LA SIXIÈME HARMONIQUE
La machine est corrompue par les déficiences de la chair.
Nemo
De retour au camp, Nemo envoya Finch ramener le Patrouilleur-Tempête et ordonna au Jimmies d’effectuer une dernière inspection des deux engins de combat. Il voulait qu’ils soient prêts à l’action à tout moment. Malgré les résultats indéterminés du pourparler, ils ne pouvait se défaire du sentiment qu’une autre attaque pouvait survenir à tout moment.
Il frissonna en pensant à ce qu’il avait appris de cette Convergence. Malgré les protestations contraires d’Aurora, il partageait l’inquiétude de l’Aumônier Geary : le confinement d’âmes dans des corps mécaniques équivalait à de la nécromancie. Il eut la chair de poule quand il pensa à ces équivalents technologiques des liches de fer.
Alors que Finch manœuvrait délicatement le Patrouilleur-Tempête à travers le campement grandissant, le Major Blackburn s’approcha de Nemo.
« Nos troupes ont complément encerclé Calbeck et creusé des tranchées à l’est et à l’ouest. Les faux transports ont rempli leur mission et rien n’indique que l’ennemi ait détecté la ruse. Les éclaireurs de l’autre côté du fleuve ne signalent aucun signe de Cryx ou d’un quelconque emplacement de la Convergence en dehors de la centrale électrique déjà sécurisée. Un petits groupes de rangers reste là et fait un rapport visuel toute les demi-heures ».
« Et le camp ? »
« L’atelier et d’autres tentes clés ont été éloignés des lignes de front. Nous avons placé les réfugiés dans des tentes juste au sud du camp principal », répondit-il. « L’Aumônier Geary était impatient de s’entretenir avec vous après le pourparler, mais je l’ai chargé du bien-être physique et spirituel des villageois ».
« Bien joué ». Bien que Nemo appréciait les conseils de l’aumônier en privé, il souhaitait une autre conférence avec la druidesse sans la présence de Geary ne vienne perturber le cours de son enquête. Blackburn était un officier aussi perspicace qu’il était courageux. « Et Mags ? Sergent Jernigan ».
« Elle aura un coquard de la taille d’un œuf d’oie, mais Geary l’a guérie en premier. Dès qu’il a eu fini de prier, elle a insisté pour reprendre le travail ».
« Et vous l’avez laissée partir ? »
« J’ai laissé cette décision à Geary. D’après ce que j’ai entendu en m’éloignant de leur dispute, il perdait ».
Nemo réprima un petit rire. Considérant la façon dont Mags traitait son général, il imagina que le chevalier Précurseur n’avait eu aucune chance. « Très bien. Retrouvez-moi à la tente des cartes dans une heure ».
« Oui, monsieur ». Blackburn salua, mais ses yeux s’attardèrent sur le visage de Nemo.
« Qu’y a-t-il ? »
« Si je peux me permettre, monsieur, quand avez-vous mangé pour la dernière fois ? »
Nemo voulu demander à Blackbunr s’il était un chevalier-tempête ou une matrone d’une pension de famille. Ce n’était pas la première fois que Finch où l’un des autres officiers de Nemo devait lui rappeler de manger.
Pour eux, c’était une question d’auto-préservation, estima-t-il. Lorsqu’il passait trop de temps entre les repas, il était plus susceptible de dégrader un officier.
« Ce sera tout, major ».
Blackburn effectua un autre salut avant de se retirer.
Jugeant préférable de calmer sa faim avant d’interroger la druidesse, Nemo s’arrêta à la tente mess. À son apparition, les fantassins déjà attablé se mirent au garde-à-vous.
« Repos », prononça Nemo. Il salua le soldat qui se leva d’un bond pour débarrasser une table pour son service personnel et désigna la marmite à soupe. Alors que le soldat commençait à assembler un plateau, Nemo secoua à nouveau la tête. « Juste le bol, une cuillère et un morceau de pain noir. Non, un plus petit morceau. À quoi je ressemble pour toi ? À un titan skorne ? »
Derrière lui, un jeune soldat ricana avant de se taire.
Nemo se retourna pour jeter un regard noir sur la table. Les convives devinrent très silencieux. Pendant un moment, le seul bruit était le claquement des cuillères sur les bols et l’aspiration prudente de la soupe. Avec un dernier lent regard de l’assemblée, Nemo prit sa soupe et quitta la tente, répriment son propre sourire sous l’effet de sa désapprobation. On aurait pu penser qu’il avait pointé un canon-tempête sur les troupes, vu la façon dont elles s’étaient recroquevillées sous son regard.
Il trempa son pain et le mâcha en marchant vers la tente où il avait laissé Bronwyn. Alors qu’il s’approchait, il remarqua deux soldats debout à l’extérieur de la tente, l’un tenant le bâton noueux de l’arme de la druidesse, semblable à une hache.
Bien qu’il était impatient de l’interroger, Nemo ne voulait pas débuter l’interrogatoire avec un bol dans les mains. Il engloutit le reste du pain et de la soupe et jeta le bol vide dans les bras d’un soldat passant par-là.
Nemo entra dans la tente et trouva la druidesse assise, non pas sur le tabouret qu’ils lui avaient fourni, mais sur le sol nu. La tête baissée, sa capuche noire dissimulait son visage. Elle avait les doigts entrelacés dans l’herbe brune de l’automne, non pas fermement comme si elle s’accrochait à la terre, mais doucement comme si elle message subtil de la terre.
Nemo prit le tabouret pour elle. Alors qu’il s’asseyait, la druidesse leva les yeux vers lui.
« Que faisais-tu ? Demanda-t-il, « Tu communique avec quelqu’un ? »
Bronwyn secoua la tête. « Je médite simplement. Je suis heureuse de voir que vous êtes revenu vivant. Peu de membres du Cercle reviennent de leurs affrontement avec ces cyrissistes ».
« Que peux-tu me dire d’autre à leur sujet ? »
Bronwyn secoua la tête à nouveau. « On en sait peu. Parfois, nous découvrons un de leurs temples souterrains. Nous les chassons, sinon ils tuent tous ceux qui tentent de le faire. Lorsque certains s’échappent pour avertir d’autres membres du Cercle, nous revenons en force pour les trouver partis, leurs repaires abandonnés.
L’expérience de Nemo avait été similaire, mais sans les conflits militaires. « Qu’avez-vous appris des machines que vous avez capturées ? »
« Nous les détruisons », cracha Bronwyn. « Ce sont des abominations ».
« Mais vous pourriez apprendre tellement de chose en les étudiant... » Nemo réalisa que les druide n’appréciaient pas la technologie comme lui et la Convergence. « Avez-vous trouvez des preuves de nécromancies dans les temples de Cyriss ».
La druidesse fronça les sourcils et considéra la question. « Non », pour finalement répondre. « Mais leurs soldats mécaniques, avant ils étaient des êtres humains, n’est-ce pas ? »
Nemo hésita à partager ce qu’il avait appris sur la Convergence avec un autre ennemi, même si la druidesse avait été utile jusqu’à présent. « Oui, ils l’étaient ».
Browyn secoua la tête. « C’est mal d’interrompre le cycle de la nature de cette manière. Il n’y a pas de vie sans mort, pas de renouveau sans décadence ».
« Vous vénérez le changement ».
« C’est une façon de voir les choses ».
« Tout comme cette warcaster de la Convergence », dit Nemo. « Ou du moins, c’est ce qu’elle dit ».
Bronwyn plissa le nez comme si elle détectait une puanteur. « Le changement n’est bénéfique que lorsqu’il renouvelle le monde ».
« Eh bien, je suis d’accord avec cela », dit Nemo. Il n’avait jamais souscrit à la notion de changement pour le plaisir. Même les progrès de la connaissance humaine n’étaient bonnes que tant qu’elles restaient sous la garde des personnes qui les appliquaient au profit des autres. C’était la principale différence entre Morrow et sa sœur. Les thamarites s’efforçaient d’obtenir l’avancement personnel et non partagé. Après son entretien avec Aurora, il soupçonnait qu’elle avait plus de points communs avec la sombre jumelle.
« Comment vos gens géraient les vecteurs auparavant ? » demanda Nemo. « Tu dois sûrement avoir de l’expérience pour... »
Un formidable boom retentit du côté du camp sud. Nemo sortit de la tente pour voir un panache de fumée s’élever près du nouvel emplacement de l’atelier des mékaniciens.
« Surveillez-là », dit-il aux gardes en se déplaçant pour avoir une meilleure vue. Il aperçut d’abord la massive silhouette d’un Cuirassé-Tempête s’éloignant en titubant de la source de l’explosion. Son bras droit avait disparu, ainsi que sa lance de combat. Une toile d’énergie voltaïque cascada sur son châssis avant de disparaître.
Au moins quelqu’un sur les lieux avait eu le bon sens d’éloigner les warjacks de l’explosion, pensa Nemo.
La fumée pâle se dissipa suffisamment pour révéler le châssis en lambeaux du Foudroyant. À ses pied gisait le corps du second Cuirassé-Tempête. Nem baissa ses lunette de protection pour épargner ses yeux des fumées.
Un autre boom assourdissant secoua le camp. L’explosion souffla sur Nemo un vent chaud et nocif. Nemo reconnut le bruit comme étant une explosion de foyer. Le Cuirassé-Tempête marchant tomba en avant, propulsé par l’explosion de son propre réservoir de carburant. Des charbons ardents arrosèrent les tentes les plus proches, les enflammant. Une fumée noire s’éleva d’un point proche de la détonation originale.
La clameur autour du camp s’amplifia. Avant qu’elle ne puisse se transformer en chaos, la voix du Major Blackburn ordonnait le sauvetage, le contrôle des flammes et le renforcement de la sécurité du périmètre. Ses officiers les plus proches le reprirent, relayant les ordres à leurs lieutenant, puis à tous les soldats du camp. Les autres cris étaient des cris de coordination, pas de panique.
« Un blessé ici ! » cria un homme.
« Plus de seaux ici ! » cria un autre.
Traçant un chemin à travers la fumée, Nemo suivit le son de la voix de Blackburn jusqu’à ce qu’il trouve l’homme.
« Une autre attaque ? » demanda Nemo.
« Non, monsieur. Pas pour autant que nous puissions l’affirmer. Les premiers rapports suggèrent un dysfonctionnement du Foudroyant ». Il tourna la tête pour tousser. « Soit ça, soit... »
« Sabotage », grogna Finch, se matérialisant à côté de Nemo.
Blackburn hocha la tête.
« Victimes ? »
« Nous avons tiré deux mékaniciens des flammes, mais la deuxième explosion nous a obligé à reculer. Dès que le contrôle du feu aura… Là, ils en ont une autre ». Deux soldats sortaient Mags Jernigan. Ses bras noircis traînaient sur l’herbe. Là où sa jambe mékanique rejoignait son genou, il ne restait qu’un moignon rouge criard.
Une main glacée se crispa sur le vente de Nemo.
Blackburn claqua des doigts : « Portez-la à l’Aumônier Geary sur le champ ! »
« Monsieur », cria un autre homme au Major Blackburn. Il portait une autre personne sur son épaule. Les robes roussies pendant à son armure bleue l’identifiaient comme le compagnon warcaster Benedict. « Celui-ci est en vie, mais à peine ».
« Emmenez-le aussi à Geary », dit Blackburn.
« Priorité ? »
« Cet homme d’abord », dit Blackburn. Il jeta un coup d’oeil à Nemo pour confirmer. En tant que commandant faisant face à la probable perspective d’une bataille, il devait placer la vie d’un warcaster avant celle d’une mékanicienne, peu importe ses sentiments personnels. Bien que cela lui fasse mal, Nemo hocha la tête en soutient de la décision de Blackburn. Il sortit un tissu de sa poche de ceinture pour couvrir son nez et sa bouche.
Tandis que les soldats lançaient quelques derniers seaux d’eau sur les carcasses fumantes des Cuirassés-Tempête, Nemo évalua leur état.
Le Foudroyant semblait être la source de l’explosion initiale. Ses bobines galvaniques étaient noircies et à moitié fondues. Un bras pendait sur le côté tandis que l’autre gisait sur le sol à dix verges de là. De profondes entailles dans le châssis faisaient craindre à Nemo que les dommages n’aient atteint le cortex, auquel cas le warjack serait une épave totale.
Nemo déplorait les dégâts autant que les blessures qu’il avait remarqués sur Mags. Chaque warjack avec lequel il se connectait ressemblait plus à une créature vivante qu’à une machine, celui-ci plus que la plupart. Il avait pratiquement reconstruit le Foudroyant de fond en comble après la bataille du Temple de Garrodh. Bien que cette expérience lui ait donné confiance dans sa capacité à la faire à nouveau, il lui faudrait plusieurs jours, et non des heures, pour que le warjacks soit prêt pour le combat.
La question de savoir comment il avait explosé le troublait profondément.
Il y a quatre ans, lorsqu’il débutait le développement du warjack alimenté par la foudre, Nemo avait détruit deux fois un prototype en surchargeant ses bobines galvaniques. Pourtant, il avait résolu ce défaut de conception, ainsi que le problème de protection du cortex du warjack. Pour faire exploser ce modèle récent, il fallait bien plus qu’une erreur de mékanicien. Finch avait eu raison lors de sa réaction initiale.
Ça ne pouvait être qu’un sabotage.
Malgré les dommages subis par sa boîte à feu, le Cuirassé-Tempête ayant échappé à la seconde explosion semblait pouvoir être sauvé. Celui au sol, cependant, était complètement perdu. Heureusement, son bras armé demeurait intact. Cela demanderait beaucoup d’effort, mais le mékaniciens pourrait la fixer sur l’autre Cuirassé-Tempête.
Pour que l’explosion du Foudroyant ait causé autant de dégâts aux trois warjacks, il fallait qu’ils se trouvent très près les uns des autres, bien plus près que ne le permettraient les protocoles de sécurité. La personne ayant fait cela le savait et les avait disposés en conséquence. Il devenait de plus en plus clair que le saboteur faisait partie des propres troupes de Nemo, faisant de l’acte non seulement un sabotage mais une trahison.
« Apporte les rapports à la tente des cartes », dit Nemo avant de quitter Blackburn. Finch le suivi en silence.
Ils avaient parcouru la moitié du chemin jusqu’à la tente des cartes quand une silhouette sombre se précipitait vers eux., la cape ramenée en arrière telle une paire d’ailes noires. Finch leva son arme pour le défendre, mais Nemo contenta de se renfrogner lorsque la druidesse s’arrêta devant lui. Derrière elle venaient deux gardes, les yeux écarquillés et le souffle coupé. « Monsieur attention ! »
« Je suis venu offrir mon aide », déclara Bonwyn. Elle se tenait à l’aise, les yeux mi-clos, respirant aussi facilement que si elle ne venait pas de s’éloigner en courant de deux soldats armés.
Nemo lança un regard noir au gardes n’était pas parvenu à la garder enfermée. L’un d’entre eux portait la bourse de la druidesse et la dague à sa taille. L’autre tenait sa hache noueuse. « Depuis combien n’est-elle plus sous votre garde directe ? »
« Pas plus de deux minutes, monsieur ! » répondit le premier homme.
« Je serai venue plus tôt mais ils se sont montré plus vigilants et plus rapides que je ne le pensais. Il a fallu un certain temps pour leur échapper ».
« Tu dis que tu veux nous aider », répondit Nemo. « Qu’elle aide peux-tu nous offrir ? »
« J’ai entendu les cris des blessés. Si tu me rends ma bourse. Je peux aider à les soigner ».
Nemo ne faisait clairement pas confiance à la cape noire. En toute autre circonstance, il aurait aimé voir avec quelle facilité elle pourrait échapper à la détention après l’avoir mise aux fers. Pourtant, il savait que les druides possédaient de puissants pouvoirs de guérison, tant naturels que mystiques. Alors que l’Aumônier Geary consacrait ses prière au Lieutenant Benedict, peut-être que les soins de Bronwyn amélioreraient les chance de survie de Mags.
« Rendez-lui sa bourse », dit Nemo. « Emmenez-la à la tente des blessés. Et essayez de ne pas la perdre cette fois ».
« Monsieur ! »
Nemo et Finch retournèrent à tente des cartes, où Blackburn les rejoignit pour signaler un total de six victimes dont trois grave. Tous sauf le compagnon warcaster étaient des mékaniciens, et tous, sauf Mags, étaient des mékanciens de terrain nouvellement arrivés.
Finch pinça les lèvres au froncement de sourcils de Nemo. « Pensez-vous qu’ils ont ciblé les mékaniciens ».
« Je pense qu’ils ont ciblé le Foudroyant et le Lieutenant Benedict », dit-il. « Mais oui, il es possible que nos mékaniciens aient été une cible secondaire. Si c’est le cas, cela pourrait signifier qu’ils espèrent une guerre d’usure, réduisant à la fois notre capacité à déployer des warjacks et notre capacité à les réparer.
Blackburn hocha la tête. « Il n’y a eu aucun signe d’infiltration, à l’exception de cette druidesse ».
« Elle vient de s’échapper de sa tente », déclara Finch. « Qui peut dire qu’elle ne s’est pas éclipsée plus tôt et n’est pas revenue pour se donner un alibi ? »
Nemo admira le raisonnement de la jeune chasseuse de tempête, mais il avait déjà envisagé cette possibilité. « J’étais avec elle juste avant l’explosion. Même si elle aurait put faire son travail pendant que toi et moi étions absents, il semble peu probable qu’elle soit restée au camp après avoir organisé l’explosion. De plus, je doute qu’un druide ait l’expertise mékanique pour provoquer une telle surcharge. Quoi qu’il en soit, Blackburn, demande à nos hommes d’examiner la tente où elle était retenue. Vois s’il y a des signes qu’elle se soit échappée et soit revenue avant l’explosion. Et remplace les hommes qui la surveillent dans la tente des blessés ».
« La tente des blessés ? » Blackburn haussa les sourcils. Nemo décrit brièvement l’offre de la druidesse.
Blackburn acquiesça, mais son visage trahissait son incrédulité à l’idée que Nemo puisse laisser une telle liberté à l’étrangère.
« Exprime-toi. »
« Ce n’est rien, monsieur », dit Blackburn, qui s’empressa de revoir son expression.
Nemo s’efforça de contenir sa colère. Il réalisa qu’il n’était pas en colère contre Blackburn. Il était en colère contre lui-même, effrayé par les soupçons prenant forme dans son imagination.
« Qu’est-ce que Benedict faisait avec le Foudroyant, de toute façon ? » demanda-t-il.
« Il venait juste de revenir après avoir conduit les Lucioles dans les bois à l’est avec le chariot leurre. Peu de temps avant votre retour, lui et le Sergent Jernigans repositionnaient les Cuirassés-Tempête. Les mékaniciens que nous avons interrogés ne peuvent pas expliquer pourquoi ».
« Mags a ordonné qu’ils soient déplacés ? » demanda Nemo.
« je n’en suis pas certain ».
« Donc ça pourrait être Benedict qui a ordonné les déplacement des warjacks ? »
Blackburn secoua la tête. « Ce n’est pas clair, monsieur ».
Nemo soupira mais pas de soulagement. L’incertitude s’enroulait entre ses poumons tel un vieux ressort.
« Les éclaireurs ? »
« Tous présents, bien qu’ils y ait eu quelques rencontres rapprochées avec les gardes mécaniques. L’ennemi compte près de mille hommes, y compris ces vecteurs et ces serviteurs. Il semble qu’il y en ait encore plus à l’intérieur. Nous avons repéré des entrées à chacun des quatre pieds entourant la tour. Les anges et leur chef s’envolent également d’un pont partiellement dissimulé juste au-dessus des arches. En dessous se trouve la foreuse – sonde, moteur ou quoi que ce soit – qu’ils ont enfoncée dans le sol. On ne sait pas combien d’espace il leur reste sous la surface. Nous avons vu des sentinelles au sommet, aussi, juste en dessous de cette orbe ».
« Et les prisonniers libérés ? »
« Tous confinés dans des abris à l’arrière du camp », répondit Blacburn/ « Nous avons envoyé des cavaliers dans les villages les plus proches pour réquisitionner des fournitures supplémentaires. En attendant, les officiers du mess ont reçu l’ordre de réduire les portions d’un quart ».
« Sécurité du camp ? »
« Une autre inspection est en cours. Les rapports initiaux suggèrent qu’il n’y a pas eu de violation, mais je vais remplacer la garde sur la druidesse et inspecter personnellement la tente où elle a été confinée ».
« Très bien. Rompez ».
Blackburn salua et quitta la tente.
« Tu es craints que Mags ait saboté les warjacks, n’est-ce pas ? » demanda Finch.
Nemo fronça les sourcils, mais il était indéniable qu’elle avait deviné son inquiétude.
« Il y a encore une chance que ce soit Benedict, mais le timing pointe vers Mags. Le problème est que nous avons besoin de Benedict ainsi que de tous les mékaniciens que nous pouvons déployer. Jusqu’à ce que je sache à qui de ces deux-là je peux faire confiance, je ne peux pas compter sur eux ».
« Peut-être que ce n’est aucun des deux », déclara Finch. « Peut-être que c’était réellement un accident ».
« Impossible. Il n’y qu’un nombre limités de personnes dans ce camp ayant les compétences pour provoquer cette explosion ».
« Je me porte garante pour toi si tu te porte garant pour moi », répondit Finch.
La pauvre plaisanterie de Finch ne fit rien pour apaiser ses inquiétudes. Il vit sur son visage qu’elle ne croyait pas non plus que l’explosion ait pu être un accident.
« Prions pour qu’ils se remettent tous les deux », dit-elle. « Si l’un d’eux meurt, nous ne saurons peut-être jamais la vérité ».
« Tiens ta langue... » commença Nemo. La remarque de Finch lui avait donné une idée. Il prit une plume et un parchemin sur la table et griffonna une note à la hâte. Il tamponna l’encre humide et plia le papier. Il le tendit à Finch. « Apporte-le en premier à l’Aumônier Geary - Non, ne l‘ouvre pas. Ensuite, assure toi de tes forges-tempête. Après avoir reçu leurs rapports, rejoints moi dans la tente des blessés ».
« Oui, monsieur ». Malgré son vif salut, Finch lui lança un regard inquiet avant de quitter la tente.
Quand elle fut partie, Nemo s’assit et ferma les yeux. Il laissa le poids des années et de la mémoire le retenir tandis qu’il comptait les secondes. Après cinq minutes, il se leva et ouvrit le rabat de la tente avec la pointe de son bâton. Il sortit dans la lumière du soleil de l’après-midi, portant l’arme plutôt que de s’appuyer dessus.
Des soldats le saluèrent sur son passage. Il les ignora jusqu’à la tente des blessés.
À l’intérieur, le tente était divisée en trois, avec de lourdes bâches en guide de murs. Dans la partie centrale, quatre mékaniciens étaient allongés sur des lits de camps, les bras et le visage bandés. Deux essayèrent de se mettre au garde-à-vous à l’entrée de Nemo, mais il leur fit signe de se recoucher. « Repos ».
De la bâche de droite, Nemo entendit l’Aumônier Geary entonner des prières à Morrow. Un infirmier traversa la barrière de toile en tenant un plateau en fer blanc de bandages souillés.. Nemo grimaça en remarquant cela. Il ajouta sa propre prière silencieuse pour que Benedict survive.
Il se dirigea vers la cloison de gauche. Avant même de la toucher, il sentit les nauséabondes vapeurs s’accumuler derrière la bâche. En l’ouvrant, il vit Bronwyn accroupie à côté du lits de Mags Jernigan.
La druidesse avant enlevé les bandages et déposé des lignes d’herbes humides écrasées le long des horribles brûlures de Mags. Sous le regard de Nemo, Bronwyn prit une autre boulette de feuilles mâchées dans sa bouche et la déposa sur le dos de la main brûlée de Mags. Peu importe la puissance de l’art de la druidesse, Nemo craignit que Mags ait bientôt besoin plus qu’une jambe mékanique.
La druidesse avait allumé un petit feu sur le sol. Au-dessus mijotait une casserole d’eau infusée de Morrow-savait-quoi. Bronwyn jeta une autre poignée d’herbes sur la surface bouillonnante et utilisa une aile d’oiseau pour ventiler la vapeur vers Mags.
La mékanicienne était à moitié inconsciente. Ses lèvres remuèrent et elle gémit un mot à peine articulé que Nemo ne put comprendre.
Il s’était arrêté à l’entrée. Bronwyn se tourna pour le regarder. « Fermez le rabat. Nous ne devons pas laisser s’échapper les vapeurs curatives.
Nemo fit un pas à l’intérieur. « Comment va-t-elle ? »
« Très mal », répondit Bronwyn.
« Quelle est cette infâme concoction ? » Il préférait ses potions et teintures préparées dans un laboratoire, pas dans le chaudron d’une druidesse.
« Cela l’aidera à dormir ».
« J’ai besoin de parler avec elle ».
Bronwyn soupira et posa l’aile sur le rebord de la marmite mijotant. « Ses brûlures sont très profondes », déclara-t-elle. « Je pourrais faire plus si près d’une ligne de force, mais cette tour mécanique interfère avec le flux naturel des énergies ».
« Nous chasserons ces envahisseurs ».
« D’ici là, il sera peut-être trop tard », déclara Bronwyn. « Même si elle survit, le nœud est peut-être endommagé ».
« Comment ? » dit Nemo. « Comment peuvent-ils faire ça ? »
« Même nos puissants les plus érudits ne le savent pas avec certitude », déclara Bonwyn.
« Partout où nous avons combattu ces cyrissistes, ils ont laissé le monde blessé. Nous pouvons sentir la faiblesse de la terre ».
Nemo se soucia peut de l’effet que la Convergence avait sur les capes noires, et cela devait se remarquer sur son visage.
« Les blessures sur la face de Caen nuisent à tous ceux qui y vivent, qu’ils sachant ou non puiser la puissance de la terre. Et n’oubliez pas que les forces de la Convergence emploie cette puissance pour faire fonctionner leurs machines. N’es-tu pas préoccupé par ce qu’ils espèrent accomplir avec le mal qu’ils causent au monde ? »
Nemo était en effet inquiet.
« Cette femme ailée », dit Bronwyn, « comment s’appelle-telle ? »
« Aurora... » murmura Mags.
« Mags, m’entends-tu ? » Nemo lui prit la main, vit le peu de peu qu’il restait, et changea d’avis. Le moindre contact ne lui apporterait probablement qu’une agonie.
« Bastian ».
« As-tu parlé à Aurora à Calbeck ? » demanda-t-il.
« Oui », dit-elle lentement. Nemo ne put dire si c’était la réticence ou la blessure qui lui avait arraché la syllabe.
« Que t’a-t-elle dit ? »
« Elle a dit qu’elle aillait libérer les femmes et les enfants », répondit Mags. « Et que je pouvais aller avec eux ».
« Ce n’est pas tout ce qu’elle a dit ? Que t-a-telle promis ? »
« Rien – Elle ne m’a rien promis du tout ».
« Mags, tu n’es pas l’unique blessée dans l’explosion. Quatre des mékaniciens sont gravement blessés. Benedict plus gravement que toi ».
« Benedict ? Ce n’est encore qu’un gamin ». Sa voix se brisa.
« Pourquoi as-tu rapproché les warjacks ? »
« Après avoir vu toutes ces machines à Calbeck, je voulais être sûr que nous étions prêts... »
Le mensonge suintait à chacun de ses mots, Nemo le percevais de plus en plus. « Je sais que c’est toi Mags. Ce que je ne sais pas, c’est pourquoi. Que t’ont-ils promis ? »
La bâche s’ouvrit et l’Aumônier Geary pénétra dans la pièce. Ses yeux se rétrécirent quand il regarda Bronwy, et sa potion mijoté. Ils se rétrécirent encore quand il remarqua que Mags Jernigan était réveillée.
« Comment va le Lieutenant Benedict ? » demanda Nemo.
Geary secoua la tête. « Je suis désolé, Général. Ses blessures étaient trop importantes pour que même le pouvoir divin de Morrow puisse le soigner ».
« Pardonnez-moi », gémit Mags.
« Nemo se tourna vers elle. « Qu’est-ce qu’ils t’ont promis ? »
Mags leva son bras esquinté d’environ un centimètre ou avant que sa force ne s’épuise.
Nemo eut sa réponse.
« Un nouveau corps », dit-il. « C’est ça, n’est-ce pas ? »
Des larmes stria son visage brûlé.
D’un coup, il comprit. Comme lui, Mags avait longtemps souffert des infirmités de la vieillesse. Elle avait donné sa jambe pour le Cygnar et ses seins sans autre raison que l’indifférente cruauté du cancer. La vie militaire lui était toujours resté e travers de la gorge. Combien lui en voulait-elle de ne pas avoir accélérer sa demande d’une meilleure jambe.
L’ultime pitié qu’il ressentait pour ses blessures s’évanouit, remplacée par de la rage. Personne ne pouvait compatir davantage aux affronts de l’âge, des blessures et de la maladie, sans parler de la perpétuelle lassitude de celui qui avait consacré une vie entière à l’armée. Mais une chose que Nemo ne pourrait jamais pardonner était la traîtrise.
Il tourna le dos à Mags et se fraya un chemin à travers la cloison en toile. Bronwyn le suivit. « Que veux-tu faire d’elle ? Tout ce que tu voudras, je le ferai ».
Nemo regarda la druidesse. Était-elle en train de demander s’il voulait qu’elle tue Mags. Ou était-ce une noire fantaisie née sa de propre pulsion de vengeance ? « Laisse-la dormir. Je veux qu’elle soit complètement rétablie et apte à faire face à une cour martiale ».
Bronwyn retourna dans la chambre de Mags.
Nemo sorti de la tente des blessés, l’Aumônier Geary à ses côtés. Aux gardes à l’extérieur, il dit : Placez le Sergent Jernigan sous bonne garde. Personne d’autre que la druidesse ou le chirurgien ne doit lui parler sans ma permission expresse ».
« Oui, Monsieur ».
Alors qu’ils s’éloignaient Nemo se souvint qu’il avait demandé à Finch de le rejoindre à la tente des blessés. Pourtant, il détesta l’idée de demeurer un instant de plus auprès de la traîtresse – il ne pouvait plus la considérer comme son amie.
L’idée que Mags – le Sergent Jernigan – ait été retournée contre son pays natal par ce culte de la mort – la trahison facilitait l’adoption du point de vue de Geary sur la Convergence – était trop difficile à accepter.
La colère fragmenta ses pensées. Il sentit une veine palpiter sur sa tempe. Tel un warjack en surchauffe, il avait besoin de se défouler avant que sa fureur ne lui fasse du mal. Mais il n’avait pas le temps de se retirer, ni même de boire une apaisante tasse de thé. Au lieu de cela, il tourna son attention vers l’autre sujet.
« Comment va Benedict ? » demanda-t-il au Précurseur.
« Il se rétablit, mais il lui faudra des jours avant qu’il ne soit apte au service ». L’Aumônier Geary se racla la gorge. « Général, bien que je sois heureux d’avoir été utile à votre interrogatoire, je dois vous dire que je n’aime pas perpétrer des tromperies aussi cruelles à notre propre peuple ».
« Moi non plus, quand on peut les éviter ». Il observa à travers le camp, vers le nord, où la grande tour de la Convergence s’élevait au-dessus du village de Calbeck. « Vous serez heureux d’apprendre que le temps de la tromperie est terminée, Aumônier ».
Geary hocha la tête, sa main se portant sur la masse à sa hanche. Conseiller en temps de paix, il est combattant en temps de guerre. Il se battrait aux côté des Chevaliers-Tempête, tuant tour à tour les ennemis et soignant les alliés.
Le prêtre toussa lorsque Bronwyn émergea de la tente blessés. La druidesse l’ignora et s’adressa à Nemo. « Elle va dormir maintenant ».
« J’apprécie ton avertissement, Bronwyn. Tu dois retourner à ta tente maintenant. Les gardes te garderont en sécurité pendant la bataille qui nous attend ».
« Je ne te serai d’aucune utilité dans ma tente », répondit-elle.
« Tu veux dire que tu préfère que nous te libérions ? »
« Mon peuple ne peut pas combattre à vos côtés dans cette bataille contre la Convergence », déclara-t-elle. « Mais si tue le permets, je le ferai ».
Nemo fixa son regard sur elle, se demandant quels secrets se cachaient derrière ses brillants yeux verts. Il pris sa décision.
« Finch, prépare tes forges-tempête. Je veux la patrouilleurs de chaque côté de la ligne de front, et envoie un message aux deux équipes flanquant. Aumônier Geary, présentez-vous au Major Blackburn. Vous combattrez avec les Chevaliers-Tempête. Je veux que toutes les unités soient prêtes à bouger dans une demi-heure.
« Et moi ? » demanda Bronwyn.
Nemo fit un signe au garde tenant la longue hache de la druidesse. Il la prit à l’homme et la tendit à Bonwyn.
« Tu vas venir avec moi », dit-il. Aide-nous à porter la tempête à Calbeck.