le principal obstacle, un faisceau grillé sous le cortex ne permettant pas à l’énergie de passer. Avec un peu de travail, Garner reconstruisit le conduit avec un fer à souder voltaïque. Après avoir ouvert les évents d’aérations supérieurs et la hotte de l’atelier pour récupérer la fumée, il mit en marche le moteur du warjack. Elle exhorta Marque à avancer, et il fit son premier pas depuis son apparente destruction, ce qui provoqua un cri de joie de la part du mékanicien. Haley partagea son enthousiasme, trouvant qu’il était bon d’être à nouveau utile.

Par-dessus le bruit du moteur de la machine, ils entendirent un coup sec sur la porte latérale de la maison de Garner. Ils se figèrent tous les deux. Garner pointa du doigt un vieux casier vertical presque vide. Une fois qu’Haley réussit à se faufile à l’intérieur, il alla voir qui avait frappé.

Haley ne put rien voir ni entendre de sa position et il fallut quelques minutes avant qu’il ne revienne. « Tu peux sortir maintenant », dit-il, et il se dégagea. Son visage était sinistre.

« Mauvaise nouvelle ?, demanda-t-elle, son esprit se tournant vers l’idée que sa présence avait été découverte. Garner avait déjà affirmé que des gens la cherchaient dans toute la ville, et qu’une importance récompense avait été offerte pour savoir où elle se trouvait.

« Non . . . », dit-il, bien que sa voix soit étouffée. « C’était mon ami avec les cyrissistes locaux. Le rendez-vous est organisé ».

« Bien ! » Haley fit une pause et demanda : « Pourquoi cette tête ? »

« Je ne lui ai pas dit de venir directement ici. Il était censé glisser une note codée sous la porte en cachette, après quoi j’aurais été le chercher. On dirait que ses contacts ont voulu accélérer les choses. Cela me met mal à l’aise ».

Haley y réfléchit, pensant à la récompense offerte. « Comment accéléré ? »

« Ils veulent que cela se produise ce soir, dans un endroit isolé au sud de la ville, à l’écart de la route principale. Je sais comment s’y rendre. Je lui ai dit que je n’étais pas sûr que cela fonctionnerait, mais il m’a répondu que c’était un opportunité unique. Maintenant ou jamais. Quelqu’un est censé nous rencontrer là-bas, quelqu’un versé dans la technologie avancée entretenue par le cercle intérieur, quoi que cela signifie. Il demeura silencieux quelques secondes avant de dire : « Toute cette situation sonne faux. Je ne pense que tu devrais t’y rendre ».

Haley fronça les sourcils et réfléchit à son avertissement. « À quel point fais-tu confiance à cet ami ? »

« Celui qui est venu ce soir ? Complètement. Nous avons grandi ensemble, fait notre apprentissage ensemble, nous nous sommes enrôlés ensemble. Il prendrait une balle pour moi, et je ferais la même chose pour lui. Mais il est profondément impliqué au sein de cette religion. Il pourrait leur faire trop confiance. Je ne sais rien sur les autres personnes qu’il a fait venir ».

Haley pesa le pour et le contre. Il était tout à fait possible qu’ils aient été trompés, et que quelqu’un voulant toucher la récompense attendre de confirmer sa présence ici. Elle sera les lèvres. « Je dois le faire. J’apprécie et comprends ton inquiétude, mais il y aura toujours des risques ». Haley lui jeta un regard ferme. « Donne-moi tous les détails. Je vais devoir trouver le meilleur moyen de m’y rendre sans être vu ».

« j’ai un plan en tête. Cela inclus Marque ici ». Il frappa d’un coup de poing l’épaule en acier de la Sentinelle. « Il me servira de prétexte pour sortir. Nous lui ferons la plein, le préparons et le laisserons tourner au ralenti pendant la réunion ».

Haley secoua la tête. « Je ne peux pas te faire courir ce risque. C’est mon problème ».

Il lança un regard noir et dit : « Comme l’enfer ! As-tu réfléchi à la façon dont tu vas te rendre au lieu de rendez-vous. Ce n’est pas tout près. Pense à ce qui c’est passé en venant ici l’autre soir. Tu voudras avoir quelqu’un avec toi ».

Il n’avait pas tort. « D’accord, alors comment compte-tu nous y emmener ? »

« J’ai accès à un chariot, et avec Marque chargé à l’arrière et une bâche sur lui, il sera plus facile de te cacher. Je serai le conducteur. Il n’y aura pas beaucoup de renforts, mais ma clé à molette, et la mitrailleuse d’une Sentinelle, c’est mieux que rien ».

Haley soupira. Elle n’avait pas de meilleur plan pour franchir les sentinelles du mur extérieur sans être observé. « Bien. Mas tu restes avec le chariot, et ce morceau de métal aussi, pendant que je découvre si ces personnes peuvent m’aider ».

« Modifié: 04 mai 2024 à 17:38:26 par elric »
Citation de: Maître Yoda
Trop gentil tu seras, dans le côté obscur tu l'auras.

Si vous constatez des fautes d'orthographe et/ou de conjugaison, des phrases à remanier pour une meilleur compréhension.
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« Réponse #6 le: 04 mai 2024 à 17:38:40 »
PARTIE TROIS

Le chariot cahotait le long du chantier, lui occasionnant une secousse de douleur à chaque fois qu’il se rebondissait sur l’inégale route. Elle était coincée contre la Sentinelle, inerte et attachée à plat sur la route, occupant la majeure partie du lit du chariot. L’air était lourd et vicié sous la bâche, et elle résistait à l’envie de trouver un moyen de jeter un coup d’oeil à l’extérieur.

Après ce qui parut un interminable voyage, le chariot s’arrêta. Elle entendit des bruits de pas sur le côté et attendit tendue, même si elle savait qu’il s’agissait probablement que Garner. Sa main droit métallique tenait une longue et fine tige d’acier, qu’elle pouvait ostensiblement utiliser soit comme bâton de marche, soit comme arme si nécessaire. C’était loin d’être aussi redoutable qu’Écho, sa lance mékanique, mais elle était contente d’avoir quelque chose. Garner avait improvisé sa création en installant des accumulateurs dans sa tige alimentant en énergie des petits générateurs de force à chaque extrémité, lui permettant de porter des coups avec un impact bien plus important que sa seule force ne l’aurait permis. Elle avait également emprunté un petit pistolet à Garner, qui était rangé dans un étui caché dans son dos, sous sa veste. Elle espérait ne pas avoir à s’en servir.

Garner tira la bâche vers l’arrière et lui adressa un sourire. Il murmura : « Nous sommes pas loin, et j’ai vu un endroit où je peux surveiller tes arrières. Aide-moi à descendre ce truc ». Il tapota le pied métallique de Marque. Bien qu’il fasse nuit, les lunes brillantes permettaient une assez bonne visibilité.

Le chariot est équipé d’une petite grue semblable à celle de son atelier. Le chariot était large et robuste, avec un châssis renforcé, spécialement conçu pour supporter le poids d’un warjack. Une paire de chevaux de traits lourds étaient attelés à l’avant. Garner sauta à l’arrière du chariot, détacha la Sentinelle et, avec l’aide d’Haley, accrocha les chaînes de la grue au châssis. Il enclencha le moteur de la grue pour soulever le warjack et le remettre sur ses pieds. Dès qu’il fut debout, Garner alluma également le moteur à vapeur du warjack et le laissa monter en pression. Haley regarda autour d’elle, mais ne put dire grand-chose de l’endroit où ils se trouvaient, si ce n’est qu’il s’agissait d’un terrain familier au milieu des collines rocheuses entre Port Bourne et Brainmarché.

« Ce n’est pas particulièrement calme », déclara Haley, élevant la vois pour s’exprimer par-dessus le grondement des moteurs.

« Nous n’allons pas être exactement cachés », déclara-t-il. « Ils sauront que nous somme là. Je vais rester avec le ‘jack pour ne pas sembler une immédiate menace, mais je préférerais qu’ils sachent que tu n’est pas seul. Mon ami accompagnera la personne que tu rencontreras pour que nous puissions nous assurer que tout se passe bien ». Il souleva une longue-vue pliable en bronze. « Je vais m’assurer qu’il est bien là. Si quelque chose semble étrange, nous ferons demi-tour ».

Ils commencèrent à gravir une légère pente, une pente qui confirma à Haley à quel point son endurance avait fondue. Elle eut bientôt du mal à respirer et recommença à voir des taches, bien que le bâton de marche l’aidât. Bientôt, ils atteignirent une zone plus plate proche du sommet de la colline. Marque avançait stoïquement derrière, son lourd pas envoyant une pluie de terre à chacun de ses pas. Haley se sentait rassurée d’avoir la machine là, et elle regardait périodiquement à travers ses yeux. Alors que la nuit était relativement claire, les optiques du warjack étaient meilleures que ses propres yeux dans des conditions de faible luminosité.

« Nous allons attendre ici », dit Garner. « Ils seront devant nous ». Il désigna la pente vers une zone plus large où se dressaient deux vieux arbres, chacun penché l’un vers l’autre. Il y avait une variété de roches escarpés dans les environs, et juste après les arbres, il y avait une descente abrupte vers un petit ruisseau.

Fixant les ombres entre les arbres, elle vit deux silhouette se tenant là. Elle les pointa du doigt.  « L’un d’eux est ton ami ? »

Le chef sortit sa longue-vue et jeta un coup d’oeil à travers. « Difficile à dire dans le noir ». Il demeura silencieux pendant plusieurs secondes puis ajouta : « Ouais, c’est lui. Sur la droite. Il s’appelle James. Il a l’air nerveux, mais je suppose qu’il faut s’y attendre ».

« Tu as dit que vous vous étiez engagés ensemble. Est-il toujours dans l’armée ? »

Garner secoua la tête. « C’est un civil maintenant, membre du Syndicat des Ouvriers du Métal et de la Vapeur. Nous embauchons souvent des gars comme lui pour des projets spécifiques, et il fait du bénévolat depuis l’attaque de Port Bourne ».

« Je suis sûre que c’est un gars formidable », déclara-t-elle. « Tu n’as pas besoin de me convaincre. « Attend ici ». Elle ordonna mentalement à Marque de rester en état d’alerte, puis descendit la colline. Il était difficile de bien voir le sol et elle s’appuya plus d’une fois sur le bâton en métal lorsqu’elle faillit trébucher. Elle se sentait très exposée et vulnérable. Avec son esprit, elle chercha à détecter la présence de warjacks ou de warcasters dans les environs ; elle avait toujours été particulièrement sensible à ce genre de choses. Elle ne sentit rien d’autre que Marque.

Elle leva la main gauche dans ce qu’elle espérait être un geste amical. L’homme de droite lui rendit la pareille.

En s’approchant, elle put remarquer que James était un homme du même âge que Garner, bien qu’il soit plus mince et que ses cheveux aient prématurément viré au gris. Il esquissa un demi-sourire qui se voulait probablement rassurant, bien qu’il ne cessait de jeter des coups d’oeil gênés à l’homme à ses côtés.

Cet homme retira le capuchon de sa robe pour révéler une tête rasée. Elle fut frappée par sa jeunesse. Il aurait été parfaitement à sa place aux côtés de recrues récemment formées aux fusiliers. Haley avait demandé quelqu’un versé dans le technologie avancée des cyrissistes, ce qui semblait douteux à son âge. En tirant sa robe sombre vers l’arrière, il découvrit une armure étrangement ornée. Le clair de lune faisait briller l’argent et le bronze chromé, et elle vit le symbole de la Patronne des Mécanismes gravés sur plusieurs surface. Il était difficile de dire s’il était armé. Plusieurs appareils et cylindres métalliques inconnus étaient accrochés à sa taille, à côté d’un casque métallique y pendant. S’il l’avait porté, elle n’aurait pas sur qu’il était humain.

L’inconnu s’exprima en premier. « Major Victoria Haley ? » À son hochement de tête, il sourir d’une manière qu’elle n’appréciât pas. « Excellent. Je suis Optifex Quintus ».

« Merci d’avoir répondu à mon invitation, Optifex. C’est un rang? Êtes-vous prêtre ? Vous êtes plus jeune que ce à quoi je m’attendais ».

Son sourire s’évapora. « Optifex couvre un large éventail de tâches. Vous pouvez me considérer comme un initié, quelqu’un qui doit faire ses preuves avant de pouvoir pleinement s’éveiller. Déesse, sauve-nous de la corruption de notre chair ». Il prononça cette dernière phrase entre ses dents, comme une prière réflexe. Il leva une main pour prévenir la question qu’Haley allait poser. Il s’interposa : « Avez-vous un moyen de priver votre identité ».

Haley ressentit une vague d’agacement. « Tel que ? Je n’ai aucun papier de l’armée, si c’est ce que vous demandez. Qui d’autre serais-je ? »

Quintus se tourna vers James et demanda : « Pouvez-vous confirmer son identité ? Je suppose que vous l’avez déjà vue ». Sa voix était empreinte d’une certaine arrogance.

James s’approcha pour mieux voir Haley. Elle le regarda calmement. Garner avait décrit son ami comme étant profondément religieux, mais sa posture laissait à penser qu’il n’était pas à l’aise avec l’homme se tenant à ses côtés. Peut-être que Quintus ne correspondait pas à l’idéal qu’il avait imaginé pour un jeune prêtre de sa déesse, ou lus probablement que les réunions clandestines au milieu de la nuit le rendait nerveux. James déclara : « Je suis raisonnablement certaine que c’est elle, Optifex. Elle a l’air différence sans son armure, bien sûr. Mais . . . Oui, c’est le Major Haley ».

Quintus sourit et hocha la tête. « Bien. Le moment de prouver mon engagement est arrivé ». Il regarda Haley Haley et prononça : « S’il vous plaît, posez les questions qui vous ont amené ici ».

L’attitude du cyrrisiste perturba Haley, mais elle rassembla ses pensées. « Je comprends vos mékaniques, ou peu importe comme vous les appelez . . . »

« Optifex », interrompit-il doucement avec condescendance. « Ou ingénieurs ». Il s’empara de l’un de ses appareils suspendus à sa taille et en ajusta les paramètres. Haley avait vu des mékaniciens faire quelque chose de similaire avec des clés sur leurs ceintures à outils.

« Bien sur », poursuivit-elle. Il était logique qu’une religion fondée sur les mécanismes et les machines combine les rôles de mékaniciens et de prêtres. « Je comprends que vos ingénieurs ont contourné les problèmes corporels en fabriquant des vaisseaux mécaniques, et que vous pouvez transférer l’esprit d’une personne vivante . . . »

Pendant qu’elle parlait, il semblait ne pas lui prêter attention. Il souleva le cylindre qu’il était en train d’ajuster, l’observant attentivement. Il tourna ensuite une série d’anneaux près de son sommet, chaque rotation produisant une série de cliquetis aigus. Elle se rendit compte qu’il s’attelait à cette tâche de manière délibérée plutôt que pas une sorte d’habitude nerveuse. Alors même que sa voix s’éteignait, l’optifex souleva le cylindre et appuya sur un interrupteur.

Les instincts de Haley la poussa déjà en mouvement, ayant ajusté sa prise sur son bâton avec l’intention de faire tomber la chose de sa main si nécessaire. Elle fut trop lente. Un petit orbe métallique lancé du haut du cylindre, droit dans les airs, comme poussée par un étroit mais intense faisceau de lumière argentée. Il y eut un son semblable à celui d’un gong lorsque des ondulations de lumière blanche jaillirent de l’orbe en vol stationnaire, le rendant momentanément aussi lumineux que le jour.

Plusieurs choses se produisirent en même temps.

La lumière l’aveugla et son élan manqua l’optifex. À travers ses yeux plissés et douloureux, elle vit une tache floue qui semblait être le prêtre se tournant et s’éloignant d’un bond. Il tomba du bord du surplomb, juste après les arbres. Elle n’avait fait qu’un pas dans cette direction lorsque James poussa un cri et, du coin de l’oeil, elle vit quelque chose de sphérique jaillir du sol où ils se trouvaient. Cette orbe mesurait près de soixante centimètre de diamètre, et sa surface miroitante était parsemée de protubérances arrondies, semblables à des boutons. Il avait manifestement été enterré avant la réunion.

Il ne fut pas difficile d’en déduire que l’orbe était hostile. Elle tenta de s’éloigner d’un bond. James lui vint inopinément en aide, s’interposant entre elle et l’engin pour la pousser et la faire chuter. Elle l’interpréta presque à tort comme une attaque et aurait pu le frapper si elle n’avait pas déjà été déséquilibrée. Elle dégringola douloureusement sur les rochers et le sable, faisant subir une nouvelle agression aux bleus couvrant son torse.

Un bruit de sifflement aigu provenant de la sphère métallique fuit suivi d’un bruit sourd assez puissant pour secouer ses os. Elle se glissa derrière l’un des troncs d’arbres au moment où la sphère métallique explosa en shrapnel dans un éclat de lumière. Elle se couvrit la tête tandis que la moitié supérieure de l’arbre était déchiquetée. Des fragments de métal tranchants se heurtèrent au tronc derrière elle et s’enfoncèrent dans le sol à quelques centimètres de ses pieds. James n’était plus là. Elle vit quelques morceaux sanglants de ce qui devait être les restes macabres de son corps éparpillés à proximité.

Elle dégaina le pistolet dans son dos, de sa main droite et transféra le bâton dans sa main gauche. Avant de risquer d’abandonner le peu d’abri qu’elle avait, elle toucha mentalement Marque et regarda à travers ses yeux. Le cortex de qualité militaire du warjack l’avait poussé à l’action, et il se précipitait déjà en bas de la colline, la mitrailleuse en action. De nombreuses autres sphère métalliques flottantes de différentes configurations étaient apparues autour de la zone. La Sentinelle arrosa les plus proches.

L’une d’entre elles, avec ce qui semblait être une sorte de mékanisme de mise à feu de projectiles suspendu en dessous se tourna et lança un projectile métallique sur le Chef Garner, qui avançait juste derrière le warjack, sa lourde clé à molette à la main. Marque se déplaça sur la gauche et étendit son bouclier, interceptant le projectile destiné au mékano. Le projectile fut dévié par l’acier incurvé avec un claquement.

Haley l’exhorta à concentrer le feu sur toutes les sphères ciblant Garner. Une rafales de balles provenant de ses canons réduisit en miettes deux de ces sphères à projectiles, mais d’autres flottaient dans sa direction. Haley ne repéra une autre sphère couvertes de mines jusqu’à ce quelle se soit suffisamment rapprochée pour exploser contre le flanc droit de Marque. Heureusement, Garner était en sécurité de l’autre côté et ne fut touché pas aucun des éclats d’obus, mais l’explosion déchira le blindage sur le torse de la Sentinelle, laissant certaines de ses rouages exposés. Haley serra les dents et dirigea mentalement son feu contre les autres sphères les plus proches. L’une d’entre elles parvint à lancer un projectile à travers le bouclier de Brand pour s’enfoncer profondément dans le cuisse de Garner. Il poussa un cri étranglé et tomba en se
tenant la jambe.

Haley ignora ses douleurs et ses maux et, sous l’effet d’une poussée d’adrénaline, se remit debout. Elle décocha un tir de pistolet pour envoyer une balle les entrailles d’une des sphères se rapprochant de Garner, mais à travers les yeux se tournant vers elle. Elle projeta un projectile qu’elle évita de justesse en faisant un pas de côté.

N’ayant pas le temps de recharger le pistolet, elle le laissa tomber pour s’emparer de son bâton à deux mains. Elle fit tournoyer le bâton de métal au-dessus de sa tête pour percuter le fin blindage de la sphère, l’envoyant dévaler la colline en tintant et en pulvérisant des pièces métalliques. L’impact lui envoya une décharge de pure agonie dans les bras, la faisant haleter. À travers un brouillard de douleur, elle se souvint des paroles de Dolan selon lesquelles elle n’était pas en état de se battre, avant même que trois hommes ne lui donnent des coups de pied dans les côtes.

Elle retourna en boitillant vers la Sentinelle alors même qu’une sphère différente lui lançait un globe de verre rempli d’une sorte de liquide. Il se brisa juste à sa gauche, et projeta un nuage de produits chimiques incandescents sur ses jambes.

Elle eut un sursaut de peur en pensant à la bile corrosive cryx, mais il n’y avait pas de brûlure. Là où le liquide avait touché, ses jambes brillaient d’une luminescence jaune particulière. Plusieurs sphères tirant des projectiles se tournèrent immédiatement pour la suivre, apparemment attirées par la lumière. Poussant un cri, Haley balança son bâton vers la sphère l’ayant marqué et ressentit de la satisfaction lorsque porta, ses générateurs de force envoyant l’ennemi dans les airs se briser sur les rochers. Une fois de plus, une secousse de douleur lui parcourut les bras et elle serra les dents, se forçant à conserver sa prise sur l’arme.

Avec désespoir, Haley aperçut près d’une douzaine d’entités métalliques franchissant la colline à grand pas. Elles ressemblaient à des warjacks, mais elles étaient plus petites, de la taille d’un homme, des créatures mécaniques bipèdes avec des symboles de Cyriss brillants sur leur poitrine. Chacune d’entre elles avait un seul œil brillant au centre de sa tête conique. Sur le dos de la main gauche de chaque personnage se trouvait un ensemble de menaçants canons représentant certainement une sorte d’arme à projectiles. Elle s’élança désespérément juste à temps pour se retrouver derrière Marque alors que plusieurs des sphères tiraient des flèches, frappant le warjack au lieu d’elle. Bien que les projectiles soient petits, ils étaient tirés avec une grande force et réussirent à pénétrer l’armure du warjack. Marque riposta et abattit plusieurs autres engins flottants.

Son canon à main lui manquait. La seule arme dont elle disposait pour faire face aux ennemis à distance était Marque. Elle envoya le warjack léger dans leur direction, tirant au fur et à mesure qu’il se déplaçait. Les canons de sa mitrailleuse étaient brûlants et grésillaient de chaleur, ce qui lui fit craindre que le mékanisme de mise à feu ne s’enraye si elle le poussait, si elle n’était pas en premier à court de munitions. Elle donna la priorité à la dernière des sphères flottantes se déplaçant rapidement, comme première cible. Pendant ce temps, elle se pencha pour examiner Garner. Il était en vie, mais sa jambe saignait abondamment, le projectile en métal étant resté coincé. Elle devait le mettre à l’abri.

« Debout, chef ! » ordonna-t-elle vertement. Elle l’aida à se relever, le laissant s’appuyer sur son épaule alors qu’ils se dirigeaient vers un rocher voisin. Il ne pouvait utiliser que sa bonne jambe, et elle se sentait pathétiquement faible alors que son poids l’écrasait. Elle le plaça contre le rocher, du côté opposé aux hommes de métal approchant, et s’efforça de reprendre son souffle, les poumons en feu.

L’esprit d’Haley avait été divisé alors qu’ils se déplaçaient, guidant les tirs de la Sentinelle en courtes rafales, essayant de refroidir les canons incandescents. Si elle avait disposé de sa magie, rien de tout cela ne serait un problème. Elle ressentait une rage impuissante et ne pouvait rien faire d’autre que la canaliser dans son warjack.

Les hommes de métal avançaient sans crainte. Trois furent déchirés successivement par des balles de la mitrailleuse, mais les autres s’approchèrent suffisamment pour tirer avec leurs propres armes, déclenchant une nuée de projectiles tournoyants, chacun ressemblant à une foreuse miniature affamée. Ceux-ci transpercèrent e bouclier de la Sentinelle. L’un deux sectionna les pistons vitaux de son bras gauche et lui fit lâcher son bouclier. Le blindage de son torse était déjà compromise, et plusieurs autres foreuses l’atteignirent de plein fouet. Marque parvient à en abattre deux autres avant que des foreuses ne perforent son cortex et que Haley ne perde sa connexion mentale.

« Allons-y ! Nous ne pouvons pas rester ici ! » Haley ordonna à Garner. Il avait l’air pâle et hébété alors qu’elle l’aidait à se relever. Il cligna des yeux et hocha la tête puis s’appuya sur elle alors qu’ils s’éloignaient aussi vite qu’ils le pouvaient des soldats en métal, qu’elle pouvait entendre gagner du terrain sur eux.

Haley n’avait que son bâton pour les protéger, et elle était à deux doigts de s’évanouir.

Elle leva les yeux, et son coeur se serra en voyant plusieurs autres soldats en métal s’approcher droit devant elle. Ils dévalaient la pente d’une démarche souple et peu naturelle. L’étincelante lumière de leurs yeux uniques la transperça et elle se figea, levant instinctivement son bâton. Celui qui se trouvant à l’avant leva son bras gauche et elle se retrouva à fixer les trous noirs de six canons, sachant que la mort était arrivée. Mieux vaut mourir au combat que dans son lit, pensa-t-elle, mais le fait que Garner mourrait à ses côtés lui laissait un goût amer en bouche. Il lui serra l’épaule, effrayé, alors qu’il s’apprêtait à être déchirés par le feu de l’ennemi.

* * *
« Modifié: Aujourd'hui à 12:30:36 par elric »
Citation de: Maître Yoda
Trop gentil tu seras, dans le côté obscur tu l'auras.

Si vous constatez des fautes d'orthographe et/ou de conjugaison, des phrases à remanier pour une meilleur compréhension.
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« Réponse #7 le: Aujourd'hui à 12:30:48 »
Le paysage sembla s’assombrit un instant, comme si les lunes dans les cieux s’éclipsaient. Puis une lumière blanche traversa ses yeux et sa peau picota tandis que les poils de ses bras et de son cou se dressaient. Elle entendit des explosions étouffées et le déchirement du métal alors que les machines humaines devant elle étaient consumées par un faisceau cohérent de quelque chose qui ressemblait à un éclair solide. Il perça un trou brûlant dans les corps chromés, et ils s’effondrèrent bruyamment au sol.

Elle regarda au-delà d’eux jusqu’à la source de lumière et vit une machine flottante très différente, celle-ci considérablement plus grande que toutes celles qu’elle avait vue jusqu’à présent. Cela lui rappelait un warjack lourd en taille et en proportions, avec des bras s’achevant par une sorte  d’armes voltaïques, chacune brillant d’un bleu arcanique. Il n’avait pas de jambes mais flottait à plusieurs dizaines de centimètre au-dessus du sol. Au-dessous de sa taille se trouvait un cône inversé et l’air sous lui scintillait comme des vagues de chaleur au-dessus d’un poêle.

Elle sentit un picotement aigu à l’arrière de la tête, et elle sut qu’un warcaster était plus proche qu’il n’aurait été possible sans qu’elle ne le sente jusqu’à présent. Ajoutant à la confusion sensorielle, son esprit ne pouvait rien détecter ressemblant à un cortex à l’intérieur de la machine semblable à un warjack venant de faire fondre les adversaires sur le point de la tuer, elle et Garner.

Garner marmonna quelque chose d’incohérent et ses yeux se révulsèrent. Il s’affaissa, la perte de sang ayant raison de lui. Incapable de supporter son poids, elle ne pouvait qu’essayer de guider sa chute pour éviter qu’il n’atterisse sur le projectile planté dans sa cuisse. Ignorant qu’elle était entourée d’étranges machines dont elle ne comprenait pas les intentions et d’un warcaster qu’elle n’avait pas identifiée, elle se pencha pour arracher des bandes de tissus de sa chemise et referma sa plaie pour ralentir l’hémorragie.

Elle avait l’impression que le monde était devenu anormalement calme. Elle leva enfin les yeux pour voir d’autres machines flottantes s’approcher de plus en plus près du lieu de la réunion. Le plus proche avait des bras se terminant par des grandes plaques festonnées en forme de bouclier avec des protubérance en forme de lames. Elle chercha du regard les hommes de métal qui avaient neutralisé Marque, mais ne vit rien d’autre que des morceaux de chrome éparpillés et des engrenages cisaillés. Le warjack lui-même avait basculé sur la pente, de la fumée et de la vapeur s’élevant de sa forme inerte.

Aussi étranges et étonnants que soient les warjacjs sans cortex en vol stationnaire, l’arrivée suivante captiva totalement son attention. Il s’agissait d’une figure plus petite mais royale se tenant entre ses protecteurs flottants, qui la suivaient et la flanquaient. Il ne faisait aucun doute qu’elle était responsable.

Haley reconnut qu’il s’agissait d’une autre machine, mais le mot lui parut inadéquat. Avec ses larges hanches et sa poitrine galbée, il ne faisait aucun doute que la nouvelle venue était une femme, même si son corps était de chrome réfléchissant.

Des dizaines d’engrenages complexes cliquetaient et tournaient autour de l’étroite taille de la silhouette. Un cercle d’acier ceignait sa tête, tandis que derrière elle flottait quelque chose qui, à première vue, semblait être une sorte de coiffe ou de capuchon, mais qui en regardant de plus près, semblait être une machine bien plus complexe. Ce qui semblait être une cape flottante derrière cette figure abritait deux des sphères flottantes, et sous celle-ci se trouvaient des douzaines de bras métalliques segmentés, chacun se terminant par une larme incurvée. Alors que les bras chirurgicaux que les cephalyx portait sur leur dos étaient effrayant et horribles, ceux-ci étaient en quelque sorte gracieux et agréables à l’oeil, leur mouvements ressemblant o une dans fluide de l’acier. En plus des warjacks plus imposants, elle était escortée par une paire de sphères flottantes qui ressemblaient à des yeux métalliques. Ils fixaient Haley, qui se sentait coincée sous leur regard.

Il ne faisait aucun doute que cette personne était dangereuse, d’autant plus avec Haley dans son état actuel. Elle n’était même pas certaine de pouvoir à nouveau manier son bâton. Pourtant, remarquablement, elle découvrit qu’elle ne ressentait pas de la peur, mais de l’émerveillement et de la crainte. L’espace d’un instant, elle eut l’improbable pensée qu’elle contemplait la déesse Cyriss devenue tangible.

Elle écarta rapidement cette pensée et reprit ses esprits. La silhouette s’approcha, à moins de trois mètres et s’arrêta. Les lames de son dos s’entrecroisaient telle des ciseaux pliants. « Qui êtes-vous ? » demanda Haley, heureuse d’entendre que sa voix ne tremblait pas.

La voix qui sortit de la machine fut aussi clair et féminine qu’inhumaine. « Salutations, Major Victoria Haley. Je suis Directrix, Mère de Fer de la Convergence de Cyriss. Je m’excuse pour le retard de mon arrivée. J’avais espéré intervenir avant que le mal ne soit fait, afin de prévenir l’erreur de mes subordonnés. Les responsables de cette agression seront punis.

Au milieu de cet étrange champ de bataille, après avoir enduré une embuscade l’ayant pratiquement tuée, Haley ne s’attendait pas à des excuses. Elle cligna des yeux, puis jeta un coup d’oeil à Garner et dit : « Mon chef d’équipe est gravement blessé. Il a besoin d’attention ».

Directrix demeura silencieuse un moment et Haley sentit quelque chose, bien que fugace : quelque chose comme l’écho d’une commande mentale entre un warcaster et un warjack. Puis la personne dit : « J’ai envoyé chercher de l’aide. Elle sera là bientôt ».

« Vous être une figure d’autorité au sein de votre . . . hiérarchie ? » Il avait du mal à trouver le mot juste.

Directrix inclina la tête. « Je suis l’autorité ».

Haley cligna des yeux et décida qu’il valait mieux pas demander de clarification, si cela signifiait que Directrix était responsable d’une branche locale du culte, d’un culte régional entier, ou de quelque chose d’autre. De toute évidence, elle possédait une puissance de feu et des machines formidables, et Haley n’ignorait pas que les forces auxquelles elle avait fait face ressemblaient à celle du Général Artificier Nemo avait décrites en train de combattre à Calbeck. Elle n’avait du tout l’intention d’approcher la Convergence, mais il était clair qu’ils étaient plus connectés aux autres cyrissistes qu’elle ne le pensait.

« Pourquoi vos subordonnés m’ont-ils tendu une embuscade ? Je cherchais une rencontre pacifique. Comme vous pouvez le voir, je suis venue presque sans armes ». Une légère mais justifié exagération.

« Les décisions ont été prises par ceux qui auraient dû demander la permission », déclara Directrix. « Une incompréhension. Récemment, il y a eu de malheurs conflits avec votre armée. Certains membres du clergé vous ont qualifié d’ennemi potentiellement dangereux et ont estimé qu’il valait mieux organiser votre élimination. Une erreur de jugement ».

Toute la situation avait une aura d’irréalité. Haley ne pouvait pas ignorer la possibilité que tout cet arrangement ait été mis en scène, y compris son « sauvetage ». En même temps, elle ne voyait pas de raison à de telles complexités, étant qu’elle avait déjà indiqué sa volonté d’entrer en contact. Elle demanda : « Mais contrairement à vos subordonnés, vous ne me voyez pas comme une ennemie ? »

« Pas pour le moment, non. Je vous classerais comme une ennemi potentiel : une importante distinction. Certains préfèrent éliminer toute personne de cette catégorie, par opportunisme à courte vue. Je pense qu’un ennemi potentiel est aussi un ami potentiel. Il est essentiel que nous établissions des relations utiles au-delà de nos halls. Il y a beaucoup à apprendre ».

Haley réfléchit et se souvint d’une autre partie de l’histoire de Nemo. « Est-ce pour cela que vos gens ont essayé de recruter le Général Sebastian Nemo ? »

Directrix croisa ses bras métalliques et dit : « Sebastian Nemo est un grand esprit, un savant nescient. Nous serions extrêmement enrichis s’il se joignait à nous. Mais je suis pas venue ici pour parler de lui. Posez les questions qui vous poussé à prendre de tels risques. Vous aussi, vous cherchez à apprendre ».

Haley sentit qu’elle était enfin sur un terrain un peu plus solide. Étant donné ce que Nemo avait vécu, Directrix essaierait probablement de la recruter elle aussi. Cela expliquait la volonté de la femme de métal de parler ; dans toute négociation, chaque partie avait des objectifs. « Je souhaitais en savoir plus sur les corps mécaniques », déclara-t-elle, se sentant un peu stupide d’aborder le sujet avec ce qui était clairement une personne mékanique. « J’ai entendu dire que vous utilisiez, même si je ne m’attendais pas à voir des preuves aussi irréfutables ».

Directrix émit un son rythmique qui aurait peu être un rire. Puis elle dit : « Oh, oui, nous sommes capables de transcender la chair. C’est le plus grand don de la déesse. C’est ainsi que nous éveillons ».

« L’Optifex Quintus était vivant », dit Haley. « Pas mécanique ».

« L’état d’éveillé doit être mérité. Il n’est pas prêt. Il ne sera peut-être jamais prêt ».

Haley sentit ses mains trembler et se força à rester calme, pour dissimuler l’impatience qu’elle ressentait. Elle ajouta : « Et quand vous devenez un mécanique, qu’arrive-t-il à votre esprit ? À votre âme ? »

« L’essence est préservée au sein d’une capsule protégée et scellée qui reste avec nous : notre noyau, notre être. Rien ne se perd. En fait, on y gagne beaucoup. Débarrassé de la chair, l’esprit devient pur, sans entraves. La pensée est plus facile, l’imagination est libérée. Toutes les distractions liées aux imperfections de la biologie disparaissent. C’est extrêmement libérateur. Même si j’admets qu’il y des des aspects de la chair qui son perdus, et certains d’entre eux nous manquent ». Il y eut une pause et Haley se demanda si c’était le résultat d’une émotion liée à cette dernière phrase. Directrix déclara : « Dans l’ensemble, les gains dépassent de loin ce qui est perdu ».

« Et votre pouvoir, si vous en aviez avant ? Le pouvoir mystique, je veux dire ». Haley réalisé qu’elle avait brisé son impassibilité et détourna les yeux.

« Il est également conservé et même augmenté. Ce que tu perçois comme mystique est simplement la capacité d’exploiter les formules et les lois sous-jacentes de la réalité, qui répondent à la volonté d’une âme dotée de pouvoirs. Chaque âme est elle-même une formule, un fragment du divin. L’âme aspire à se libérer de la chair, un état qui n’est généralement atteint que dans la mort. La nôtre est une autre voie.

Même si elle avait peu d’intérêt à explorer ou à comprendre leurs croyances cosmologiques, Haley devait admettre qu’il y avait quelque chose d’attrayant dans ces paroles. Elle était parfaitement consciente d’elle-même pour comprendre à quel point elle voulait que tout ce que Directrix disait soit vrai ? « Vous dîtes qu’un corps mécanique devrait être mérité. Et les étranges ? Est-ce possible pour eux ? »

« C’est transformation sacrée. Même toutes les personnes qui sont dévouées à notre cause ne sont pas prêts ou digne de l’être ».

« Je vois » ? Haey sentit son coeur se serrer dans sa poitrine.

Elle se tendit lorsqu’un trio de silhouettes s’approcha de derrière Directrix, leurs armures et casques presque identiques à ceux que l’Optifex Quintus avait portés. Ils se déplaçaient avec détermination et portaient diverses outils et armes. Elle resserra sa prise sur son bâton d’acier. Directrix dit : « Ceux-ci s’occuperont de votre compagnon ».

Haley fut soulagée de voir que la promesse d’assistance n’était pas vaine. Lyle Garner était aussi à l’aise que possible, mais sa respiration était devenue inégale. Elle l’aida à ajuster sa position pour les cyrissistes nouvellement arrivés et les observa avec méfiance. Ils avaient apporté des fournitures médicales et des instruments chirurgicaux et semblaient savoir ce qu’ils faisaient.

L’un d’eux sortit ce qui semblait être une paire de tiges pliables. Cela s’avéra être une civière portable, avec un tissu blanc entre les deux tiges une fois dépliées et des poteaux de soutien se terminant par de robustes roues. Il soulevèrent Garner sur ce brancard et s’occupèrent de sa blessure. L’un deux employa une pince et une  pince coupante pour sectionner la tête du projectile empalé dans jambe. Le projectile fut rapidement extrait, puis la plaie soigneusement nettoyée et refermée. Ils effectuèrent toute la procédure avec la même efficacité que celle qu’elle imaginait qu’ils affichaient lorsqu’ils s’occupaient d’une de leurs machines au lieu d’une personne vivante.

Directrix se contenta d’attendre, bien qu’il y ait toujours des éléments de son armature en léger mouvement, comme s’il s’agissait d’une sorte d’horloge élaborée. Haley prononça brusquement : « Je suis en train de mourir. Je ne pense pas qu’il me reste beaucoup de temps. Mon corps est parcouru par un poison cryxien que nous ne pouvons pas éradiquer ».

« Je suis conscient de cela », déclara Directrix. Sa certitude fit sursauter Haley. La Convergence les avait-elle espionnée d’une manière ou d’une autre ? Il était déconcertant d’imaginer cette secte radicale inconnue jusqu’alors si familière avec ses vulnérabilités.

« Il m’est venu à l’esprit que peut-être, avec tout ce que vous avez accompli, avec la technologie à votre disparition, vous pourriez peut-être résoudre mon problème ». Elle inclina la tête vers Garner. « De toute évidence, vous avez des médecins et des chirurgiens compétents ».

Directrix répondit : « Le corps biologique est semblable à une machine, bien que très chaotique et très imparfaite. Pour les membres de notre foi qui ne sont pas éveillés, nous savons comme soigner leurs blessures, réparer les os, arrêter les saignements et accélérer la guérison. Nous ne savons rien qui puisse éradiquer les toxines qui menacent votre vie ».

Haley sentit son espoir s’envoler. « Et si l’un des vôtres était atteint comme moi ? Pourriez-vous effectuer une sorte de remplacement partiel ? » Elle bredouilla un peu les mots, incertaine de ce qu’elle demandait exactement. « Comme mon bras, mais en plus extrême ».

« Nous ne croyons pas au remplacement partiel. Ce qui a été fait avec votre bras ne serait pas fait par nous. On est soit vivant, soit machine, pas les deux ». Ces paroles surprirent Haley. Directrix poursuivit, le ton pensif. « J’ai une fille vivante d’à peu près votre âge. Si elle était atteinte de votre maladie, je serais peut-être obligée de lui accorder la transformation. Ce serait l’unique solution : devenir mécanique ».

Haley répondit : « Mais cette voie ne m’est pas accessible. Je ne suis pas l’une des vôtres. Même si vous m’autorisiez à vous rejoindre, je n’aurais pas le temps de faire mes preuves ».

Directrix inclina légèrement la tête. Elle prononça lentement : « Des exceptions peuvent êtres faites ».

Un tremblement traversa Haley, la ramenant à sa pleine vigilance. « Que voulez-vous dire ? »

« Certains circonstances permettent un éveil accéléré. Parmi les nôtres, ceux qui sont gravement blessés au combat sont souvent autorisé à devenir des mécaniques pour préserver leur esprit, même si autrement ils pourraient être considérés comme non prêts.

« Et les étrangers ? »

« Les étrangers sont une autre affaire. Normalement, ce ne serait pas possible. Pas sans nous avoir rejoints et avoir prouvé votre dévouement ».

Haley envisagea de mentir, d’exprimer un engagement ferme envers leur cause. Cependant, elle ne pensait pas pouvoir tromper cette « mère de fer » un instant, et elle ne voulait pas risquer d’être forcée de se retourner contre son peuple. « Je ne me joindrai pas à vous. Je ne briserai pas mes vœux envers le Cygnar ni vous aiderez à faire du mal à mes compatriotes.

Directrix leva un seul doigt métallique et dit : « Nous n’avons pas de visée sur le Cygnar. Pas directement ».

« À Calbeck- »

« Il était nécessaire pour nous d’y ériger une structure, pour une courte période. Ses habitants n’auraient pas coopéré et nous ne pouvions pas nous permettre d’interférences, alors il y a eu une bataille. C’est malheureux, mais la portée a été limitée ».

« Parce que vous avez été vaincus », répondit Haley, ressentant une certaine indignation au nom de Nemo. « Vous avez été chassé de la ville ».

Directrix ne sembla pas s’en émouvoir. « Nous avons atteint notre objectif à Calbeck. Nous nous sommes battus aussi longtemps que nécessaire, puis nous nous sommes retirés. Nous avons des objectifs précis, et la conquête n’en fait pas partie. Si nous sommes en désaccord avec votre gouvernement, il s’agit de trouver un moyen rapide d’éliminer les obstacles. La violence est un outil parmi d’autres. Ce n’est pas toujours le meilleur outil ».

Haley devint plus méfiante. « je le pensais quand j’ai dit que je vous rejoindrais pas. Je n’adore pas votre déesse et je ne me convertirai pas ».

La prêtresse mécanique écarta les deux bras dans un geste de conciliation. « Écoutez-moi attentivement. Ordinairement, nous n’envisagerions jamais d’apporter la forme divine à une étrangère. Vous n’êtes pas ordinaire. Nous vous connaissons, Victoria Haley. Vous êtes également une savante nesciente, bien que d’un genre différent. Votre potentiel est illimité. Cela nous est précieux. Grande valeur ».

« Qu’est-ce que vous voulez dire, ‘savante nesciente’ ? Vous avez utilisé ce terme à propos du Général Nemo », déclara Haley.

« Les savants nescients sont ceux dont l’esprit est touché par notre déesse sans le savoir. Ils façonnent une nouvelle réalité grâce au savoir et à une compréhension intuitive des lois sous-jacentes qui régissent toutes les choses. Ils sont extrêmement rares. Les esprits inférieurs affluent vers eux ou s’éparpillent devant eux. Notre foi n’existe que depuis quatre siècles, mais la déesse guide l’humanité depuis bien avant l’écriture. Très peu de tels esprits ont été collectés, préservés ».

Haley déglutit et dit : « Je n’aime pas l’idée d’être collectionnée. Et je vénère Morrow, pas Cyriss ».

« Dans ce cas, cela n’as pas d’importance. Vous n’avez pas besoin de vous convertir. Peu de personnes en dehors de nos fidèles savent que Morrow était lui-même un savant nescient. Son esprit avait été touché par notre déesse, et ses enseignements l’ont bien servi. Ce qu’il a accompli a servi à faire progresser l’avènement de notre foi, notre capacité à trouver et reconnaître la Patronne des Mécanismes ». Haley plissa les yeux. Directrix poursuivit : « Les enseignements de Morrow ont fait plus pour faire avancer la science que tout ce qui a été accompli par quiconque de son époque. Tous les mathématiciens et ingénieurs qui ont suivi l’éveil de Morrow n’ont fait que progresser vers la découverte de notre déesse. Plusieurs des ses ascendants ont accompli des travaux similaires ».

Haley secoua la tête. « Je ne suis pas intéressé par vos croyances ».

Directrix répondit : « Comme vous voulez. Le fait est que votre foi ou votre absence de foi n’est pas un obstacle. Je peux faire en sorte que vous perduriez, transformée. C’est de mon ressort ».

« Que voulez-vous en retour ? » demanda Haley, sentant qu’elle était arrivée au coeur du problème. Elle devait savoir ce que Directrix avait caché, la limite qu’on lui demanderait de franchir.

« Rien », répondit Directrix. « Je ne vous demande rien d’autre que la discretion et l’ouverture d’esprit. Le processus ne peut se dérouler qua dans les salles de nos plus grands temples. Il faudrait que je vous y emmène. Je vous montrerais les merveilles qui s’y trouvent et vous demanderais de ne pas employer ce savoir comme une arme contre nous. Les connaissance que vous y acquériez pourraient vous permettre de m’aider à trouver de meilleurs solutions aux obstacles entre votre nation et notre foi à l’avenir. Vous pourriez servir d’ambassadeur, d’agent de liaison ».

« Il n’y aura pas d’autres obligations ? Aucune exigence ? Vous me laisseriez partir comme cela ? »

« Je le ferais », répondit Directrix. « Bien qu’il me faille dire que votre vie ne serais plus jamais la même. Ils se pourrait que vos anciens amis ne vous accueille plus, alors que votre peau est d’acier ». Haley pensa à la forte aversion de Nemo pour ce processus, ainsi qu’à ce quelle avait elle-même ressenti lorsqu’elle avait remplacé son bras pour la première fois. « Vous pourriez vous retrouver en exil, ou devoir rester notre invité. Cela ne vous serait pas imposé, mais nos salles vous seront ouvertes. Bous souhaiterez probablement rester avec nous, au moins pour un temps, jusqu’à ce que vous maîtrisiez votre nouvelle forme. Mais vous n’y seriez pas contrait. Nous voulons que vous existiez ».

Ces paroles mirent les choses en perspective plus qu’Haley ne se l’était permis. Elle avait pensé à ce que pourrait être l’existence après avoir investi un corps mécanique, mais cela lui avait semblé une possibilité farfelue mais improbable. Était-elle prête à se séparer de l’humanité ? Elle devait admettre que cette pensée ne l’effrayait pas autant qu’elle aurait pu l’être autrefois. Elle ne serait plus vivante, mais elle existerait toujours. Son pouvoir serait restauré. Elle pourrait se battre pour le Cygnar – si ce n’était pas aux côtés de l’armée, peut-être dans l’ombre. Pourrait-elle empêcher des centaines de milliers de morts en servant de liaison avec la Convergence pour sa nation.

C’était tentant, plus que tentant.

Son esprit lui appartiendrait-il ? Directrix avait facilement acquiescé à ses questions, n’avait fait aucun effort pour la convertir. Leur conversation avait pris des tournures surprenantes. Nemo se serait-il laissé convaincre, s’il avait été à sa place ?

« Victoria Haley, approchez-vous. Je voudrais vous montrer quelques choses ». Directrix ouvrit les bras.

Haley s’avança prudemment, constatant que la mère de fer était plus grande qu’elle ne l’avait imaginé. Elle dégageait une fragance d’huile neuve, et une odeur d’air après la tempête. Elle était parfaitement consciente que sa vie était entre les mains de cette créature. Une seule de ces extensions de lame sur son dos pouvait la tuer. Mais c’était le cas depuis l’arrivée de la warcaster. Qu’elle soit à trois mètres ou à cent verges, Haley était à la merci de la mère de fer.

« Touchez mon vaisseau », prononça la prêtresse, «  et projetez vos sens en moi, comme vous le feriez avec l’un de vos warjacks ».

Maintenant, trouvez ma chambre à essence, ici ». Haley ouvrit les yeux pour voir Directrix toucher sa poitrine avec l’une de ses mains métalliques, au-dessus de l’emplacement où se trouverait un coeur chez un être vivant. Un anneau circulaire lumineux était situé sur sa forme extérieure, et Haley vit que c’était le sommet de quelque chose de plus grand, un cylindre s’étendant jusqu’au centre de son torse. C’était la source de la puissance de la mère de fer, le coeur de son esprit. Haley ne pouvait pas s’y interfacer comme avec un cortex – elle était tenue à distance – mais elle pouvait ressentir les complexes schémas de pensée et d’énergie. Directrix reprit la parole : « Il n’y a aucune influence extérieur qui m’affecte. Je ne suis pas contrôlée. Je suis moi-même, entière. Il en serait de même pour vous ».

Il était presque impossible de le confirmer, mais Haley ne ressentait aucune influence extérieure sur le coeur du vaisseau mécanique. Tous les flux d’énergie qui traversaient son corps éteint régulés à l’intérieur de ce cylindre de lumière flamboyante. Haley était suffisamment cynique et méfiante pour savoir que cela ne prouvait rien. Que Directrix soit libre et sans entrave ne garantissait pas qu’elle jouirait d’elle-même de la même liberté. Pourtant, elle voulait désespérément croire que Directrix était franche.

Elle retira sa main et, après une longue pause, dit : « Très bien. Je crois que c’est la voie que je dois suivre ».

Directrix inclina la tête et baissa les bras le long du corps. « Je suis ravie. Vous devriez m’accompagner à mon temple. Nous pourrons commencer la procédure immédiatement ».

Haley regarda Garner, attaché sur la civière et toujours inconscient. Son visage était si pâle que sa tache de naissance ressortait telle une tache sombre sur in tissu blanc. « Non », dit-elle. « Je dois veiller à ce que mon chef revienne sain et sauf en ville. Et il y a d’autres choses dont je dois m’occuper. Comme vous l’avez dit, ce ne sera peut-être pas facile de revenir en arrière une fois que j’aurai changé ».

Directrix fit une pause avant de prendre la parole, puis dit : « Je crois fermement que vous devriez venir avec nous maintenant. Nous prenons un risque chaque fois que nous nous déplaçons en surface à proximité des villes. Mes subordonnés veilleront à ce que votre ami soit ramené sain et sauf. Je peux envoyer des optifex vivants déguisés en cygnaréens pour s’occuper de cette tâche. Venez avec moi ». Son ton était insistant.

Haley resta ferme, secouant la tête. « Vous avez dit que je serais libre, qu’il n’y avait pas d’obligations. Si c’est vrai, vous devez me permettre de faire mon devoir. Cet homme est sous ma responsabilité ».

Il eut une pause beaucoup plus longue. Haley se demanda si elle pourrait être emmenée de force, bien que le cours de leur conversation l’ait amenée à croire que Directrix jugeait important qu’elle prenne la décision volontairement. Elle se demandait si le processus risquait d’échouer s’il était infligé à une personne ne le désirant pas. Dans le cas d’un transfert d’âme, cela semblait possible.

« Très bien » finit par répondre Directrix. « Je comprends vos raisons. Le temps presse. N’oubliez pas votre maladie. Elle se tourna sur le côté, et l’une des sphères qui l’accompagnaient s’approcha. Elle tendit la main, détacha quelque chose de petit, puis se retourna vers Haley et tendit la main. Dans sa paume métallique se trouvait un disque argenté parfaitement circulaire avec un bord fileté et ce qui ressemblait à un motif astronomique sur sa surface. « Lorsque vous aurez vu votre subordonné et que vous serez prête, revenez seule à cet endroit et apportez ceci. Mes subordonnés détecteront sa présence et vous escorteront pour le reste du voyage ».

Haley accepta le disque, le serrant dans sa main vivante de façon à ce qu’il soit pressé contre sa paume. « Merci », dit-elle. Elle revint près de Garner et prit l’un des extrémités du brancard dans ses mains.

Directrix fit un mouvement gracieux ressemblant à un demi-salut. « Jusqu’à ce que nous nous rencontrions à nouveau. Portez-vous bien et sachez qu’une place vous attends dans nos salles ». Sur ce, elle se retourna et s’éloigna, ses warjacks flottants à ses côtés. Haley tendit  son esprit vers eux, mais une fois de plus, elle ne sentit aucun cortexes. Tout ce qu’elle put ressentir, ce fut Directrix elle-même, liée à eux par des fils de pensée.

Haley jeta un regard attristé sur l’épave de Marque, la Sentinelle. Elle eut un pincement au coeur en pensant au travail que Garner avait effectué sur la machine en ruine. Au moins, il était encore en vie. C’était ce qui comptait. Elle se retourna et débuta le laborieux processus consistant à pousser son chef d’équipe inconscient sur la pente jusqu’à chariot, essayant de ne pas s’évanouir à cause de l’effort.

* * *

Le bruit sourd de la porte se refermant la réveilla en sursaut, désorientée et confuse. Il ne lui fallut qu’un instant pour se rappeler où elle se trouvait. Elle était assise sur un étroit canapé à l’intérieur du salon exigu mais chaleureux d’un appartement au sein de l’Académie de Stratégie Militaire de Port Bourne, qui faisait partie d’un dortoir réservé aux professeurs et aux invités spéciaux de l’académie militaire. L’homme qu’elle était venue chercher, Sebastian Nemo, fermant la porte devant elle et se retourna pour la voir pour la première fois. Ses yeux s’écarquillèrent, puis son expression passa rapidement de la perplexité à la colère, ses sourcils broussailleux se rétrécissant. Elle put presque entendre le grondement du tonnerre.

Haley n’avait pas eu l’intention de s’endormir dans sa chambre, mais les événements de la nuit l’avaient poussée à ses limites. Elle avait réussi à ramener Garner en ville et à être assistée par un chirurgien de l’armée quelques heures avant l’aube. Cela l’avait forcée à convaincre ceux qu’elle avait enrôlé pour l’aider qu’elle avait été impliquée dans une mission prioritaire, une mission nécessitant le secret. Elle savait que cela ne tiendrait pas longtemps, mais elle n’avait pas besoin de beaucoup de temps.

Pénétrer dans l’Académie de Stratégie Militaire sans être confrontée à ses interlocuteurs avait été plus facile qu’elle ne le pensait. Cela lui avait fait réaliser à quel point l’endroit pouvait facilement être compromis par quelqu’un malintentionné. Elle s’était rendue directement dans les quartiers préférés de Nemo, ceux se trouvant juste en face d’un laboratoire et d’un atelier privés qu’il entretenait dans le bâtiment depuis des décennies. Elle avait eu l’impression qu’il était bien plus susceptible de rester ici que dans sa résidence officielle près de la garnison de l’armée de l’autre côté du quartier militaire. À son arrivée, elle l’avait découvert inopinément absent et s’était installée dans son salon parsemé de livres, face à la porte, avec l’intention de veiller jusqu’à ce qu’il revienne. Manifestement, le calme et la tranquillité avaient eu raison d’elle.

Alors même que Nemo ouvrait la bouche pour s’exprimer, elle lui dit : « Vous deviez fermer votre porte à clé ».

Une myriade d’émotions traversa son visage, du soulagement à l’incrédulité, mais la colère dominait toujours. Il bafouilla : « J’étais seulement de l’autre côté du couloir, en train de travailler ».

« Toute la nuit ? » Ses cheveux étaient ébouriffés et il y avait de gros cernes sous ses yeux. « Vous n’avez pas dormi ».

Il s’insurgea. « L’épée de Morrow, Victoria. As-tu une idée de ce que tu as fait subir à tout le monde ?! Dolan est devenu fou, et toute la ville est à ta recherche ! Où étais-tu à Urcaen ? »

« Ce n’est pas important », déclara Haley. Dans d’autres circonstances, elle aurait pu se mettre sur la défensive, sentir son indignation monter en réponse à la sienne, mais au lieu de cela, elle se sentait calme. Au contraire, elle trouva son emportement attachant, lui rappelant qu’il y avait des personnes qui se soucient d’elle. Elle était heureuse d’être venue. Il n’aurait pas été juste de partir sans revoir Nemo.

« Bien sûr que non ! » Il fronça les sourcils et fit un pas en avant, puis s’arrêta et ferma les yeux un instant. Elle le vit se retenir de se lancer dans une conférence, et elle se sentit presque déçue. « C’est à propos de Caspia ? » demanda-t-il. « Vous n’êtes pas une prisonnière, major. Si vous ne vouliez pas vous y rendre à ce point, vous auriez du le dire. Le Pair Vigilant Dolan veut juste votre bien. Nous le voulons tous ».

« Je n’irai toujours pas à Caspia », répondit avec fermeté Haley.

« Alors qu’elle est ton plan ? Te cacher quelque part jusqu’à ce que tu meures, seul ? En quoi cela aurait-il aidé quoi que ce soit ? » Il s’arrêta et elle se rendit compte qu’il s’étouffait. Elle ne l’avait jamais vu comme ça.

Elle dit : « Je devais faire autre chose que simplement m’asseoir et attendre qu’une réponse tombe à l’improviste. Quoi qu’il en soit, je suis revenu et je suis ici maintenant ». Elle ressentit une douleur dans sa poitrine.

L’aube pointait et une lumière orangée filtrait à travers l’une des fenêtres, glissant sur le visage d’Haley. Nemo l’observa, puis se pencha et tendit une main vers sa joue. « Tu t’es battue ? »

« C’est une longue histoire », répondit-elle évasivement. Elle n’était pas tout à fait sûre de la façon dont elle voulait gérer cette situation. Elle se ressaisit et dit : « Je suis revenue par que je pensais qu’il était important de dire au revoir ».

« Au revoir ? » La moustache de Nemo tressaillit et il fronça sévèrement les sourcils. « Tu ne peux pas abandonner, Victoria. Je sais que les choses semblent mauvaises et que tu as été découragée, mais tu dois continuer à ta battre. Tu est jeune et forte. Nous avons les meilleurs personnes du royaumes sur ce dossier ». Il y avait dans ses yeux une expression de désespoir qui l’émut plus que tout. Puis son regard se porta sur le tapis à ses pieds et son froncement de sourcils s’accentua.

Haley suivit son regard et se figea, le sang refluant de son visage. Sur le tapis, brillant dans la lumière du matin, gisait le morceau de métal en forme de pièce de monnaie que Directrix lui avait remis. Elle réalisa qu’elle l’avait sorti après s’être assise pour l’attendre ; elle l’avait tenu dans sa main alors qu’elle contemplait son avenir en tant qu’être mécanique. Elle avait dû le laisser tomber en s’endormant. Elle se baissa et le ramassa, gardant une expression neutre tout en le rangeant dans une pochette à sa taille.

« C’est quoi ce truc ? » demanda-t-il brusquement.

« Rien d’important », mentit-elle. Elle se sentit ni coupable ni honteuse, juste idiote d’avoir laissé tombé le disque. La certitude d’avoir découvert un moyen de se rétablir, aussi extrême soit-il, lui avait offert une sérénité qu’elle n’avait pas ressentie depuis son empoisonnement. Elle avait dissipé son ancienne anxiété, la laissant désinvolte.

Nemo passa ses doigts dans sa moustache et la considéra. Elle pouvait presque voir les pièces d’un puzzle s’assembler dans son esprit. Elle se prépara à être accusée et interrogée.

« Je voudrais vous montrer quelque chose que lequel j’ai travaillé », dit-il, la surprenant. Il lui fit signe d’approcher en ajoutant : « Vennez. C’est dans mon atelier, ça ne prendra qu’une minute ».

Elle se leva et le suivit tandis qu’il sortait dans le long couloir sombre, puis sortit un petite trousseau de clés et déverrouilla la porte d’en face. Elle sourit en pensant qu’il était plus soucieux de la sécurité de son atelier que de celle de son appartement. C’était tout à fait approprié.

Il ouvrit la porte et la fit entrer, les yeux pétillants. Haley regarda autour de lui, un contraste frappant avec le garage de Garner, maculé de graisse et d’huile. Celui-ci était tout aussi encombré d’outils et d’appareils, mais ils étaient d’un tout autre calibre. Elle y vit des bobines voltaïques, des conduits, des sphères de verre dans lesquelles dansaient des étincelles d’électricité, des glaives-tempête démontés et d’autres appareils perfectionnés. Elle pouvait presque retracer l’histoire de la technologie tempête cygnaréenne en observant les nombreuses étagères et surfaces de travail. Ses yeux se posèrent sur un support dont Nemo s’approchait.

« Est-ce que c’est- » débuta-t-elle en s’approchant.

« Oui ! », répondit-il avec enthousiasme. « Une nouvelle armure de warcaster pour vous. Alimentée galvaniquement cette fois-ci, bien sûr. Plus de charbon, plus de fumée ».

Elle passa sa main sur les surfaces brillante de l’armure et apprécia immédiatement sa qualité de fabrication. Elle était clairement basée sur son ancienne armure en termes d’équilibre entre le poids et la facilité de mouvement, mais cette combinaison employait la technologie tempête de Nemo au lieu d’une turbine arcanique alimentée par le charbon. Des bobines étincelants s’étendaient de l’arrière à la place des cheminées. Jusqu’à présent, seuls Nemo et Stryker avaient adopté cette nouvelle source d’énergie, et Haley savait que la fabrication d’une telle armure posait de considérables défis techniques. Cela représentait un investissement considérable, surtout en termes de temps. « Finch vous a aidé ? » demanda-t-elle. Caitlin Finch, la subordonnée immédiate  la plus compétente du général, était elle-même une prodigieuse innovatrice.

Son sourire en guise de réponse semblait suffisant. « Non, pas du tout. C’est mon œuvre. J’avais l’intention de l’envoyer à Caspia comme surprise après votre arrivée. Pour vous rappeler que je m’attend à vous revoir sur le champ de bataille. Je sais que vous aurez l’occasion de la porter dès que vous serez guéri. Est-ce que je consacrerais autant de temps à quelque chose comme ça s’il y avait le moindre doute ? »

« C’est du beau travail », admit Haley. C’était le cas, et elle se sentit très touchée. Une partie de son esprit ne pouvait s’empêcher de comparer sa relative simplicité avec l’extraordinaire complexité du vaisseau mécanique de Directrix. Elles semblaient deux monde à part, et pourtant chacune d’elles était une sorte de chef-d’oeuvre technique et artistique.

« Vous avez été en contact avec eux », dit Nemo après une longue pause, la faisant sursauter. Son ton avait changé – mesuré, certain. « Les cyrissistes. Était-ce quelqu’un de la Convergence. Qu’est-ce qu’ils sont dit ? Vous ne pouvez pas leur faire confiance, Victoria. Ils se trompent et sont dangereux ». Haley se retourna pour lui faire confiance. La question l’avait prise au dépourvu, comme il l’avait sûrement voulu. Il l’observa attentivement. C’était le disque qu’il avait remarqué, combiné avec tout le reste. Ses yeux étaient encore vif, tout comme son esprit. Elle répondit : « Je ne sais pas de quoi vous parlez ».

Ses yeux se rétrécirent. Il ne la croyait manifestement pas, mais il ne le dit pas directement. « Écoutez-moi bien. Je veux que vous réfléchissiez attentivement à ce que vous ferez dans les jours à venir. Je veux que vous considériez votre humanité et à quel point elle est précieuse. Il peut être facile de l’oublier dans l’état où vous vous trouvez, mais c’est peu-être le meilleur moment pour y penser. À qui vous êtes vraiment, au plus profond de vous-même ».

Il marqua une pause et lui donna l’occasion d’intervenir, mais elle resta silencieuse. Il soupira et continua : « Quand j’étais à Calbeck, j’ai eu l’occasion de réfléchir à ses choses. Vous m’avez déjà demandé si j’avais été tenté lorsqu’ils ont essayé de me recruter. Je n’ai pas répondu franchement. À mon âge, l’idée de rester quelques décennies voire quelques siècles de plus, qui n’en voudrait pas ? Mais cela semble trop beau pour être vrai, ce qui signifie que c’est probablement le cas. Au fil des ans, j’ai appris à faire confiance à mon scepticisme. Je reste convaincu, d’après tout ce que j’ai vu et tout ce que je sais, que transformer les gens en rouages n’est pas différent d’animer les morts, tout comme le Cryx.

« Les gens meurent, Victoria. Parfois avant qu’ils ne le devraient ». Il s’éclaircit la gorge et elle entendit son émotion mise à nu dans sa voix. « Cette maladie, elle pourrait te tuer Je veux que tu la combatte, mais tu pourrais perdre. Je préférerai toujours que tu te battes. La Convergence veut que tu abandonnes. Ce qu’ils offrent, ce n’est pas vivre ».

Ses paroles la marquèrent profondément dans son esprit et son coeur. Sa sérénité était brisée. Elle chassa ses larmes en clignant des yeux et prit une profonde inspiration. « J’apprécie vos conseils. C’est vrai ». Elle reporta son regard sur l’armure. « Et votre foi en moi ».

« Nous devrions vous ramener à l’hôpital ».

« Non », répondit-elle, « Pas encore. Je veux d’abord me reposer, avant d’être interrogé par Dolan ».

Nemo sourit et parut soulagé. Il fit remarquer : « Il est membre de l’Ordre de l’Illumination. Ils sont bien entraînés ».

Haley lui rendit son sourire. « Laissez-moi m’allonger un peu sur le canapé. Justes quelques heures. Ensuite, nous verrons avec lui. Vous devriez aussi vous reposer. Il est encore très tôt ».

Après un regard mesuré, il hocha la tête à contrecoeur. « Très bien. Ensuite, vous retournez à l’hôpital. Nous reparlerons de Caspia plus tard ».

« Bien », répondit-elle. Elle se rendit compte qu’elle avait beaucoup de personne dans son camp, et celui lui faisait du bien. Mais cela rendait aussi les choses confuses et compliquées.

Elle le suivit jusqu’à sa suite, tout en se disant que si elle devait partir, elle devait le faire maintenant. Elle pourrait s’éclipser une fois qu’il se serait endormi. Elle n’irait pas à l’hôpital, ni à Caspia, mais quelque part qui aurait aussi bien pu être un autre monde. Cette pensée ne l’emplissait pas de la même tranquillité qu’elle avait moins d’une heure auparavant.
Citation de: Maître Yoda
Trop gentil tu seras, dans le côté obscur tu l'auras.

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Re : Roman - À Quel Prix
« Réponse #8 le: Aujourd'hui à 12:31:03 »
Partie trois
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